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feaux, le bled dé fes greniers, à un tiers au-deft fous du prix courant : les étrangers ont aussi été favorifés, mais cependant un peu moins que les habitans du lieu. Lorfque les greniers ont été épuifés, la bienfaifante ducheffe a donné ordre à fon régiffeur de faire de nouvelle provisions, pour continuer fes libéralités.

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Suivant des lettres de Poitou, les paroiffes de cette province où les payfans ont été défarmés, font défolées par les loups: ils y font fi communs, que, toutes les nuits, ils rodent autour des cabanes; & font tous leurs efforts pour entrer dans les bergeries; fi un chien couche dehors, il en eft bientôt dévoré, & ils attaquent même les hommes, qui n'ofent porter des armes pour le dé fendre.

On prétend qu'un Allemand a inventé une machine électrique au moyen de laquelle il croit pouvoir fe chauffer fans bois & fans charbon. Cette découverte feroit inappréciable, fi elle étoit réelle & bien conftatée; les bois manquent dans une grande partie de l'Europe; dans moins de 20 ans, nos provinces méridionales n'en auront plus; les défrichemens trop multipliés entraîneront le double inconvénient de rendre le bois de chauffage plus rare, & de laiffer aux torrens une liberté qui convertira les plaines cultivées en déserts. Le Sr. Baraguey, fecrétaire de la chambre de commerce de la province de Normandie, donne avis aux navigateurs que, fous l'autorité & la protection du roi, la chambre de commerce établie par S. M. à Rouen, a fait élever fur les côtes de cette province, quatre phares, dont un fitué fur le cap de Gatteville, à la pointe de Barfleur, deux fur le cap de la Hire, proche le Havre-de-Grace, & le 4e. fur le cap Lailly, à deux lieues & demi oueft du port de Dieppe, entre ce port & celui de St. Vallery en Caux, & que les feux de

Ces phares commenceront à être allumés le Ier. de Novembre 1775, & feront entretenus tous les jours depuis le coucher du foleil jusqu'à fon lever.

On lit dans un journal anglois l'anecdote fuivante. « Le peuple, trop avili, par le mépris injufte qu'on a pour lui, fait fouvent des actions d'honnêteté, & il a quelquefois des procédés délicats qu'on loueroit dans une claffe fupérieure. Un payfan natif d'un village qui appartient à un prince d'Allemagne, dont les états font peu éloignés de la Lorraine, s'engagea en France, il y a quelques années, dans le régiment Royal-Allemand. Quelque tems après, il demanda & obtint un congé limité pour aller voir fes parens. Son prince levoit alors une nouvelle compagnie, dont il vouloit augmenter fa petite armée; il avoit donné à ce nouveau petit corps militaire le nom de Corfe; il vit le foldat de Royal, & lui propofa d'entrer à fon fervice. Je ne le puis, Monfeigneur, je fuis au fervice de France: V. A. y eft auffi; mais lorfque le tems de mon engagement fera fini, j'entrerai volontiers à votre fervice. Toutes les follicitations, toutes les promeffes, les menaces même les plus vives ne purent ébranler ce brave homme; on le mit dans un cachot, au pain & à l'eau; tout fut inutile; mais 50 coups de bâton, qu'on lui donna foir & matin, produifirent plus d'effet. Il quitta l'habit de France, & fe revêtit du petit manteau corfe, prit le petit chapeau & le grand fabre. Son prince lui avoit promis d'acheter fon congé, & n'en fit rien; le foldat ayant demandé & obtenu la permiffion d'alier paffer quelques jours dans fon village, y vendit un peu de bienfonds qu'il avoit;& avec le produit de cette vente, il paya au major du régiment Royal les 400 livres, à quoi avoit été taxé fon dégagement ». Juillet. 1775. ae, quinz..

