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dispensés de se munir d'un permis pour chasser. (Explications de M. Gillon et du garde des sceaux; Moniteur, 17 fév. 1844.)

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ART. 8. Le permis de chasse ne sera pas accordé : 1°à ceux qui, par suite de condamnations, sont privés du droit de port d'armes; 2o à ceux qui n'auront pas exécuté les condamnations prononcées contre eux pour l'un des délits prévus par la présente loi; - 3o à tout condamné placé sous la surveillance de la haute police.

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Il s'agit ici d'une indignité, tandis que l'art. 7 n'établit qu'une incapacité. Dans les deux cas la prohibition étant établie par la loi même, le permis qui aurait été obtenu par surprise ne ferait pas disparaître le délit de chasse. (Camusat-Busserolles, p. 83.)

que

ART. 9. Dans le temps où la chasse est ouverte, le permis donne, à celui qui l'a obtenu, le droit de chasser de jour, à tire et à courre, sur ses propres terres et sur les terres d'autrui, avec le consentement de celui à qui le droit de chasse appartient. Tous autres moyens de chasse, à l'exception des furets et des bourses destinés à prendre le lapin, sont formellement prohibés. Néanmoins, les préfets des départements, sur l'avis des conseils généraux, prendront des arrêtés pour déterminer :- 1° L'épode la chasse des oiseaux de passage, autres que la caille, et les modes et procédés de cette chasse; -2° le temps pendant lequel il sera permis de chasser le gibier d'eau, dans les marais, sur les étangs, fleuves et rivières; -3° les espèces d'animaux malfaisants ou nuisibles que le propriétarie, possesseur ou fermier, pourra en tous temps détruire sur ses terres, et les conditions de l'exercice de ce droit, sans préjudice du droit appartenant au propriétaire ou au fermier de repousser ou de détruire, même avec des armes à feu, les bêtes fauves qui porteraient dommage à ses propriétés. Ils pourront prendre également des arrêtés: 1o pour prévenir la destruction des oiseaux; 20 pour autoriser l'emploi des chiens lévriers, pour la destruction des animaux malfaisants ou nuisibles; 3° pour interdire la chasse pendant les temps de neige.

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Par ces dispositions, la loi interdit tous instruments de braconnage, tels que filets, panneaux, collets, etc.; elle autorise elle-même l'emploi des procédés qui constituent l'exercice de la chasse, tels que la chasse à tir et la chasse à courre, ainsi que l'emploi des furets et bourses pour le lapin; enfin, elle charge les préfets de déterminer, selon les temps et les lieux, les conditions de chasse des oiseaux, de passage et du gibier d'eau, de destruction des animaux malfaisants ou nuisibles ainsi que de défendre la chasse des petits oiseaux, qui détruisent les chenilles ou insectes dommageables (attribution que ne leur conférait pas absolument la législation antérieure; Voy. Bourges, 11 mars, 1841; J. cr., art. 2912.)

ART. 10. Des ordonnances royales détermineront la gratification qui sera accordée aux gardes et gendarmes rédacteurs des procès-verbaux ayant pour objet de constater les délits.

La gratification ne peut être accordée qu'aux simples gardes ou gendarmes.

SECTION 2.- Des peines.

Cette partie de la loi est la plus importante, puisque là seulement se trouve la sanction de toutes les dispositions sur l'exercice ou la police de la chasse. C'est aussi celle qui présentera le plus de difficultés d'application.

