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tre autant qu'il a de plus auffi le Contrat n'eft pas rompu à caufe de l'inégalité. On dit qu'un Contrat eft rompu, quand on déclare nul celui qui par le droit n'est pas nul, ou qui fubfifte.

CONTRAT SOCIAL.

Voyez ROUSSEAU, ( Jean-Jacques) Citoyen de Geneve, Moralifte & Politique.

CONTRAVENTION, f. f. Action contraire à quelque loi, réglement, jugement, traité, &c.

Contravention à la Paix.

NOUS diftinguerons ici la Contravention à la paix, d'avec l'infraction de

la paix, & l'une & l'autre d'avec la rupture.

La Contravention eft un abus ou une inobfervation de quelque article particulier du Traité; & cet abus qui fe trouve dans le fait, ou dans l'omiffion, n'empêche pas que le Traité ne demeure en fon entier; il donne fimplement le droit d'en demander la réparation ou le dédommagement. » Si par inadvertance (dit l'article XLI du Traité de commerce entre la » France & la Hollande, du 21 de Décembre 1739) ou autrement, il » furvenoit quelques inobfervations ou Contraventions au préfent Traité, » de la part de Sa Majefté ou defdits Seigneurs Etats-Généraux & leurs

Succeffeurs, il ne laiffera pas de fubfifter en toute fa force, fans que » pour cela on en vienne à une rupture de la confédération, amitié & » bonne correspondance, mais on réparera promptement lefdites Contra»ventions; & fi elles procedent de la faute de quelques particuliers fujets, Dils en feront feuls punis & châtiés. «<

L'infraction eft oppofée à l'effence de la paix, en bleffe la fubftance, en trouble l'harmonie, & en renverfe le fondement. Elle donne droit de poursuivre la fatisfaction par les armes, fi l'on ne peut obtenir par une autre voie le redreffement des griefs.

La rupture eft une infraction plus marquée encore; car elle eft accompagnée de la prife d'armes, & confifte dans des actes d'hoftilité qui ne peuvent fubfifter avec la paix,

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CONTRE BANDE, f. f. Tout commerce qui fe fait contre les loix de l'Etat.

CHAQUE fociété a deux objets principaux dans fon administration inté

rieure. Le premier eft d'entretenir dans l'aifance le plus grand nombre d'hommes qu'il eft poffible: le fecond, fondé fur le premier, eft de lever fur les peuples les dépenfes néceffaires, non à l'agrandiffement des domai nes de la fociété, ce qui feroit le plus fouvent contraire à fon bonheur mais celles qu'exigent fa fureté & le maintien de la majefté de ceux qui gouvernent.

Pour remplir le premier objet, il a été néceffaire de prohiber l'entrée de plufieurs denrées étrangeres, dont la confommation intérieure eût privé le peuple de fon travail ou de fon aifance, & l'Etat de fa population : cette prohibition s'eft même étendue à la fortie de quelques denrées nationales en conféquence du même principe.

Pour fatisfaire aux befoins publics de la fociété, on a impofé des droits, foit fur les marchandises étrangeres permises, foit fur les marchandises nationales.

Le mot de Contrebande s'applique aux contraventions de la premiere espece; le mot de fraude à celles de la feconde efpece.

Il eft clair que la Contrebande proprement dite eft réputée telle, uniquement par la volonté du Législateur; dès qu'il a parlé, tout homme qui jouit des avantages de la fociété, doit fe foumettre à fes loix : s'il ofe les enfreindre, il eft criminel, quoique fouvent digne de piété mais il eft toujours très-méprifable, fi l'intérêt feul d'un vain luxe ou d'une fingularité frivole, le rend complice de la Contrebande au préjudice du travail des pauvres.

Quoique la loi doive être fainte pour tous dans un Etat, il eft poffible que fes motifs ne foient pas toujours également favorables au bien général.

On a pû remarquer qu'il y a deux fortes de prohibitions, l'une d'entrée, & l'autre de fortie: examinons-en les motifs.

Les prohibitions utiles fur l'entrée des denrées étrangeres, font celles que dicte une connoiffance profonde des balances particulieres du commerce, de fes diverfes circulations, & de la balance générale; c'est-à-dire, celles qu'un examen férieux & médité prouve être néceffaires à l'aifance ou au travail du peuple.

Prohiber l'entrée des grains étrangers, lorfque les terres nationales peuvent fournir abondamment à la fubfiftance publique, eft une police très-fage.

