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fatisfaction. S. A. R. vint fe rafraîchir au château d'Annaple: elle y reçut différens placets, auxquels elle répondit par des largeffes: elle reçut avec la même bonté une couronne de fleurs, & les vers fuivans, qui lui furent préfentés par une jeune fille du village, à la tête de fes compagnes :

Prince né pour l'amour, ainfi que pour la gloire,
Au champ de tes amis tu cueilles des lauriers
Préfage heureux de plus d'une victoire,
Que tu remporterois à travers les dangers.
Ton triomphe, en ce jour, eft un frivole emblême
De ceux que te prépare un ennemi réel :
Mais ici le François, qui t'admire & qui t'aime,
Peut au moins t'afforer ce triomphe immortel.
De Vénus villageoife, accepte une couronne ;
C'est le jufte tribut que te doivent les cœurs;
La vertu, qui te plaît en tous lieux, te la donne;
Ces lauriers, feloa nous font encor plus facteurs.
Ah! fonge que ta gloire eft aujourd'hui la nôtre;
Que fi la paix un jour s'exiloit de ces lieux,.
Tu fçaurois confoler des fujets moins heureux...
Fais cas de ce bouquet, Mars t'en réserve un autre.

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Le prince, de retour à Lille, affifta à la comédie. Il y eut toujours à fa fuite, dans la ville & hors de la ville une affluence de citoyens, témoignant par leurs acclamations la joie que leur caufoit la présence de S. A. R.

Le 23, Mgr. le comte d'Artois en partit pour Dunkerque, où il fut reçu par le prince de Robecq commandant de la Flandre maritime; il fit fon entrée à pied, & logea à l'hôtel de l'intendance. Les régimens de Royal-Rouffillon & des Deux Ponts bordoient les rues où S. A. R. paffa. Les corps militaires Jui furent préfentés par le marquis de Caftries; commandant-général de la Flandre & du Hainaut. Le prince fe rendit à bord du navire le Dauphin, où il fut reçu au bruit de l'artillerie, & avec les acclamations des marins & de tous les citoyens, témoignant leur joie par les cris continus de Vive le roi, vive Mgr. le comte d'Artois. S. A. R. examina avec une curiofité attentive le navire; elle en vit les manoeuvres avec fatisfac tion ; l'armateur comblé de cet honneur, demanda la permiffion de nommer fon bâtiment le comte d'Artois. Il y eut grand couvert chez le prince de Robecq, & les citoyens furent admis à voir fouper S. A. R..

Le 24, jour fixé par les Dunkerquois pour

confacrer l'heureux avénement de Louis XVI au trône, & célébrer fon facre & fon couronnement, l'abbé de Bergues st. Vinox célébra pontificalement la meffe dans l'églife paroiffiale, à l'illue de laquelle on chanta le Te Deum en actions de graces de l'événement qui faifoit l'objet de la fête. Immédiatement après, la proceffion, que Mgr. le comte d'Artois honora de fa préfence, se mit en marche dans l'ordre fuivant :

Les confraries de St. Georges, de Ste. Barbe & de St. Sebaitien; les métiers des tonneliers, de St. Jean, des cordonniers & des charpentiers de navire le corps

des belandriers, avec leurs perches, & celui des pê cheurs; le métier des boulangers & celui des meuniers; lefquelles confrairies, corps & métiers marcherent avec leurs étendards, drapeaux & attributs refpectifs.

Un char fur lequel étoit repréfentée une nymphe affife fur un pélican: plufieurs boulangers & boulangeres formerent un ballet fur le devant du char.

Un char représentant l'enlevement d'Europe par Jupiter, fous la forme d'un taureau on exécuta un bailes fur le devant du char.

Un char repréfentant les vendanges, fur lequel des vignerons, tonneliers & tonnelieres exécuterent un balletpantomime: il fortoit d'un tonneau artiftement travaillé à jour, quatre liqueurs différentes.

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Un char repréfentant l'Afie & l'Amérique, figurées par un roi indien & un prince negre, athis fur des trônes accompagnés de leurs cours; des perfonnes de leur fuite exécuterent plufieurs danfes chinoifes & négreffes.

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Un char repréfentant le triomphe de St. Louis à Da. miette; le roi étoit affis fur un trône; deux guerriers françois & deux françoifes de fa fuire danferent un pas, qui fut fuivi d'un autre de deux Turcs & deux Turques; après quoi, tous fe réunirent pour former un ballet.

Un char repréfentant la ville de Dunkerque, figurée par une femme appuyée fur un bouclier aux armes de la ville, une couronne murale fur la tête, ayant à fes pieds la navigation, écoutant attentivement Minerve, qui lui fair part de l'avénement du roi Louis XVI à la couronne, caufe de la joie publique. Mercure, dieu du commerce ordonne à la renommée, placée fur le fommet du char, de publier cet événement ; on exécuta un ballet fur le deyant dù char.

Un char repréfentant le roi & la reine affis fur le trône, ayant à leurs pieds les princes & princesses qui compofent leur cour. Une troupe de danfeurs & de danfeufes exécuterent un ballet fur le devant du char.

Un char représentant les forges de Vulcain, au haut duquel étoit Vénus. Les cyclopes forgeant des armes pour Enée, out, en préfence du prince, forgé les fiennes, & celJes du roi qui ont été préfentées à S. A. R. La jeune perfonne qui repréfentoit Vénus, a détaché l'amour, qui étoit à fes pieds, pour préfenter à Mgr. le comte d'Artois un placer dans lequel elle demandoit le congé de fon frere, que fun S. A. R. lui a promis avec bonté.