Une première question, qui domine les autres, est de savoir si les infractions prévues, toutes passibles d'amendes élevées, et justiciables des tribunaux correctionnels, appartiennent entièrement à la catégorie des délits, qui ne sont punissables qu'autant que l'intention coupable se joint au fait. La difficulté a dû être examinée par le gouvernement et les Chambres pour le cas où un chasseur se tromperait sur la valeur du consentement obtenu, ou sur les limites de son fonds, et pour le cas où le porteur de gibier en temps prohibé serait dans une erreur excusable. La question a d'abord été agitée à la Chambre des pairs, où M. Persil a exposé qu'il s'était une fois trouvé par méprise sur le terrain d'autrui. A la Chambre des députés, elle l'a été plus particulièrement par la proposition faite d'insérer le mot sciemment dans chaque disposition répressive, et par des interpellations suivies d'explications diverses. (Voy. Mon., 18 fév. 1844, p. 353, 355, 369.) Un député ayant dit que la matière qu'on réglementait se rapportait à beaucoup d'égards à la contravention, et l'organe de la commission ayant exprimé le même avis par le motif qu'il s'agissait de délits spéciaux, une exception fut demandée pour le cas où le passage des chiens sur le terrain d'autrui aurait lieu sans la volonté du chasseur. Alors M. Pascalis, membre de la commission, s'exprima ainsi : « Quand il s'agit de délits de chasse, le tribunal qui est appelé à prononcer, examine deux choses : le fait et l'intention..... Il faut que le chasseur ait contrevenu à la loi, non-seulement par le fait, mais encore par l'intention; s'il est donc parfaitement démontré au tribunal correctionnel que c'est sans la volonté du chasseur, malgré lui, que ses chiens, entraînés par l'ardeur de la poursuite, sont allés sur le terrain d'autrui, il n'y a pas de délit... Il n'est pas nécessaire d'écrire cela dans la loi : celay est écrit par cela seul qu'on dit qu'on ne punira que ceux qui commettront des délits de chasse. » La commission ayant été plus tard interpellée, une explication différente a été donnée, en ces termes, par le rapporteur : « Il est vrai que l'opinion du rapporteur, et c'est celle de la commission, est qu'en matière de contravention et de délit de chasse, l'intention ne peut être présentée comme une excuse; mais il n'en résulte pas qu'il n'y ait pas nécessité d'examiner le fait en lui-même, d'en apprécier les circonstances, afin de reconnaître si ses éléments constituent un délit. Dans cet examen, le juge recherchera si le fait a été le résultat de la volonté de celui auquel il sera imputé, mais il ne recherchera pas s'il y a eu intention de commettre ou de ne pas commettre un délit; c'est en ce sens que le fait seul constitue la contravention. Ainsi, si je voulais citer un exemple, je dirais que dans le cas où des chiens, s'échappant d'un chenil, parcourront la campagne, lanceront une pièce de gibier et la sui

vront, il n'y aura pas de délit de chasse imputable au propriétaire des chiens, s'il ne les suit pas ou ne les fait pas suivre pour tuer ou prendre le gibier. Pourquoi? parce que dans ce cas il n'y a pas acte résultant de sa volonté, et qu'il n'y a pas fait de chasse. Mais si, dans une circonstance semblable, ce propriétaire parcourt, en chassant, la propriété d'autrui, croyant parcourir la sienne, son erreur, qui pourtant implique sa bonne foi, par conséquent son défaut d'intention, ne sera pas admise comme une excuse, parce que son fait, résultat d'une volonté libre, est un acte de chasse caractérisé. » Cette doctrine absolue, si elle a été adoptée par la Chambre des députés, ne paraît pas l'avoir été par la Chambre des pairs, où une autre interprétation de la loi avait été exprimée sans contradiction. Il doit donc être permis de juger la question d'après les principes du droit commun, auxquels il n'a point été dérogé par une disposition expresse dans la loi nouvelle; et nous préférons le système de M. Pascalis, d'accord avec l'auteur du commentaire revu par le rapporteur de la loi à la Chambre des pairs (p. 113.). Voy. aussi Petit, Traité de la chasse, t. 1, p. 18.

Le système répressif de la loi nouvelle est beaucoup plus satisfaisant que celui de la loi de 1790, qui n'atteignait que la chasse en temps prohibé et la chasse sur le terrain d'autrui; qui, d'un autre côté, n'établissait aucune distinction entre le braconnier et le chasseur inoffensif: il atteint tous les faits jugés punissables et il proportionne les peines aux infractions, établissant d'ailleurs un minimum et un maximum qui permettront au juge de compléter les gradations marquées par le législateur.

ART. 11.

