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Que cette mesure avait pour but d'obtenir de Grenouilloux des déclarations sur le fait de savoir si deux créanciers produisant à l'ordre n'avaient pas été par lui antérieurement désintéressés sur le prix de la terre de Neuville, qu'il avait précédemment achetée du même individu; Que des conclusions à fin de subrogation étaient même prises contre Grenouilloux ; qu'ainsi, la mise en cause devenait réellement un incident dans l'ordre, et que le jugement qui l'ordonnait devait être frappé d'appel dans les dix jours de la signification à avoué, aux termes de l'art. 763, C. P. C.;

Considérant, en fait, que le jugement dont est appel a été signifié à avoué le 19 août 1842, et que ce n'est que le 10 nov. suivant que le sieur Grenouilloux en a interjeté appel; d'où il suit que cet appel est non recevable;

Par ces motifs, la Cour DÉCLARE l'appel de Grenouilloux non recevable, etc.

Du 2 août 1843.-Ch. civ.

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COUR ROYALE D'AIX.

Reprise d'instance.-Délai.-Prorogation.-Décès. - Ayant cause.

Notification.

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La prorogation de six mois accordée par l'art. 397 C. P. C., pour les cas où il y a lieu à demande en reprise d'instance, s'applique au cas où l'une des parties en cause est décédée, la cause n'étant pas en état; et ce, encore bien que le décès n'ait pas été notifié à l'adversaire (1). Cette prorogation de délai est dictée autant dans l'intérêt de la partie survivante que dans celui des représentants de la partie décédée (2).

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(N. C. N.) — ARRÊT.

LA COUR ;-Attendu que l'art. 397, C. P. C., ne fait aucune distinction, et qu'en accordant une prorogation de délai dans les cas qu'il prévoit, il le fait dans l'intérêt de toutes les parties; qu'il répugne à la raison et à l'équité de faire, contre le texte de la loi, une distinction dont le résultat serait de priver une partie, ou ses hérititiers, du droit de se prévaloir d'une circonstance, d'un fait constant au procès, dont l'autre partie ou ses héritiers pourraient cependant se prévaloir ;-Que, dans la lettre comme dans l'esprit de la loi, il y a donc lieu à reprise d'instance, et, par conséquent, à augmentation de délai, toutes les fois que la cause n'étant pas en état, se réalise le décès d'une des parties;

(1) Conf., Lyon, 10 mai 1817 (J.Av., t.18. p.483):- Poitiers, 22 janv. 1823 (J.Av., t.38, p. 218); Metz, 12 avril 1826 (J.Av., t.37, p. 58); Bordeaux, 11 août 1828 (J.Av., t.37, p. 199). Contrà, Caen, 17 janv. 1828 (J.Av., t. 38, p.215); Dijon, 26 mai 1830 (J.Av., t.40, p.290.) V. aussi Chauveau sur Carré, Lois de la Procédure civile, Quest. 1423 bis.

(2) Conf., Cass., 2 avril 1823 (J.Av., t. 25, p 116), et Chauveau sur Carré, Quest. 1425.)-Contră, Rejet, 12 juill. 1810 (J.Av., t. 18, p. 424), et Paris, 1er juill. 1812. (J.Av., t.18, p.479.)

LXVI.

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que, du défaut de notification du décès, il résulte seulement la conséquence sans préjudice de l'augmentation de délai, que les procédures faites depuis le décès ignoré ou non notifié, sont valables, ce qui n'exclut pas, pour les héritiers de la partie décédée, la nécessité de la reprise d'instance, ni pour l'autre partie, nonobstant la non-notification du décès constant d'ailleurs, la faculté de cette reprise, laquelle faculté, le décès étant connu quoique non notifié, n'est pas incompatible avec celle de faire valablement des actes de procédure, dans l'ignorance du décès;-Par ces motifs, etc.

Du 11 mai 1843.

COUR ROYALE DE BOURGES.

Compétence commerciale.-Négociant.-Ouvrier.

Les travaux faits par un ouvrier, dans l'intérêt de l'usine d'un commerçant, donnent lieu à une action commerciale contre celui-ci (1).

(Belon de Chassy C. Gaulon).-ARRÊT.

LA COUR ;-Considérant que Belon de Chassy est directeur et associé dans une entreprise de commerce; que les travaux faits par Gaulon l'ont été dans l'intérêt de l'usine et pour la mettre à même de remplir sa destination; qu'ainsi c'est avec raison qu'il a porté sa demande en paiement devant le tribunal commercial et que celui-ci s'est déclaré compétent;

DIT qu'il a été bien et compétemment jugé; -ORDONNE l'exécution du jugement de première instance.

