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Si quelque chofe peut ajouter aux allarmes qu'infpirer ces événemens, c'eft la déclaration publique faite pa V. M., qu'elle se reposoit sur la sagesse d'une affembe dont il eft notoire que la plus grande partie eft foudoy pour trahir leurs conftituans & leur patrie. C'eft le malheur de V. M., c'est le malheur & le fujet des plaints de vos peuples, qu'un grand confuil & un confeil de représentans soit foumis à une influence illégale & dan gereufe, à une influence qui, quoique procédant de ve miniftres, eft dangereuse pour V. M., qu'ils abusent, pour vos peuples, qu'ils trahiffent.

Dans une telle fituation, les fupplians font obligés & déclarer à V. M. qu'ils ne doivent ni ne peuvent ref dans l'indifférence & dans l'inaction, & qu'ils s'expofe ront à tout pour livrer les confeillers de ces mefures def tructives à la juftice de la Grande-Bretagne & des colomies qu'ils ont tant outragées.

Nous avons déjà déclaré la conviction où nous fommes que ces maux procedent originairement des confeils fecrets de gens également ennemis du titre de V. M. & des droits de vos peuples. Les requérans font actuellement obligés de dire, que V. M. eft environnée d'hommes qui font les ennemis jurés des principes qui affurent à V. M. l poffelhon de fa couronne, & à vos peuples celle de leur liberté. Dans des circonftances autli difficiles & auffi dangereufes, la confiance publique eft effentielle pour le repos de V. M. & pour la confervation de vos peuples. Cette confiance ne peut avoir lieu avec des miniftres & des confeillers dépourvus de fagelle, & attachés à des principes incompatibles avec la liberté; on ne peut forder aucune efpérance de recours fur un parlement qui ne doit fon exiftence qu'à un artifice imaginé d'après de faux rapports fur le véritable état des affaires en Amérique, & à la précipitation infidieufe avec laquelle on a profité de l'erreur où l'on avoit jetté toute la nation.

Les fupplians prient & conjurent de nouveau V. M. d'éloigner pour jamais de fa perfonne & de fes confeils fes miniftres & confeillers actuels, de diffoudre un parlement qui, par différens actes de cruauté & d'injuftice, a manifefté un efprit de perfécution contre nos freres d'A• mérique, & donné la fanation de fon autorité au papisme & au pouvoir arbitraire; de donner fa confiance à des miniftres dont l'attachement inaltérable & connu à la conftitution, joint aux lumieres & à l'intégrité, puiffe mettre V. M. en état de terminer cette querelle allarmante, par une conciliation établie fur les fondemens honorables & folides de la liberté générale.

La pétition qu'on vient de rapporter, n'ayant as été préfentée au roi, on se borna à la remlacer par une adreffe que nous avons rapportée, vec la réponse de S. M., dans la 2me. quinz. Août, pag. 54. Ces démarches en faveur des méricains avoient été provoquées, ainfi que ous l'avons dit auffi, par une lettre que le coité de la Nouvelle - Yorck écrivit, le 5 Mai lernier, au lord-maire, aux aldermans & au ommun confeil de la ville de Londres, & dont oici la traduction.

MY LORD ET MESSIEURS.

Diftingués, comme vous l'êtes, par vos efforts généeux en faveur de la liberté, & effentiellement intéreffés commerce de cet empire, vous pouvez compter avec uftice fur l'attachement le plus refpectueux de notre part. e comité général d'affociation pour la ville & le comté e la Nouvelle Yorck demande en conféquence, la pernifion de s'adreffer à vous, & à la capitale de l'empire ritannique, en la perfonne de fes magiftrats, au fujet es torts faits à l'Amérique. Nés pour jouir de l'honorale avantage de la liberté angloife, les habitans de ce afte continent ne pourront jamais fe foumettre au joug onteux, ni fe courber fous le poids des chaînes de l'eflavage. La faculté de difpofer de leur propriété avec une iberté entiere, & fans la moindre apparence de contraine, eft un droit facré qu'ils tiennent de la nature : c'est ne prérogative fublime qu'ils ont réfolu de défendre u prix de tout leur fang, pour la tranfmettre, fans alération, à leur poftérité.