Seront punis d'une amende de 16 à 100 fr.: 1° ceux qui auront chassé sans permis de chasse; - 2o ceux qui auront chassé sur le terrain d'autrui sans le consentement du propriétaire. L'amende pourra être portée au double si le délit a été commis sur des terres non dépouillées de leurs fruits, ou s'il a été commis sur un terrain entouré d'une clôture continue, faisant obstacle à toute communication avec les héritages voisins, mais non attenant à une habitation. Pourra ne pas être considéré comme délit de chasse le fait du passage des chiens courants sur l'héritage d'autrui, lorsque ces chiens seront à la suite d'un gibier lancé sur la propriété de leurs maîtres, sauf l'action civile, s'il y a lieu, en cas de dommage. 3 Ceux qui auront contrevenu aux arrêtés des préfets concernant les oiseaux de passage, le gibier d'eau, la chasse en temps de neige, l'emploi des chiens lévriers, ou aux arrêtés concernant la destruction des oiseaux et celle des animaux nuisibles ou malfaisants;

4° ceux qui auront pris ou détruit, sur le terrain d'autrui, des œufs ou couvées de faisans, de perdrix ou de cailles ;-5° les. fermiers de la chasse, soit dans les bois soumis au régime forestier, soit sur les propriétés dont la chasse est louée au profit de communes ou d'établissements publics, qui auront contrevenu aux clauses et conditions de leurs cahiers de charges relatives à la chasse.

On doit considérer comme fait de chasse, l'action de poursuivre ou

faire poursuivre par des chiens du gibier (Rouen, 17 juin 1831, et Cass. 26 sept. 1840; J. cr., art. 2805), sans aucune distinction d'après les espèces (Paris, 15 juill. 1827 et Cass. 5 nov. 1842; J. cr., art. 3264); mais non l'action qui ferait simplement présumer qu'il y a eu ou qu'il y aura chasse illicite. (Douai, 5 nov. 1839, et Rej. 5 déc. suiv.)

Le permis de chasse n'existe légalement qu'autant qu'il a été délivré (art. 1er) par le préfet du département de la résidence ou du domicile. (art. 3.) Il ne suffit pas qu'avant le fait de chasse il y ait eu demande, avis favorable du maire ou sous-préfet, et consignation des droits (C. de cass., 24 et 31 déc. 1819, 11 fév. 1820, 7 mars et 26 nov. 1823 et 3 mars 1836; J. cr., art. 18.4): le prévenu ne peut se justifier qu'en prouvant qu'antérieurement la délivrance avait eu lieu; et la preuve contraire ne saurait, sous aucun prétexte, être mise à la charge du ministère public (arr. précités ; C. de cass. 4 et 5 fév. 1819, 5 mai 1836 et 20 avr. 1837; J. cr., art. 1824). Mais la loi n'exige pas que tout chasseur soit porteur de son pernis. (Camusat-Busserolles, p. 35.)

Le consentement exigé pour chasser sur le terrain d'autrui, est celui du propriétaire du droit de chasse, lorsqu'il y a usufruit, bail ou cession du droit. Voy. art. 1er, § 2.

On doit réputer chargées de fruits les terres emblavées (Cass. 16 nov. 1837 et 9 juin 1838); mais non les prairies artificielles dont la deuxième coupe a été faite, et qui ne sont plus destinées à être fauchées de l'année (Rej. 31 janv. 1840); ni les terres couvertes de produits destinés à être enfouis comme engrais (Grenoble, 11 nov. 1841), ni les champs ensemencés de pommes de terre (Colmar, 16 nov. 1842). La discussion de la loi à cet égard permet de penser que la jurisprudence préexistaute doit encore servir de règle.

La clôture continue est ici une circonstance aggravante, quoique le terrain ne soit point attenant à une habitation. Mais il faut qu'elle soit telle que le chasseur n'ait pu se croire autorisé à la franchir, ce qui ne s'applique pas aux haies clairsemées et bas murs.

