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XIII

La Liberté individuelle

et la Liberté d'enseignement

La liberté individuelle n'existe pas sans la liberté des opinions, sans la liberté aussi de les répandre de toutes façons. Que ce soit par la parole, que ce soit par la presse, que ce soit par l'enseignement, le droit doit être le plus large et le plus entier.

De tout temps, l'enseignement a rénové le monde. C'est par lui que les notions saines et fortes ont successivement pénétré partout, que les progrès ont fait leur chemin, que l'humanité a gagné en civilisation, en améliorations de tous genres, en avantages innombrables.

Quand Socrate se promenait dans les rues. d'Athènes et qu'il y répandait ses idées sur la morale, sur la société, sur la Divinité, tout le

monde l'écoutait avec ravissement et recueillait avidement ses leçons. C'était la liberté dans son action, qui devait donner au monde et a répandu partout, tant et de si grandes leçons. Quand Platon dans l'académie enseignait le beau, le vrai et le bien, chacun se sentait devenir meilleur et comprenait mieux le prix de la liberté. C'est grâce à elle et malgré des entraves passagères, que les doctrines du Christ se sont répandues sur la terre. C'est grâce à elle que la philosophie a répandu ses enseignements. C'est grâce à elle encore que les principes proclamés par la révolution ont pu s'introduire partout, et que l'homme a mieux senti sa valeur et mieux apprécié ses devoirs et ses droits.

Donnez-moi, disait un philosophe, l'enseignement et je renouvellerai la face de la terre. C'est que l'instruction, s'emparant des esprits, leur donne les notions dont ils ont besoin et fait des hommes à peu près ce qu'elle veut. Si l'Etat seul était maître de l'école, il formerait à peu près les hommes comme il voudrait, leur donnerait les idées qui lui plairaient, règlerait tout comme il l'entendrait; la science serait ce que l'Etat voudrait, la philosophie, la religion même se façonneraient, dans une certaine

mesure, sur les règles qu'il édicterait. Alors plus de liberté de penser, plus de large envolée, plus de notions nouvelles dans quelque domaine que ce soit; tous les hommes sortiraient comme d'un moule unique et, perdant l'avantage de l'examen des doctrines et des idées, se trouveraient presque au même niveau.

L'enseignement de l'Etat est une excellente chose. Les ressources, dont il dispose, lui permettent bien des efforts, que l'enseignement libre souvent ne peut pas s'imposer. A l'université, dans les établissements d'instruction moyenne, dans les institutions d'enseignement primaire, il peut introduire les meilleures méthodes, il peut à pleines mains répandre les meilleures doctrines.

Mais tout ceci à une condition, c'est qu'il ne s'exerce pas seul et qu'il ne puisse pas tout faire disparaître devant lui. L'enseignement libre donne, lui, et répand les idées qui lui plaisent, les notions qui lui semblent les meilleures, les leçons qui lui paraissent les plus convenables. L'enseignement libre s'exerce comme il l'entend. Dans le domaine de la science, des lettres et des arts, il prend les doctrines qui lui conviennent et les sème autour de lui.

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