Prohiber une manufacture étrangere, uniquement parce qu'on eft dans

le deffein de l'imiter, n'eft pas toujours un trait de prudence; car les étrangers ont de leur côté un droit de prohibition. Lorfque les Anglois, par exemple, ont profcrit l'ufage des linons & des batiftes de France, ils ne fe font pas apperçus que la France avoit le droit de prohiber encore plus efficacement l'entrée des quincailleries d'Angleterre, dont on fait une consommation fi abondante, fous le nom & en payant les droits de celles d'Allemagne.

Il convient de pefer très-fcrupuleufement la perte & le gain qui peuvent réfulter d'une prohibition, avant de l'ordonner. Le calcul eft la bous fole du commerce; fans lui on ne peut prefque jamais rien déterminer fur l'application des principes généraux, parce que les cas particuliers fe varient à l'infini.

Les prohibitions abfolues ne font pas les feules les peuples intelligens dans le commerce en ont encore introduit une autre efpece plus mitigée. Lorsqu'ils font dans la néceffité, foit réelle, foit politique, d'importer une denrée étrangere, ils en permettent l'introduction fur les navires nationaux feulement : mais on a foin de n'employer cet expédient que dans le cas où l'on achete plus chez un peuple qu'on ne lui vend, ou pour regagner un commerce englouti par les nations qui font celui d'œconomie.

Le droit de prohibition eft naturel à toute fociété indépendante : cependant il eft des cas où la fureté de toutes peut exiger que quelques-unes y renoncent. Lorfqu'elles y font aftreintes par un traité de paix, cette convention devient loi du droit public; on ne peut y contrevenir fans injuftice.

Dans tous les Etats d'une certaine étendue, il eft prefque impoffible de déraciner la Contrebande, fi elle préfente un profit confidérable. Auffi a-t-on regardé par-tout la punition de ceux qui font ufage des denrées prohibées, comme l'expédient le plus court & le plus fimple pour faire périr ce ver rongeur. Les acheteurs font en effet toujours auffi coupables que les vendeurs, & leurs motifs font en général encore plus honteux.

Tout relâchement fur cette police eft d'une telle conféquence, qu'il devient fouvent impoffible au Légiflateur d'en réparer les funeftes effets : ce peut même être une prudence néceffaire que de céder à la corruption générale, fi le profit qu'on trouve à éluder la loi, le nombre des facilités, & le caprice de la multitude, font plus forts que la loi même : alors la fimple tolérance eft d'un exemple dangereux; les étrangers ne laiffent pas de s'enrichir, l'Etat perd ou le produit de fes domaines, ou l'occafion d'un travail qui pourroit du moins remplacer en partie celui qui s'anéantit. Dans plufieurs États, la Contrebande qui fe pratique par les gens dont c'eft la profeffion, pour ainfi dire, & la reffource, n'eft pas la plus dangereufe. On veille fans ceffe fur eux; il eft rare qu'ils ne foient furpris tôt ou tard, & la punition éclatante d'un feul en corrige plufieurs.

Je parle de la Contrebande que font les Commis des Douanes, foit à

leur profit particulier, foit pour celui de leurs fermiers, en facilitant fous des noms fuppofés & fous des droits arbitraires, l'entrée des denrées prohibées. Cette Contrebande fur laquelle perfonne ne veille, eft un moyen fourd & très-affuré d'épuifer un État : d'autant plus que le remede eft difficile; car la régie des Douanes, quoique démontrée la meilleure de toutes les formes qu'elles peuvent recevoir, n'a pas réuffi dans tous les pays; comme une expérience de phyfique bien conftatée peut manquer dans des mains différentes.

Nous n'avons parlé jufqu'à préfent que de la Contrebande d'entrée : celle de fortie confifte à exporter les denrées que l'État défend de vendre aux étrangers. Le nombre en eft toujours médiocre, parce qu'en général cette méthode n'eft utile que dans le cas où les fujets feroient privés, foit du néceffaire, foit d'une occafion de travail. C'eft ainfi que la fortie des laines eft défendue en Angleterre, parce que leur qualité eft réputée unique; en France, celle du vieux linge, du falpêtre, &c.

L'exportation des armes & des munitions eft fujette à des reftrictions dans prefque tous les États, excepté en Hollande. Ces fages Républicains favent que l'argent de tout le monde eft bon à gagner, & réfervent les prohibitions pour les occafions extraordinaires. En effet, il n'en eft point des fufils, des épées, des balles des canons, comme des matieres, par exemple, du brai & du goudron, que tous les pays ne fourniffent pas & dont le tranfport peut être défendu utilement dans certaines circonftances, parce qu'il feroit difficile de les remplacer. Mais fi la Suede & le Danemarc imaginoient en temps de paix de prohiber la fortie de ces matieres pour la France, ce feroit lui rendre & à fes colonies du continent de l'Amérique, un fervice très-fignalé.

