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trompe ou de caisse, dans la commune, qui doivent être certifiées par le maire, ainsi qu'une insertion dans le journal de l'arrondissement ou du département (1) des avertissements individuels ne dispenseraient pas de l'observation exacte de ces formalités essentielles, ordonnées dans l'intérêt général (2).

Une commission d'enquête doit examiner les déclarations ou réclamations consignées au procès-verbal du maire, recevoir les observations des propriétaires, puis donner son avis (3). Lorsque les travaux s'étendent sur plusieurs communes, il faut une commission pour chacune d'elles, puisque chaque maire est membre nécessaire et serait incompétent pour ce qui ne concernerait pas sa commune, outre qu'il y a un nombre fixé qui ne peut être dépassé (4). Sous la loi de 1833, à défaut de disposition contraire, la jurisprudence exigeait la présence de tous les commissaires, au nombre de sept (5): la loi de 1841 permet de délibérer au nombre de cinq. Le délai, pour les opérations de la commission, qui était d'un mois, d'après la loi de 1833, et qui est de huit jours pleins, d'après celle de 1841, doit être observé, à peine de nullité de la poursuite (6).

Un arrêté du préfet doit ensuite déterminer les propriétés à exproprier, et l'époque où il y aura lieu d'en prendre possession (7). S'il s'agissait d'un chemin communal, il faudrait, à peine de nullité, l'avis du conseil municipal, et un arrêté pris en conseil de préfecture (8).

Telles sont les formalités qui doivent être remplies, avant que le tribunal soit appelé, par le réquisitoire du procureur du roi, à prononcer l'expropriation : elles sont toutes obligatoires, y eût-il dispense consentie par les propriétaires intéressés, tant qu'ils ne se sont pas tous accordés avec l'administration poursuivante sur les indemnités à fixer, de manière à rendre l'aliénation amiable (9); si quelqu'une paraissait omise, le tribunal devrait, ou rejeter la demande en expropriation, ou surseoir à statuer, jusqu'à la production de l'acte constatant l'accomplis

(1) LL. de 1833 et 1841, art. 6 et 7.

(2) Cass. 4 avril 1843 (J. av., t. 65, p. 584).

(3) LL. de 1833 et 1841, art. 8 et 9; L. 1841, art. 10.

(4) Cass. 6 janv. 1836.

(5) Cass. 3 juill. 1839 et 30 déc. suiv.

(6) Cass. 27 nov. 1838, et 21 juin 1842.

(7) LL. de 1833 et 1841, art. 2, 3o, et 11.

(8) L. du 21 mai 1836, art. 16; L. 3 mai 1841, art. 12; Cass. 22 mai et 21 août 1843 (J. av., t. 65, p. 598); Cass. 4 avril et 21 mai 1843 (J, av, t. 65, p. 584 et 587).

(9) Rej., 8 avr. 1835.

sement de la formalité (1). Le jugement d'expropriation, régulièrement, doit constater l'accomplissement de chacune de ces formalités, par le visa des pièces probantes, de celle surtout qui constitue la déclaration d'utilité publique, et de la délibération qui la complète dans un cas spécial (2); mais, à part cet acte fondamental, une énonciation générale, motivant suffisamment le jugement, ne serait pas vicieuse, dès que la cour de cassation, saisie par un pourvoi, a mission de vérifier elle-même, sur le vu des pièces qui doivent lui être transmises, si les formalités voulues ont été réellement et régulièrement accomplies (3).

Le jugement d'expropriation, indépendamment de la constatation des formalités préalables, a ses conditions de régularité. S'il n'est pas soumis à la règle du code de proc., qui veut des qualités énonçant les points de fait et de droit, au moins doit-il indiquer les juges et le procureur du roi, mentionner le réquisitoire de ce magistrat, nommer les expropriés et désigner les parcelles de chacun, motiver son dispositif et constater la publicité (4). Il y aurait nullité, en la forme, si le jugement omettait de désigner nommément les expropriés et autorisait ainsi l'administration à l'appliquer arbitrairement à tels ou tels propriétaires (5), ou s'il exprimait inexactement la contenance des terrains expropriés, et s'écartait ainsi des projets publiés (6). Il y aurait ouverture à cassation, pour excès de pouvoirs, si le jugement autorisait la dépossession immédiate, sauf indemnité ultérieure, la loi exigeant toujours le paiement préalable, et réglant d'ailleurs les formes à suivre en cas d'urgence (7).

Après la publication du jugement et sa notification aux intéressés, et indépendamment des formalités de purge des priviléges et hypothèques (8), s'il n'y a pas eu pourvoi en cassa tion formé dans les trois jours de la notification, et notifié lui-même dans la huitaine (9), l'administration doit faire connaftre ses offres aux intéressés désignés ou intervenus, et ceuxci doivent,à défaut d'acceptation, préciser leurs prétentions (10): la notification d'offres est une formalité essentielle, qui ne peut

(1) LL. de 1833 et 1841, art. 13 et 14; Cass. 5 juill. 1836.

