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pour la premiere fois, le 29 Juin, la Fête de village, intermede en 2 actes. Il y eft queftion de la réception d'un feigneur, qui, dans toute! piece, eft dans les efpaces imaginaires, & qui néanmoins eft censé être dans fa terre: comme eft homme de guerre, les foldats de fon régiment, qui eft en garnifon dans les environs, fe mêlen aux payfans. Les premiers chantent sa bravoure, & les autres fa bonté & fa générofité : c'est cette idée retournée dans tous les fens poffibles, qui remplit les divers morceaux chantans. Il n'eft point de perfection qu'on ne fuppofe à ce héros de piece. Un bailli, qui conduit la fête, qui s'agit & fe montre partout, qui effaie de faire des cor plets fans en venir à bout; voilà les traits principaux de ce tableau. Le feigneur invisible fait donner à la fin un repas à fes pay fans & à fes foldats, qui, avec l'éloquence du cœur dont ils par lent jufqu'à la fatiété, répetent,en chantant,les élo ges de ce feigneur. Le public paroit avoir fait beau• coup moins de cas des paroles de cette piece que de la mufique, qui, en effet, annonce du talent,

Les comédiens françois donnerent, le 26 Juil let, la premiere représentation des Arfacides, tragédie en fix actes, par le Sr. de Beaufol. Tigrane eft roi d'Arménie, graces aux fecours que Tui ont donné les Romains pour dépouiller de ce trône Métrodate, de la famille des Arfacides, qu'il croit avoir tué, lorfqu'il venoit d'époufer Vargenice, fille de Volgéfie, reine des Parthes. Cet affaffin couronné s'eft trompé fur fa victime, par ce que le frere de Métrodate, dans le moment du maffacre, avoit détaché le bandeau royal du front de fon frere pour le placer fur le fien, & que, par ce généreux dévouement, il avoit attiré fur Îui le fer de Tigrane. Métrodate, échappé à la mort, a pris le nom d'Orban, un de ses parens, & c'est

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fous ce nom qu'il a été arrêté par les ordres de Tigrane, qui le tient depuis ce tems dans les fers. Les Romains ont encore des troupes & un préteur dans la cour de ce roi, & il a reçu de leur part la loi d'époufer Glaphire, jeune princeffe, née Parthe, elle-même ayant des droits au trône d'Arménie, mais élevée à Rome depuis fon enfance, & remplie de fentimens romains. Vargenice, femme de Métro date, qu'on croit mort, eft efclave à la cour de Tigrane, & bientôt elle doit être envoyée à Rome pour fervir d'ornement au triomphe du préteur. La mere de cette malheureufe princeffe, qui n'a pu fe perfuader encore que fon époux ait terminé les jours, eft dépouillée elle-même de fon trône; elle vient à la cour de Tigrane voir sa fille, & faire part d'un projet qu'elle a conçu. Tigrane a déjà accordé aux prieres de cette mere, avant fon arrivée, la liberté de fon prifonnier Orban, Il est même prêt à renoncer à Glaphire pour époufer Vargenice. Volgéfie arrive, & s'efforce de la confoler; elle lui parle d'Orban, dont elle a obtenu l'élargiffement, & lui dit, qu'il faut qu'elle épouse un autre Arfacide. Vargenice rejette cette propofition; elle ne croit point Métrodate mort, & veut lui refter fidelle. Volgéfie, fuivant la permiffion que lui en a donnée Tigrane, attend le prifonnier, le voit, & reconnoit fon gendre Métrodate, qui lui explique comment il a échappé à la mort par le facrifice que fon frere a fait de fa perfonne. La reine lui dit qu'elle eft venue détacher, s'il eft poffible, Tigrane du parti des Romains, & lui offrir, en l'époufant, fes droits au trône dont on l'a fait defcendre; elle veut en même tems lui faire céder à fa fille celui de l'Arménie. Elle ne cache point à Métrodate qu'el le a voulu engager Vargenice à l'époufer fous le nom d'Orban, mais que, toute entiere enI core à fon premier amour, elle a préféré sa cap

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tivité, & la honte qui en doit être la fuite, à l'hymen qu'elle lui propofoit. Métrodate s'engage à traiter avec Tigrane ces différens objets. Le préteur fait tout difpofer pour hâter le mariage de Tigrane avec Glaphire. Déjà le temple eft prêt, & le roi d'Arménie se plaint à elle de ce qu'on difpofe ainfi de lui fans fon aveu. Orban lui a fait demander une entrevue feul à seul, & ill'a accordée; Métrodate paroit, fait rougir Tigrane de la dépendance dans laquelle le tiennent les Romains, & lui propofe la main & les droits de Volgéfie: Tigrane eft loin de les accepter, & veut fçavoir fi Métrodate eft dans le droit de lui faire une pareille propofition, & s'il eft chez les Parthes affez confidéré pour être chargé d'un ministere aussi important. Il fait appeller Vargenice pour qu'elle lui dife quel rang cet Orban occupe dans fon pays. Métrodate oppofe envain qu'on lui a promis de lui parler feul; Vargenice arrive fans vouloir jetter les yeux fur celui qu'elle croit Orban, & qu'elle ne veut point voir. Tigrane juge, au mépris que paroit en faire la princeffe, qu'il eft un impofteur; & ce même roi qui lui a donné la liberté, on ne fçait pourquoi, veut, avec auffi peu de fondement, le punir fur le champ. C'est au moment où il va le frapper de fon glaive, comme un furieux, que Vargenice jette les yeux fur lui, & reconnoit fon mari dans Orban. Alors elle change de langage; elle confent à l'arrangement qu'a propofé fa mere; mais l'amour de Tigrane pour elle est un obstacle invincible à cette disposition; il parle de fa paffion avec chaleur, & devant le mari, qui garde toujours le filence. Il veut faire à Vargenice le facrifice de fa rivale Glaphire ; il va combattre les Romains, & regner déformais en maitre: en effet, il fe donne un combat où il eft défait; & pendant cette affaire, Glaphire, l'aide du préteur, fait valoir aux fujets de Ti