Du 22 août 1843.-1re ch.

COUR DE CASSATION.

Péremption d'instance.-Actes interruptifs. -Transaction.

La péremption d'instance repose sur l'abandon présumé d'un droit, présomption qui résulte d'un silence prolongé pendant plus de trois ans. Par suite, tout acte qui dément nécessairement cette présomption est interruptif de la péremption (2).

La transaction intervenue entre deux parties interrompt. la péremption (3).

(Commune de Vindefontaine C. commune des Moitiers.) Un litige existait entre la commune de Vindefontaine et la

(1) Contrà, Rouen, 20 mars 1844, suprà, p. 311.

(2 et 3) Arrêt anal., Lyon, 17 janv. 1844, et nos observations (suprà, p. 242.)

commune des Moitiers, relativement à la propriété d'une lande. -Par un premier jugement, le tribunal de Valogne avait attribué à la commune de Vindefontaine la propriété exclusive de cette lande.Appel par la commune des Moitiers.-Plus de trois ans s'étant écoulés sans poursuites, une demande en péremption est formée, laquelle est elle-même déclarée périmée par un arrêt qui fait revivre l'appel. - Conciliation et transaction entre les deux communes, qui conviennent de jouir en commun de la lande disputée. Cette transaction, non-revêtue des formalités nécessaires à sa validité, fut cependant exécutée. Dix ans plus tard, la commune de Vindefontaine renouvelle sa demande en péremption. La commune des Moitiers oppose la transaction et l'exécution qui en a été la suite.—Arrêt de la Cour de Caen, du 14 avril 1842, qui rejette la demande en péremption.

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Pourvoi en cassation. -On soutient que la transaction intervenue entre les communes litigantes n'a pu interrompre la péremption, parce que la loi n'attache cet effet qu'à des actes valables, et que les communes ont agi en dehors des conditions exigées par la loi pour donner la validité nécessaire à leurs actes.

Nous extrayons le passage suivant du rapport de M. le conseiller Mestadier: «La jouissance durait depuis plusieurs années: la commune défenderesse était donc en pleine sécurité et de bonne foi. Que la demande en nullité de la transaction eût été formée, c'était un droit loyalement exercé; mais, sans réclamer contre la transaction, agir en péremption, c'était vouloir faire punir la commune coïntéressée d'un silence gardé de part et d'autre sur un acte réciproquement respecté, réciproquement exécuté. La justice peut-elle être forcée d'admettre un système dont le résultat pourrait être de faire perdre un droit légitime sans examen, sans discussion, sans jugement?... La péremption n'a d'autre base que la présomption de l'abandon de son droit, que la loi fait résulter d'un silence prolongé pendant plus de trois ans; c'est un désistement tacite et légalement assimilé à un désistement formel. Mais, lorsque les faits de la cause sont exclusifs de cette présomption, il n'y a plus de péremption possible. Ainsi point de péremption s'il y a eu convention réciproque, écrite ou non, de laisser l'instance suspendue : c'est ce qu'a jugé la Cour de Rouen, le 5 juill. 1828; point de péremption si le procès a été volontairement terminée, quoiqu'un acte valable n'ait pas sanctionné l'accord des parties, si cet accord est constant, et qu'il ait d'ailleurs été exécuté; point de péremption, si, plaidant sur un immeuble, les parties sont convenues d'une jouissance commune, et que cette jouissance ait eu lieu en abandonnant le procès. En un mot et en général, la justice doit conformer ses arrêts à l'essence et à la nature des choses; elle ne doit jamais permettre le triomphe de la fraude lorsqu'elle est reconnue, et admettre la présomption de l'abandon d'un droit

lorsque le fait contraire est constant entre les parties litigantes.
A la vérité, l'art. 399, C. P. C., dit que la péremption se cou-
vrira par des actes valables; mais il ne dit pas qu'elle ne pourra
pas se couvrir autrement, en dehors des actes de la procédure,
notamment par la conduite constante et avouée des deux parties.
Les termes de l'article sont extrêmement vagues; et d'ailleurs
l'article dit : «La péremption se couvrira par des actes valables
<< faits par l'une ou l'autre des parties, » ce qui prouve que la
pensée du législateur n'a pas été au delà d'un acte personnel à
l'une des parties, tel qu'un acte de procédure et autres actes
analogues, sans prévoir la variété possible des actes et des faits
exclusifs de toute présomption de l'abandon du droit, sans pré-
voir la variété possible des faits résultant de la volonté des deux
parties et des conséquences qui en résultent. - Deux arrêts sont
invoqués à l'appui du pourvoi (31 janv. 1837 et 26 avril 1842).–
Au premier aperçu, l'espèce de l'arrêt de 1837 semble avoir de
l'analogie avec l'espèce actuelle, en ce que c'était une commune
qui avait renoncé au bénéfice d'un jugement sans remplir les
formalités légales; mais la Cour royale, appréciant les faits dans
un sens tout à fait contraire à l'espèce actuelle, avait considéré
que la délibération invoquée n'existait pas en forme probante,
qu'elle n'avait pas même été transcrite sur les registres, et que
d'ailleurs elle n'avait pas reçu d'exécution; elle avait admis la
péremption, appréciant, comme dit l'arrêt de rejet, les actes
présentés tant dans la forme qu'au fond. - Dans le deuxième, il
s'agissait d'une transcription faite par le mari sur un immeuble
de la femme sans son concours. L'exception de péremption
avait été admise, et l'arrêt de rejet semble consacrer plus expli-
citement encore que le précédent, l'abandon à l'appréciation des
Cours royales des conséquences d'un acte ou d'un fait commun
aux deux parties sur la péremption en dehors des actes de la
procédure.

