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1° Huissier.

2o Huissier.

COUR DE CASSATION.

Dommages-intérêts. Compétence.
Responsabilité. — Saisie.

3o Jugement. Motifs. - Condamnation.

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Faute.

Une Cour royale régulièrement saisie d'un procès sur l'exécution d'un de ses arrêts, peut-elle connaître d'un recours en garantie formé devant elle par l'une des parties contre un huissier, à l'occasion de ce procès? (Décr. 14 juin 1813, 73; C. P. C., 464.) (1)

L'huissier est-il responsable des faits et de la solvabilité du gardien qu'il a établi, ou seulement de ses fautes personnelles? (C. C. 1962; C. P. C., 591 et 959.) (2).

Est nul, pour défaut de motifs, l'arrêt qui condamne un huissier à garantir le saisissant des condamnations en restitution accordées au saisi, sans motiver le rejet des conclusions de l'huissier qui tendaient à faire déclarer non recevable et mal fondée l'action récursoire du saisissant. (L. 20 avril 1810, 7; Décr. 14 juin 1813, 73; C. C., 1382 et 1982.)

(Mercier C. Dieutre.)

En 1838, l'huissier Mercier fut chargé par Me Dieutre, avoué à la Cour royale de Rouen, d'exécuter une condamnation de dépens qu'il avait obtenue contre la dame Bourgois.

Une saisie-exécution et une saisie-brandon furent pratiquées : la partie saisie n'offrant pas de gardiens, l'huissier dut en constituer deux. Quelques récoltes furent vendues; certains objets s'égarèrent.

Demande en nullité de poursuites par la dame Bourgois, en ce que les objets saisis étaient dotaux et inaliénables. 15 fév. 1839, jugement qui repousse cette demande. 12 mars suivant, arrêt qui l'accueille, sans ordonner aucune restitution.

En cet état, la dame Bourgois, procédant à fin d'exécution de l'arrêt confirmatif, a assigné Me Dieutre devant la Cour royale, pour voir ordonner, sous contrainte de 3,000 fr., qu'il remettrait à la demanderesse: 1° les objets saisis, dont quelques-uns avaient disparu; 2° les clefs, emportées par l'huissier ou le gardien; 3o le prix de la vente des récoltes, touché par l'huissier.

En vertu de permission sur requête, Me Dieutre a assigné l'huissier Mercier devant la Cour, pour prendre son fait et cause. Procédant de même, l'huissier a appelé en garantie les

(1) L'incompétence est certaine (Bourges, 22 déc. 1828; J.Av., t. 36, p. 85; Boncenne, t.3, p. 409); mais elle a besoin d'être proposée (Rej. 20 juill.1830; J.Av., t. 39, p. 192).

(2) La jurisprudence limite la responsabilité aux cas de faute ou négligence grave de la part de l'huissier: V. les arrêts cités par Chauveau sur Carré, Lois de la Procédure civile, t. 4, p. 727, Quest. 2052 bis.

deux gardiens, et néanmoins, il a conclu à ce que l'action récur soire de Me Dieutre fût jugée non recevable et mal fondée.

Après arrêt de défaut profit-joint, suivi de réassignation, la Cour royale de Rouen a statué en ces termes, par arrêt du 3 août 1840:

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Vu l'arrêt du 12 mars 1839;-Vu le procès-verbal de récolement du 13 juin 1839;- Attendu que la saisie pratiquée par Me Dieutre sur les effets mobiliers et dotaux de la veuve Bourgois, a été annulée par l'arrêt susénoncé; - Attendu qu'une partie des objets saisis n'a pu être représentée lors du procès-verbal de récolement, soit que ces objets soient restés à la disposition de l'huissier, soient qu'ils aient été divertis par les gardiens.

« Attendu que le créancier saisissant est responsable de la conduite et de la solvabilité de l'huissier qu'il a requis, sauf son recours contre les gardiens; Attendu qu'il est dû des dommages-intérêts à la dame Bourgois, soit à cause de la vente prématurée de certaines récoltes, soit à raison de la perte ou détérioration de divers objets reportés dans un lieu humide.

