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pour les faillites celles fixées par le code de commerce. Le montant du livret sera donc valablement payé entre les mains du curateur, qui justifiera de sa qualité.

En cas de décès, le payement se fait aux héritiers ou légataires, qui, s'ils ne sont pas suffisamment connus, doivent produire toutes les pièces justificatives.

La loi n'a, du reste, pas voulu créer un titre d'une nature spéciale et qui ne fût soumis aux prescriptions des lois générales.

Le livret peut s'égarer, être détruit; l'article 24 prévoit le cas et dit : « En cas de perte d'un livret, le propriétaire peut en obtenir un double, en se soumettant aux conditions et « aux mesures de précaution prescrites par l'adminis“tration. "

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Le prix du livret nouveau est de trente centimes.

L'article 25 porte ce qui suit: « Les sommes versées sont, « à la demande des déposants, converties en fonds publics belges au cours du jour de la Bourse de Bruxelles.

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Le consentement du déposant est donc certainement indispensable; il n'en est pas de même pour le cas prévu par l'article 26, fort important à ce point de vue, et dont voici le texte: «La Caisse peut, après avoir prévenu les propriétaires, convertir en fonds belges toutes les sommes néces"saires pour réduire les livrets d'un seul déposant à une ❝ somme de 3,000 francs. Elle peut agir de même dès qu'elle “a la conviction que, pour éluder éventuellement l'application de cette disposition, divers livrets appartenant à la même personne sont inscrits sous plusieurs noms. "

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La Caisse peut donc, de sa propre autorité, faire cette conversion. Le porteur du livret peut toutefois s'y opposer et réclamer la totalité des sommes déposées, en se conformant aux délais prescrits par l'article 22.

Quant au second alinéa, il prévoit un moyen grâce auquel il eût été facile d'éluder les prescriptions de l'article qui nous occupe. Une personne eût pu faire inscrire plusieurs livrets sous des noms d'emprunt et placer ainsi ses capitaux à beaux intérêts, sans soucis ni tracas.

Contrairement à ce que font les règlements de presque toutes les caisses d'épargne privées, la loi de 1865 n'a pas

fixé le maximum des dépôts; ceci malgré les protestations de beaucoup d'orateurs. On avait, nous semble-t-il, raison d'en demander la fixation. Il pourrait, en effet, se présenter des moments où les dépôts seraient si considérables, qu'ils constitueraient un véritable danger. La Caisse d'épargne ne doit recevoir que les petites économies; lorsque celles-ci ont acquis assez d'importance pour être placées par le déposant lui-même, elles doivent être retirées. En permettant le dépôt de capitaux considérables, on nuit à l'initiative privée, on rend le capitaliste imprévoyant, on distrait le capital d'un emploi meilleur.

Les articles 27 et suivants sont les plus importants de la loi, ils règlent l'emploi des sommes déposées.

La question est grave; le problème à résoudre était compliqué, il fallait placer à gros intérêt et d'une façon sûre. Or, on sait combien il est difficile de réaliser de nos jours ce double but; l'intérêt produit par les bons placements est minime; ce ne sont guère que les sociétés d'un avenir douteux qui donnent ou promettent des intérêts élevés.. L'actif de la Caisse comprend trois catégories :

1o Le fonds de roulement;

2o La part destinée à des placements provisoires; 3o La part destinée à des placements définitifs.

Quant au fonds de roulement, c'est-à-dire celui destiné à faire face à tous les remboursements qui peuvent être exigés, il est placé à la Banque Nationale

L'article 28 règle comme suit l'emploi des placements provisoires :

1° Escompte de lettres de change et billets à ordre;

2o Avances sur effet de commerce, bons de monnaie ou d'affinage du pays ou de l'étranger;

3o Avances sur warrants;

4o Avances sur fonds publics belges ou des États étrangers, des communes ou des provinces, actions ou obligations de sociétés belges.

Ainsi que l'on peut s'en rendre compte, les valeurs reçues en dépôt sont employées principalement au profit de l'industrie, indirectement donc au profit même des déposants ouvriers. En favorisant l'industrie, en lui procurant des ca

pitaux, on augmente la fabrication et, partant, le taux des salaires.

La Banque Nationale, parfaitement outillée pour réaliser ces diverses opérations, en a été chargée; mais, pour éviter toutes contestations, les opérations qu'elle fait pour et au nom de la Caisse d'épargne doivent être complètement séparées des siennes; elle tient, à cet effet, des comptes et des portefeuilles distincts, indépendants des siens.

Le Conseil a une grande responsabilité au point de vue de ces placements; mais, composé d'hommes d'élite habitués aux affaires, ses décisions présentent toutes les garanties désirables.

Le danger est surtout grand pour l'escompte des lettres de change et billets à ordre, Il faut rechercher s'ils ont une cause réelle, si ce ne sont pas des effets de circulation, n'offrant pas de garantie suffisante de payement à l'échéance.

Nous arrivons aux placements définitifs dont il est question à l'article 29.

