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tems dans la feuille du Cultivateur. Nous y joindrons dans la suite quelques autres observations.

De l'amélioration de la laine, et de la manière d'élever Les troupeaux pour l'obunir.

Je suis parvenu, à force de recherches, d'essaist et d'observations, et sur-tout en suivant les conseils de quelques citoyens éclairés qui ont écrit sur les laines, à améliorer celle de mon troupeau; je me crois obligé de publier le succès qui a couronné mes espérances, et d'indiquer la marche des raisonnemens et des procédés qui m'y ont conduit.

Il a d'abord fallu que je convinsse avec moi-même de ce qu'on entend communément par une bonne laine, et je crois que c'est celle dont le poil est fiu, en quelque sorte transparent, souple et creux. Quand j'ai dit la bonne laine doit être fine, on en conque viendra facilement; la souplesse qui la caractérise aussi ne sera pas plus disputée: mais il est nécessaire que je fasse sentir la nécessité de sa transparence, qualité qui n'existe que lorsqu'elle est creuse dans toute la longueur du poil. Chaque poil est un tuyan qui tire son accroissement d'une substance grasse, huileuse, fournie par le corps du mouton. Si ce tuyau est obstrué, l'accroissement ne peut plus exister, ou n'existe que d'une manière monstrueuse et funeste à la qualité de la laine; s'il ne l'est pas, au contraire si le suc qui le nourrit circule librement du corps de l'animal à l'extrémité du poit, ce poil y gagne nécessairement une sorte de transparence on de brillant. J'ai donc eu raison d'assigner à la bonne laine les caractères que j'ai indiqués.

Mais l'expérience nous apprend que la circulation de la substance qui se trouve dans chaque tuyau ou petit canal du poil de la laine, n'est parfaitement? libre, et conséquemment que la laine n'est transparente que lorsque le mouton convenablement nourri, jouit d'une parfaite santé. La première opération de celui qui veut avoir de bonne lainé, donc de veiller à la santé de son troupeau.

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Je ne présume pas qu'on puisse me demander quel avantage on retire de cette transparence que je regarde comme la qualité la plus essentielle de la laine. Cependant pour ne rien oublier, je satisferai à ceue question. L'avantage qu'on en retire consiste, en ce que cette laine, employée dans les manufactures donne aux étoffes qu'on en prépare, le brillant du poil de chameau, et que, par la souplesse qui en résulte, elle leur procure de la solidité et de la durée. Toutes les laines ne peuvent pas être également fines; mais qu'elles soient fines ou grossières, longues ou courtes, pourvu qu'elles soient transparentes,, brillantes et souples, elles sont excellentes dans leur espèce, et proviennent certai 'nement d'un troupeau sain et bien nourri.

Quand un mouton est malade ou souffre de la faim, les sucs destinés à l'accroissement de la laine s'arrêtent et s'épaississent dans le petit canal des poils, le remplissent d'une substance d'abord trouble, ensuite blanchâtre et qui finit par se durcir, substance quote au poil toute sa transparence et son brillant. La laine ainsi dégénérée devient dure et cassante, et comme elle ne peut plus s'élever sur l'animal, elle croît irrégulièrement en se mêlant. Si l'animal revient en santé, ou reçoit une nourriture plus abondante ou meilleure, elle reprend son accroissement, et c'est ce qu'on appelle laine de seconde pousse; mais elle reste toujours gaiée et défectueuse, parce qu'elle tombe à la préparation et sous le peigne. Elie cesse aussi de croître, avant que le tems de la tonte soit arrivé, et les entes de cette espèce de laine, si l'on veut me permettre d'employer cette expression pour indiquer cette seconde croissance. pendent autour de l'animal comme des lambeaux déchirés. Elle se casse et se déchire souvent, soit au filage, soit à la tissure, et conséquem ment il est impossible d'en préparer une étoffe bonne et durable. Il y a plus, elle est mauvaise pour la teinture, elle ne peut ecevoir une couleur vive, franche et qui se soutienne.

Quand un mouton, au contraire, est sain et bien

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nourri, la croissance de la laine continue sans interruption jusqu'à la tonte. Il ne peut s'y rassembler. aucun suc délétère, aucune matière dure, la laine est toujours brillante, douce et souple, et sa transparence, son brillant, servent à relever les couleurs qui y sont appliquées. C'est en cela que consiste la supériorité de la laine angloise qui ne se tond qu'une fois, et dont on trouve des étoffes si brillantes, qu'on les croiroit fites de poil de chameau. Il net faut pas croire que toutes les laines angloises soient égales en longueur et en finesse, mais cette qualité billante se fait appercevoir dans toutes. La manière de les préparer peut y contribuer; mais je puis assurer, pour l'avoir observé, que le brillant des étoffes de laine de cette nation tient plus à la qualité de la laine qu'à toute autre cause.

