général Mélas (voy. ces noms) sur la ligne du Var, et l'année suivante, il battit les Autrichiens sous les murs de Gênes; mais forcé, par l'infériorité numérique de ses troupes, de se remettre sur la défensive, il occupa l'ennemi assez longtemps à ce siége fameux pour permettre à Bonaparte de préparer la victoire de Marengo (voy.). Quelques jours avant, il se vit contraint à capituler, mais avec les honneurs de la guerre, Bonaparte, pour lui témoigner son estime, lui confia, à son départ pour Paris, comme au plus digne, le commandement en chef de l'armée victorieuse. Ces honorables avances n'empêchèrent pas Masséna de se jeter dans l'opposition et de refuser son vote pour le consulat à vie. Porté depuis au corps législatif, il suivit la même ligue de conduite, et lors du procès de Moreau, il se prononça en faveur de son ancien général. Na- | poléon, parvenu à l'empire, ne l'en comprit pas moins parmi les premiers maréchaux; le 14 juin 1804, il le nomma aussi grand officier de la Légion d'honneur et il le fit grand-cordon le 2 février 1805. Cette même année, Masséna reçut le commandement de l'armée d'Italie et fut encore opposé à l'archiduc Charles, dont il retarda la marche par plusieurs combats livrés successivement à Caldiero, à Vicence, sur la Brenta, sur le Tagliamento, etc., tandis que Napoléon, débarrassé de cet obstacle, marchait librement sur Vienne et livrait la célèbre bataille d'Austerlitz. En 1806, à la suite du traité de Presbourg, Masséna fut chargé d'opérer la conquête de Naples et d'y installer le roi Joseph. A son approche, les Anglais et les Russes se hâtèrent de reprendre la mer; l'armée napolitaine, privée de cet utile secours, ne songea plus à disputer le terrain, et Naples fut occupée sans opposition. Restait, pour compléter la conquête, la petite ville de Gaěte (voy.), réputée imprenable. Masséna en entreprit avec audace le siége, et le conduisit à bonne fin, en dépit d'une diversion tentée par les Anglais en Calabre. Délivré de cet embarras, il courut au secours de Régnier, et força les Anglais à se rembarquer. | payé chèrement. Chassant un jour en compagnie de Berthier, il reçut un coup de fusil qui le priva pour toujours d'un œil : il avait traversé toutes les guerres de la révolution sans être atteint d'une seule blessure; celle-ci d'ailleurs ne lui fit pas quitter le service. En 1809, dans la guerre contre l'Autriche, il reçut le commandement de toutes les troupes réunies sur la rive droite du Danube, et livra plusieurs combats brillants. A la tête de son corps d'armée, il parut l'un des premiers devant Vienne, qu'il tourna, et dont il réussit à occuper l'un des faubourgs. Le 21 mai, à la bataille d'Essling (voy.), il fut chargé de protéger le passage du Danube, en occupant le village d'Aspern, qui fut pris et repris dans cette | journée jusqu'à 14 fois. Forcé à la retraite, il passa dans l'ile de Lobau, sans laisser derrière lui un seul blessé. A la suite de cette sanglante bataille, il prit une part glorieuse aux 40 jours de combats qui furent livrés pour tenter de nouveau le passage. Sa réconciliation avec l'empereur était alors si complète qu'un jour Napoléon, pendant une reconnaissance, dit, en s'appuyant sur lui, en présence de son état-major : Voici mon bras droit. Le jour de Wagram (voy.), il commanda l'aile gauche, et une blessure, qu'il avait reçue la veille en tombant de cheval, le força de se tenir assis dans une calèche. Le surlendemain, il fut mis à la poursuite de l'ennemi, et remporta divers avantages sur lui, notamment à Hollabrunn, à Znaïm, etc. Là s'arrêta la déroute de l'archiduc, et alors furent signés les préliminaires de la paix de Vienne. La belle conduite de Masséna dans cette campagne lui valut le titre de prince d'Essling et le don du magnifique château de Thouars. En 1810, Napoléon lui confia le commandement de l'armée d'Espagne, avec mission de repousser les Anglais jusqu'en Portugal pour les contraindre au rembarquement. Par malheur, des rivalités intempestives, et par suite, le défaut d'unité dans les opérations, firent échouer une partie de ce plan, et donnèrent au général Wellington le temps de se reconnaître. Masséna, qui n'avait sous ses ordres qu'une armée de En 