1 lance dont, à dire vrai, les circonstances vous font un devoir d'autant plus impérieux, que les voies ordinaires de la justice sont, les unes suspendues, les autres non encore établies; il étoit seulement nécessaire de vous démontrer que l'on n'a suivi que des voies concertées, et que les irrégularités et les contraventions aux textes les plus pré-.. cis des loix se sont accumulés au point que le conseil du Roi s'empressera de prononcer l'indispensable cassation d'une décision qui n'a d'un arrệt que la plus fausse apparence. , L'intérêt de la chose publique exige donc l'adoption des plus promptes mesures afin que les droits de la nation ne souffrent point des erreurs de ceux qui étoient chargés de les défendre; c'est là le vœu des loix protectrices du trésor de l'Etat. Plusieurs membres de votre comité, très-versés dans la connoissance des loix, et d'autres qui ont été appelés à sa délibération, parce qu'ils ont à juste titre votre confiance, ont trèsmûrement discuté les moyens d'allier dans cette occasion, le respect dû aux formes et le respect non moins certain que l'on doit à la fortune publique; tous ont reconnu unanimement qu'un arrêt concerté n'est jamais regardé que comme une transaction. Or entre qui a été consenti l'arrêt ou transaction dont il s'agit? entre MM. Périer. d'une part, et d'autre part, des administrateurs qui n'étoient ni intéressés, ni parties, du moins quant à l'intérêt du trésor public. Cependant, MM. Périer ne pouvoient pas plus que les administrateurs ignorer l'existence d'une partie de plus, savoir l'agent du trésor public; car, sous le nom de controleur des bons d'état et dès les premières procédures, il avoit été reçu partie intervenante dans la cause au Châtelet. Ils n'en ont pas moins fait déclarer commun avec lui un arrêt concerté, et qui plus est un arrêt concerté sans lui. , En délibérant sur ces faits on en concluoit que le représentant du trésor public, l'agent créé par vos décrets, n'ayant eu aucune part à ce concert, il n'y avoit point d'arrêt contre la nation; qu'en conséquence il falloit commencer avant tout par décréter la réintégration des deniers de la nation dans la caisse de la compagnie des eaux; que comme les effets d'un acte ne doivent se rapporter qu'à leur cause, et ne peuvent engager que ceux qui les ont passés, c'étoit à ceux-là qui avoient disposé de la propriété de la nation, ou qui l'avoient envahie, à en être personnellement responsables. D'autres, plus affectés des formes, ne craignoient point cependant de reconnoître un véritable arrêt dans l'effet de la convention entre MM. Périer et les administrateurs de la compagnie des eaux: mais frappés des vices multipliés de la procédure, ils envisageoient sa nullité sous d'autres rapports. Ainsi par des motifs et des moyens différens, tous tendoient de concert avec les lois vers un même but, tous pensoient que l'expédient le plus desirable seroit sans contredit celui qui, sans contrarier aucune forme ni aucune loi, pourroit s'accorder avec l'intérêt du trésor public; tous enfin pensoient que cet expédient devoit être promptement exécutable, parce qu'il pourroit y avoir du péril dans le retardement. Tels sont les motifs qui ont déterminé l'adoption de la mesure que votre comité m'a chargé de vous proposer. Elle consiste à dénoncer au Roi l'arrêt du 22 septembre; cette mesure n'est pas nouvelle, vous l'avez déja employée, et dans des occasions moins importantes. Elle consiste ensuite à joindre à cette dénonciation la demande expresse de faire, dans le plus bref délai, réintégrer dans la caisse de la compagnie des eaux, les deniers de la nation qui en sont induement sortis. Cette mesure consiste enfin à vous proposer d'ordonner, pour prévenir de nouvelles erreurs, que la même caisse, dont les quatre cinquièmes appartiennent à la nation, soit déposée au trésor public. Si c'est l'intérêt de la nation, ce n'est pas moins celui des actionnaires dont tous les droits doivent également être conservés et protégés. Ce sera ensuite d'après le décret que vous allez rendre , que votre comité fera passer vos ordres et vos instructions à l'agent du trésor public. Il est temps, Messieurs, que l'Assemblée nationale commence à frapper les esprits du profond respect dû à la fortune publique, à ces pénibles fruits des sueurs du peuple; et à elle-même l'Assemblée nationale se doit de tracer enfin une ligne de démarcation entre les erreurs d'une administration vicieuse et la fermeté d'un régime austère sans lequel le paiement de la dette publique et le rétablissement des finances seroient la plus vaine des fictions. , PROJET DE DÉCRET. L'ASSEMBLÉE NATIONALE, après avoir entendu le rapport de son comité de liquidation, sur l'arrêt rendu par la chambre des vacations du parlement de Paris, le 22 septembre dernier, décrète: ARTICLE PREMIRR. Le président de l'Assemblée nationale sera chargé de dénoncer au Roi l'arrêt concerté entre les sieurs Périer et les administrateurs de la compagnie des eaux, afin qu'il soit pourvu à ce que les intérêts de la nation et du trésor public n'en souffrent aucun dommage. I I. $ Sera pareillement chargé le président de l'Assemblée nationale de démander au Roi que dès-àprésent, et sans préjudice aux droits des actionnaires, des abonnés, ou de toutes autres parties, il soit donné les ordres les plus prompts pour faire rétablir, dans le plus court délai, et dans la caisse de la compagnie des eaux, les sommes qui en ont été tirées, en vertu de l'arrêt du 22 septembre dernier, et pour faire porter au trésor public tant les sommes rétablies dans ladite caisse, que celles qui peuvent y être actuellement déposées, et à l'avenir celles qui devront y être remises; pour lesdites sommes y rester par forme de sequestre jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, toutes oppositions tenantes entre les mains de l'administration du trésor public. ΙΙΙ. L'Assemblée nationale se réserve de faire rendre telles plaintes qu'il appartiendra contre les personnes qui ont obtenu ou fait obtenir l'arrêt du 22 septembre dernier, et suivi l'exécution dudit arrêt, comme aussi contre les auteurs, fauteurs et adhérens de toutes les manœuvres par lesquelles on est parvenu à enlever au trésor public les sommes mentionnées dans le rapport de son comité de liquidation. En conséquence elle lui enjoint expressément de prendre tous les renseignemens nécessaires à cet égard, et de s'occuper de tous les moyens de faire rentrer lesdites sommes dans le trésor public. A PARIS, DE L'IMPRIMERIE NATIONALE. |