«La Cour, condamne Me Dieutre sous une contrainte de 300 francs sauf à augmenter, à remettre, 1° les objets mobiliers manquant et désignés au procès-verbal de récolement; 2° les clefs de plusieurs portes et armoires, dont l'huissier ou le gardien se sont emparés; 3° 50 fr. en numéraire, une pièce d'or de Westphalie de 40 fr., une autre d'une valeur de 20 fr., une montre en or; 4° enfin le prix provenu de la vente des fruits à laquelle l'huissier de Me Dieutre a procédé; - Condamne ledit Me Dieutre en 200 fr. de dommages-intérêts envers la dame Bourgois, et aux dépens; Et statuant sur l'action en recours dudit Me Dieutre contre Mercier, lui accorde contre ce dernier recours et récompense de toutes les condamnations ci-dessus; dit et juge qu'elles recevront exécution par la voie de la contrainte par corps, en principal, frais et dommages-intérêts; -Donne défaut, faute de conclure, contre Billard et Guérinière, gardiens; en conséquence, accordé à Mercier recours et récompense des condamnations ci-dessus prononcées, avec dépens, dont distraction... >>

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Pourvoi par l'huissier Mercier.

Le premier moyen de cassation proposé était une violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué n'avait nullement motivé le rejet des conclusions prises contre l'action récursoire de Me Dieutre.

Pour établir que le défaut de motifs renfermait une violation implicite des principes sur la compétence et sur la responsabilité par rapport aux huissiers, nous avons dit :

Les huissiers ne sont justiciables que du tribunal de première instance du lieu de leur résidence, pour les faits relatifs à leurs fonctions. (Décr. 14 juin 1813, art. 73.) Ils ne peuvent être ap

pelés de plano devant une Cour royale, alors même qu'elle est régulièrement saisie quant aux autres parties: c'est ici surtout qu'on doit dire, avec M. Henrion de Pansey, que la juridiction des Cours royales n'est pas immédiate (de l'autorité judiciaire, chap. 29), et avec M. Bonconne, que les appels sont la matière de la compétence des Cours royales, que par conséquent, il y a incompétence matérielle, absolue, toutes les fois qu'elles retiennent et jugent, hors les cas d'exception écrits dans la loi, des affaires qui appartiennent au juge du premier degré (t. 3, p. 413). La fin de non-recevoir proposée par l'huissier Mercier devant la Cour royale de Rouen, reposait sur le privilége de juridiction conféré aux huissiers par le décret de 1813, comme sur la règle des deux degrés de juridiction, établie pour tous les justiciables: en la repoussant sans motifs exprimés, l'arrêt a doublement méconnu les règles de compétence, en même temps qu'il a commis un vice de forme.

Relativement à la responsabilité, des motifs étaient d'autant plus nécessaires, que l'huissier Mercier la repoussait par ses conclusions, et que les principes étaient pour lui. En principe, l'huissier n'est pas responsable de la solvabilité ou des fautes personnelles du gardien par lui préposé à la saisie, puisque la loi l'oblige à en établir un. (Voy. art. 1962, C. C.; 596 et 597, C. P. C.) La responsabilité ne pèse sur lui qu'autant qu'il y a faute de sa part, soit connivence ou fraude, soit au moins négligence grave. (Rej. avril 1827; Cass. 24 avril 1833 et 25 janv. 1836.) Il faut donc une appréciation du juge, et une constatation expresse dans la décision. Or, l'arrêt attaqué ne donne aucun motif qui impute au demandeur une faute quelconque ; et l'absence de faute résulterait plutôt de la condamnation récursoire prononcée à son profit contre les gardiens.

ARRÊT.

LA COUR; Vu l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810;

Attendu que les conclusions principales de Mercier, devant la Cour royale, tendaient à ce que la demande en garantie contre lui formée par Dieutre, fut déclarée non recevable et mal fondée;

Attendu que tous les motifs de l'arrêt attaqué ont pour but de justifier les condamnations prononcées au profit de la dame Bourgois contre Dieutre; mais qu'aucun de ces motifs n'est applicable à l'action en garantie dirigée contre le demandeur en cassation; qu'en effet, la Cour royale se place dans la double hypothèse de fautes, ou de l'huissier, ou des gardiens, sans spécifier celle de ces hypothèses à laquelle elle s'arrête;

Que des motifs de l'arrêt attaqué, on ne saurait induire que les faits motivant la condamnation du créancier saisissant, soient en tout ou en partie imputables à l'huissier personnellement;

Que cette induction est d'autant moins possible qu'elle serait peu conciliable avec le recours, non partiel, mais intégral, accordé par l'arrêt à l'huissier contre les gardiens;

Attendu, d'un autre côté, que l'arrêt attaqué n'explique en aucune manière sur quel motif, il se fonde pour déclarer l'huissier responsable des gardiens par lui établis;

D'où il suit qu'en condamnant le demandeur en cassation à garantir Dieutre des condamnations prononcées contre celui-ci, sans donner aucun motif applicable à cette garantie, l'arrêt attaqué est vicié de nullité aux termes de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810;

Sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens de cassation; CASSE.

Du 6 nov. 1843.-Ch. civ.

COUR ROYALE DE RIOM.

