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de la Commission chargée de la visite des Fermes,

Par M. le comte de VIGNERAL.

La Commission qui était chargée de la visite des ferme a l'honneur de vous soumettre son rapport.

Lors de la réunion générale de l'Association normande à Argentan, après le compte rendu par M. Desulis des rapports envoyés par les membres de l'Association chargés, dans chaque canton, de l'examen des fermes les mieux gouvernées et qui nourrissaient, proportionnellement å leur étendue, le plus grand nombre de bestiaux, deux exploitations avaient été signalées comme pouvant prétendre au prix de 500 francs, accordé par M. le ministre de l'agriculture et du commerce.

L'importance de ce prix avait arrêté votre Commission; elle ne se trouvait pas suffisamment éclairée par les rapports qui lui étaient soumis, pour proclamer un seul vainqueur. Elle proposa de diviser ce prix entre plusieurs fermes; mais M. de Ste-Marie déclara qu'il était indivisible.

L'éloignement de ces deux fermes, situées l'une à l'extrémité est de l'arrondissement d'Argentan, l'autre å l'extrémité ouest, séparées par une distance de plus de 100 kilomètres, avait rendu impossible le déplacement de la Commission pendant la courte durée de la réunion de

l'Association normande.

M. le directeur de l'Association normande, de concert avec M. Lefebvre de Ste-Marie, inspecteur de l'agri

culture, désigna MM. Desulis, Malo, Gallot-Lavallée et de Vigneral, pour examiner, sur les lieux mêmes, le mérite et l'importance des deux fermes.

Notre tâche matérielle pouvait être pénible, et la responsabilité morale aurait dû peut-être nous faire décliner alors la mission honorable dont vous vouliez bien nous charger.

Aujourd'hui que je viens vous faire connaître notre décision, nos craintes sont évanouies ; car nous avons au cœur cette espérance que, dès cet instant, l'opinion publique ratifiera le jugement que nous avons cru devoir porter; et lorsque l'Association normande, à une époque malheureusement trop reculée, viendra de nouveau honorer notre arrondissement par la tenue de son Congrès, elle trouvera que nous avons sagement répandu ses dons sur une terre d'avenir; que le cultivateur, ami du progrès, que nous désignons aujourd'hui pour recueillir l'un des nombreux encouragements dont elle a bien voulu doter notre contrée, aura contribué par son intelligence et son exemple à faire entrer l'agriculture dans une voie féconde, à faire disparaître autour de lui l'ancienne culture, pour la remplacer par une nouvelle, mieux appropriée aux circonstances économiques de notre époque.

Une des fermes désignées est située sur la commune de Glos-la-Ferrière, à un kilomètre du bourg de ce nom, dans le canton de la Ferté-Fresnel.

Cette propriété appartient à MM. Dupin; elle est exploitée par M. Metayer.

Contenance.

110 hectares de terres arables.

15 hectares de prairies naturelles.

Assolement.

L'assolement est triennal, sauf un quart des terres qui sont ensemencées en luzerne. La durée de la luzerne est indéterminée; le fermier y supplée par des semis annuels.

Le sol est, en général, argilo-ferrugineux.

Les champs ensemencés que nous avons parcourus, étaient convenablement préparés. Les instruments aratoires sont ceux 'en usage dans le pays, sans aucune modification.

Chevaux.

Six chevaux de la race percheronne de trait suffisent à la culture des terres. Ils sont mal croisés, et conviendraient à peine au service du roulage. La tenue de l'écurie et des harnais témoigne une grande indifférence de la part du maître. Il n'y a point d'élèves.

Vacherie.

La vacherie se compose de 14 à 16 têtes de différents âges, et d'un taureau.

Les vaches appartiennent à l'espèce commune du pays; elles sont assez fortes, mais elles sont mal conformées. Le taureau est très-médiocre.

Les vaches sont nourries à l'étable, pendant sept mois, au foin. M. Metayer ne veut pas cultiver les plantes sarclées pour leur nourriture, et ne paraît pas disposé à faire aucune concession à cet égard.

Pendant cinq mois, elles paissent les luzernes et les regains des prairies naturelles.

Bergerie.

Le troupeau se compose de 5 à 600 têtes; il y a environ 150 mères. Le fermier, qui a long-temps habité le département de l'Eure, a importé dans sa nouvelle exploitation les usages de son pays natal, et toute son industrie est concentrée sur son troupeau.

Ce nombreux troupeau n'appartient à aucune race: c'est un croisement presqu'effacé de la race du pays avec des béliers mérinos.

Les brebis portières ont été luttées cette année par des béliers mérinos d'un très-mauvais choix. M. Metayer a trois ou quatre autres béliers aussi médiocres, qu'il loue, pour la saison, aux autres cultivateurs du pays. Il n'attache aucune importance à l'amélioration de son troupeau, qui, de son aveu même, a beaucoup dégénéré depuis son arrivée à Glos. Il lui suffit de pouvoir engraisser et vendre.

Pendant sept mois, le troupeau est nourri à l'étable avec le foin récolté sur les 30 hectares de luzerne ; pendant cinq mois, on le conduit paître sur les champs de vesces et autres plantes fourragères.

Fumier.

Le fumier est mal disposé; le purin s'écoule sans être recueilli, et les eaux pluviales, qui sont en grande partie déversées vers la mare à fumier, enlèvent, dans leur passage, les parties les plus précieuses de l'engrais.

Bâtiments.

L'aspect général de la ferme est triste. Au milieu d'une

cour immense, vous voyez un instrument brisé ou ren versé. Tout révèle la négligence et l'insouciance du maître. Une jolie maison moderne, à droite et à gauche d'immenses bâtiments, vous indiquent que ces lieux avaient, il y a peu d'années, une autre destination. En effet, M. Gervais, propriétaire de la terre de Glos, avait voulu adjoindre à sa vaste exploitation une fabrique de sucre. Là, comme ailleurs, des circonstances facheuses ontfait échouer ses projets ; et, au lieu d'aider au progrès et au perfectionnement de l'agriculture, les paroles que nous avons recueillies, à plusieurs reprises, nous ont donné la certitude que, de long-temps encore, on ne pourra détruire les préventions erronées que des essais malheu reux ont rendues vraisemblables.

Nous avons ensuite visité la ferme du Baillet, située près du bourg de Briouze, appartenant à M. le comte d'Orglande. Elle est exploitée par M. Charles Grimbert.

Contenance.

La ferme se compose de 28 hectares de terres arables, 6 hectares de prairies naturelles.

Les terres arables sont divisées en plusieurs champs clos de haies, soigneusement entretenues.

Assolement.

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L'assolement est sexennal. M. Grimbert divise ainsi ses terres sarrasin, blé, avoine, seconde avoine fumée avec des cendres ou du noir animal, trèfle, seconde année de trèfle pour pâture; puis il recommence sa rotation par le sarrasin et autres plantes à racines alimentaires. Jusqu'ici les plantes sarclées n'entraient point dans ses,

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