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corde entre tous les hommes, bienveillance et fraternité universelle, voilà ce qu'il s'agit maintenant d'établir, et à quoi des Calendriers exclusivement attachés à une religion s'opposeront toujours, tandis qu'on voudra régler sur eux les divisions générales et particulières du tems, les actions publiques des citoyens et le cours des occupations civiles.

Le nouveau Calendrier n'exige rien de personne. Il est pour l'année entière ce que le cadran est pour la journée. Celui-ci marque les heures, l'autre les jours. Le cadran ne vous dit point ce que vous devez faires ou ne pas faire à dix heures ou à midi; mais il vous laisse parfaitement maître de déjeuner, de dîner, de faire tout ce qu'il vous plaît. La même heure qui sonne pour l'un l'angelus, sonne pour l'autre le bouteselle, ou l'audience d'un tribunal, ou un rendez-vous d'amour.

Autant en fait pour les jours notre Calendrier républicain. Il nous dit : vous voilà dans telle saison, dans tel mois, à tel jour du mois; du reste, pendant ce jour adorez Dieu à votre manière, fêtez un saint, labourez un champ, dansez, chassez, croisez-vous les bras, peu m'importe. Encore une fois, je ne suis là que pour vous dire le nombre des jours, comme le cadran vous dit le nombre des heures.

Il me semble qu'il y a trop de mauvaise humeur à se fâcher contre une invention aussi accommodante et qui se fait ainsi toute à tous.

CONVENTION NATIONALE. Conservation des monumens de la littérature et des arts. 4 de Brumaire. (25 octobre, vieux style.) Plusieurs décrets ont ordonné de faire disparoître des places publiques, des jardins, des chemins, des maisons, tant à l'extérieur que dans l'intérieur même, tous les signes de la royauté et de la féodalité.

Les patriotes éclairés se sont empressés d'exécuter

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à la rigueur, mais avec discernement ces décrets républicains; qu'ont fait l'ignorance et le faux zèle ? ils se sont mis à sabrer les tableaux, les statues, les médailles, les gravures précieuses, et même les livres. Il y avoit ici une couronne, là des fleurs de lys, ailleurs des armoiries ou des titres féodaux abolis par l'égalité : brisez, déchirez, biûlez tous ces monumens d'esclavage. Déja l'on avoit commencé ces exécutions barbares; et nos ennemis, jaloux de notre gloire littéraire, envieux de la supériorité que nous donnent nos sciences, nos arts, comme nos armes et notre courage, poussoient, excitoient à ce massacre des hommes ardens et irréfléchis.

Comme ces profanations ruineuses et deshonorantes se sont déja commises et pourroient se commettre encore dans les départemens, dans les campagnes, dans les bibliothèques, ou dans les cabinets et collections des ci-devant châteaux, il est important que l'on y connoisse le décret protecteur qu'a rendu la Convention nationale pour prévenir, suivant ses propres expressions, les écarts de l'ignorance et les entreprises de la cupidité et de la malveillance".

I. Il est défendu d'enlever, de détruire, mutiler ni altérer en aucune manière, sous prétexte de faire disparoître les sigues de féodalité ou de royauté, dans les bibliothèques, les collections, cabinets, musées publics ou particuliers, non plus que chez les artistes, ouvriers, libraires ou marchands, les livres imprimés ou manuscrits, les gravures et dessins, les tableaux (1), bas-reliefs, statues, médailles,

(1) Ce décret a été rendu trop tard pour Fontainebleau. On y a détruit un grand nombre de tableaux et d'autres objets irréparables. Parmi des tableaux du premier mérite qui étoient condamnés àu feu, il s'en trouvoit un de Philippe de Champagne, représentant un évêque en pied. La main étoit d'une beauté ravissante. Elle frappa un amateur des arts. I la coupa adroitement, comptant faire encadrer ce précieux débris. Quand l'évêque

vases, antiquités, cartes géographiques, plans, ide liefs, modèles, machines, instrumens et autres objets qui intéressent les arts, l'histoire et l'instruction.

II. Les monumens publics, transportables, inté-/ ressant les arts ou l'histoire, qui portent quelques. uns des signes proscrits, qu'on ne pourroit faire disparoître sans leur causer un dommage réel, ront transférés dans le Musée le plus voisin, pour y être conservés pour l'instruction nationale.

se

III. Les propriétaires de meubles ou ustensiles d'un usage journalier, sont tenus d'en faire disparoître tous les signes proscrits, sous peine de confiscation. Les objets de ce genre mis en vente sont exceptés, sans que la vente puisse én être retardée.

IV. Les objets indiqués dans les articles I et III qui auroient été enlevés chez quelques citoyens par une fausse application des loix précédentes, seront restitués dans le plus court délai,, sauf à poursuivre ensuite les propriétaires, s'ils ne se conforment pas sur le champ au présent décret.