1807, il eut ordre de rejoindre la grande 38,000 hommes, soutint la lutte contre plus de armée en Allemagne; mais il n'arriva à son poste 100,000 Anglo-Portugais. Il parvint à rejeter qu'après la bataille d'Eylau. Napoléon lui donna | Wellington sous Coimbre et sous Lisbonne; mais l'aile droite à commander, et le chargea de con- dans cette position, où les ennemis pouvaient tenir les Russes en Pologne. Après l'armistice, puiser de nouveaux secours, tandis que son arMasséna reçut le titre de duc de Rivoli avec une mée ne faisait que s'affaiblir, il se vit contraint dotation considérable, et cette nouvelle faveur au rôle d'observateur. Désespérant de recevoir le rattacha enfin au parti de l'empereur. Pour la des renforts, il résolut, au bout de six mois paspremière fois, il se montra à la cour, où l'atten- | sés à Santarem, de forcer la ligne du Tage. dait un accueil distingué. Mais son début y fut | Mais le maréchal Ney lui refusa son concours, et malgré sa destitution et son remplacement MASSIF. Ce mot s'applique à quelque chose qu'il opéra sur-le-champ, il lui fallut battre en de lourd, d'épais, de pesant, et cependant, en retraite jusque dans la province de Salamanque, architecture surtout, l'épithète de massif ne où les Anglais tentèrent en vain le siége d'Ol- comporte pas toujours une acception aussi démeida. Masséna leur tint tête, et les battit com- favorable. Il est en effet des bâtiments, tels que plétement, le 3 mai 1811, à la Fuenta d'Onoro. les prisons, les citadelles, les corps de garde, etc., Dégoûté de son commandement et malade de ses dont le caractère est naturellement massif; un fatigues, il rentra en France, le 10 mai, sur sa style léger et des proportions gracieuses ne saudemande, et passa toute l'année dans un repos raient leur convenir. Il est aussi certains cas où absolu. Au premier bruit de la campagne de le goût le plus délicat ne saurait improuver des Russie, il se montra prêt; mais il n'obtint de murs massifs, soit dans leur épaisseur, soit en Napoléon que le commandement de la 8o divi- apparence. Dans le langage familier et pris sien militaire, en Provence, où il devait être au figuré, le mot massif revêt l'idée de grosoccupé à repousser les tentatives des Anglais et sièreté, de lourdeur : on dira d'un homme qui a à combattre les insurrections italiennes. l'esprit grossier, épais, que son esprit est masC'est dans cette position que le trouva le gou-sif; et malheur à lui si la prépondérance de son vernement de la restauration, qui le maintint | abdomen et la rotondité de son corps le pladans son poste et le nomma commandeur de Saint-Louis, le 24 septembre 1814. On lui accorda, en outre, des lettres de grande naturalisation, qui furent enregistrées à la chambre des pairs, le 20 décembre suivant. Il était toujours à Marseille, lorsque Napoléon, sur le point de débarquer, lui adressa cette lettre aussi courte qu'énergique : « Prince, arborez sur les murs Dans l'ébénisterie, on dit qu'une table, une de Toulon le drapeau d'Essling, et suivez-moi!» commode, etc., est d'acajou massif, de citronMasséna ne répondit pas à cet appel, et resta nier massif, quand l'acajou, le citronnier dont étranger à tous les événements des cent-jours. elle est faite a été employé plein; les meubles où Après Waterloo, le gouvernement provisoire lui ces bois n'ont été employés que par plaques colconfia le commandement de la garde nationale lées sur autre bois ne sont plus en acajou masparisienne; mais la seconde restauration lui té- sif, etc.; ils sont plaqués. — Pris comme submoigna fort peu de sympathie, et il fut même stantif, le mot massif, en termes de jardinage, obligé de se défendre d'une accusation portée s'applique à un bosquet, à un bois, qui ne laisse contre lui par les habitants de Marseille, à l'oc-point de passage à la vue : il y a plusieurs mascasion de sa conduite au mois de mars 1815, en publiant un mémoire justificatif. Presque en même temps, il se récusait dans le célèbre procès du maréchal Ney, sous prétexte de son ancienne inimitié en Portugal. Masséna mourut le 4 avril 1817, laissant une fille, qui a épousé le comte Reille, son ancien aide de camp, et deux fils, dont l'un est mort le 13 mai 1820, et dont