Les petits chevaux-légers, les petits dauphins, le grand dauphin avec Arion, le char des fauvages, monté par des jeunes gens de la ville, habillés tels qu'on les dépent, le géant, la géante, le géant à cheval, trois figures coloffales intéreffantes & curieufes, & le navire le St. Pierre, frégate où l'on voit exécuter toutes les manœuvres de la mer, fermoient la marche de cette belle cavalcade.

Le prince s'eft enfuite rendu à Mardik, pour voir la manœuvre du régiment de Diesbach; &, malgré la pluie, il n'a point voulu entrer dans la tente qui lui avoit été préparée, & eft refté exposé, comme la troupe, à l'injure du tems. Le 25, il a été voir le port, & a parcou ru le chenal jufqu'à l'entrée de la rade dans une chaloupe du roi, il a délivré neuf prifonniers ; il a reçu avec bonté les placets qui lui ont été préfentés; &, par des actes de bienfaifance, il a témoigné aux Dunkerquois fa fatiffaction de ce qu'ils avoient fait pour lui.

S. A. R. revint à Lille le 25, & repartit fur le champ pour voir Fontenoi & la plaine où s'eft donnée cette bataille fi glorieufe pour fon augufte ayeul & pour la nation; dela il alla à Tournai, puis à Valenciennes, continuant fa route par Cambray, pour retourner à Verfailles.

GRANDE-BRETAGNE.

LONDRES (le 28 Juin.) Le 16 de ce mois, le lord Townshend, ci-devant vice-roi d'Irlande, remit au roi les plans de tous les forts & fortifications de ce royaume, tels qu'ils ont été envoyés ici par le comte de Harcourt, vice- roi actuel; & le 18, le comte de Suffolk, fecrétaire d'état ayant le département de l'Irlande, vint en ville , pour hâter le départ d'un meffager qu'on

expédia ce jour-là au comte de Harcourt pour lui remettre des dépêches, contenant entre autres dit-on, des inftructions pour la réparation immédiate des châteaux, ports, &c.

Le 20, au foir, il fe tint une affemblée de la bourgeoilie, dans laquelle, après avoir établi le droit, qui n'a jamais été contefté au lord maire aux aldermans & à la bourgeoifie, de s'adreffer au roi fur fon trône, il fut arrêté « que le refus qu'on voudroit leur faire d'en ufer, ne pourroit tendre qu'à empêcher S. M. d'ê re informée des griefs & des oppreffions du peuple ». En conféquence, il fut unanimement réfolu de prétenter au roi une remontrance fur ce fujet. On proposa enfuite une feconde remontrance fur la fâcheufe conjoncture où l'on fe trouve, & particulierement fur la malheureuse fituation de nos co-fujets en Amérique; ce qui, après avoir été débattu quelque tems, article par article, paffa aufli à la pluralité des voix.

Le 22, on célébra l'anniversaire de la naiffance du roi, qui étoit entré le 4, dans fa 38me. année. On tira le canon du parc & de la tour; il y eut, le foir, bal à la cour, & dans la ville des feux d'artifice & des illuminations.

Le 23, le lord-maire communiqua à la bourgeoisie affemblée, une lettre du comité du commerce à la Nouvelle - Yorck en date du 5 Mai, adreffée à la communauté de Londres. Cette lettre, qui eft fignée du préfident & de 28 autres chefs de la colonie, en faifant l'énumération des griefs des Américains, annonce qu'ils font réfolus de ne point fe foumettre aux taxes britanniques,. & de réfifter aux démarches qui feroient faites pour les mettre en exécution, mais bien de fournir leur quote-part aux dépenfes générales, fur la réquifition de la couronne ou du parlement, & prie la magiftrature de Londres de s'employer

encore à détourner les maux qui résulteront de cette fâcheufe affaire &c. Cette lettre ayant été prife, le 24, en confidération dans une affemblée in plenis, il fut réfolu de préfenter derechef au roi une humble remontrance fur cet important objet, malgré le rèfus qu'a fait S. M. de recevoir là-deffus des représentations ultérieures. Les échevins furent chargés de fe rendre, le 26, auprès du fouverain, pour fçavoir quand il voudroit recevoir cette remontrance? Rendus à Kew à cet effet, S. M. leur fit dire qu'ils euffent à venir le 28, à St. James, pour y entendre la réponse.

La ducheffe de Kingfton eft arrivée d'Italie pour se défendre d'une accufation de bigamie qui lui eft intentée par les héritiers du feu duc de Kingston. On prétend qu'elle étoit mariée au Sr. Hervey, aujourd'hui lord Briftol, lorfqu'elle a contracté un fecond mariage avec le duc de Kingf ton, dont elle poffede les biens en vertu d'un teftament qu'il a fait en fa faveur. Elle a comparu devant le tribunal du banc du roi, pour y donner caution de fe préfenter à la chambre des pairs dès qu'elle y fera citée. Cette cause excite d'autant plus la curiofité publique, que la perfonne qui en eft l'objet, connue fous le nom de Mifs shidley, lorfqu'elle étoit fille d'honneur de la feu princeffe de Galles, a été célebre par fon efprit & par fa beauté.

Il y a beaucoup de différence entre les détails qu'on a publiés d'abord ici fur l'affaire du 191 Avril, & ceux qui ont été envoyés à la cour. Voici ce qu'ils contiennent.

« Le général Gage ayant appris qu'il y avoit à la Concorde (à quinze milles de Bofton) un magafin confidérable de munitions de guerre deftinées à un corps de troupes qui devoit fervir contre le gouvernement de S. M., détacha le 18 au foir, les grenadiers de l'armée & l'infanterie

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