Renvoi à un autre tribunal. Requête. Opposition.

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Lorsque le tribunal, appelé à connaître d'une affaire, a consaté par procès-verbal régulier l'impossibilité de se constituer, la Cour royale peut, sur simple requête présentée par la partie la plus diligente et sans assignation, commettre un autre tribunal (1).

(Veschambes C. Rey et Vallette.)

Un procès-verbal dressé par le tribunal de Mauriac ayant constaté qu'un seul juge pouvait connaître d'une instance en partage introduite devant lui, les héritiers Veschambes, demandeurs, ont présenté requête à la Cour de Riom, afin de désignation d'un autre tribunal. En vertu d'un arrêt désignant le tribunal d'Aurillac, les demandeurs ont assigné leurs adversaires devant ce tribunal, pour procéder sur l'instance. Jugement par défaut. Opposition à ce jugement; opposition à l'arrêt qui avait désigné le tribunal de renvoi.

ARRÊT.

<«< Attendu que lorsque les causes de la demande en renvoi ont été avouées ou justifiées par le tribunal de première instance, le renvoi doit être fait devant l'un des autres tribunaux ressortissant de la même Cour. (art. 373 C. P. C.):

<«< Attendu que la loi n'ajoute pas que les parties seront assignées pour voir prononcer sur la demande en renvoi portée devant la Cour qui doit apprécier les motifs par lesquels les premiers juges ont déclaré ne pouvoir se composer, pour juger la contestation qui leur était déférée;

« Attendu que la loi, en n'ordonnant pas d'assigner les parties pour voir prononcer le renvoi, a pu avoir pour objet de ne pas établir un débat entre les juges et les parties; qu'elle

<<< Attendu

a montré confiance entière aux magistrats et que le ministère du juge supérieur, d'après les réponses des tribunaux,

(1) La régularité de ce mode de procéder est fort contestable: V. Chauveau sur Carré, Lois de la Procédure civile, t. 3, p. 324 et 325, sur les art. 372 et 373, C. P. C.

n'a eu qu'à déterminer le tribunal auquel la cause serait renvoyée ; « Attendu que le cas du règlement de juges ne peut être assimilé au cas de renvoi; le cas de règlement de juges n'étant relatif qu'à un différend qui est porté devant deux ou plusieurs tribunaux, les parties peuvent contester sur le règlement de juges sans qu'il y ait rien de personnel aux magistrats, et sans que leurs déclarations puissent être attaquées;

<< Attendu que l'usage par la Cour de prononcer en matière de renvoi sur simple requête à elle présentée, non communiquée et non signifiée aux parties, a été constamment suivi, et qu'il n'est pas démontré que cet usage soit contraire à la loi ;

<< Attendu que l'arrêt du 3 juin 1843, qui a ordonné le renvoi au tribunal d'Aurillac, est fondé sur le procès-verbal du 10 mai précédent, duquel il résulte que le tribunal de Mauriac n'a pu légalement

se composer;

« Attendu que d'après les motifs ci-dessus, l'opposition audit arrêt, formée par les parties de Rouher, ne saurait être accueillie;

«Par ces motifs,

«La Cour, sans avoir égard et sans s'arrêter aux moyens de forme qui ont été proposés par les parties de Rouher, et qui sont rejetés, ordonne que l'arrêt du 3 juin 1843 sera exécuté suivant sa forme et teneur, condamne lesdites parties de Rouher aux dépens. Du 22 déc. 1843.-2e ch.

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COUR DE CASSATION.

Arbitrage. Nomination d'office.-Arbitre nommé.

Lorsque l'un des associés, entre lesquels il y a arbitrage forcé, a notifié à son adversaire le choix par lui fait d'un arbitre, le tribunal de commerce est sans pouvoir pour faire une nomination d'office. (C. Comm., 55.)

(Laurey C. Caulet.)

Une contestation survenue entre les sieurs Caulet et Laurey, associés, était soumise à la décision de deux arbitres, qui avaient commencé leurs opérations. Un tiers arbitre devenait nécessaire. L'arbitre du sieur Laurey refusant de concourir à sa nomination, elle eut lieu d'office, par jugement du tribunal de commerce de la Seine; et, ce même arbitre s'étant déporté avant que le tiers arbitre eût conféré avec lui, le sieur Laurey nomma, à sa place, le sieur Pommier, dont il signifia la désignation par acte extrajudiciaire du 17 oct. 1839.

Néanmoins, Caulet assigna Laurey devant le tribunal de commerce, par exploit du 22 oct., pour voir nommer d'office deux arbitres. La nomination demandée fut prononcée par défaut contre Laurey, et les arbitres procédèrent par défaut. Op

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