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cheik fut à fa rencontre hors de la ville, & dès la premiere entrevue, le cap gi lui mit fur la tête un mouchoir que le grand-feigneur lui envoyoit pour preuve qu'il oubliott fa conduite paffée. L'arrivée de ce capigi & la publicité de la réconciliation de Daher avec la Porte raffuroient d'abord les efprits fur les bruits réitérés des préparatifs de guerre que l'Egypte faifoit contre ce pays-ci; mais l'événement n'a que trop bien juftifié les avis que nous avions recus en Février. Méhémet-Bey Abou- Dahab, à la téte d'une groffe armée, efi déjà, dit-on, arrivé à Gaza, dont Ali Aga Mekké, qui étoit dans cette ville à la tête d'un parti, lui a fait ouvrir les portes. Le ché k Kerim, neveu du cheik Daher, qui commandois l'autre partie de la garnifon obligé d'abandonner la place, & s'eft retiré à Jaffa avec fes gens.

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a été

Le capigi avoit expédié un Tartare à Abou-Dahab avec une copie du katachérif pour l'informer du fujet de fa miffion auprès de Daher, & Pinviter à ne plus regarder le cheik comme ennemi de la Porte: le général égyptien a renvoyé le Tartare chargé de cette réponse: Je n'agis point par ordre de la Porte; mais je lui rendrai compte de mes actions. Je viens de faire la guerre au cheik Daher, & rien ne fçauroit changer mes difpofitions à fon égard, ayant juré fa perte. Cette réponse a porté la défolation dans le pays; Daher feul n'en eft point déconcerté; & toujours zélé défenfeur de fon pays & de fa liberté, il n'a pas balancé à fe préparer a arrêter l'ennemi, quelque redoutable qu'il foit.

RUSSIE.

Moscou (le 13 Juin.) L'impératrice, accompagnée du grand-duc, de la grande- ducheffe & d'une partie de fa cour, vient de fe mettre

en route pour aller vifiter le couvent de Troitfka: comme ce voyage eft une espece de pélerinage, S. M. I. voulant donner à les peuples un exemple de piété, le propofe de le faire à pied, & de revenir en voiture. Ce monaftere, qui eft très - célebre chez les Mofcovites, eft fitué au nord, & à 30 werfles de cette capitale; il n'y a pas longrems qu'on y comptoit encore 400 moines grecs; il renferme des tréfors, des antiquités & des reliquaires dignes de la curiofité publique, & le réfectoire ér eft immenfe. Les anciens czars étoient dans l'ufage d'y aller deux fois par an, pour y faire une retraite, Les impératrices Anne & Elifabeth s'y rendirent pour le même motif, la premiere en 1730, & la feconde en 1744.

Avant de prir pour Troitska, l'impératrice a déclaré fon ambaffadeur auprès du roi & de la république de Pologne, le baron de Stackelberg, qui ju qu'à préfent n'avoit eu que le caractere d'envoyé extraordinaire; S. M. I. lui a accordé en même tems les marques de l'ordre de St. Alexandre-Newski.

On peut fe rappeller l'émigration des Tartares Calmoucs, arrivée en 1771 (voy. la 2me. quinz. de Mai & la Ire. de Juin 1773. Art. Pétersbourg) qui des bords du Volga près d'Aftracan, où ils étoient établis, fe retirerent vers les frontieres de la Chine. Le fénat de Pétersbourg écrivit à l'empereur de la Chine, pour le prier de refufer à ces fugitifs l'entrée de fes états; mais, loin d'avoir égard à cette réquifition, ce prince a recueilli les Calmoucs, & leur a afligné tout le pays qui eft fitué entre les rivieres d'Irtifz & d'illi, jufqu'à la ville de Cachoar. (*) On voit ici des copies de la réponse de ce monarque au fénat;

( * ) Le pays dont il est ici question, fe nomme la

il s'exprime à peu-près en ces termes : Touché du fort des Calmoucs, j'ai voulu qu'on eût pour eux tous les égards que mérite l'infortune qui cherche auprès de moi un afyle & de l'aifance. J'ai fait appeller a Pékin les princes & les chefs de cette peuplade; j'ai voulu qu'ils connufent l'éclat de ma cur, j'ai daigné même les admettre à l'honneur de manger à ma table, & je les ai renvoyés. comblés de bienfaits, raconter à leurs concitoyens mua magnificence, ma générofité. Ils étoient mak dans le pays qu'on leur a oit affigné pour demeure en Ruffie; leur fanté, & leurs befoins leur faifoient une loi de chercher un meilleur afyle, & je leur ai accordé celui que je devois à des peuples qui viennent fe foumettre volontairement à mon empire. Pour conferver ceux qui restent dans le vôtre, rendez les heureux, comme mes fujets le font dans le mien. L'empereur de la Chine prétend d'ailleurs, que le nombre des Calmoucs réfugiés dans fes états n'eft que de 10 à 12 mil le. Si cette affertion eft fidelle, il faut qu'il en ait péri beaucoup en chemin, ou que la plus grande quantité de ces Tartares fe foit retirée chez les