La faculté accordée aux juges, relativement au passage sur le terrain d'autrui, de chiens qui seront à la suite d'un gibier lancé sur la propriété de leurs maîtres, n'est que pour les chiens courants, que les chasseurs ne peuvent pas rappeler comme les chiens d'arrêt. C'est une application du principe qu'il n'y a pas de délit sans intention; et si une disposition à cet égard a paru nécessaire, c'est que le fait peut être accompagné d'une volonté qui suffirait pour constituer le délit, sì le juge n'avait pas plus de latitude que ne lui en accorde le droit commun.

ART. 12.

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Seront punis d'une amende de 50 à 200 fr., et pourront en outre l'être d'un emprisonnement de six jours à deux mois : 1o ceux qui auront chassé en temps prohibé; 2° ceux qui auront chassé pendant la nuit ou à l'aide d'engins et instruments prohibés, ou par d'autres moyens que ceux qui sont autorisés par l'art. 9; 3o ceux qui seront détenteurs ou ceux qui seront munis ou porteurs, hors de leur domicile, de filets, engins ou autres instruments de chasse prohibės; 4° ceux qui, en temps où la chasse est prohibée, auront mis en vente, vendu, acheté, transporté ou colporté du gibier; 5o ceux qui auront employé des drogues ou appâts qui sont de nature à enivrer le gibier ou à le détruire; 6o ceux qui auront chassé avec ap

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peaux, appelants ou chanterelles. Les peines déterminées par le présent article pourront être portées au double contre ceux qui auront chassé pendant la nuit sur le terrain d'autrui, et par l'un des moyens spécifiés au § 2, si les chasseurs étaient munis d'une arme apparente ou cachée. Les peines déterminées par l'art. 11 et par le présent article, seront toujours portées au maximum, lorsque les délits auront été commis par les gardes champêtres ou forestiers de l'Etat et des établissements publics.

La chasse en temps prohibé, la chasse de nuit et la chasse à l'aide d'engins prohibés sont généralement des faits de braconnage, qui doivent être sévèrement punis. La faculté accordée au juge d'ajouter à l'amende l'emprisonnement, selon les cas, a principalement en vue les braconniers.

La détention d'instruments de chasse prohibés a paru devoir être punie, pour que le but de la loi soit atteint, tandis que la loi sur la pêche fluviale s'est bornée à punir le transport, faisant présumer davantage l'emploi des filets prohibés (Voy. Moniteur, 18 fév. 1844, p. 355; 29 mars suiv., p. 758). Ainsi se trouvent autorisées les visites domiciliaires, mais seulement de l'ordre du juge d'instruction, sans que les officiers de police judiciaire puissent jamais les effectuer de leur chef, sous prétexte d'un flagrant délit qui ne se conçoit pas en fait de détention. (Camusat-Busserolles, p. 137.)

ART. 13. - Celui qui aura chassé sur le terrain d'autrui, sans son consentement, si ce terrain est attenant à une maison habitée ou servant à l'habitation, et s'il est entouré d'une clôture continue faisant obstacle à toute communication avec les héritages voisins, sera puni d'une amende de 50 à 300 fr., et pourra l'être d'un emprisonnement de six jours à trois mois. Si le délit a été commis pendant la nuit, le délinquant sera puni d'une amende de 100 fr. à 1000 fr., et pourra l'être d'un emprisonnement de trois mois à deux ans, sans préjudice, dans l'un et l'autre cas, s'il y a lieu, de plus fortes peines prononcées par le Code pénal.

La chasse sur un terrain clos attenant à une habitation, est le plus grave des délits de chasse, surtout quand elle a lieu la nuit. Mais pour que la sévérité de la loi soit entièrement justifiée, il faut que la clôture franchie soit de celles qui ne peuvent l'être sans une sorte d'escalade ou effraction. C'est ainsi que l'ont entendu les Chambres, d'après les rapports des deux commissions. (Voy. Moniteur, 20 et 21 fév. 1844, et CamusatBusserolles, p. 142-148.)

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ART. 14. Les peines déterminées par les trois articles qui précèdent, pourront être portées au double si le délinquant était en état de récidive, s'il était déguisé ou masqué, s'il a pris un faux nom, s'il a usé de violence envers les personnes, ou s'il a fait des menaces, sans préjudice, s'il y a lieu, de plus fortes

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