l'autre a succédé à tous ses titres. Masséna, qui brilla d'un si vif éclat sur les champs de bataille, et qui eut la gloire de sauver la France à Zurich, était doué par l'éducation bien moins que par la nature. Napoléon disait de lui que « le bruit du canon éclaircissait ses idées, lui donnait de l'esprit, de la pénétration et de la gaieté. » Il repose au cimetière du Père Lachaise, sous un magnifique obélisque en marbre blanc. DEADDÉ. cent parmi ce qu'on est convenu d'appeler à Paris les personnes puissantes! car alors on ne manquera jamais de dire que son esprit est aussi massif que son corps. On appelle or massif, argent massif, un morceau d'or ou d'argent qui n'a été ni fourré ni creusé : une couronne d'or massif, un crucifix d'argent massif. sifs d'arbres dans tel jardin; il y a un massif MASSILLON (Jean-Baptiste). Le plus grand orateur de la chaire évangélique, s'il est vrai de dire que Bossuet est le plus grand politique et le MASSICOT. C'est le nom que l'on donne vul- plus grand écrivain de l'Église gallicane. Jeangairement à un oxyde jaune de plomb: Baptiste Massillon était le fils d'un notaire de la ses faiblesses; elle jugeait sans appel les plus grands hommes et les plus grands malheurs, Turenne, Condé, Henriette d'Angleterre; elle était l'enseignement des rois, et elle était l'enseignement des peuples; elle marchait tête levée parmi toutes les oppressions de la pensée; elle avait là son allure évangélique; elle était une des libertés les plus vivaces du christianisme. Les plus grands hommes de l'éloquence et de la poésie, Bossuet et Fénelon, s'étaient fait gloire tienne touchait à toutes les gloires, à toutes les opinions, à toutes les libertés; elle assistait à la prise de voile de Mme de la Vallière, et elle dessinait en traits de feu le portrait de Cromwel; la cour et la ville, Paris et Versailles, la France ent'ère se taisait quand parlait l'orateur chrétien; il remplissait de son éloquence et du parfum de ses vertus ce monde frivole, qui cependant oubliait toute chose pour l'entendre. C'était donc là une belle palme, et glorieuse à conquérir, la palme de l'éloquence. Massillon, après avoir eu peur de ce grand pouvoir, qui lui vint malgré lui, trouva enfin une éloquence nouvelle. Il puisa son éloquence dans son cœur. Il s'adressa aux plus doux sentiments de l'homme. ville d'Hyères en Provence. Déjà au collège des | putés et le journal; elle faisait comparaître à sa Pères de l'Oratoire, cet enfant, poussé par un barre tous les hommes, toutes les opinions, toutes instinct naïf d'éloquence et de conviction, répé-les puissances de ce monde; elle traitait presque tait à ses jeunes condisciples les plus beaux pas-d'égal à égal avec le roi, avec ses amours, avec sages des sermons qu'il avait entendus dans la chapelle. Son père l'avait destiné aux études du barreau, mais le jeune homme, quand il eut achevé les belles et sévères études de l'antiquité, n'eut pas la force d'oublier les vers de Virgile pour la prose de Justinien, et malgré tous ses efforts pour obéir à la volonté paternelle, il revenait sans cesse à ses poetes, à ses orateurs favoris, à ses savants maîtres les Pères de l'Oratoire, qui l'aimaient comme leur plus noble disciple. Même ce fut à leurs sollicitations pres-d'être des orateurs chrétiens; l'éloquence chrésantes, que le père de Massillon consentit à faire de son fils un homme d'Église, et il s'abandonna aux théologiens. Mais la théologie, ce n'était pas encore la vocation du jeune apôtre. Il y avait quelque chose là, qui lui disait qu'il était fait pour parler aux hommes une langue plus à la portée de leur intelligence et de leur cœur. La première fois qu'il lut les sermons du P. le Jeune, il se sentit un orateur chrétien, comme la Fontaine se sentit un poète en lisant une ode de Malherbe. A cette découverte, l'effroi le saisit; | il eut peur d'avoir péché par orgueil; il voulut revenir à la théologie, pour faire pénitence de son ambitieux espoir. Il alla s'enfermer, dans l'abbaye de Sept-Fonts, austère retraite, où cependant il se fit découvrir, un jour que l'abbé le Pendant que Bourdaloue jetait l'épouvante chargea de répondre à un mandement du cardi- dans les âmes et frappait comme un sourd à nal