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EXTRAIT

DU PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 23 nivôse de l'AN VII
(12 JANVIER 1799).

Un membre (1) obtient la parole pour une motion d'ordre sur le projet présenté par la Commission d'instruction publique, concernant l'enseignement de l'art de guérir. Il vient démontrer que ce projet ne présente ni égalité, ni ensemble, ni uniformité, ni économie; que ce projet tend à faire adopter, au grand préjudice de l'instruction, la conservation des écoles de médecine dans le même état où elles existent; qu'il s'oppose entièrement aux progrès de l'art de guérir, et à la perfection de l'enseignement, en donnant à l'École de Paris une supériorité sur les autres écoles de médecine, et en plaçant à côté d'elle une Société de médecine formée d'une partie de ces professeurs toujours prêts à défendre ses privilèges, sans cesse disposés à accroître sa toute-puissance aux dépens des autres écoles; qu'il offre des abus dangereux en laissant aux professeurs le soin de déterminer la nature, l'ordre, le nombre des différents cours et examens; qu'il détruit l'émulation et la concurrence au détriment des armées, des campagnes et de l'art de guérir, en ne voulant pas rétablir la chirurgie et les chirurgiens; qu'enfin il porte un coup mortel à l'enseignement par la formation de vingt écoles dites primaires ou élémentaires de médecine.

L'orateur donne quelques développements à son opinion pour prouver que le projet dont il s'agit anéantirait toute espèce de concurrence de la part des médecins célèbres répandus dans toutes les parties de la République, et produirait un effet contraire au but que le Conseil se propose, puisqu'il établirait une espèce de Société de médecine à Paris, qui exercerait sa prépondérance sur tous les établissements en ce genre des autres départements.

Il termine en demandant que la discussion s'ouvre sextidi de la

(1) Vitet, il s'agit des projets de Cabanis et de Hardy, voir p. 419 et suivantes,

décade prochaine, sur le projet concernant les écoles spéciales de médecine.

Le Conseil adopte cette proposition.

Cette tentative pour amener la discussion définitive sur les projets qui précèdent fut la dernière; l'année qui s'écoula entre la présentation de ces projets et la promulgation de la Constitution de l'an vIII n'amena aucune solution.

Sous le Consulat la question fut reprise dès l'an Ix; le Conseil d'État discuta cinq projets dont nous donnons la première rédaction, aucun d'eux n'aboutit; c'est la loi de l'an xi qui sortit de toutes ces tentatives.

PROJET DE LOI

SUR L'ENSEIGNEMENT ET LA POLICE DE LA MÉDECINE.

29 PLUVIÔSE AN IX (18 février 1801) (3).

$1.

Organisation des écoles de médecine.

ART. 1. Les trois écoles établies à Paris, Montpellier et Strasbourg par la loi du 14 frimaire an ш sous le nom d'écoles de santé seront maintenues; elles porteront désormais le nom d'écoles de médecine. On continuera d'y enseigner la médecine, la chirurgie, la pharmacie, les accouchements et toutes les parties théoriques et pratiques de l'art de guérir.

ART. 2. Le nombre des professeurs y demeure fixé, savoir: à 24 pour Paris, 16 pour Montpellier et 12 pour Strasbourg. Il y aura de plus, comme il est dit dans la loi du 14 frimaire an II, un directeur et un conservateur dans chacune de ces trois écoles, et un bibliothécaire dans celle de Paris. L'organisation donnée par cette loi y sera maintenue.

ART. 3. Lorsqu'il vaquera une place de professeur dans les écoles de médecine, il y sera nommé par les professeurs réunis. Le candidat qui aura réuni les deux tiers des suffrages sera proclamé professeur, et il recevra un diplôme signé par le premier Consul.

Les professeurs actuellement en exercice recevront un pareil diplôme comme titre de leur nomination.

ART. 4. La médecine et la chirurgie ne formeront qu'une seule et même profession; elles ne pourront être exercées que par des citoyens déjà reçus suivant les formes anciennes, ou qui le seront par la suite d'après les formes prescrites dans la présente loi.

(1) Conseil d'État, Recueil de projets, t. III, no 211. Bibliothèque de la Chambre des députés.

(*) 1 rédaction. Rapporteur : le citoyen FOURCROY.

3) Cette date est celle de l'impression du projet.

