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REIMS (le 20 Juin.) Le roi, après avoir reçu depuis Compiegne jufqu'à Fifmes, où S. M. coucha le 8 de ce mois, les preuves les plus éclatantes, les plus finceres, & déjà les plus méritées de l'amour qu'elle infpire à fes peuples, en partit le 9 pour fe rendre en cette ville, où. elle arriva dans fes voitures de cérémonie, accompagnée de Monfieur, de Mgr. le comte d'Artois, du duc d'Orléans, du duc de Chartres &. du prince de Condé. Après avoir reçu les clefs de la ville, par les mains du duc de Bourbon gouverneur de Champagne, S. M. y fit fon entrée, escortée des troupes de fa maifon, & à tra vers les flots empreflés d'un peuple enivré de joie, & fignalant des tranfports qui, loin de s'épuifer, ont femblé redoubler dans tout le cours de cette cérémonie. S. M. defcendit à l'église métropolitaine, où ayant été reçue par l'archevêque de Reims, à la tête de fon chapitre, elle entendit le Te Deum. Après la bénédiction, le roi fe retira à l'archevêché, où S. M. reçut les com plimens de tous les corps de la ville. Le lende main, le roi entendit les premieres vêpres dans la cathédrale, & dimanche 11 du mois, S. M. fe rendit vers les 7 heures, dans la plus grande pompe, à la même églife, & elle y fut facrée dans les formes d'ufage..

La reine arrivée ici, accompagnée de Mada me, & que l'incognito qu'elle gardoit n'empêcha point de jouir des plus vives expreffions de l'amour que la nation françoife lui a voué, fut préfente à toutes les augufles cérémonies de cette fête facrée, dans une tribune préparée pour elle, & dans laquelle Mme. Clotilde & Mme. Elizabeth furent auffi placées.

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Le 12, le roi entendit la meffe dans la chapel le du château archiepifcopal, après laquelle les dames de la cour eurent l'honneur de lui rendre

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leurs refpects. L'après-midi, la reine & Madame allerent à une lieue de la ville, où elles virent manœuvrer le régiment de huffards du comte d'Efterhazy. Monfieur & Mgr. le comte d'Artois en uniforme de dragons, firent une charge à la tête des efcadrons; le duc de Chartres, le prince de Condé & le duc de Bourbon, auffi en uniforme, fe mêlerent à ces attaques. La ducheffe de Bourbon, & beaucoup de dames & de feigneurs de la cour affifterent à ce fpectacle militaire.

Le 13, le roi admit le clergé à le complimenter. Il fut conduit à l'audience de S. M. par le marquis de Dreux, grand-maitre des cérémonies, & par le Sr. de Nantouillet, maitre des cérémonies. Le duc de la Vrilliere, miniftre & fecrétaire d'état, le préfenta, & le cardinal de Luynes porta la parole. S. M. fut enfuite entendre la meffe à l'abbaye de St. Nicaife; & en revenant, elle pofa la premiere pierre du college de l'univerfité de cette ville. L'après midi, les chevaliers commandeurs & officiers de l'ordre du St. Esprit s'étant affemblés chez le roi, en conféquence de fes ordres, S. M. fe rendit dans la marche ordinaire, & avec la plus grande pompe, à l'églife métropolitaine, où, après avoir entendu les vêpres, elle fut reçue grand maitre fouverain de fon ordre. A fon retour, S. M. tint chapitre dans lequel elle nomma chevaliers de fes ordres, l'ancien évêque de Limoges, l'archevêque de Narbonne le vicomte de la Rochefoucault, le comte de Talleyrand, le marquis de Rochechouart & le marquis de la Roche-Aymon, qu'cl le avoit nommés pour otages de la Ste. ampoule, & le vicomte de Talaru, qu'elle avoit aufli nommé pour porter la queue de fon manteau, le jour de fa réception de grand maitre fouverain de l'ordre.

Le même jour, un citoyen de Thionville, pere de 15 enfans, eut l'honneur d'être préfenté avec fa nombreuse famille, au roi & à la famille royale, qui l'accueillirent avec bonté.

Le 14, le roi fut en cavalcade à l'abbaye de St. Remi, S. M., accompagnée de Monfieur, de Mgr. le comte d'Artois, dur duc d'Orléans, du duc de Chartres, du prince de Condé, du duc de Bourbon, & d'un grand nombre de feigneurs & de grands-officiers, entendit la meffe dans cette abbaye où elle fit fes dévotions par les mains du cardinal de la Roche-Aymon: Elle toucha enfuite deux mille quatre cens malades des écrouelles, dans le parc de l'abbaye, & leur fit diftribuer des aumônes. L'après-midi, le roi fut fe promener au cours, & alla de-là au camp de fes gardes-françoifes & gardes-fuiffes. Le peuple, qui étoit en foule fur les pas de S. M., témoigna partout les tranfports de joie que lui infpiroit la préfence augufte & chérie de fon maitre.

