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timens des curés de fon diocefe, s'eft joint à eux pour opérer leur juftification. On apprend de la Lorraine, que le roi, par un ordre du 25 Avril,. déclare que, d'après les témoignages favorables rendus par l'évêque de Toul, foit a la régularité des affemblées des curés de Jon diocefe, foit à leur qele pour l'intérêt de l'état & l'accomplissement de leurs devoirs, il eft de fa juftice de rétablir les chofes dans leur premier étai; qu'en confequence, S. M. a révoqué & révoque les défenjes portées par l'ordre du 8 Mai 1773.

Un autre bienfait du roi, qui ne touche pas moins les curés de Lorraine que celui qui leur eft particulier, eft le don de 100 mille liv. fait à la province par S. M., & dont nous avons déjà parlé. L'intention de S. M., rendue publique par une ordonnance de l'intendant de la province, eft que tous les travaux par corvées demeurent fufpendus dans la Lorraine & le Barrois jufqu'après la récolte prochaine; qu'il foit établi (ce qui s'eft fait dans le mois de Mai) des ateliers de charité à portée des villes de Nancy, Bar, Pontà-Mouffon, Mirecourt, Neufchâteau, Bitche Morhange, Plombieres & Remberviller; que tout homme, femme & enfant au-deffus de 6 ans, qui fe préfentera muni d'une pioche, pêle ou panier au chef de l'attelier fera reçu fans difficulé. Le prix de la journée d'un homme au-deffus de 16 ans eft de 10 fous; celui d'une femme ou fille au-deffus du même âge, de 7 fous; celui des enfans des deux fexes, de 10 à 16 ans, eft de s fous les enfans de 6 ans à 10 font payés fur le pied de 3 fous, le tout au cours de France.

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Les mêmes principes de bienfaisance dont le roi eft animé, ont porté S. M. à faire dreffer un mémoire fur les moyens de procurer, par une augmentation de travail, des reffources au peuple de Paris, Ce mémoire, qui contient les difpofi

tions paternelles d'un roi toujours attentif à soulager fes peuples, mérite d'être connu. ( Nous en ferons part à nos l'edeurs dans le Journal prochain.)

On voit encore une preuve de la tendreile paternelle de notre jeune monarque dans la lettre fuivante écrite, le 1er. Juin, au directeur de la gazette de France, par le Sr. le Comte de Souvré, curé de Connée, dans la province du Maine, au nom des habitans de ce lieu.

Difperfés en plus de 100 hameaux, & féparés du rejte des hommes par des mon.agnes prefqu'inacceffibles, nous venons d'attirer fur nous, par le récu de nos malheurs, les regards, bienfaifans du meilleur des rois. S. M. s'eft fait rendre compte des horribles ravages que fit la grêle du 4 Août dernier dans fa province du Maine. Elle a bien voulu entrer dans le détail des pertes de chacun de nous, & nous venons de recevoir une décharge fur les impofitions, tant de la taille que des vingiumes. La remife accordée à chaque particulier, a été plus ou moins grande en proportion du plus ou du moins de dommages fupportés, & nous avons eu une difpenfe générale de la corvée. Tant de bienfaits exigeoient de nous l'unique retour qu'on en peut attendre, des vœux & des prieres pour la confervation des jours précieux de ce prince. Nous nous fommes donc adreffés à notre évêque, & nous avons obtenu que pendant le de Louis XV du nom, il fervit établi dans la paroiffe de St. Martin de Connée, un jour de vœux & de prieres pour la longue profperité du regne de ce prince, & que ce jour feroit le dimanche le plus proche du 3e. d'Août, jour de la naiffance du roi.

?

cours du

regne

Ceux & celles d'entre nous qui font nés dans les mêmes années que le roi & la reine, fçavoir, en 1754&en 1755, fe font tous fait inferire chez leur curé, & ils ont promis que pendant le cours de la vie de L. M., & tant qu'ils demeureroient

dans la paroiffe de Connée, ils prendroient à la fête indiquée une part toute particuliere, & qu'ils approcheroient des facremens... Ils ont ajouté qu'ils defiroient tous mourir dans l'accompliffement de ce devoir... Cette promeffe a été auffi reçue & agréée par notre évêque.., & a figné pour les habitans.

Dans le mandement rendu par l'archevêque de Paris pour ordonner des prieres à l'occafion du facre du roi, ce prélat, après avoir fait des vœux pour que la révolution qu'il attend de cette heureufe circonftance, rétabliffe folidement parmi les François l'amour de la religion, les mœurs, la foumiflion & la paix, s'exprime en ces termes: Quand le pontife, dit-il, répandra l'huile fainte fur la tête augufte du monarque, nous n'aurons pas befoin de defirer pour lui l changement qu'un prophète annonçoit autrefois dans une pareille occafion. La droiture de fon ame, la pureté de fes maurs, fon amour pour la jujice, fon zele pour la foi, qu'il jurera de défendre, la fincerite de fes intentions pour le bonheur de fon peuple, font de précienfes qualités, qui annoncent un bon roi; & ces qualités ont déjà prévenu nos defirs.

Lettre de M... à M***., fur la cérémonie du facre de Louis XVI.