Vous n'avez pas dû être étonnés de la vive oppofition qu'ils ont d'abord fait éclater, lorfqu'on a formé le deffein d'établir au fein de la liberté un defpotifme dont on auoit peine à trouver l'exemple, tant dans les monumens de l'antiquité, que dans les faftes de l'hiftoire moderne ; un defpotifme fondé fur le pouvoir que fe font arrogé es repréfentans d'une partie des fujets de S. M., pour lépouiller, au gré & fous le bon plaifir de leur fouverain, e refte des fujets de leur propriété. Et quels font les efforts d'administration qu'on a employés pour exécuter ce projet deftructeur? Les entraves oppreflives mifes au

commerce des colonies; le blocus du port de Bofton; le changement introduit dans la conftitution intérieure des provinces de Maffachuffer & de Quebec; l'établement de la religion romaine dans cette derniere; la ruine de notre commerce des Indes par des réglemens faits pot accroître le gouvernement arbitraire, l'érection d'un tre bunal d'amirauté, dont la jurifdiction s'étend fur tous les colonies, & qui eft contraire la conftitution; l'a

veinte portée à notre droit d'être jugés, même dans l caufes capitales, par un juré du voisinage; l'horrible pré caution de mettre à couvert de toute punition les exécu seurs fanguinaires de la vengeance des miniftres; enfin, pour abréger, la révoltante énumération de nos grief, les opérations hoftiles d'une armée qui a déjà verfék fang de nos compatriotes.

Il y a fi peu de tems que les troubles excités par l'a dieux acte du timbre, ont fait voir à tout l'univers, que Les Américains ne veulent pas être efclaves, que nous a concevons rien à l'exceffive imprudence du miniftere. L'expérience avoit prouvé récemment que les propriétaires de ce vafte continent ne fe foumettroient jamais à aucun taxe propufée par l'autorité législative de la Grande-Bre tagne. Il fallut recourir à la diffimulation ; & fans ctfu de rendre au même but, le parlement effaya d'établir fi fuprématie abfolue fur les colonies, en voulant les af fujettir à des droits, fous prétexte de pourvoir à leur bo gouvernement & à leur défenfe. L'adminiftration, pour fe couvrir d'un voile de modération apparente, s'abftint de taxer les objets d'importation les plus néceffaires à ce continent; mais fon avarice la détermina à maintenir l'im pôt fur le thé, pour faire preuve du droit qu'elle prétend avoir d'impofer les colonies. Zélés de notre part pour le maintien d'une union indiffoluble avec notre mere-patrie, appliqués à accroître la gloire & le bonheur de l'empire britannique, convaincus de la néceffité d'une autoré de J forveillance, pour balancer & concilier les intérêts fou vent oppofés du commerce réciproque, nous nous fou mettons de bon coeur aux réglemens qui émanent fur ces objet de la légiflation de la mere-patrie • pourvu qu'ils excluent, par leur nature, toute idée de taxation.

Vous ne voyez que trop quoi rendent les machin tions actuelles du pouvoir arbitraire. Si on purfuit ces funeftes defleins avec autant d'acharnement qu'on y a mis jufqu'ici de rigueur & d'inhumanité, on finira par obli ger le continent de rompre pour jamais avec l'Angleterre. Les habitans de ce pays ne fe laifferont point éblouir,