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Calmaquie, & n'appartient pas à l'empereur de la Chine; il eft fous la domination du contaich ou grand kan des Euths peuples idolâtres, qui ont pour chef de leur religion le kutuktu, vicaire du grand lama du Thibet. Ce ne peut donc pas ê re l'empereur de la Chine, comme le rapportent les papiers publics, qui a donné un afils: aux Eluths ou Calmoucs fugitifs; mais le Contaifch, leur fouverain légitime, dont les états de 600 lieues de long & de 400 de large, ont pour bornes au midi l'Indoftan & une partie de la Chine., D'ailleurs, cette branche de Tartares n'a fait que rentrer dans fa patrie dont elle étoit fortie pour quelque mécontentement, au Commencement de ce fiecle fous la conduite de fon chef, qui fe nommoit Ajuka. La Ruffie tiroit grand parti de ces peuples belliqueux, & ce font eux qu'on a vu fervi dans fes armées fous le nom de Calmoucs..

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kirgis, ou chez d'autres peuplades de cette nation Il continue de grêler & de neiger ici comme fi l'on étoit au fort de l'hyver. Cette températu re de l'air, dont on ne fe fouvient pas d'avoir vu d'exemple dans une faison fiavancée, occafionne beaucoup de maladies.

SUEDE.

STOCKHOLM (le 4 Juillet.) L'absence du roi n'a pas été auffi longue qu'on le croyoit. Le 2 de ce mois, S. M. entra heureusement à la rade de ce port, venant d'Abo, où elle étoit arrivée dès le 22 du mois dernier, quoiqu'elle n'y fût attendue que le 25. La reine & le duc d'Oftrogothie allerent en chaloupe à la rencontre du roi. La duchelle de Sudermanie ne put les accompagner à caufe de fa grofleffe; mis elle attendit le ros fous l'arc de triomphe qu'on avoit élévé fur le pont, où S. M. defcendit à terre vers les 6 heuses du foir.

Le roi a vifité toutes les villes principales & Les fortereffes de la Finlande, & a pallé en revue & fair manœuvrer les troupes réparties dans cette province; ce prince étant le 12 à Loifa, les gé, Béraux-majors d'Engelhard & Stupifchin, le coIonel prince d'Ifenbourg, le lieutenant-colonel com te de Stenbock, & le confeiller-d'état Calman, tous au service de Ruffie, eurent l'honneur de lui être préfentés, & de l'accompagner jufqu'a Abhorfors, où ils prirent congé de S. M. Le rop a trouvé beaucoup de neige en plusieurs endroits, particulierement dans le Nyland, où la glace n'étoit pas encore entierement fondue. Une fingularité remarquable c'eft que l'hiver a duré beaucoup plus longtems dans les parties orientales du royau me, que dans nos environs, où le printems acom mencé de très-bonne heure. Les châleurs y on

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été fi prématurées & fi fortes, que plufieurs forêts fe font embrafées.

S. M. ayant résolu de fonder de nouvelles villes de commerce en Finlande, elle en a fixé provifionnellement le nombre à quatre. La premiere fera établie dans le village Enna, de la paroiffe de Fioftrum en Aland; la feconde, dans la paroiffe St. Michel, dans le Savolax; la troifieme, près du village Aniampeldo dans le Nyland, & la quatrieme, près de Tummersfors, dans le fief d'Abo Toutes ces villes de commerce feront fondées fur le territoire qui appartient immédiatement à la couronne; & dès que leur circuit aura été mefuré, les baillis en détermineront la jurifdiction. Parmi les encouragemens que le roi promet à ceux qui viendront habiter ces places, S. Maj. leur accorde d'abord une exemption de toutes impofitions & charges pendant 20 ans, & il leur fera auffi permis d'exercer tel commerce & métier qu'ils voudront, fans être tenus de fe conformer à aucun ftatut ou réglement de commerce ni de maîtrife.

Depuis que le roi a pris les rênes du gouverne ment, on a conftruit fept vailleaux de ligne. Le dernier qui a été lancé à l'eau à Carlfcron, eft de 70 canons, & fe nomme Adolphe - Frederic. Comme on va encore conftruire d'autres vaiffeaux dans le même chantier, la marine de ce royaume fe trouvera fur un meilleur pied qu'elle ne l'a été depuis bien des années. On a abattu dans la Poméranie beaucoup de bois de conftruction, que l'on tranfporte ici; & cet approvifionnement nous met dans le cas de nous poffer de celui de l'étranger, dont nous tirions une grande quantité avant la révolution. Les galeres, qui en tems de guerre nous font d'une fi grande utilité, ont été réparées avec grand foin; on a même donné de la cale à celles qui n'en avoient point, & l'on a formé un

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