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proposa de rapporter le décret du 16 de ce mois qui bannissait de France tous les membres de la famille des Bourbons. Après de longs débats, la Convention décréta la suspension du décret du 16, et l'ajournement de la discussion jusqu'après le jugement de Louis XVI.

Enfin le jour fixé pour entendre la défense de Louis XVI est arrivé. Le 26 décembre, à neuf heures et demie, Louis entre à la barre, accompagné de ses conseils: Voilà mes conseils, dit-il au président; il s'assied, et M. Desèze prend la parole son discours honore son courage et ses talens.

Ce discours terminé, Louis XVI lut quelques phrases énergiques et touchantes. On lui mit sous les yeux les pièces originales qui étaient à sa charge; il déclara ne pas les reconnaître ; puis il se retira et fut ramené au Temple.

L'Assemblée était calme en la présence de Louis XVI; elle fut, après sa sortie, extrêmement orageuse.

Bazire et quelques autres demandent que Louis XVI soit jugé sur-le-champ et sans désemparer. On réclame l'ajournement de cette proposition; le président se presse un peu trop à le mettre aux voix; une grande partie des membres s'étant levés contre, il déclare la proposition rejetée. Alors de la partie de la salle, appelée la montagne, s'élancent quarante ou cinquante membres; ils se portent vers le bureau, menacent et

injurient le président (Defermon), et s'inscrivent pour demander un appel nominal. Un meinbre monte à la tribune, accuse le président d'être d'intelligence avec les défenseurs du ci-devant roi, et d'avoir reçu leur visite. Le président dit qu'en effet les défenseurs de Louis XVI, ne sachant comment pénétrer dans la salle de la Convention, dont les gardes avaient la consigne de ne laisser entrer que les députés, il leur avait donné un billet pour y être introduits. Cette explication calma subitement Forage; mais ce calme ne fut pas de longue durée; une trentaine de furieux font entendre, du haut de la montagne, des cris menaçans, d'horribles et scandaleuses vociférations; le président se couvre et le calme renaît.

Le jeudi 27 décembre, la discussion sur le jugement de Louis XVI fut reprise et continuée journellement : dans chaque séance, six ou huit orateurs. pour et contre sa condamnation, furent entendus. Les hommes qui désiraient si ardemment précipiter la discussion et hâter le jugement de Louis XVI, employèrent, dans la séance du dimanche 30 décembre, un moyen nouveau.

Une députation de dix-huit sections de Paris, vint demander la mort de Louis XVI. Le président lui répondit que la Convention, occupée de discuter sur cet objet, prononcerait suivant sa conscience, et ne céderait à aucune influence.

A sa première demande, cette députation en joignit une seconde; celle de faire paraître aux

yeux de l'assemblée les victimes de la journée du 10 août. On vit une centaine d'individus, les uns portés sur des brancards, les autres appuyés sur des béquilles, et les femmes et les enfans de ceux qui avaient péri dans cette journée. On sent dans quel but ce spectacle avait été préparé.

Plusieurs membres ne se croyant pas suffisamment autorisés pour juger Louis XVI, pensèrent que la nation française devait intervenir dans ce jugement. Vergniaud, le 31 décembre, soutint énergiquement cette opinion, et vota l'appel au peuple qui avait déjà été proposé.

Cette opinion de l'appel au peuple, celle du bannissement, d'une prison jusqu'à la paix générale, d'un sursis à l'exécution du décret fatal, et celle de la mort, partageaient les membres de la Convention. Dans la séance du 7 janvier 1793, elle ordonna l'impression de toutes les opinions, même de celles qui n'avaient pas été prononcées.

Dans la séance du 14 janvier, pendant sept heures consécutives, on agita la question de savoir comment seraient posées les questions sur lesquelles les députés avaient à prononcer dans le jugement de Louis XVI; enfin, on convint de cette première question: Louis est-il coupable ? oui ou non.

Dans la séance du 15 janvier, la position des questions fut la matière d'une longue discussion. On arrêta enfin celles-ci : 1°. Louis est-il coupable? 2°. Son jugement sera-t-il soumis à la ratification du peuple? 3°. Quelle peine Louis a-t-il encourue?

La Convention était composée de sept cent quarante-cinq membres, dont vingt étaient absens par commission, cinq par maladie, un sans motif connu, et dont vingt-six firent diverses déclarations; il restait six cent quatre-vingt-treize membres, qui tous votèrent que Louis était coupable.

On passa à cette question: Le jugement qui sera rendu sur Louis sera-t-il soumis à la ratification du peuple ?

Sur sept cent dix-sept votans, dix refusèrent de voter, quatre cent vingt-quatre votèrent contre l'appel au peuple, et deux cent quatre-vingt-trois pour cet appel. Le président déclara que le recours au peuple est rejeté.

Cette dernière question fut décidée dans la séance du 16 janvier, et dans cette même séance, ainsi que dans celle du 17, on procéda au troisième appel nominal sur cette question : Quelle peine sera infligée à Louis?

L'Assemblée était composée de sept cent quarante-neuf membres, vingt-huit étaient absens par maladie ou autre cause; il restait sept cent vingtun votans. Deux votèrent les fers;

pour

Deux cent quatre-vingt-six pour la détention et le bannissement à la paix, ou le bannissement immédiat, ou pour la réclusion;

Quarante-six votèrent la mort avec sursis, soit après l'expulsion des Bourbons, soit à la paix, soit à la ratification de la constitution;

Trois cent soixante-un votèrent pour la mort;

Vingt-six pour la mort, en demandant une discussion sur le point de savoir s'il conviendrait à l'intérêt public qu'elle fût, ou non, différée, et en déclarant leur vou indépendant de cette demande.

La majorité absolue étant de trois cent soixanteun, les votes pour la mort sans condition de trois cent quatre-vingt-sept, le président déclara, au nom de la Convention, que la peine prononcée contre Louis était la peine de mort.

Après le prononcé de ce jugement, les défenseurs de Louis XVI paraissent à la barre et présentent un écrit signé de Louis, portant qu'il interjette appel à la nation du jugement de ses représentans. Les défenseurs font ensuite, sur la majorité et sur la manière de compter les votes, quelques observations qui n'ont pas de suites. Le président les invite aux honneurs de la séance. L'appel de Louis et les observations de ses défenseurs sont rejetés.

Dans les séances du 18 janvier on proposa de surseoir à l'exécution du jugement. Cette proposi tion fit naître une discussion très - vive, trèsbruyante; le président se couvrit trois fois. Le 19, la discussion continuée se termina par l'appel nominal : une majorité de trois cent quatre-vingts voix sur deux cent quatre-vingt-sept, décida que sursis serait rejeté.

le

Alors Louis, par une note du 20 janvier, demanda un délai de trois jours pour se préparer à comparaître devant Dieu; l'Assemblée refusa le

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