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donne l'indépendance, qui l'élève et le fortifie pour les luttes de la vie.

Il est évident que l'épargne est, à l'heure actuelle, difficile pour le travailleur, par suite de la modicité des salaires; aussi n'exige-t-on que des sommes minimes, dont l'ensemble constituera plus tard un capital utile. On objecte que l'ouvrier se trouve généralement dans l'impossibilité presque absolue d'épargner, même quelques centimes, alors surtout qu'il a charge de famille. Cette objection n'est pas sérieuse; il peut toujours restreindre ses dépenses de luxe : le tabac, le genièvre, le jeu. Peut-on soutenir qu'il n'y a pas quelques sous à consacrer à l'épargne, lorsqu'il y a toujours assez d'argent pour les dépenses de cabaret?

La situation des affiliés s'est généralement améliorée; l'économie règne dans leurs ménages et beaucoup d'entre eux, grâce à une petite fortune accumulée franc par franc, ont pu s'élever d'un rang dans la société et devenir patrons à leur tour.

Les nombreux avantages que présente la Caisse générale d'épargne ne sont toutefois pas assez vulgarisés. Les patrons devraient en faire connaître les rouages à leurs subordonnés, les forcer en quelque sorte moralement à s'y affilier.

La Caisse générale d'épargne a été instituée en Belgique par la loi du 16 mars 1865, modifiée par celle du 1er juillet 1869. Son organisation, fort bien comprise, et de beaucoup préférable à celle des établissements similaires, ne laisse aujourd'hui place qu'à peu de critiques. C'est là l'opinion de la Commission du travail qui, après avoir rendu hommage au fonctionnement de l'institution, se borne à émettre quelques vœux, dont l'unique but est de répandre parmi les travailleurs le goût de l'épargne.

Elle s'adresse à cet effet aux patrons, aux contremaîtres, aux présidents des sociétés de secours mutuels. Les ouvriers affiliés devraient aussi chercher à faire de nouveaux adeptes et prêcher d'exemple.

Depuis quelques années, on a introduit l'épargne à l'école, afin d'inculquer aux enfants, dès leur jeunesse, les bons principes d'ordre et d'économie; cette innovation a produit d'excellents résultats.

Aujourd'hui, en effet, contrairement aux autres déposants, qui ne peuvent verser des sommes inférieures à un franc, les élèves des écoles primaires et moyennes, tant officielles que libres, sont admis au dépôt de sommes minimes, de deux centimes même. L'administration remet, à cet effet, des formules ad hoc, divisées en plusieurs cases, dans lesquelles l'enfant colle un timbre-poste représentant la valeur du dépôt. Lorsque ce livret provisoire se trouve dépasser la somme d'un franc, il est échangeable contre un livret définitif dont le montant porte intérêt. Ces formules s'obtiennent facilement, les facteurs ruraux en tournée en sont munis.

Comme nous l'avons déjà dit, ce procédé a pleinement répondu à l'espoir que l'on fondait sur lui. Dans les écoles de la ville de Gand, où pour la première fois le système a été expérimenté, le nombre des livrets est actuellement fort élevé. En 1880, les élèves en possédaient environ dix mille, représentant un capital de plus de 300,000 francs. M. le chanoine Henry, dans un remarquable rapport (1), nous apprend que des résultats plus beaux encore ont été obtenus à Eeghem et à Iseghem (2).

Depuis que l'épargne est encouragée dans les écoles, le nombre des livrets s'est accru considérablement (3).

(1) Rapport présenté à la Commission du travail en 1886.

(2) La Caisse d'épargne d'Iseghem a été créé en 1874 par M. l'abbé Vandendrissche. Depuis 1876, elle forme une succursale de la Caisse générale.

(3) Une enquête sur l'épargne scolaire a donné les résultats suivants :

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CHAPITRE Ier.

ORGANISATION DE LA CAISSE D'ÉPARGNE.

L'article 1er de la loi organique de 1865 place la Caisse d'épargne sous la garantie de l'Etat. Cette garantie est une des principales sources du succès de l'institution : elle inspire la confiance aux petites gens, confiance qui avait singulièrement diminué par suite de la situation précaire des caisses d'épargne alors existantes.

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La Caisse n'est pas cependant directement administrée par l'Etat, elle conserve son autonomie, son initiative privée. Le siège social est établi à Bruxelles. L'utilité d'un centre unique est incontestable cette concentration rend seule possible un contrôle efficace. C'est dans ce but que le règlement général prescrit que, dans les premiers jours de chaque année, les livrets délivrés dans les succursales ou par d'autres agences seront adressés à l'administration centrale, à l'effet d'y faire inscrire le montant des intérêts échus au 31 décembre précédent. Notons qu'entre-temps le porteur du livret reçoit un récépissé, et que le livret lui est rapidement retourné. Faute de faire ce dépôt avant le 30 juin, les intérêts sont perdus pour l'année révolue.