(2) Cass. 1er juill. 1834, 2 fév. 1836, 2 janv. 1844.

(3) Rej. 11 mai 1835, et 6 janv. 1836.

(4) Cod. proc. civ., art. 141; L. 20 avril 1810, art. 7; L. de 1833 et 1841, art. 14 et 15.

(5) Cass. 2 fév. 1836, et 4 août 1841.

(6) Cass. 14 mars 1842 (J. av., t. 65, p. 571).

(7) Cass. 28 janv. 1834; L. 3 mai 1841, art. 65-74.

(8) L. 3 mai 1841, art. 15-19.

(9) L. 3 mai 1841, art. 20.

(10) L. 3 mai 1841, art. 21-25.

être suppléée par des offres oralement faites et discutées (1); le contredit est une mesure de prudence, puisqu'il peut seul réserver le droit d'obtenir plus qu'il n'a été offert (2). Les indemnitaires doivent être cités devant un jury, dirigé par le magistrat qu'a dû commettre le jugement d'expropriation (3). Alors, le débat est nécessairement contradictoire ; c'est ici surtout qu'un défenseur peut être utile à l'exproprié, et même à la partie poursuivante, qu'elle soit une administration publique ou un concessionnaire, puisqu'il n'y a plus de ministère public (4).

La composition du jury est soumise à des règles d'autant plus rigoureuses, qu'il s'agit d'une juridiction exceptionnelle, et que la compétence est d'ordre public.

La liste des électeurs ou capacités, sur laquelle doit être. choisi le jury spécial, est formée par le conseil général dans sa session annuelle (5) les pouvoirs des jurés tirés de cette liste sont expirés dès que le conseil général, dans la session suivante, a formé une liste nouvelle, qui peut toutefois reproduire un même nom après une année; et les opérations qui n'auraient été commencées que postérieurement, seraient entachées d'un excès de pouvoirs flagrant (6). Le tirage à faire par la Cour royale ou par le tribunal du chef-lieu judiciaire, selon les cas et avec les conditions prescrites par la loi (7), serait annulable avec tout ce qui aurait suivi, s'il était fait par une juridiction incompétente, v. g. un tribunal autre que celui du chef-lieu, hors le cas d'empêchement (8), ou par une chambre de Cour royale ou de tribunal non composée du nombre de juges voulu (9); et même si l'acte judiciaire, constatant l'opération, ne faisait pas connaître les magistrats ayant concouru à cet acte, qui est soumis aux conditions ordinaires d'idonéité (10).

Le résultat du tirage doit être notifié aux parties, avec indication du jour et du lieu fixés pour la réunion; et il doit y avoir aussi convocation aux jurés (11). La convocation peut être faite

(1) Cass. 26 mai 1840.

(2) Cass. 23 fév. et 21 juin 1842, et 11 avril 1843 (J. av., t. 65, p.570 et 603). (3) L. 3 mai 1841, art. 14 et 28.

(4) V. DELALLEAU, p. 527; J. av., t. 56, p. 137.

(5) LL. de 1833 et 1841, art. 29.

(6) Cass. 23 fév. 1842 (J. av., t. 65, p. 571); Rej. 8 nov. 1843.

(7) LL. de 1833 et 1841, art. 30.

(8) Lyon, 10 mai 1838 (J. av., t. 55, p. 483); Cass. 11 mai 1838 et 31 déc. 1839.

(9) Cass. 24 fév. 1841.

(10) Cass. 22 nov. 1841.

(11) LL. de 1833 et 1841, art. 31.

par simple lettre du préfet, pourvu qu'il y ait notification dans la forme généralement réglée par la loi (1). Mais il y aurait nullité, si une erreur commise, soit dans l'indication du jour, soit dans la remise à domicile de l'avertissement, privait les parties d'un juré qui leur était acquis (2); de même que si une erreur de nom réduisait à 15 le nombre des jurés, qui doit être de 16, pour que 4 récusations puissent avoir lieu (3). Le retard ou l'erreur dans la notification aux intéressés n'entraînerait pas nullité, si les parties comparaissaient devant le jury, sans présenter ce grief (4).

Dès que le jury est constitué, nul changement ne peut, à peine de nullité, s'opérer, soit par l'introduction du juré en l'absence duquel a été appelé un juré supplémentaire, ou d'un nouveau juré, en remplacement d'un incapable (5), soit par le concours d'un étranger, y cût-il le nombre voulu sans le compter (6), soit par le concours d'un membre d'un autre jury procédant simultanément pour une autre affaire (7).

Le serment voulu doit être prêté immédiatement : il y aurait nullité, si la prestation de serment n'avait lieu qu'après l'audition des offres de l'administration et une visite de lieux (8), à la différence du cas où l'inspection des lieux aurait précédé la constitution du jury et serait ainsi le fait de personnes n'ayant encore aucun caractère légal (9). La prestation du serment, par chaque juré individuellement, doit être constatée au procèsverbal, à peine de nullité (10).