grane les droits que fa naiffance lui donne fur le trône d'Arménie & fe fait couronner reine. Tigrane, après fa défaite, revient, & retrouve cette éleve des Romains fur fon trône; on lui découvre enfin, que le Parthe qu'il ne connoit que fous le nom d'Orban, eft l'époux de Vargenice, & il fe livre aux plus lâches fureurs. Glaphire, en princeffe généreufe, réunit les deux époux, & les replace fur le trône d'Arménie. Tigrane fe donne la mort. C'est par-là que fe termine cette tragédie, qui n'a point eu de fuccès.

L'académie royale de mufique représenta pour la premiere fois, le 1er. Août, Cythere affiégée, ballet en 3 actes, dont les paroles font du Sr. Favart, & la mufique du chevalier Gluck. C'est au milieu d'une fête en l'honneur d'Adonis que fe paffe l'action. La jeune Carite épouvantée fe jette au milieu des femmes qui chantent les louanges de Vénus & d'Adonis; elle implore leur fecours. Elle annonce qu'on va attaquer Cythere; qu'elle a vu des foldats menaçans, des ennemis cruels. La crainte s'empare de toutes ces nymphes. On adreffe des prieres à l'Amour; on lui demande de venir défendre la capitale de fon empire.

Des Scythes excités par le dieu Mars, jaloux des fêtes dont Adonis eft l'objet, inveftiffent les murs de Cythere, & plufieurs d'entr'eux menacent de venger le frere de Bellone. Mais Olgar dit qu'il faut être un Scythe infenfible pour réfifter à l'amour & à fes feux. Il parle de Brontés, fon chef, dont le cœur farouche ignore qu'on puiffe aimer tandis qu'il a eu la foibleffe de s'enflammer pour une Tigree. Ce général arrive : il raffemble fa troupe, pour venger le dieu Mars. Secondé par Olgar, il invite au combat & à l'affaut, une trompette fe fait entendre fur les remparts; on y a arboré le drapeau blanc; & Daphné, une bran

che d'olivier à la main, se préfente à ces guerriers, leur dit de fe rendre, & leur offre les honneurs de la guerre. Cette confiance de Daphné irrite les Scythes, qui fe retirent indignés, & qui ne laiffent avec elle qu'Olgar. Elle lui préfente Doris, qu'il n'avoit pu fe défendre d'aimer. Doris, mal gré fa réfiftance, parvient enfin à lui arracher des foupirs, & à lui enlever fa maffue. Le général Brontés paroit: il refte immobile d'étonnement en voyant un de fes principaux chefs vaincu & défarmé; Doris fe retire avec fierté, emportant la maffue d'Olgar, & reparoit enfuite fur les rem parts, au milieu de fes compagnes, avec ce trophée. Brontés a vu tous fes foldats fe rendre lâchement; il les rappelle envain; ils ne l'écoutent plus. Une nymphe de Cythere, la jeune Cloé fe préfente à ce général, & lui dit qu'on va employer contre lui tous les artifices dont fes compagnes font capables; Brontés la foupçonne elle-même; elle a l'air de juftifier les foupçons du Scythe, & veut fe retirer; il l'arrête, & lui demande ce qui peut l'intéreffer à prendre fa défense: elle feint. d'y être entraînée par fes exploits, & par le defir qu'elle auroit de vivre fous fes loix.

Brontés fent que la nymphe lui éleve l'ame, & que le feu de fes yeux le remplit d'une ardeur nouvelle; il jure de n'épargner qu'elle. Cloé pourfuit, & le conjure de l'arracher d'un pays dont les ufages lui déplaifent. Elle jure de détefter l'Amour; Brontés eft enchanté de ce ferment, & fe livre à la nymphe, qui prend la hache d'ar mes du Scythe pour effayer fi elle a bonne grace fous les armes. Elle prend enfuite fon épée, comme fi elle avoit à fe défendre contre quelque ennemi; Brontés enivré ne foupçonne point la rufe. Cloé va plus loin: fi mon ennemi étoit devant moi, dit-elle, je le lierois ainfi, & elle lie Brontés, qui, dans fon enthoufiafme pour la fauf

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