de Noailles. Il y avait dans cette réponse de droite et à gauche, par devant, par derrière; Massillon tant d'atticisme, tant d'onction et tant sauve qui peut! » (Mme de Sévigné.) Massillon, d'élégance, que l'évêque ne voulut pas laisser plus calme, plus inspiré, plus tolérant, la perenfoui ce précieux talent, et qu'il le rendit à suasion sur les lèvres, attirait doucement toutes l'Oratoire. Alors, le jeune novice devint profes- les âmes par le charme irrésistible de sa parole. seur de belles-lettres; on se souvient encore, Il dégageait le chemin de tout mysticisme pédans quelques villes obscures du Forez, qu'il y dantesque, de toute comparaison barbare, de eut autrefois dans ces murs prosaïques, un pro- toute science profane et déplacée. Il se mit à fesseur d'éloquence qui s'appelait le P. Massil- fouiller scrupuleusement le cœur de l'homme lon.-En 1696, le professeur de rhétorique était pour y trouver tous les mystères cachés, l'anommé à Paris directeur du séminaire de Saint- mour-propre, les vanités, l'orgueil, l'ambition, Magloire, et alors, il commença à se révéler au les folles amours. En 1698, il prêcha à Montpelmonde par ses conférences. Ce n'était pas en- lier après Bourdaloue, et toute cette ville, pleine core la vivacité, l'inspiration, l'abondance lim- encore du souvenir de Bourdaloue, admira cepide des sermons de Massillon, mais c'était déjà pendant cette ample et limpide éloquence, si leur grâce sans apprêt, leurs aimables négli- remplie d'atticisme, de chaleur et de bon sens. gences, leur style correct et animé. On compre- Alors, il fut reconnu que la France avait un nait que Bourdaloue, cet immense orateur, s'é- grand orateur de plus. Paris, qui était avide de tait déjà emparé de l'âme et de l'esprit du jeune ces enseignements, et qui en faisait une de ses Massillon. Il faut se rappeler, à propos de ces solennités les plus importantes et les plus littégrands maîtres de la chaire, qu'en ce temps-là, raires, rappela l'orateur, et Massillon prêcha son la chaire était une puissance, la seule puissance premier carême en 1699 dans l'église de l'Oraoratoire; elle était à la fois la chambre des dé-toire. On applaudit de l'âme et du cœur cette | | touchante et bienveillante parole; le P. Bour- | justes? Pécheurs, où êtes-vous? restes d'Israël, daloue vint encourager de sa présence ce nouvel passez à la droite? Mon Dieu, où sont vos élus, apôtre, qui devait bientôt tenir sa place à ses et que reste-t-il pour votre partage? » A ces pacôtés dans la renommée et dans la gloire, et roles solennelles, l'auditoire épouvanté se leva Bourdaloue admira son rival. Il grandira, di- comme un seul homme, comme si l'archange sait-il, pendant que moi je baisserai! Massil- allait venir. Louis XIV lui-même se tourna époulon, dans sa chaire, parlait les yeux baissés, sans vanté, comme si l'heure de la résurrection allait effort, sans mouvements et sans gestes. Il se sonner; et cependant, l'orateur, la tête cachée tenait de toutes ses forces dans l'humilité chré- dans ses mains, reste immobile et muet, n'osant tienne, et il parlait avec la simplicité d'un en- plus reprendre son discours. Voilà l'éloquence! fant, mais d'un enfant inspiré et convaincu. Aussi, la popularité de Massillon était univerSeulement, il y avait des instants où cette grande selle. « Ce diable de Massillon, disait une femme âme n'était plus maîtresse d'elle-même; il fallait du peuple, remue tout Paris quand il prêche! ■ qu'elle éclatât de toutes façons, par le regard, Le comte de Rosambau, blessé à la bataille de la par la voix, par le geste; la tête de l'orateur se Marsaille, ne voulut pas d'autre confesseur que relevait, son visage se colorait, sa main frémis- le père Massillon, et il renonça entre ses mains sait au-dessus de toutes ces têtes béantes. Il était à toutes les pompes et à toutes les frivolités du superbe, vu ainsi; et Baron s'écriait : Voilà un monde. En 1704, Bossuet et Bourdaloue, fatale orateur, moi je ne suis qu'un comédien! Vous année! rendirent au ciel cette âme éloquente et jugez si c'était là une éloquence entraînante et vertueuse qui avait jeté un si vif éclat sur l'Évansalutaire. Après Paris, Versailles voulut enten- gile. Déjà commençait à