--

Le rejet est motivé sur ce que, dans l'appréciation des faits
et du projet de transaction, la Cour royale s'est renfermée dans
les limites de ses attributions. La doctrine du caractère non
restrictif de l'art. 399 est professée par plusieurs auteurs. Elle
résulte aussi d'un arrêt du 29 mai 1832, et elle a été littéralement
consacrée par l'arrêt du 8 mars 1831 relativement aux consé-
quences d'une séparation volontaire sur une instance en sépara-
tion de corps suspendue par des accords et des faits communs,
et également imputables aux deux parties. Ne penserez-vous
pas qu'il y ait analogie parfaite avec l'espèce actuelle ? >>

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ARRÊT.

par

la

LA COUR; Attendu qu'il a été reconnu et constaté en fait
Cour royale de Caen, qu'après avoir plaidé pendant dix sept ans sur la
jouissance d'une lande, les deux communes de Vindefontaine et des
Moitiers convinrent par une transaction de jouir en commun, et de ter-

miner ainsi le procès; qu'à la vérité, toutes les formalités voulues par la loi ne furent pas accomplies, mais que chaque commune retira ses pièces, et que le procès fut considéré de part et d'autre, comme terminé; que la jouissance commune eut lieu et se prolongea pendant plusieurs années;

Attendu qu'au lieu d'agir en nullité de la transaction, comme c'était son droit, la commune de Vindefontaine agit en péremption d'in

stance;

Attendu, en droit, que la péremption n'a d'autre base que la présomption de l'abandon de son droit, que la loi fait résulter d'un silence prolongé pendant plus de trois ans : c'est un désistement tacite et légalement assimilé à un désistement formel; d'où il résulte que si les faits de la cause sont exclusifs de cette présomption, il n'y a plus de péremption possible, la justice ne devant jamais permettre le triomphe de la fraude, lorsqu'elle est reconnue, ni admettre la présomption de l'abandon d'un droit lorsque le fait contraire est constant entre les parties litigantes;

Attendu qu'en disant, par l'art. 399, C. P. C., que la péremption d'instance se couvrira par des actes valables faits par l'une ou l'autre des parties avant la demande en péremption, le législateur n'a pas porté sa pensée au delà d'un acte personnel à l'une des parties, tel qu'un acte de procédure et autres actes analogues; il n'a pas dit que la péremption ne pourrait pas se couvrir autrement, en dehors des actes de la procédure; il n'a pas statué sur la variété possible des actes et des faits exclusifs de toute présomption de l'abandon du droit; il n'a pas prévu la variété possible des faits résultant de la volonté des deux parties, et des conséquences de ces faits relativement à la péremption; Attendu, dès lors, que la Cour royale a fait, dans l'espèce, une juste application des principes sur la péremption;-REJEtte.

Du 6 février 1844. Ch. req.

COUR DE CASSATION.

1° Ordre.-Appel.-Créancier. 2o Ordre.-Procédure divisible.

1o En matière d'ordre, et lorsqu'il y a lieu à faire statuer par voie d'appel sur une contestation relative à la collocation d'un créancier, il suffit d'intimer l'avoué du dernier créancier colloqué, encore bien qu'il ait comparu en une autre qualité, v. g. comme représentant l'une des parties en cause.

2o La procédure d'ordre est essentiellement divisible. Par suite, la non-intimation de l'avoué du dernier créancier ne rend pas l'appel irrecevable à l'égard des créanciers intimés, sauf le droit de tierce opposition pour ceux qui n'ont pas été appelés, quoique intéressés (1).

(1) V. Cass., 19 déc. 1837. (J.Av., t.54, p.239.

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