C

Extrait du procès-verbal de ce qui s'eft paffé à la féance tenue en la cour des aides de Paris, en préfence de Monfieur, frere du roi, le 31 Mai dernier.

attendant la ve

Ce jour, les chambres 'affemblées nue de Monfieur, frere du roi, fuivant les ordres de S. M., apportés le même matin à la cour, les huiffiers vinrent avertir fur les heures du matin, de l'arrivée de ce prince, qui fut reçu par les deux plus jeunes préfidens & les deux plus anciens confeillers. Il étoit accompagné du maréchal de Clermont Tonnerre & de

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MM. d'Agueffeau , doyen des confeillers d'état, & Chaumont de la Galaifiere, auffi confeiller d'état ; & il étoit fuivi de fes principaux officiers. Après qu'on eut pris place, Monfieur parla à la cour en ces termes : MESSIEURS,

Le roi, mon très-honoré feigneur & fouverain maitre, taujours occupé du bien de fes fujets, a jugé à propos de changer, d'une maniere plus avantageuse pour vous, la forme preferite par fon ordonnance du mois de Novembre dernier pour un cas que votre fidélité donne lieu de penfer qui n'aura jamais lieu, & m'a choifi pour vous annoncer fes volonzés à cet égard. Vous les connoitrez plus particulierement par ce que M. d'Aguesseau va vous dire.

On fit enfuite lecture d'une lettre de cachet adreffante à la cour, enfemble de la commiffion donnée par S. M. à Monfieur; après quoi M. d'Agueffeau fit le difcours

fuivant.

MESSIEURS,

Vous venez d'entendre les intentions de S. M. La déclaration que Monfieur vient de vous annoncer, vous fera connoitre de plus en plus les bontés dont le roi honore votre compagnie. S. M. veut bien condefcendre à fes defirs, & l'appeller au jugement de jes membres, fi par la fuite des tems, il pouvoit s'en trouver d'affez peu inftruits de leurs devoirs, pour contrevenir à d'anciennes regles de difcipline que le roi a jugé néceffaire de renouveller.

Ces regles feroient, fans doute, fuperflues, fi, comme eu. jourd'hui, cette compagnie étoit toujours préfidée par ce chef refpectable, dont la candeur & la nobleffe des fentimens éga lent les talens & la faceffe; & fi, comme lui, fes fucceffeurs avoient toujours le bonheur de voir affis à leurs côtés des magiftrats auffi pénétrés que vous l'êtes, Meffieurs, de tous vos devoirs, & auffi attachés à leur roi.

Tel eft auffi, Meffieurs, le defir du législateur ui-même ; & s'il preferit ces regles, c'est pour qu'un vœu fi conforme à la bonté de fon caur foit à jamais rempli.

Vous êtes heureux, Meffieurs, qu'un prince auffi capable que Monfieur, d'apprécier vos fentimens, fe trouve à portée de rendre au roi, dont il poffede à jufte titre le cœur & la confiance, le compte fidele de votre zele pour fon fervice, & le defir de plaire à un fouverain qui vous témoigne une bonté fi marquée, & qui n'a d'autre objet que le bien de la juftice & l'honneur de la magiftrature.

Ce difcours fini, le premier préfident fe leva; & adreffant-la parole à Monfieur ; il lui dit. ;

MONSEIGNEUR, (j'obéis à l'ordre exprès du roi, mon feigneur & maitre.)

Il fut un tems où la joie de voir fiéger dans cette cour des princes iffus du fang de nos maitres étoit prefque toujours troublée par la rigueur des ordres qui nous étoient apportés. Mais le moment eft venu où nous pouvons nous livrer fans réserve aux fentimens que nous infpire votre préfence augufte.

Ce fut une grande confolation pour nous, au milieu de nos malheurs, de fonger qu'aucun prince du fang royal n'avoit prété fon miniftere à l'acte de notre deftruction; & dans le moment de notre rétablissement, le roi a comblé fes bienfaits, en chargeant Mgr. le comte d'Artois de nous les an

noncer.

