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deux noms de Junius Brutus, fondateur de la Répu blique; Rome esclave donna au septième mois, qu'on avoit nommé Quintile (1) le premier om de Jules César, destructeur de la Republique et fondateur de la tyrannie. Ce mois s'appella Julius dont nous avons lait Juillet.

Auguste ayant succédé à César, voulut aussi que' l'un des mois porrat son nom. Le huitième mois, qui se nommoit sextile prit alors le nom d'Augustus (2), que nous avons abregé, corrompu et défiguré en l'appellant août.

Un mouvement de basse jalousie fit qu'Auguste troubla ordre commode et raisonnable que Jules César avoit établi. Il ne voulut pas que le mois qui portoit son nom fût inférieur à celui qui portoit le nom de Jules. I prit un jour au mois de février pour le donner au mois d'Auguste, ou d'août. Ce dernier, eut donc 3: jours et février n'en eut que 28, excepté dans les années bissextiles: cet arrangement alternatif de mois de 30 et de 31 jours, créé par César, fut renversé par une fantaisie d'Auguste, sans qu'on se soit soucié depuis de le rétablir.

Mais Jules et ses astronomes s'étoient eux-mêmes, trompés dans la supputation des jours de l'année, en lui donnant 365 jours, 6 heures.

Sa durée réelle n'est, comme je l'ai déja dit, que de 365 jours, 5 heures. 48 minutes, et 49 secondes. Il y eut donc plus de 11 minutes de trop dans l'année de Jules César.

Ces onze minutes vous paroissent pau de chose, mais rien n'est à négliger dans la mesure du tems onze minutes font envien 24 heures en 134 ans ; ensorte qu'après ces 134 ans, en faisant toujours l'année de 365 jours 6 heures, Téquinoxe arrive un jour plutôt qu'avant ce tems.

(1) J'ai dit plus haut quelle avoit été la cause de ceste. confusion dans le nom des mois.

(2) Les latins prononçoient Дougoustous.

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A Rome, vers l'an 1580 de l'ère chrétienne, sous le pontificat de Grégoire XIII, on s'apperçut que l'équinoxe du printems, qui, 325 auparavant, tomboit au 21 mars, arrivoit pour lors le 11. Ainsi les 11 minutes de différence avoient, au bout de ce tems, produit une erreur de, dix jours.

Le pape consulta des astronomes, et voici le remède fort simple qu'ils trouvèrent à ce dérangement. On étoit alors au mois d'octobre 1582. On supprimă dix jours de ce mois, et par conséquent de l'année. Le 5 octobre fut compté pour le 15; et l'équinoxe du printems qui seroit arrivé le 11 mars suivant, tomba juste au 21, d'après cette suppression de dix jours.

Mais il falloit empêcher que le même inconvé nient ne pût renaître; et cela encore ne fut pas difficile.

Selon le calcul de Jules César l'année bissextile revenoit tous les quatre ans, et par conséquent la dernière année de chaque siècle devoit être bissextile, Mais les minutes de trop faisant un jour au bout de 134 ans, au bout de 400 ans cela faisoit trois jours. On ordonna donc que sur quatre siècles la dernière année des trois premiers ne seroit pas bissextile, et qu'il n'y auroit que la dernière année du quatrième qui le seroit.

La dernière année du siècle qui couroit alors étoit 1600: elle fut bissextile. 1700 ne l'a pas été, 1800 et 1900 ne le seront pas; mais l'an 2000 le sera.

Par ce moyen on retranche 3 jours en 400 ans ; et le calendrier de Grégoire XIII corrige, à très-peu de chose près, l'erreur du calendrier de Jules César.

Je dis à très-peu de chose près, car il y a encore, comme vous le verrez bientôt, une erreur légère qui se fait déja sentir.

Mais en réformant tout le calendrier, en liant ce grand changement dans la mesure du tems au changemeat plus grand encore que la révolution française imprime au cours des choses humaines, devoit-on s'arrêter minutieusement à prévoir des inégalités qui ne sont sensibles qu'après des siècles, et mettre de No. 3. Quatrième année.

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l'embarras dans les calculs du présent, pour épargner à l'avenir quelques supputations simples et

faciles ?

C'est ce que nos législateurs n'ont pas cru nécessaire ou pluôt ce qu'ils ont évité avec soin. Choisir un point fixe dans les mouvemens célestes, couper la révolution annuelle en parties égales et régulières, doaner une place natúrelle au jour intercalaire que fournit l'année bissextile, et se reposer du reste sur la facilité des corrections lorsque de petites différences accumulées auront produit un jour, voilà ce qu'ils ont fait, ce qu'a préparé le comité d'instruction publique, de conceit avec plusieurs savans distingués, ce que la Convention a unanimement adopté. d'après un rapport que lui a présenté le citoyen Romme au nom du comité dont il est membre.