ART. 5. Outre l'enseignement donné dans les trois écoles de médecine, suivant la loi du 14 frimaire an II et celui qui a lieu dans quatre des hôpitaux militaires et dans trois des hôpitaux de marine, il sera fait des cours élémentaires de médecine, savoir: 1° sur l'anatomie et la physiologie; 2° sur les maladies externes; 3° sur les maladies internes; 4° sur la préparation des médicaments dans les hospices civils des 15 villes suivantes : Bordeaux, Bruxelles, Caen, Clermont-Ferrand, Dijon, Grenoble, Lyon, Marseille, Orléans, Perpignan, Poitiers, Reims, Rennes, Rouen et Toulouse.

ART. 6. Ces cours seront donnés par les trois officiers en chef de chacun de ces hospices; il y sera fait de plus, par l'un d'eux, un cours d'accouchement.

$ 2.- Élèves en médecine et réception des médecins.

ART. 7. Nul ne pourra dorénavant être admis élève dans les trois écoles de médecine de Paris, Montpellier et Strasbourg et dans les hôpitaux ou hospices désignés ci-dessus, sans avoir acquis les connaissances littéraires indispensables pour étudier avec fruit l'art de guérir.

Ceux qui voudront se livrer à cette étude seront tenus de produire des certificats des écoles centrales dont ils auront suivi les leçons et de subir une première épreuve dont le mode sera déterminé dans un règlement dont il va être parlé.

ART. 8. Les élèves payeront annuellement une rétribution de 120 francs aux écoles de médecine et de 60 francs dans les hôpitaux ou hospices; le temps de leurs études en médecine ne pourra être moindre que quatre années dans les écoles et cinq années dans les hôpitaux d'instruction.

ART. 9. Il sera ouvert, deux fois chaque année, dans les trois écoles de médecine, des examens sur les diverses parties théoriques et pratiques de l'art de guérir; le nombre, le mode, l'époque et la durée de ces examens seront déterminés dans un règlement rédigé par les écoles de médecine et approuvé par le Gouvernement. Les épreuves en seront assez rigoureuses pour bien assurer la capacité de ceux qui les subiront.

ART. 10. Les élèves en médecine, soit des écoles, soit des hôpitaux, payeront aux écoles pour leurs examens et leur réception une somme de 600 francs. Ces sommes, ainsi que les rétributions

annuelles mentionnées à l'article 8, et toutes celles dont il sera parlé dans les articles suivants, seront destinées à l'entretien et aux frais de l'enseignement. Les trois dixièmes serviront aux dépenses de l'école; les sept autres dixièmes seront partagés entre les professeurs.

ART. 11. Les élèves qui suivent actuellement, soit depuis plusieurs années, soit depuis l'ouverture des cours de l'an ix, l'une des trois écoles de médecine dans l'intention de se faire recevoir médecins, seront tenus d'acquitter leurs rétributions annuelles. Elles seront modérées à 60 francs seulement pour les années antérieures à l'an Ix; cette dernière sera de 120 francs.

ART. 12. Les citoyens qui auront fait preuve de savoir dans les examens dont il vient d'être parlé seront reçus médecins. I leur sera délivré par les écoles un diplôme qu'ils feront enregistrer à la sous-préfecture de l'arrondissement communal dans lequel ils voudront se fixer pour exercer la médecine.

ART. 13. Ceux des élèves des trois écoles qui, d'après l'arrêté du Ministre de l'intérieur ont déjà obtenu des certificats de capacité dans les écoles, seront tenus de les échanger contre de nouveaux diplômes, de payer la rétribution de 600 francs à l'école qui les leur délivrera, et de les faire enregistrer à la sous-préfecture de l'arrondissement où ils voudront s'établir.

ART. 14. Sont exceptés des examens et des dispositions précédentes :

1° Les officiers de santé employés en chef dans les armées de terre et de mer par brevet ou commission suivant la loi du 3 ventôse an n;

2o Les officiers de santé qui auront été employés pendant trois ans comme médecins ou chirurgiens de première classe dans les armées ou les hôpitaux. Ils recevront un diplôme de l'une des trois écoles de médecine, en payant la rétribution de 600 francs et en présentant des attestations de leurs services légalisées par le Ministre de la guerre ou de la marine.

ART. 15. Les citoyens munis du diplôme de médecin pourront exercer leur profession dans toutes les parties de la République, après l'avoir fait enregistrer à la sous-préfecture de l'arrondissement communal où ils transporteront leur résidence.

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