:

Exhibition doit être faite par le magistrat directeur aux jurės, du tableau des offres et demandes notifiées, des plans et autres documents respectivement produits (11) il y aurait nullité, mais seulement pour l'exproprié, si l'exhibition des plans parcellaires n'était pas constatée par le procès-verbal (12). Le jury doit entendre les observations que veulent présenter oralement les intéressés, par eux-mêmes ou leurs défenseurs : il peut consulter toutes personnes, se transporter sur les lieux ou déléguer ce soin

(1) Rej. 15 avril 1840.

(2) Cass. 23 juin et 20 juill. 1840.

(3) LL. de 1833 et 1841, art. 31-35; Cass. 22 nov. 1841.

(4) Rej. 13 janv. 1840.

(5) Rej. 25 fév. 1840; Cass., 22 nov. 1843.

(6) Cass. 6 déc. 1837 (J. av., t. 54, p. 247).

(7) Cass. 22 juin 1840 (J. av., t. 59, p. 492).

(8) LL. de 1833 et 1841, art. 36; Cass. 23 sept. 1834, et 3 mai 1843 (J. av., t. 65, p.590).

(9) Rej. 26 avril 1843 (J. av. t. 65, p.605).

(10) Cass, 3 mai et 11 août 1843 (J. av., t. 65, p.590 et 605).

(11) LL. de 1833 et 1841, art. 37; rej. 14 déc. 1842 et 27 mars 1843 (J.av., t, 65, p. 583.).

(12) Cass. 24 mars 1841 et 2 janv. 1844,

à un ou plusieurs membres, pourvu que l'opération ait lieu avant la clôture des débats (1); le magistrat directeur et le greffier doivent accompagner le jury lorsqu'il opère en corps, et assister à toutes ses séances, à peine de nullité (2). L'exproprié peut modifier ses conclusions, et le magistrat directeur commettrait un excès de pouvoir en refusant de soumettre au jury la demande modificative, sous le prétexte qu'elle aurait dû être préalablement notifiée (3).

Après le débat oral, pendant lequel ils peuvent communiquer avec toute personne qu'ils jugent utile d'entendre (4), les jurés se retirent dans une chambre pour délibérer, sous la présidence de l'un d'eux, qu'ils peuvent désigner à l'audience comme dans la chambre de leurs délibérations (5): dès ce moment, toute communication avec qui que ce soit leur est interdite, si ce n'est avec le magistrat directeur ou le greffier, pour obtenir quelque document nécessaire (6). Leur décision se forme à la majorité, sans qu'il soit nécessaire ni interdit de mentionner le nombre de voix (7). La décision serait nulle- si elle ne répondait pas à toutes les questions soumises au jury par le magistrat directeur (8); -si elle posait simplement les bases de l'indemnité, subordonnant la fixation positive à des calculs ultérieurs (9);—si elle allouait une rente ou une somme annuelle, au lieu d'un capital (10);

si elle composait l'indemnité d'une somme d'argent et d'objets mobiliers à conserver par le propriétaire, ou de matériaux à extraire par lui et de travaux à exiger, sans le consentement constaté de celui-ci (11);-si, au cas d'expropriation d'un immeuble relativement auquel il y a litige engagé par la revendication d'un tiers, ou prétention contestée de l'exproprié ou d'un autre ayant droit, elle n'accordait pas une indemnité alternative, selon les éventualités (12);-si elle apposait une 'con

(1) Rej. 7 fév. 1837; L. 3 mai 1841, art. 37.

(2) LL. de 1833 et 1841, art. 34 et 35; V.Cass. 5 juill. 1842 et 2 janv. 1843; Rej, 27 mars 1843 (J. av,, t. 65, p. 581 et 583).

(3) Cass. 11 avril 1843 (J. av., t. 65, p. 603).

(4) LL. 1833 et 1841, art. 37; rej. 26 avril 1843 (J. av., t. 65, p.605).

(5) Idem, art. 38; rej. 24 mars 1841.

(6) Idem, rej. 27 mars et 3 mai 1843 (J. av., t. 65, p. 589).

(7) Rej. 19 janv. 1835, et 24 avril 1843 (J. av., t. 65, p.605).

(8) Cass. 23 fév. 1840.

(9) Cass. 3 août 1840, 10 août 1841, et 29 août 1843 (J. av., t. 65, p. 601).

(10) Cass. 19 et 31 déc. 1838.

(11) Cass. 3 et 19 juill. 1843 et 2 janv. 1844 (J. av., t. 65, p.593).

(12) Cass. 21 août 1838, 25 mars 1839, 5 fév. 1840, 15 mai, 19 juill. et 11 déc. 1843 (J. av., t. 65, p.592).

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