Dans les pays où le commerce n'eft point encore forti de fon enfance; l'exportation de l'or & de l'argent eft défendue fous les peines les plus ri goureuses. L'exemple de l'Efpagne, du Portugal, & même celui de la France dans le temps des refontes lucratives au tréfor royal, prouvent l'impuiffance de cette prohibition chimérique. A voir les craintes répétées de l'auteur du Dictionnaire du commerce fur la quantité d'argent qui fort de l'Angleterre, on feroit tenté de croire qu'il n'imaginoit pas qu'il y en pût rentrer. Si l'ouvrage étoit moins eftimable, on ne feroit pas cette remarque mais en rendant juftice au zele & à l'application de l'auteur, il eft bon de ne pas s'abandonner à fes principes.

La fraude confifte à éluder le paiement des droits impofés fur les marchandifes nationales ou étrangeres, foit dans la consommation intérieure foit à l'importation ou à l'exportation : ainfi elle peut être confidérée dans ces trois circonftances différentes.

Les droits fe perçoivent dans la confommation intérieure, ou aux entrées des lieux où elle fe fait, ou à l'entrée des Provinces, ou enfin fur les denrées dont l'État s'eft réservé le monopole.

Toute fraude eft criminelle affurément indépendamment du mépris de la loi, c'eft voler la patrie; c'eft anéantir les effets de ce principe fi augufte qui fit les Rois, & le plus effentiel de leurs devoirs, la juftice dif tributive mais comme il eft rare que tout un peuple foit guidé par l'efprit public, il convient de lui faire aimer la loi que l'on veut qu'il refpecte. Le peuple fe perfuade mal-aifément que l'ufage d'une denrée néceffaire, & qui fe trouve facilement fous fa main à bon marché, puisse lui être juftement défendu, à moins qu'il ne l'achete chérement & avec des formalités gênantes.

Si cette denrée eft néceffaire, foit à quelque partie de l'agriculture, foit à quelque manufacture, la fraude s'établira & les recherches redoubleront, ou bien ces parties fi effentielles de l'occupation des hommes diminueront, & avec elles la population. Plus les motifs de la fraude font féduifans, plus la loi devient févere. Rien peut-être n'eft plus funefte à la probité d'un peuple, que cette difproportion dans la peine des crimes; & les Juges établis pour y veiller, fe voient expofés chaque jour à la déplorable néceffité de retrancher de la fociété des citoyens qui lui euffent été utiles, fi les loix euffent été meilleures. Quand même il ne feroit pas auffi poffible qu'il le paroît toujours, de remplacer cette efpece d'impôt; il eft évident que les peuples feroient foulagés d'un grand fardeau, fi l'État convertiffoit en une fomme d'argent fixe ce qu'il retire net de chaque fujet, à raison de cette branche des revenus publics.

Le monopole que l'État fe réserve fur les denrées de pur agrément, eft beaucoup plus doux : mais fouvent il n'eft pas plus favorable à la population, puisqu'il limite l'occupation des citoyens, & diminue les moyens de groffir la balance du commerce.

Un principe conftant des finances bien entendues, c'eft que le produit des revenus s'accroît en raifon du nombre des fujets, de leur occupation, de leur aifance: tels font les feuls refforts actifs & durables de cette partie auffi belle qu'effentielle de l'adminiftration. Le monopole dont nous parlons entraîne les mêmes inconvéniens que l'autre par rapport aux peines & aux formalités : une opération très-fimple cependant pourroit remédier à tout, & doubler le revenu.

eft

La fraude fur les droits qui fe perçoivent de Province à Province commune en raifon du profit qu'elle donne à celui qui la fait; & la barriere qu'il eft abfolument néceffaire d'établir contr'elle, exige tant de dépenfes, que ces fortes de droits ne rendent jamais le quart de ce qu'il· coûtent aux peuples. Mais leur plus grand inconvénient eft d'arrêter la circulation intérieure & extérieure des denrées, & dés-lors de nuire à l'occupation des fujets, à la population. On ne fauroit trop répéter, que ce n'eft prefque jamais autant en raifon de la valeur de ces droits, que parce que les formalités fe multiplient fans ceffe en proportion de la facilité qu'il y a de les éluder. D'un autre côté, fans ces formalités la recette s'anéantiroit;

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