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tenir l'étrier, conduire par la bride la haquénée blanche, telle étoit l'étiquette reçue, qui ne se trouve certainement ni dans l'évangile, ni dans les actes. des apôtres. Les empereurs s'humilioient pour dominer, et Frédéric tout fier qu'il étoit, s'y plia comme les autres. Toujours les Allemands vouloient être les maîtres en Italie; toujours les Italiens étoient tentés de céder à l'instinct de la liberté. Ils vouloient des papes italiens, nommés selon le vœu du peuple de Rome on leur opposoit une faction germanique; et après la mort d'Adrien, de ces deux factions il résulta encore deux papes, entre lesquels se partagèrent toutes les villes d'Italic.

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Frédéric appella révolte les efforts genéreux des Milanois. Il les vainquit, les réduisit en esclavage, et fit semer du sel sur les ruines de leur ville. Iltraita presque avec la même cruauté les autres principales villes, qui avoient, "youlu devenir libres. Il lui mouroit un pape il en faisoit nommer un autre : il en fit nommer trois pendant qu'Alexandre, III, competiteur du premier, se disoit toujours le seul chef des fidèles. Il fut enfin déclaré tel dans une espèce de congrès tenu à Venise. L'empereur qui avoit en tête d'autres entreprises le reconnut, lui baisa les pieds, lui tint l'étrier; et le sang cessa de couler; et alie fut pacifiée et Frédéric, qui avoit fait décider par les docteurs que c'étoit être hérétique que de ne pas le reconnoître pour le souverain du monde, partit pour les guerres des croisades, où il mourut pour s'être baigné dans un fleuve. bestod

Son fils ne vécut pas avec les papesen, beaucoup meilleure intelligence que lui. De grandes divisions éclatèrent en Allemagne, après, la mort de ce fils. le pape Innocent II sutten profiter- Sans épargner les excommunications, il ne s'y borna pas. Il obtint, par de bons diplômes le patrimoine de Saint-Pierre, i depuis si long-tems donné et contesté. La Romagne l'Ombrie, la Marche d'Ancone, Orbitelle Viterbe le reconnurent pour souverain: Rome enfin se courba sous l'autorité papale. Le sénat apprit à lui obéir:, on abolit les consuls; les évêques de Rome en de

vinrent les rois et se trouvèrent à la fin du 12°. siècle, revêtus d'un pouvoir qui les plaça, en dépit de l'humilité apostolique, au nombre des souverains tem porels, et des puissances politiques de l'Europe.

LE CURÉ GARDE NATIONAL.

Quelques personnes nous ont fait une sorte de reproche d'imprimer trop de lettres de nos souscrip teurs, et d'en imprimer de trop longues. Ces reproches sont injustes.

Il n'est aucune de ces lettres dont le sujet ne soit intéressant, aucune où il ne soit renfermé dans de justes bornes. Notre plume veille sur celle de nos correspondans, et ne laisse passer en général que ce qu'elle auroit écrit elle même,

Il étoit naturel que cette feuille devint un centre de lumière, où chacun se fit un plaisir d'apporter son rayon. Qu'importe, pourvu qu'il éclaire, de quelle part il est venu ?

Pourquoi refuser à des citoyens instruits, zélés pour le bien, et doués du talent d'écrire, la publicité qu'ils veulent donner à leurs idées ? n'en résulte t-il pas une variété piquante de matières et de styles ?

Un morceau de philosophie ou de morale usuelle, ou de critique ingénieuse, qui auroit quelque prix pour nos lecteurs si nous l'avions écrit nous-mêmes, l'a-t-il perdu parce qu'il est daté de Sacy, de Droyes,' oy de Boissise ?

Ce bon caté Parent sur tout nous écrit souvent, il est vrai, et beaucoup plus souvent encore que notre feuille ne le dit. Sa verve originale s'exerce sur toute sorte de sujets. S'il est quelquefois prolixe, ce n'est pas que son style soit traînant, c'est que son imagination est féconde, et qu'elle appelle toujours une foule d'idées accessoires autour de son idée principale.

On en dira ce qu'on voudra ; mais après s'être présenté sous tant de formes variées, le voilà qui s'offre encore en garde national. Ce costume lui sied à mer

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veille: on peut dire qu'il ne ressemble en rien à un soldat du pape; et nous ne devons pas craindre plusque lui de le faire passer en revue.

Que ne peuvons-nous voir tous ses confrères marcher eu ligne comme lui! engageons les à lire sa lettre, à peser ses raisons. Pourquoi ne l'imitercie itils pas s'ils sentent ne pouvoir lui répondre ?

Au citoyen GINGUENÉ.

SALUT.

Dès le moment de l'organisation de la garde natio nale de ma commune, je me fis enregistrer. Mes concitoyens le virent avec tant de plaisir qu'ils me surnommèrent Bonconseil; mais je crus devoir respecter certaines gens du dehors qui se mirent à crier à l'irreligion, comme si ce pouvoit être un acte d irreligion, dans un prêtre, de concourir à la défense des foyers de ses frères... Je ne fis donc pendant long-tems aucun acte de garde national à l'instar des bourgeois (1), et, à mon grand regret, toutes les fois que mon tour vint de monter la garde, je me fis remplacer moyenant finance.