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Pour vous le rendre intelligible, il m'a fallu q mes bons amis, reprendre les choses de lon, et vous expliquer avec détail ce qu'il ne fait qu'indiquer rapi dement, Il parle à des hommes instruits, moi à des hommes que je dois instruire.

A présent vous pouvez l'entendre ; et il n'a, pour ainsi dire, plus besoin d'interprête auprès de vous.

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6 L'ère vulgaire, vous dit-il, prit naissance chez un peuple ignorant et crédule, au milieu des troubles précurseurs de la chûte prochaine de l'empire romain. Pendant 18 siècles, elle servit à fixer dans la durée les progrès du fanatisme, l'avilissement des nations, le triomphe scandaleux de l'orgueil, du vice et de la sottise, les persécutions et les dégoûts qu'essuyèrent la vertu, le talent, et la philosophie, sous des despotes cruels, ou qui souffroient qu'on le fût en leur

nom "".

L'ère vulgaire fut l'ère de la cruauté, du mensonge, de la perfidie et de l'esclavage: elle a fini avec la royauté.

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La révolution a retrempé l'ame des Français: elle les forme chaque jour aux vertus républicaines! Le tems ouvre un nouveau livre à l'histoire ; et dans sa marche nouvelle, majestueuse et simple comme

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l'égalité, il doit graver d'un burin neuf et vigoureux les annales de la République ".

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Ce livre est le nouveau calendrier français, destiné à devenir un jour celui de tous les peuples libres..

Du nouveau Calendrier.

De année. La durée de l'année est la même pour tous les peuples, de quelque manière qu'ils en divisent la mesure; mais son commencement, son premier jour, n'a pas été placé chez tous à la même époque.

Les uns ont choisi pour commencer leur aunée Tun des deux soluces, les autres l'un des deux équinexes. Plusieurs au lieu de se fixer à une époque de Saison, ont préféré de prendre dans leurs fastes une époque historique."

La révolution Françoise offre un rapport frappant, et peut-être unique dans les fastes du monde, entre les mouvemens célestes, les saisons, les traditions anciendes et le cours des événemens.

Le 21 septembre 1792, le dernier jour de la monarche, et qui doit être le dernier de l'ère vulgaire les représentans du peuple François, réunis co convention nationale, ouvrirent leur session et prononcèrent l'abolition de la royauté.

Le 22 septembre, ce décret fut proclamé dans Paris. Ce jour fut décrété le premier de la république, et le même jour, à 9 heures 18 minutes 30 secondes du matin, le soleil est arrivé à l'équinoxe vrai, en entrant dans le signe de la Balance.

Ainsi l'égalité des jours et des nnits étoit marquée dans le ciel, au moment même où l'égalité civile et morale étoit proclamée par les représentans du peuple François, comme le fondement sacré de son

gouvernement.

Ainsi le soleil a éclairé à la fois les deux poles, et successivement le globe entier, le même jour où pour la première fois a brillé dans toute sa pureté sur la nation Françoise, le flambeau de la liberté, qui doit un jour éclairer tout le genre humain.

Ainsi le soleil a passé d'un hémisphère à l'autre

le même jour, où le peuple triomphant de l'oppres sion des rois, a'passé du gouvernement monarchique au gouvernement républicain.

Les François ont été rendus entièrement à euxmêmes dans cette saison heureuse, où la terre, fecondée par les influences du ciel et par le travail, prodigue ses dons et paie avec magnificence à l'homme laborieux ses soins, ses fatigues, et son industrie.

Les traditions sacrées de l'Egypte, qui devinrent celles de tout l'Orient, faisoient sortir la terre du cahos, sous le même signe que notre république, et y fixoient l'origine des choses et du tems.

Le concours de tant de circonstances imprime un caractère sacré à cette époque. Il seroit impossible d'en trouver une dans les fastes du monde entier qui fât plus invinciblement désignée pour commencer sons de favorables auspices l'ère d'un peuple libre.

L'année Françoise doit donc commencer désormais. au jour qui étoit le 22 septembre, jour où tombe l'équinoxe tai d'automne,, où le signe de la balance donne aux hommes le signal de Tégalité, où fut solemme lenient proclamée l'abolition de la royauté et l'établissemont de la république,

Du mois. Tous les peuples connus, excepté peut-être les premiers Romains, ont divisé l'année en 1 2 mois.

La division marquée par les deux équinoxes et les deux solstices et celle de l'année en quatre saisons, indiquoient naturellement le nombre quatre pour premier diviseur de sa durée. Chacune de ces quatre parties, qu'il eût été gênant de laisser entières, fut subdivisée en trois, dont le total fit le nombre de douze; et ce qui détermina sans doute pour ce nombre, c'est qu'il exprime combien de fois la lune passe devant le soleil, pendant que la terre fait une révolution. Cette division est commode, et ne peut être combattue solidement.

Mais ce que la raison réprouve et devoit cnfin rejetter de notre calendrier, c'est l'inégalité bizarre les mois, qui fatigue l'esprit par des difficultés sans

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