Le 15, jour de la fête-dieu, le roi, accompagné de Monfieur, de Monfeigneur le comte d'Artois, ainfi que des princes du fang, fuivit la proceffion, & affifta à la grand'meffe & au falut dans l'églife métropolitaine. La reine, Madame & Mme. Clotilde affifterent à l'un & à l'autre ainfi que la ducheffe de Bourbon & un grand nombre de feigneurs & de dames de la cour: Mme. Elifabeth affifta à la grand'meffe & au falut.

S. M. repartit le 16 avec Monfieur, Mgr. le comte d'Artois & les autres princes qui l'avoient accompagnée. Elle arriva à Compiegne, où elle refta jufqu'au 19, qu'elle retourna à Versailles. Mine. Clotilde & Mme. Elifabeth s'y étoient rendues le matin, & la reine accompagnée de Madame & des dames de fa cour, y arriva le foir de ce même jour.

Le roi a donné sa mille liv. à l'univerfité pour

la conftruction du college, & 45 mille pour la deftruction de la porte aux Ferrons; cette démolition, en démafquant le plus beau quartier de la ville, offrira la place de Louis XV pour perfpective à ceux qui arriveront de Paris. Le ciboire dont S. M. a fait préfent à l'églife métropolitai ne, eft eftimé 50 mille liv. On a frappé pour 45 mille liv. de médailles, & l'on en frappera encore pour 15 mille. Ces médailles ont été diftribuées en partie, & l'on a jetté au peuple fur le parvis de la cathédrale 9 mille liv. en efpeces. Il y a eu plus de 100 prifonniers délivrés, qui ont reçu chacun 30 liv. en fortant de la ville.

On apprend que le Sr. Merlin, curé de Dampierre-au-Temple, près de Châlons- fur-Marne, fit, le 11 de ce mois, un difcours fur la cérémonie du facre, dont voici le texte: Hæc eft dies quam fecit dominus; exultemus & lætemur in ea. La Iere. divifion de fon difcours étoit jour de joie pour Louis XVI notre roz, & la 2e. : jour de joie pour nous, qui fommes fes fujets. Quoiqu'il n'entendit parler que de cette joie pure & fainte qui répand dans les cœurs cette paix inaltérable qui fait ici-bas la fatisfaction du jufte, ce jour n'en fut pas moins un jour d'allégreffe publique. Le fon des cloches fe fit entendre; on chanta des cantiques en actions de graces, & la fête fe termina par un feu d'artifice que le pafteur fit tirer fur un monticule : les habitans qui l'entouroient,firent répéter aux échos les cris de Vive le roi.

Le même jour, le Sr. Paté, curé de Vigny près Mezieres, fit, pendant la grand'meffe qu'il célébra, un difcours dans lequel il s'étendit fur l'amour & la fidélité que tout sujet doit à fon roi, fentimens déjà gravés dans le cœur de fes paroiffiens. Vers les 8 heures du foir le Te Deum fut chanté au fon des inftrumens de la musique du ré. giment d'Eptingen, fuiffe, & du bruit de plu

fieurs décharges de moufquetterie, qui fe renouvellerent pendant que les habitans s'étoient raffemblés autour d'un feu de joie. Hommes, femmes & enfans fans exception, fe rendirent enfuite dans le jardin du presbytere, où le pasteur avoit fait dreffer trois tables longues où regnerent l'abondance des vivres & la grosse joie qui n'eft plus connue qu'à la campagne. Ce jour d'allégreffe fe termina par un feu d'artifice qui s'exécuta aux acclamations réitérées de Vive le roi Ces expreffions du cœur font peut-être les premiers mots que prononcerent les enfans que les meres avoient portés fur leurs bras à ces deux fêtes champêtres.

PARIS (le 22 Juin.) Il paroit un édit du roi, donné à Versailles au mois de Mai dernier, & enregistré au grand confeil le 24 du même mois qui fixe la finance des offices dudit grand con feil, penfions & indemnité attachés auxdits offices. Il contient 23 articles, dont le fecond fixe la finance de l'office de chacun des préfidens à 6ɔ mille 1.; de celui des confeillers à 25 mille; de chacun des avocats-généraux à 50 mille; de greffier en chef à 30 mille, outre 30 mille autres, en qualité de confeiller fecrétaire du roi, &c. S. M. fait don & remife de ces finances à tous les officiers ac tuels du grand-confeil; & de plus, elle accorde au premier président 12 millel. de gages; à chacun des huit préfidens, 3000; à chacun des 56 confeillers' actuels, 450 livres; à chacun des deux avocatsgénéraux, 3800, dont 2000 pour gages, & 1800 liv. pour penfion; au procureur-général 5325; au greffier en chef 900; à chacun des deux doyens de chaque fémeftre, 3000 liv. de penfion; à cha cun des deux fous-doyens, 15co liv. de pareille penfion; à deux confeillers de chaque fémestre, au choix de S. M., mille liv. de penfion, &c.

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