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"La part de l'actif de la Caisse destinée à un placement définitif est rendue productive par l'achat de valeurs des quatre catégories suivantes :

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1° Fonds publics belges ou autres valeurs garanties par l'État ;

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2o Obligations sur les provinces, les villes ou les com«munes de la Belgique ;

« 3° Cédules ou prêts hypothécaires;

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4o Obligations des sociétés belges, qui, depuis cinq ans consécutifs au moins, ont fait face à tous leurs engage«ments au moyen de leurs ressources ordinaires.

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Les valeurs dont parle l'alinéa 1er sont de toute sûreté; il en est de même pour celles comprises sous l'alinéa 2.

Le troisième alinéa parle de cédules ou prêts hypothécaires. Ce mode de placement est encore plus avantageux que les précédents. Car, même en temps de crise, alors qu'une baisse des fonds d'Etat est inévitable, les prêts hypothécaires conservent leur valeur, leur base étant sûre, immuable.

L'intérêt produit par les placements de cette nature est, du reste, plus élevé que celui des fonds d'Etat, qui ne pro

duisent plus aujourd'hui en Belgique que moins de 3 1/2 p. c., tandis que l'on trouve encore de bons placements hypothécaires à 4 1/4 et même à 4 1/2 p. c.

On pourrait objecter que le prêt sur hypothèque constitue une immobilisation, qu'il y a un danger pour la Caisse à opérer de tels placements. Mais il ne faut pas perdre de vue que les créances hypothécaires peuvent être cédées, vendues, et qu'en temps de crise, leur vente est moins difficile et beaucoup plus avantageuse que celle des fonds d'Etat.

Le mode de placement prévu par le 4o de l'article ne présente pas autant de garantie que les autres, mais on ne peut contester son utilité au point de vue commercial et industriel, surtout si l'on emploie les capitaux pour soutenir des industries nouvelles et que l'on augmente ainsi les forces vitales du pays.

Ces placements sont opérés par la Caisse des dépôts et consignations, mais elle n'est pas libre de choisir parmi les différents modes; elle est tenue de se conformer à cet égard aux indications qui lui sont fournies par le Conseil général de la Caisse d'épargne et de retraite.

La Caisse des dépôts et consignations n'a aucune initiative, elle n'agit que comme simple mandataire.

De même qu'elle est chargée des placements, la Caisse des dépôts et consignations a le soin de réaliser les dépôts, le cas échéant; le produit de ces réalisations retourne à la Banque Nationale qui remplit l'office de caissier de la Caisse d'épargne. En outre, elle a pour mission de toucher et de remettre à la Banque Nationale les revenus provenant des placements de l'espèce,

La Caisse possède un fonds de réserve. Il est destiné à faire face aux pertes éventuelles et à rembourser au Trésor public celles qu'il aurait faites par suite de la garantie qu'il prête. Il se compose des bénéfices renseignés par les comptes. En 1887, il s'élevait à environ 6 1/2 millions de francs.

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L'alinéa 2 de l'article 32 porte Tous les cinq ans, « le gouvernement peut, le Conseil général entendu, décider qu'une partie du fonds de réserve sera répartie entre les « livrets existants depuis un an au moins, au marc le franc,

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« des intérêts bonifiés à chacun pendant les cinq dernières ❝ années.

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A cause de la répartition au marc le franc, il se produit cette anomalie que les gros dépôts faits à la veille de la période quinquennale viennent absorber une grande part des bénéfices qui devraient échoir aux petits dépôts datant de quatre ou cinq ans.

Le gouvernement justifiait ainsi cette disposition dans sa réponse à une question posée à ce sujet par la commission du Sénat chargée de faire rapport sur le projet de loi : « Les dépôts qui ont été les plus productifs d'intérêt étant ceux qui auront le plus contribué à réaliser les bénéfices, il est juste que la répartition se fasse au marc le « franc (1).

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Les bénéfices ne devraient être répartis qu'entre les petits déposants. Ce serait pour eux un encouragement. Ce système ne manquerait pas d'augmenter la popularité de la Caisse (2).

Nous avons vu que, dans un cas, on pouvait d'office convertir les sommes déposées en fonds d'Etat; ces sommes ainsi converties ne rentrent pas en ligne de compte pour le partage des bénéfices. Le porteur profite déjà des avantages attachés au titre de rente, c'est-à-dire un intérêt plus élevé, la réalisation plus facile; il serait exagéré de l'admettre à participer en outre à ceux qui résultent des dépôts ordinaires à la Caisse. De plus, à partir du moment de la conversion, il ne contribue plus à la réalisation des bénéfices.

Aux termes de l'article 33, la Caisse d'épargne peut, " avec l'autorisation du ministre des finances, faire des

(1) Sénat, Documents, session 1862-1863, p. 62.

(2) La commission des finances du Sénat avait à ce sujet introduit unamendement conçu en ces termes : « Lorsque le fonds de réserve dépas«sera 10 p. c. du montant des dépôts des particuliers, le Conseil général « pourra, moyennant l'approbation du gouvernement, répartir chaque « année tout ou partie de l'excédent entre les livrets d'ouvriers, domes«<tiques ou d'autres catégories déterminées de déposants. » Il fut rejeté par le Sénat. (Sénat, Documents, session 1862-1863, p. 52 et Annales, séance du 21 décembre 1864, p. 143.)

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