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L'article 2 est conçu comme suit : « Des succursales sont établies dans toutes les localités où il est possible de s'assurer le concours des communes, des établissements publics ou de personnes bienfaisantes.

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Les conventions conclues pour l'érection des succursales ou des caisses auxiliaires sont soumises à l'approbation du ministre des finances.

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Au début, les succursales furent peu nombreuses; il n'y en avait guère que dans les agences de la Banque Nationale. Il n'en est plus de même aujourd'hui, surtout depuis que les plus petits bureaux de poste sont devenus des succursales (1).

(1) En 1887, il existait 609 bureaux et succursales.

Les dépôts peuvent se faire actuellement à la Caisse d'épargne à Bruxelles, dans les agences de la Banque Nationale, dans les bureaux de poste et dans les comptoirs agricoles. Le pays entier peut profiter de l'institution; l'habitant du plus petit village peut, sans déplacement et sans perte de temps, déposer ses économies et les faire. fructifier.

Les bureaux de la Caisse d'épargne n'étaient pas jadis accessibles au public le dimanche; ils le sont aujourd'hui, à la suite d'un vœu émis en ce sens par la Commission du travail qui, à l'appui de sa demande, faisait valoir avec raison que l'ouvrier n'est guère libre que ce jour-là, son travail commençant avant l'ouverture des bureaux et ne se terminant qu'après leur fermeture.

Beaucoup de caisses d'épargne privées ont été adoptées par la Caisse générale, dont elles forment aujourd'hui des succursales, par exemple celle d'Iseghem (1), dont nous avons déjà parlé et qui fut reprise en 1876. Elles ont pris dès ce jour un essor nouveau, preuve de la confiance du public dans la Caisse générale patronnée, garantie par le gouvernement. Ces succursales sont actuellement au nombre de vingt-deux.

Les diverses opérations effectuées par la Caisse d'épargne font l'objet de l'article 3. La Caisse reçoit les versements, paye les rentes et rembourse les dépôts dans toutes les agences de la Banque Nationale et, en outre, dans toutes les localités où le gouvernement le juge nécessaire.

Elle reçoit d'abord les versements, l'article 20, § 2, en indique le minimum. Chacun d'eux doit être d'un franc au moins. Quant au remboursement, le porteur du livret n'est pas admis à le réclamer immédiatement, s'il dépasse certaines sommes fixées par l'article 22. La raison de cette restriction est bien simple. La Caisse place les fonds souvent pour un temps assez long, elle ne peut avoir constamment.

(1) Au 31 décembre 1887, on constatait à Iseghem l'existence de 1,336 livrets, 160 nouveaux livrets avaient été déclarés pendant la même année. Les dépôts s'élevaient à 485,070 fr. 74 c.

disponibles des sommes considérables qui deviendraient forcément improductives. De plus, dans certains moments de crise, la foule se fût présentée aux guichets, on eût été dans l'impossibilité de rembourser immédiatement les sommes déposées, et l'effet eût été désastreux.

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L'article 22, relatif à ce point, est conçu comme suit :

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« Le retrait des fonds déposés peut avoir lieu sans avis préalable, si la somme réclamée n'excède point 100 francs; toutefois le déposant ne pourra user de cette faculté qu'une fois par semaine.

"Pour toute somme supérieure, il faut prévenir d'avance, savoir :

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15 jours pour plus de 100 francs et moins de 500 francs.

« Un mois pour 500 francs et moins de 1,000 francs.

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Deux mois pour 1,000 francs et moins de 3,000 francs. "Six mois pour 3,000 francs et plus.

"Ces délais, qui peuvent être abrégés par le Conseil "d'administration, ne prennent cours qu'à dater du dernier « remboursement mentionné sur chaque livret.

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Lorsque le livret aura été délivré dans l'une des succursales, il doit, lorsque l'on exige le remboursement du dépôt, être remis au préalable au siège social.

Le remboursement s'opère contre quittance, sur la présentation du livret. Si le déposant ne sait signer, ou se trouve dans l'impossibilité de le faire, il doit être accompagné de deux témoins.

Toutes les sommes déposées dans les succursales sont centralisées dans une seule caisse,

De l'administration.

Les articles 6 à 9 de la loi de 1865 règlent l'administration de la Caisse d'épargne et de la Caisse de retraite, dont il sera question plus loin. Ces deux institutions ont été réunies à cette époque sous, une administration com

mune.

Il y a d'abord le Conseil général, composé d'un président et de vingt-quatre membres; ensuite le Conseil d'adminis

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