V. Les objets déposés dans les Monts-de-Piété ou Lombards, chez les notaires, mis en sequestre ou sous le scellé, ne seront soumis à la recherche que lorsqu'ils seront remis dans les mains du proprié

taire.

Le reste du décret a rapport à la réimpression des anciens ouvrages et à l'impression des nouveaux, à la fabrique des papiers, à l'empreinte qui sera mise dorénavant sur les livres dans les bibliothèques nationales. Par-tout les signes féodaux sont proscrits, et remplacés par des signes républicains.

Le dernier article invite les sociétés populaires et tous les bons citoyens à mettre autant de zèle à faire détruire les signes proscrits sur les objets indiqués dans les décrets précédens et dans le présent décret, qu'à assurer la conservation des objets ci

fut porté au bûcher, les brûleurs s'apperçurent qu'il manquoit une main. Grande rumeur, graude recherche. On trouve enfin le coupable. La main est jettée au feu avec le reste; et l'imprudent amateur arrêté comme suspect.

dessus énoncés, comme intéressant essentiellement les arts, l'histoire et l'instruction.

Subsistances, approvisionnemens.

Supplément à la loi du MAXIMUM -11 de Brumaire 1. novembre.)

En examinant les réclamations qu'a excitées la loi du maximum, ou de la taxation des denrées de première nécessité, et la cause des embarras qu'éprouve son exécution, la Convention a reconnu deux, vices essentiels dans cette loi.

Le premier provient de la mollesse de quelques administrations, de la malveillance de plusieurs de l'intérêt qu'ont quelquefois les administrateurs à favoriser les gains excessifs et les opérations sourdes du commerce; il en est résulté la non-exécution presque générale d'une loi qui avoit été rendue comme urgente, et révolutionnaire.

Pour remédier à ce vice, on a d'une part fait entendre la voix du patriotisme aux administrateurs zélés et vigilans et de l'autre, on a stimulé les fonctionnaires publics indifférens ou intéressés par la crainte de la confiscation d'une partie de leurs biens.

Le second vice tient à l'insuffisance de la loi même du maximum. Elle a paru blesser la justice, en ne donnant aux marchands détaillans aucun dédommagement de leurs pertes; favoriser exclusivement le marchand en gros et les entrepreneurs de fabrique, aux dépens du fabricant ouvrier qui est presque toujours dans la classe du pauvre; enfin devoir appeller incessamment la disette au milieu de l'abondance, c'est-à-dire, épuiser les petites boutiques et ménager les grands magasins; fermer à la fois les unes et les autres, les petites par épuisement, les grandes par avarice et par intérêt.

Le maximum, pour obvier à ces inconvéniens, descendra désormais par degrés, du magasin des matières premières à la fabrique, de là au marchand en gros, et enfin au détaillant, en assurant à chacun

de ces degrés un bénéfice certain et modéré. C'est le moyen de bannir l'arbitraire des prix, et d'épurer le commerce du vice aristocratique et agioteur qui corrompt et le tourmente.

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La loi du maximum n'a atteint que les marchands détaillans et les fabricans ouvriers, sans frapper le marchand en gros et l'entrepreneur de fabrique. Elle n'a diminué que la fortune des citoyens peu riches ce sont eux seuls qui doivent être dédommagés: les autres ont eu les profits de l'agiotage et les grands bénéfices commerciaux.

Enfin la fixation du prix des denrées nécessaires doit avoir deux motifs; le premier, le hacheur du peuple et l'amélioration de so sort, le second, le gain légitime du travail et de l'industrie.

C'est ce double but que la Convention s'est proposée d'atteindre par son nouveau décrét.

Il sera fait incessamment, sous les yeux des commissaires nommés par la commission des subsistances et des approvisionnemens, un tableau portant, 1. le prix que chaque genre de marchandises comprises dans la loi du maximum, valoit dans le lieu de leur production ou fabrique en 1790 augmenté d'un tiers; 2o, cinq pour cent de benefice pour le marchand en gros; 3°. dix pour cent de bénéfice pour le marchand détaillant; 4o. un prix fixé par lieue pour le transport à raison de la distance de la fabrique.

Ces quatre bases formeront irrévocablement le prix de chacune des marchandises pour toute l'étendue de la République.

Il sera accordé une indemnité aux marchands et fabricans qui par l'effet de la loi du maximum, justiferont avoir perdu leur entière fortune, ou scront réduits à une fortune au-dessous de 10,000 livres de capital.

Les citoyens qui se trouveront dans le cas d'obtenir cette indemnité, présenteront leurs pétitions aux chefs-lieux de district, pour y être statue d'après les bases qui scront fixées incessamment. Cette indemnité sera payée par le trésor public.

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