s'introduire dans les dre le grand orateur. Massillon fut nommé pré- âmes le doute, cette révolution qui a enfanté dicateur de la cour en 1699, et ni l'éclat de cette toutes les autres. Massillon prêcha un second chapelle royale, ni la grandeur de cet auditoire, carême à la cour. Durant le rude hiver de 1709, ni l'imposante majesté de Louis XIV, ne purent la disette était partout, les pauvres mouraient intimider cet homme, si naturellement modeste. de faim: le père Massillon prêche sur l'aumône; Il prit pour texte de son premier sermon ce et à sa voix les mains les plus avares s'ouvritexte admirablement commenté par Fléchier: rent. A ce discours bienfaisant assistait le bon Beati qui lugent (Heureux ceux qui pleurent!) Rollin avec ses élèves, qui étaient ses enfants. et de ce texte il tira la plus touchante paraphrase, (Rollin et Massillon!) Les disciples et le maître comme ferait un habile musicien d'une phrase furent attendris et saisis de la même pitié, et il de Mozart. Il réussit à Versailles comme à Paris. ne fallut rien moins que toute l'autorité du bon Les courtisans furent émus encore plus qu'é- Rollin pour arrêter le jeûne auquel ses disciples tonnés. - Mon père, disait Louis XIV à Mas- s'étaient condamnés pour faire l'aumône. En sillon, j'ai entendu plusieurs grands orateurs, 1710 (Fléchier venait de mourir !) Massillon, le j'en ai été content; mais quand vous avez parlé, dernier de ces grands orateurs, prononça l'oraije suis bien mécontent de moi-même. » En effet, son funèbre du dauphin. Et comme il parle dans cette cour, habituée aux plus grands mouvements ce même discours, à propos du royal élève, de d'éloquence, dut trouver un grand charme à ces deux maîtres, le duc de Montausier et Boscette éloquence entraînante et naturelle. Sou- suet! En 1715, Louis XIV fermait par sa mort vent on lui avait fait peur de l'enfer et de la ce grand siècle qu'il avait ouvert. Massillon rendamnation éternelle; jamais on ne lui avait fait dait au grand roi les derniers devoirs que Bospeur de cet enfer que l'homme méchant porte suet avait rendus au grand Condé. Et qu'il devait dans son propre cœur. Il y avait d'ailleurs tant | être sublime à voir ce noble prêtre, s'arrêtant d'élégance et une élégance si soutenue dans cette confondu devant cette tombe qui renfermait tant simplicité, que Massillon, à côté de Bossuet, et de majesté et de grandeur; puis relevant la tête par un rapprochement involontaire, rappelait et s'écriant, en regardant le ciel : Dieu seul est à toute cette cour si éclairée, Racine après Cor- grand, mes frères ! Bossuet lui-même n'eût pas neille. Et cependant cette douceur évangélique mieux fait. Évêque de Clermont, en 1717, Masne laissait pas que d'avoir ses instants d'épou- sillon se trouva jeté dans ce dix-huitième siècle, vante. Témoin ce sermon mémorable sur le petit que déjà prévoyait Bossuet mourant. La puisnombre des élus. « Je suppose que c'est votre sance de l'Évangile était passée; les chaires dernière heure et la fin de l'univers ; que Jésus- étaient croulantes; l'autorité était perdue; toutes Christ va paraître dans sa gloire pour nous ju- les croyances s'en allaient déjà avec une harger. Croyez-vous qu'il s'y trouvât seulement dix | diesse inconnue. Voltaire, le grand prédicateur le soin de revoir les manuscrits de ses sermons, qui furent publiés par son neveu, le P. Joseph Massillon : l'Avent, le Carême, Mystères, Panégyriques et Oraisons funèbres, Conférences, Mandements et Discours, Paraphrase de plusieurs psaumes, Discours sur le danger des mauvaises lectures, Rituel du diocèse de Clermont. Voltaire savait par cœur les sermons de Massillon, et n'en parlait qu'avec un tendre respect. D'Alembert a fait son éloge. J. JANIN. MASSIQUE. Voy. Falerne. MASSOLINO, peintre. V. FLOREntine (école). MASSON (ANTOINE), peintre et dessinateur habile et très-célèbre graveur au burin, naquit à Louri, près d'Orléans, en 1635. Avant d'exercer la gravure, il était ciseleur damasquineur : c'est dans cette profession qu'il apprit à manier le burin. Masson excella dans l'histoire et le portrait. Son burin, ferme, net et gracieux, dirigeait ses tailles suivant la marche du pinceau, le sens des carnations, le mouvement des