Je n'ai fçu, mon ami, à quoi je m'engageois quand j'ai promis de vous décrire la cérémonie augufte dont j'allois être le témoin. Tout ce qui n'intéreile que l'imagination peut fe peindre; mais ce qui touche & pénetre l'ame, comment le retracer? Cela n'eft pas pollible: il faut le voir pour en jouir,

On croit fe faire une affez haute idée de cette pompe folemnelle, de cette fête en même tems politique & religieufe, dans laquelle, en face du ciel & de la nation, le monarque vient imprimer un caractere plus fenfible & plus inviolable encore à fes devoirs & à fes droits. On fe repréfente un jeune roi déjà connu pour vouloir le bien & pour s'en occuper fans ceffe, reçu partour comme l'objet de l'efperance de fes peuples; on le fuit des yeux fur fa route, dans les villes, dans les campa

gnes, on l'ensend louer & bénir à Reims, 100 mille de fes fujets l'attendent; il y paroit dans tout l'éclat de S. M., cette multitude l'entoure, & fe prefle autour de fon char, l'air retentit fur fon paffage, d'acclamations & de vœux ; jufques la tout eft fimple & jufte.

On peut s'imaginer encore la cordialité des Rémois leur' empreffement à remplir tous les devoirs de l'hofpitalité, dont leur zele paffe les bornes : cette émulation Iouable n'eft que l'effufion de la joie; il eft fi naturel à l'homme heureux de defirer que tout foit heureux avec Jui.

On n'eft pas plus furpris de la magnificence d'une ville qui met fa gloire à recevoir fon roi, à le pofléder dans fon fein; & quoiqu'il foit rare de voir dans une fi grande affluence, l'ordre le calme, la police la plus tranquille & la plus sûre, l'abondance de tout, & dans l'enivrement de la félicité publique, une vigilance i fage, que, fans gêner la liberté, elle prévient toute licence; on ne voit la qu'un bel exemple; en l'admirant on le conçoit.

Qu'eft ce donc, allez vous me dire, qui paffe la cro yance & l'imagination? Eft-ce la pompe même de la cérémonie? non, mon ami : l'objet l'annonce; & bien que; dans le temple le plus majeftueux, décoré d'un goût fa-, ge & noble, on ait vu réuni tout ce que le trône & l'autel, la nobleffe & le facerdoce, l'églife, la cour &, l'état ont de plus refpectable & de plus impofant; bienque dans cette augufte & nombreuse affemblée, un prélat jeune encore, & déjà diftingué, ait ofé faire en-. tendre au roi le langage auftere & fenfiole de la vérité, courageufe, de l'humanité gémillante; ni ce prélude digne de la folemnité dont il portoit le caractere, ni cette folemnité même, dans fa religieufe fplendeur n'auroient été l'objet de votre étonnement.

Vous auriez vu notre bon rei (car une feule année de regne lui a mérité ce titre ), vous l'auriez vu avec cet air, de fimplicité qui peint la candeur de fon ame, fans fafte fans oftentation, fans apparence de vaine gloire, au milieu d'une pompe fi propre à éblouir, y conferver cette dignité fage qui eft la decence de fon rang; mais vous fçavez combien la vanité le bleffe: il n'a fait que se reffembler.

Qu'ai-je donc à vous dire encore? Ce qu'il eft im poflible, je le répete, d'imaginer & de décrire l'im-, preffion foudaine & profonde qu'a faite fur tous les efprits le moment où les pairs de France venant de plas

eer de leurs mains, & de foutenir fur la tête de Louis XVI la couronne de Charlemagne, le roi s'eft montré, accompagné de ce noble cortege, fur une tribune exhauffée, féparant le chœur & la nef où fon trône étoit élevé, & qu'il s'eft alis fur ce trône entre fa nobleile & fon peuple; repréfentez-vous ce tableau.

de

A peine le bruit des trompettes, des cloches l'artillerie annonce le couronnement, les portes s'ouvrent, le peuple à flots preflés inonde cette églife im menfe, & dans l'inftant fait retentir les voûtes d'un concert de vive le roi, que répete en échos la multitude des auftans, dont toute l'enceinte du chœur eft remplie en amphithéâtre. Ces cris, mille fois renvoyés du fond du fanctuaire bien loin au delà du parvis, font taire les chants de l'églife, abforbent le fon des trompettes, couvrent le bruit des cloches, & celui du canon.

C'est alors qu'un attendriffement inexprimable a faifi toute l'affemblée, & que les larmes ont coulé : c'eft alors que toutes les voix étouffées par les fanglors, un mouvement involontaire a excité des battemens de main, qui, dans l'inftaut, font devenus univerfels. Les grands, la cour, le peuple, animés du même transport, n'ont eu que la même maniere de l'exprimer : l'ivreffe étoit au comble, & ce n'a plus été qu'une alternative rapide d'acclamations & d'applaudiffemens.

Oublierois-je dans ce tableau ce qu'il y a de plus touchant? La reine, qui avoit fuivi des yeux tous les détails de la cérémonie avec le plus tendre intérêt, immobile, attentive & refpirant à peine, ne perdant pas le roi de vue un feul inftant, foutenoit fon émotion, & fe foulageoit par fes larmes ; mais au moment du grand éclat, de l'allegreffe univerfelle, à ce moment du plus beau triomphe qu'ait jamais décerné l'amour, l'impref fion a été trop forte, elle n'a pu y réfifer; & obligée" de fortir pour refpirer, elie a perdu quelques inftans du plus beau jour de fa vie. Cette fcene touchante n'a fait que redoubler l'enthoufiafme de l'affemblée; & quand la reine a reparu, la nation a rempli le plus cher des vœux de fon roi, & l'a fait jouir a fon tour de l'hom mage adreffé aux vertus de la reine.

Ainfi s’ek passé, mon ami, ce spestacle auguste & fu• blime. Un Africain en a été prefque auffi att.ndri que nous. Oui, l'envoyé de Tripoli eft devenu François dans ce moment; j'étois auprès de lui, & je l'ai vu baigné, de larmes.

Le roi a été accompagné jufqu'a fon palais par de

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