On ne nous a point encore fait connoitre, Monfeigneur, les loix que vous allez faire publier; mais il nous eft permis d'en concevoir les plus flatteufes espérances. Elles font l'ouvrage de la juftice du roi, que nous avons invoquée, & elles feront dignes des vertus du prince choifi par le roi pour y faire mettre le dernier fceau de fon autorité.

Il nous eft douloureux de ne pouvoir y concourir par un enregiftrement volontaire; mais pourquoi faut-il, Monfei gneur que vous ne foyez jamais témoin des délibérations libres de cette compagnie?

C'eft ici que le peuple, toujours malheureux malgré les foins paternels du roi, & fouvent opprimé malgré sa vigiLance, vient implorer l'appui des loix contre les plus odieufes de toutes les vexations.

Miniftre effentiel de la juftice dans toutes les cours du royaume, vous pouvez éclairer les magiftrats par la fupériorité de vos lumieres foulager les maux du peuple par votre protection, & feconder les vues bienfaisantes du roi, en lui rendant un compie fidele de la vraie fituation de fes fujets. Eh! par qui, Monseigneur, cette fituation pourrait-elle lui

Etre auffi bien préfentée? Les magiftrats font remplis de zele; mais la connoiffance de prefque toutes les opérations de l'adminiftration leur a été enlevée. Les miniftres du roi joignent au même zele des lumieres très-étendues, mais n'eft-il aucun objet fur lequel les miniftres aient un intérêt différent de celui du roi & de celui de la nation? Les peuples fentent leur malheur; mais il leur manque un organe pour je faire entendre.

La cour des aides vient de préfentèr au roi le tableau de l'adminiftration fur les objets de fa compétence. S. M. a penfé que ce tableau devoit être jecret, & n'a pas voulu qu'il reftat entre les mains de ceux mêmes qui l'avoient tracé.

Notre confiance feroit entiere, Monfeigneur, fi ce fecret de l'état vous étoit confié, & fi ce tableau intéreffant avoit pu être fait dans cette cour fous les yeux des freres du roi, & avec le concours des princes & des pairs de France, de ces chefs de la nation, qui tout-à-la-fois guerriers & magiftrats, fouvent chargés de faire refpecter l'autorité du roi dans les provinces, & enfuite admis auprès de fa perfonne & dans fa confiance intime, pourroient encore mieux que nous approfondir tous les myferes de l'adminiftration, & rempli roient bien plus efficacement la noble fonction d'être auprès du roi les interceffeurs du peuple.

Après ce discours, le groter en chef fit, portes ouvertes, lecture d'une déclaration du roi, donnés à Verfailles le 28 Mai 1775, dont voici là teneur.

Louis, &c. Nous nous fommes fait rendre compte des remontrances de notre cour des aides Spécialement en ce qui concerne l'exécution de lart. XXVIII de notre ordonnance donnée à Fontainebleau au mois de Novembre 17:4, & enregiftrée en notre cour des aides le 12 du même mois, & nous avons reconnu la légitimité du droit réclamé par les officiers de notre cour des aides, d'être jugée, en matiere criminelle, par ceux qui ont féance en cette cour, & notamment par les princes de notre fang & les pairs de France, membres effentiels de toutes les cours fupérieures. A ces causes, & autres à ce nous mouvant, nous avons dit, déclaré & ordonπέ ; & par ces préfentes fignées de notre main, difons, déclarons, & ordonnons, que, dans le cas où les officiers de notre cour des aides ce que nous ne préfumons pas, fufpendraient l'adminiftration de la juftice, ou donneroient leurs dém ions par une délibération combinée, & refuferoient de reprendre leurs fonctions au préjudice de nos ordres, la for faiture fera jugée par nous tenant notre cour des aides, a laquelle nous appellerons les princes de notre fang, le chancalier garde des fceaux de France', les pairs de France, les

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