nous en fommes certains, par des projets illufoires de conciliation tandis qu'il eft évident que le miniftere ne tend qu'à établir un impôt perpétuel, que des actes ppreffifs & injuftes fixeroient, & qu'on leveroit par le moyen de flottes & d'armées deftinées à cet ufage. Jamais ils ne confentiront à la vente d'une denrée taxée au préjudice des colonies pour augmenter le revenu du roi, & procurer aux adminiftrateurs de nouvelles reffources pour acheter le fuffrage & le dévouement de ceux qui afpirent aux faveurs de la cour. Ce plan, qui tendroit à nous défunir, feroit plus, dangereux que la force ouverte, dans l'ufage de laquelle nous efpérons que les troupes du roi échoueront toujours comme elles viennent déjà d'y échouer. Si, au lieu d'employer ces moyens inufirés, extraordinaires, incompati bles avec la conftitution, pour fe procurer des levées d'impôt fur les fujets il eût plu gracieufement à S. M. de demander, dans des conjonctures preffantes, fuivant l'ancienne forme, les fubfides dont elle auroit ey befoin, les colonies, loin de s'y refufer, ont déjà témoigné qu'elles euffent été prêtes à concourir au maintien du gouvernement; mais elles veulent contribuer de leur propre gré & librement, comme c'eft le droit des Anglois. Lorfqu'on aura redreffé nos griefs, notre prince verra fes fujets Américains lui prouver, dans toutes les occurrences qui l'exigeront, par des fecours auffi grands que leur fituation le leur permettra, la fidélité inébranlable qu'ils confervent à leur fouverain, & leur inviolable attachement au bien de ce royaume & de fes domaines.

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Permettez-nous de vous obferver encore que l'oppreffion que l'Amérique éprouve, l'a`rendue fi irritable, que le moindre coup porté à l'une de fes parties, fe fait à l'inftant fentir, par la fympathie qui regne entre elles, dans tout le continent; que la Penfylvanie, le Maryland, & la Nouvelle-Yorck, ont déjà suspendu leurs exportations aux ifles de la Pêche & vers les colonies qui, dans cette conjoncture épineufe, ont refufé de fe joindre à leurs freres pour la caufe commune, & que probablement le jour eft proche où notre congrèsgénéral fermera entierement fes ports.

Les favoris de l'autorité peuvent aujourd'hui informer le gouvernement (s'il leur eft poffible de parler jamais le langage de la vérité ) que cette ville fe dévoue, comme un feul homme, à la défenfe de la liberté; qu'en con. féquence, les habitans fe font prefque unanimement liés

par l'affociation ci-inclufe; affociation qui devient de plus en plus générale, par les foufcriptions qui y acce dent chaque jour; que ces habitans fe font engagés, avec la plus ferme réfolution, à foutenir leur comité, & les congrès tant provincial que général, que l'on fe propofe de tenit; qu'il n'y a pas le moindre doute fur l'efficacité de leur exemple à l'égard des autres co Jonies; en un mot, que, tandis que tout le continent defire ardemment la paix à des conditions telles que de Anglois puiffent les agréer, il s'occupe infatigablement a fe préparer à tout événement. Que ce foit là le langage. & la conduite unanime de nos concitoyens vous pou vez vous en convaincre par les remontrances qui on! d'abord été préfentées par le lieutenant-gouverneur & le confeil au général Gage, à Bofton & qu'on a enfuite envoyées aux miniftres de S. M. Soyez fûrs, My lord & Meffieurs, que nous exprimons les fentimens ré ls des colonies confédérées fur le continent, depuis la Nouvelle Ecoffe jufqu'à la Géorgie, lorfque nous déclarons, que toutes les horreurs d'une guerre civile ne forceront jamais l'Amérique à fe foumettre à être taxée par l'autorité du parlement ».

Une fincere affection pour le bien public & la caufe de l'humanité, un defir ardent d'épargner l'effafion du fang humain, notre fidélité envers le prince; l'amour que nous portons à os co-fujets dans le royaume & les autres états de S. M., une pleine conviction de l'at tachement inviolable qui regne dans la capitale de l'empire, à la caufe de la juftice & de la liberté, nous ont engagés à nous adreffer a vous fur ce fujet important, dans la ferme confiance que les mêmes motifs porteront la ville de Londres à faire les efforts les plus vigoureux pour rétablir l'union, la confiance mutuelle, & la paix dans tout l'empire.

Signé, ISAAC Low, préfident, &c.

La proclamation, en forme d'amniftie, que le général Gage fit publier le 12 Juin dernier, & dont on a parlé dans la 2me, quinz. d'Août, p. 58. eft conçue en ces termes.

Un grand nombre de perfonnes s'étant laiffé féduire & entraîner par des traîtres & des féditieux très-conDus, dans un enchainement de voies de fait contre l'au torité conftitutionnelle de l'état, & ayant enfin embrafe Le parti d'une rébellion ouverte, & rendu par-là inuti

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