muscles, ou suivant l'ordre des plis, des draperies et ce qu'exigeait la nature des étoffes. Les connaisseurs regardent avec admiration, dans l'estampe des Pèlerins d'Emmaüs, d'après le Titien, connue sous le nom de la Nappe, cette nappe gravée d'un burin délié, pressé et tout d'une taille, dont l'harmonie et l'effet sont si habilement soutenus par les travaux variés des divers objets qui l'environnent. Après ce chef-d'œuvre de l'art de buriner, on cite encore de Masson le Repos en Égypte, d'après Mignard; l'Assomption de la Vierge, d'après Rubens; les portraits du duc d'Harcourt, de Brisacier et d'Olivier Lefèvre d'Ormesson. de ce siècle, grandissait au milieu de toutes sortes de bruits avant-coureurs. Massillon ne cessa pas un instant de défendre l'Église attaquée de toutes parts. Il avait cinquante-cinq ans, et depuis vingt années il répandait au peuple et aux grands de la terre la sainte parole, lorsqu'il fut appelé à prêcher le carême devant ce jeune roi Louis XV, maintenant le seul espoir de l'avenir. La tâche était difficile et importante: parler à cet enfant royal, et tenir cette jeune intelligence attentive aux divers enseignements de la chaire; quitter le rôle d'apôtre pour une mission plus paternelle; tendre une main bienveillante à cet enfant, et cependant se souvenir toujours que cet enfant est un roi; parler le plus simple et en même temps le plus châtié des langages; main- | tenir l'éloquence à une hauteur si facile à atteindre, et cependant ne trahir aucun des devoirs de l'éloquence, voilà pourtant quel fut le dernier effort, le dernier chef-d'œuvre du saint évêque de Clermont. Le Petit Carême, après avoir été écouté dans le silence de l'attention et du respect, par ce jeune prince si frivole, fut bientôt reconnu pour un des modèles de la prose et de l'éloquence française. On compara cette prose aux plus beaux vers de Racine, aux plus touchants passages de Fénelon, et la comparaison fut trouvée juste. Aussi, quand il fut reçu à l'Académie française en 1719, l'Académie ne futelle guère étonnée de son discours si rempli d'atticisme et de politesse. Mais alors l'orateur fit place à l'évêque. Massillon ne quitta plus guère ce diocèse dont il était l'honneur et le salut que pour venir prononcer à Saint-Denis l'oraison funèbre de la duchesse d'Orléans qui l'appelait son ami Massillon. Dans cette vie utile, heureuse et si calme qu'il s'était faite, le saint évêque, entouré de ses parents et de ses amis, oubliait toutes les guerres qui déchiraient l'Église. Il ne s'occupait que de bonnes actions, et, quand il avait le temps, de beau langage; il réunissait à sa table des oratoriens et des jésuites, et la journée se passait dans d'aimables disputes d'art et de poésie. Quand il fallut défendre son diocèse contre d'énormes impôts, Massillon fut le premier sur la brèche. Il adressa plus d'une fois d'énergiques réclamations au cardinal de Fleury, et ces réclamations furent entendues. Sa fortune était médiocre, et cependant ses aumônes étaient abondantes. Ce saint homme, cet illustre prélat, cet excellent orateur, ce grand écrivain, | plus grande partie de sa vie en voyages. Il vit mourut le 18 septembre 1742, pauvre comme Bossuet, mais sans dettes. Il institua pour son légataire légitime l'Hôtel-Dieu de Clermont; il légua sa bibliothèque à la cathédrale. Il avait eu Antoine Masson est mort en 1700, laissant dans sa fille, Madeleine, une héritière de son nom et de son talent à graver le portrait. L. C. SoYER. MASSORAH, MASSORÈTES. Voy. MASORA. MASSOUDI, célèbre écrivain arabe du xe siècle de notre ère, se nommait ALI et était surnommé ABOUL-HAÇAN, apparemment pour avoir eu un fils du nom de Haçan. Le titre de Massoudi ou plutôt d'Almassoudi était resté attaché à sa famille, parce qu'elle se glorifiait de descendre d'un habitant de la Mecque, appelé Massoud, dont le fils aîné avait accompagné le prophète dans sa fuite de la Mecque à Médine. Massoudi naquit à Bagdad, vers la fin du Ixe siècle; | mais il séjourna peu dans cette ville et passa la des régions qu'aucun écrivain arabe n'avait décrites avant lui, et il se comparait lui-même au soleil à qui rien n'échappe dans son cours. Il s'appliquait certains vers du poëte Abou-Temam, |