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du néant pour le confoler dans les traverfes & dans les maux auxquels il eft expofé dans le cours de la vie.

L'accufation de plagiat, qu'on n'em. ploye que pour dégrader la perfonne du Philofophe, & pour éloigner le vulgaire de la lecture de l'Ecrivain qu'on calommie, n'eft le plus fouvent que la reffource de l'envie & de la médiocrité. L'Auteur des Paradoxes juftifie plusieurs Ecrivains célèbres qu'on a cherché à Alétric par cette odieufe imputation; & l'apologie qu'il fait de ces Ecrivains le conduit à traiter la fameufe queftion de la preffe. Il est plus aifé de prouver que les loix peuvent & doivent fixer des limites à la liberté d'écrire, que de les déterminer avec cette fageffe impartiale qui difcute également les inconvéniens & les avantages. On regarde comme un principe incontestable qu'une faculté fi naturelle & fi utile ne doit & ne peut être gênée qu'autant que le bien de l'Etat, cette loi fuprême, l'exige. Il n'eft pas cependant auffi facile qu'on fe l'imagine de démêler les circonstances ou l'intérêt public l'or. donne. La vérité n'a point à craindre les attaques de l'erreur. Multiplier les com bats, c'eft multiplier fes triomphes. C'est

fouvent du choc des opinions que naît cette lumière bienfaifante qui éclaire tous les efprits, & qui termine enfin toutes ces vaines & ridicules difputes fouvent fi contraires à l'ordre public & à la tranquillité des Citoyens.

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On trouve à la fuite de ces differtations une nouvelle édition des Lettres de Brutus fur les chars anciens & modernes, où l'Auteur employe toute fon érudition contre ce genre de luxe qui a tant de fois produit des malheurs & des défordres dans la fociété. M. de Voltaire, en recevant la première édition de cet Ouvrage, a écrit cette Lettre de remerciement à l'Auteur. Monfieur, il y a deux ans » que je ne fors point de chambre, & que » la vieilleffe & les maladies qui accablent » mon corps très foible, me retiennent prefque toujours dans mon lit. Je ne pren. » drai point contre vous le parti de ceux qui vont en carroffe: tout ce que je puis » vous dire, c'eft qu'un homme qui écrit » auffi bien que vous, mérite au moins » un carroffe à fix chevaux; vous voulez qu'on foit porté par des hommes » j'irai bientôt ainfi dans ma Paroifle, fuppofé qu'on veuille bien m'y rece» voir. En attendant, j'ai l'honneur d'être

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» avec la plus profonde estime & la plus »vive reconnoiflance ».

Difcours fur l'Education, prononcés au College Royal de Rouen, fuivis de notes tirées des meilleurs Auteurs anciens & modernes ; auxquels on a joint des réflexions fur l'amitié. Par M. Auger, Prêtre, Profeffeur d'Eloquence au Collège de Rouen, de l'Académie des Sciences, Belles Lettres & Arts de la même ville. A Paris, chez Durand, Libraire, rue Galande.

Cet Ouvrage ne peut être que fort utile aux pères & aux mères qui font jaloux de bien élever leurs enfans. La faine morale qu'il refpire, & les notes excellentes qui font tirées de Platon Plutarque, Montaigne, Locke, Fénélon, Rollin, M. Rouffeau, rendent ces Difcours très-intéreffans. Ce Profeffeur, que le zèle feul du bien public anime, se fait un devoir & un plaifir d'avouer que l'Emile de M. Rouffeau eft un riche tréfor où l'on trouve fur l'éducation une foule de vérités neuves & lumineufes, les réflexions les plus juftes & les plus fenfées, la morale la plus pure & la plus

févère. Ce Philofophe, également profond & éloquent, s'eft déclaré pour l'éducation Lacédémoniene, qui s'occupoit fur-tout à fortifier le corps & à perfectionner les organes; il a foutenu que jufqu'à un âge affez avancé on ne doit former l'efprit & le cœur que par occafion & par forme de converfation. Il veut qu'on n'exerce le jugement de fon Elève que de vive voir, & qu'on laiffe fa mémoire oifive; éloignant de lui toute ef pèce de livres, it ne l'applique jamais à l'étude. Quant à la Religion, l'Auteur d'Emile veut qu'on lui en parle tard, & qu'on préfère la Religion purement naturelle. La jufte admiration que notre Profefleur à conçue pour M. Rouffeau, ne l'empêche pas de modifier & de corriger ce nouveau fyftême d'éducation. Il convient qu'on doit ménager les forces d'un jeune Élève en ne l'appliquant pas trop tôt à l'étude : il ne regarde pas comme une chofe moins effentielle d'exercer de bonne heure fa mémoire fur des objets agréables & utiles, comme fables, hiftoires, &c. parce que c'eft dans la première jeuneffe que la mémoire eft bonne & qu'on peut la plier à faire d'heureux efforts. Il ne fuffit pas de prendre garde

d'y introduire des idées fauffes, mais on 95 doit encore la remplir d'excellens matériaux, que le jugement trouvera & mettra en œuvre quand il fera formé. Le Profeffeur refpecte trop la Religion pour ne pas regarder comme le devoir le plus effentiel de faire connoître au plutôt à fon Elève l'Être dont il tient l'existence, & de lui bien inculquer que tout vient de Dieu par fon amour, & que tout doit lui être rapporté par le nôtre. Ne doit-on pas prévoir que ce jeune homme en entrant dans le monde, fera environné des ténèbres les plus épaiffes & des maximes les plus fauffes, & qu'il ne manquera pas de marcher dans ces fentiers ténébreux, fi l'on ne lui a pas appris à se fervir du flambeau célefte que Dieu nous met en main pour nous éclairer & nous empêcher de nous égarer. Les Livres Saints qui renferment les vérités révélées, nous font repréfentés comme un cabinet précieux dont Dieu nous donne l'usage, & dans lequel il a mis en réserve toutes fortes de remèdes propres à guér'r nos maladies fpirituelles. Le jeune Elève, fentant les propres défauts, pourra trouver dans ce trésor de la parole de Dieu, l'efpèce particulière de remède qui con

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