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Bien plus, la loi admet en cette circonstance une opposition à la sortie. Elle rend donc ici encore la libération plus difficile, toujours sous prétexte que la personne libérée pourrait faire tort à autrui. Avons-nous besoin de répéter que, de par le droit naturel comme aussi de par la Constitution, c'est la liberté qui doit être garantie avant tout? Partout où elle est en cause, les prétextes doivent être écartés sans rémission.

L'opposition, quand elle se présente, à qui sera-t-elle déférée? Nous avons vu que l'interné, comme toute autre personne intéressée, peut se pourvoir auprès du président du tribunal de première instance, et en appel, auprès du président de la Cour d'appel, -pour obtenir sa libération.

Il semble, dès lors, que l'opposition à la sortie dût être portée aussi devant les magistrats prérappelés, et que ces derniers eussent à en saisir les chambres du conseil. Eh bien, non! Cette fois, c'est la Députation permanente du conseil de la province dans laquelle l'établissement est situé, qui est saisie et est appelée à statuer. Il y a là manque de concordance et manque de logique. Les questions se

rattachant à la liberté individuelle ne sont pas au surplus du domaine de l'administration; elles relèvent avant tout de l'autorité judiciaire.

Nous voudrions voir écarter toute possibilité de faire opposition à la sortie. La disposition se trouvât-elle maintenue, il faudrait décharger la Députation permanente d'une mission qui n'est pas la sienne.

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$3. La loi a établi des règles également pour la surveillance des établissements d'aliénés. Les mesures auxquelles elle s'est arrêtée, sont la surveillance par certains magistrats et certains fonctionnaires et l'inspection par des comités permanents.

Il y a d'abord des fonctionnaires spécialement délégués à cet effet. Ces agents visitent les institutions quand le Gouvernement le juge convenir. D'après le règlement, il y a un inspecteur nommé par arrêté royal et des commissaires spéciaux, que le Ministre de la Justice peut désigner comme il l'entend.

Mais les visites de l'inspection sont peu fréquentes et, dans la situation actuelle, si elles exercent un effet heureux sur l'organisation.

générale de l'établissement peut-être, elles peuvent rarement amener l'élargissement d'une personne déterminée. Les fonctionnaires naturellement sont influencés par les déclarations des médecins et ne prêtent qu'une oreille distraite aux déclarations des intéressés.

Le législateur a également constitué des comités permanents d'inspection. Les membres des comités ont des réunions et visitent les établissements à des moments déterminés. Ils consignent leurs observations, le cas échéant, sur le registre de l'établissement et font rapport annuellement au Gouvernement. La loi veut aussi que, tous les six mois, il y ait une visite du bourgmestre de la commune. Tous les trois mois, le procureur du Roi de l'arrondissement passe dans l'établissement à son tour. Tous les ans, le Gouverneur de la province ou un membre de la Députation permanente ou du conseil provincial délégué par le Gouverneur, visite aussi l'établissement.

Des asiles provisoires et de passage sont inspectés une fois au moins par trimestre par le bourgmestre de la commune dans laquelle ils sont situés et par le Juge de paix du canton.

Bien que le contrôle et la surveillance exer

cés dans ces conditions n'exercent pas toujours les résultats attendus, nous pensons qu'ils ont un effet très utile toujours et qu'ils doivent être maintenus, quel que soit le régime adopté, quelles que soient les dispositions votées pour le reste par le législateur.

Le Gouvernement a mission aussi de présenter, tous les trois ans, aux Chambres législatives un rapport sur la situation des établissements d'aliénés du royaume. L'attention du Parlement est ainsi éveillée, les interpellations peuvent venir si on les juge utiles, les discussions peuvent être entamées dans les plus larges conditions et les modifications reconnues utiles peuvent être provoquées, si on l'entend convenir.

Le Gouvernement donne aussi des instructions selon les circonstances. C'est ainsi que nous en trouvons un grand nombre dans le recueil des circulaires du Ministère de la Justice. A la date du 13 septembre 1873 notamment, M. le Ministre de la Justice faisait observer que l'inspection ne se faisait pas toute la régularité désirable, et que certaines autorités s'abstenaient même complètement de faire les visites que la loi prescrit. Il ajoutait

avec

que, en négligeant d'accomplir leur mission, ces autorités manquaient à leurs devoirs et se rendaient complices du défaut de soins donnés aux malades, ainsi que des abus qui pouvaient se commettre dans les établissements.

On le voit, le Gouvernement n'hésite pas, quand il le faut, à rappeler chacun à son devoir, et tient la main, autant que possible, à l'observation des dispositions tutélaires de la loi. Malheureusement, le résultat désirable ne peut pas toujours être atteint, et en l'absence du droit pour les personnes en cause de réunir tous les éléments qui leur sont utiles, de se faire assister régulièrement d'un conseil et de faire appel à l'intervention de la Justice avec toutes ses garanties, bien des abus se commettent encore et parfois ne sont pas redressés.

L'interné conserve, il est vrai, le droit d'adresser des requêtes et des réclamations tant à l'autorité administrative qu'à l'autorité judiciaire. Les réclamations ne peuvent être supprimées ni retenues. Il leur est permis ainsi, dans une certaine mesure, de faire appel à tous les concours et de provoquer les interventions utiles.

Seulement celui qui réclame n'est pas tou

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