Enfin cette année, j'ai secoué ce que j'appelle le joug de la sottise : je monte la garde à mon tour: je fais la patrouille j'ai même conduit dernièrement à la ville, et pendant la nuit, un citoyen qui avoit paru suspect à ma municipalité. J'étois alors armé de ma pique; car je suis simple piquier ... Or voici que j'entends de nouveau heurler contre moi, non pas mes propres concitoyens, ou paroissiens encore une fois, mais certaines personnes du dehors. Sur ce, voici une question que je vous propose à résoudre.

Un prêtre, un curé, un évêque doivent-ils, comme leurs concitoyens, faire toutes les fonctions de garde national ?,,

Si je n'étois pas partie dans cette affaire, voici de quelle manière je tâcherois de m'en titer.

(1) Je pense que ce mot bourgeois devroit être rayé de notre langue.

No. 2. Quatrième année,

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Ce n'est ni le prêtre, ni le curé, ni l'evêque qui est garde national, comme ce n'est, ni le vigneron qui l'ést, ni le laboureur, ni l'artisan. Le garde national est tout simplement un homme vraiment citoyen. Je regarde comme mauvais citoyen tout homme qui se fait remplacer par un autre, si non pour cause de grand âge, d'infirmités ou de maladie. Je n'estime pas même beaucoup celui qui remplace un homme qui, par cela même qu'il se fait remplacer sans nécessité absolue, me paroît un citoyen suspect. L'égalité veut que tous les Français soient gardes nationaux, ou qu'il n'y en ait aucun.... Tous les hommes doivent défendre toutes les femmes; il n'y a que les femmes à qui le port d'arme doive être interdit; or les prêtres ne sont pas femmes : ils le leur ont prouvé plus d'une fois.

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Mais si pendant que vous êtes de garde, on vous demande pour un malade ?- Vous allez voir qu'il sulfira que je sois de garde, ou en patrouille pour que tous mes paroissiens tombent malades, pour que toutes les femmes accouchent! Sur ce pied-là, je ne veux plus passer le seuil de ma porte: je ne veux plus même dire la messe, sur-tout la grandmesse; car pendant que je la dirai on peut avoir besoin de moi ailleurs. Mais quel est le citoyen à qui, dans son état, on ne puisse en dire autant? Faudra t-il pour être, garde national n'avoir absolument rien à faire ? N'aurons-nous plus pour gardiens de nos foyers que les désœuvrés et les oisifs? Le si est souvent l'arme des poltrons et quelquefois de pis encore.

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Mais l'église a horreur du sang! A la bonne heure voilà comme j'aime que l'on raisonne. Il est fâcheux cependant que cet axiome, tant rebattu ne se trouve pas dans l'évangile par qui donc a-t-il été fabriqué? Je sais bien qu'il est écrit que, celui qui se servira de l'épee, périra par l'épée; Mais de quelle épée s'agit-il ici? De l'épée des brigands, fussent-ils couronnés et même mitrés: quant à celle que la Loi nous confie pour leur résister, pour les chasser, je crois qu'aux yeux-même

de la religion, c'est un honneur et un devoir de la porter.

L'Eglise a horreur du sang! plût à Dieu que ces paroles fussent vraies nous n'aurions pas à gémir sur ces croisades insensées qui coutèrent à l'Europe plus de deux millions d'hommes les guerres de religion n'auroient jamais ensanglanté la nôtre jamais au delà des Monts on n'auroit vu de tribunaux d'inquisition, d'auto-da-fé, de château Saint-Ange, de prison du saint office.... jamais nous n'aurions' vu en France de Saint-Barthelemy, de dragonades, ni de guerre de la Vendée. L'église a horreur du sang! comment accorder ces paroles avec celles-ci qui ont dépeuplé le nouveau monde, crois ou meurs?

*

L'église a horreur du sang! si par le mot église vous entendez les seuls prêtres catholiques, vous injuriez tous les catholiques. D'ailleurs vous en imposez; car combien de prêtres catholiques dans votre armée catholique, par exemple? Si par le mot église vous entendez tous les catholiques, vous ouvrez tous les états catholiques au premier brigand qui voudra s'en emparér; vous injuriez tous ceux qui ne professent pas votre religion; enfin vous en imposez encore ; car, très-certainement, votre armée catholique n'est pas composée d'Anabatistes, de Luthériens, ni de Mahometans.

Votre ministère est un ministère de paix!- je le sais autant et plus que bien d'autres ; j'ajouterai même que je ne prononce jamais le mot paix sans être vivement attendri. Mais jusques à quand abusera-t-on des mots les plus saints? L'amour de la paix est-il donc incompatible avec le devoir de veiller à sa propre sûreté, à sa propre défense et à celle de ses concitoyens ? faut-il donc, par amour pour la paix, abandonner la terre aux brigands, quels qu'ils soient? faut-il se laisser piller, massacrer par eux? c'est la paix des esclaves, et celle que les tyrans et leurs satellites désirent. L'amour de la véritable paix ne connoît ni la pusillanimité ni la crainte ; il vous rendra courageux, actif, vigilant; la véritable paix est fondée sur la

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