La seconde qualité d'une bonne laine consiste dans sa finesse et sa propreté. Ce sont deux qualités séparées, si l'on veut, mais je les réunis ici, parce que, s'il est possible à une laine d'être propre sans être fine, il n'est pas possible qu'une laine soit fine sans être propre. La finesse exigeant que le poil soit doux, souple et transparent, il s'ensuit que la finesse réunie à la propreté constitue une excellente laine, ou même la meilleure espèce, selon le degré de ces différentes qualités. Pour obtenir et augmenter de plus en plus la finesse de la laine, la santé des moutous et une nourriture convenable et suffisante sont certainement indispensables; mais il faut aussi se procurer une bonne race, et pour déterminer quelle elle doit être, avoir égard aux brebis, aux prairies et aux fourrages qu'on a ou qu'on peut avoir, car on s'est trompé plus d'une fois sur ce point. J'y reviendrai. Je ne m'occupe maintenant que de ce qu'on peut faire dans toutes les bergeries, sans beaucoup de peine et de dépenses.

Quant à la propreté, il faut préserver les mous tons de la chute des petites graines et des restes de Jeur fourrage, sans quoi leur laine devient ce que nous appellons enfour agée, c'est-à-dire, salie et embarrassée. Ce mal en diminue d'autant plus la valeur,

que lorsqu'il a fait certains progrès par le pea de soin, on ne peut presque plus se servir de cette laine, sans un décher prodigieux. Mais il est facile, comme on le verra, de prévenir cet inconvénient.

Lorsque la réflexion et l'expérience m'ont eu con-. vaincu que les qualités dont je viens de parler, étoient essentielles à une bonne laine, je me suis, fait, pour parvenir à l'introduire dans mon troupeau, les règles suivantes qui paroîtront sans doute bien simples:

1. Entretenir le troupeau sain et vigoureux;

2o. Lui donner une bonne nourriture, en quantité suffisante, et le tenir proprement;

5o. Enfin, maintenir une bonne race, et si celle qu'on a est trop imparfaite, si elle n'est pas ou peu susceptible d'amélioration par une éducation plus soignée, l'améliorer avec une race plus parfaite.

J'ai fair les recherches nécessaires pour atteindre à ce but. J'ai trouvé que, malgré l'excellente position de mes pâcages, malgré la bonne qualité des fourrages qu'ils me procurent, la laine de mon troupeau étoit, en général, courte ou sèche, mêlée, salie et embarrassée, et qu'elle n'avoit ancun brillant.

J'ai examiné que les pouvoient être les causes de ce mal, et il m'a semblé que l'une des premières et des plus essentielles étoit la distribution irrégulière que l'on faisoit du fourrage d'hiver, et le peu de. soin qu'on avoit de le conserver comme il doit l'être. Cette double négligence a les suites les plus fâcheuses pour la santé des bêtes à laine, et cependant la plupart des bergers n'y font point attention. Quel-“ ques-uns, au commencement de l'hiver, surtout quand les mauvais tems commencent de bonneheure épargnent trop le fourrage, et lorsqu'aux approches du printemps ils s'apperçoivent qu'il leur en reste encore beaucoup ils veulent que leurs moutons en profitent et les alfouragent beaucoup trop. Cependant cette coutume n'est pas encore la plus funeste, quoiqu'elle ait une fâcheuse influence sur la laine. D'autres bergers, au contraire, quand l'hiver commence sous d'heureux auspices, et que

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d'après leurs opinions, souven superstiticuses, ils s'imaginent que le beau tems commencera de bonneheute, distribuent du fourrage avec surabondance. Alors, si l'hiver et le mauvais tems durent plus longtems qu'ils ne présumoient, le fourrage est un peu trop diminué. ils en deviennent avares, et le troupeau, au sortir de l'hiver, est conduit aux pâturages à demi-mort de faim et sans force. La disette qu'il éprouve dans ce cas-là, gâte la laine, et le plus beau tems du monde succède en vain à cet état, elle demeure toujours la même jusqu'à la tonte. Mais s'il arrive qu'aux premières sorties du troupeau, il y ait des froids humides et du mauvais tems, ce n'est

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plus la faine seule qui souffre; le troupeau manquant de force. est exposé à différentes espèces de maladies. La tonte contribue alors à les développer avec plus de force souvent elles attaquent le trou-s peau entier et le moindre inconvénient qui en résulte est la perte d'une partie de l'accroissement de la laine pour l'année suivante.

Mais si le troupeau a sa nourriture ordinaire, une nourriture bonne et suffisante, régulièrement tous les jours, jusqu'à ce qu'on puisse le mene aux champs. il demeure gai et vigoureux, et il tombe plus difficilement malade; les sucs nourricièrs de la laine circulent librement et avec abondance, et la laine elle-même, quand on ajoute la propreté à ces précautions, prend toutes les qualités d'une bonne

laine.

Je n'ai pas tardé à découvrir un autre abus dans l'économie de mon troupeau, abus qu'ane longue habitude a perpétué dans presque toutes les bergeries, et qui est aussi nuisible à la santé, des bêtes à laine qu'à la netteté de leur laine . puisqu'il les fait jeûner au milieu de l'abondance. En effet, dans ma bergerie, comme dans la plupart des autres, on avoit coutume de conserver le fourrage dans le haut de l'étable même, suspendu sur des perches, des planchers, etc. Les exhalaisons des animaux, de leurs excrémens, etc. s'attachoient au fourrage et lui donnoient un goût amer, répugnant et désa

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