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gémissent, sont, pour l'ordinaire, des marques et des effets de l'amour de Dieu, qui les contient ainsi dans la voie du devoir et du vrai bonheur; et les méchans qui les oppriment ne sont que des fléaux dont se sert la Providence pour les purifier, de vils instrumens qui seront un jour brisés et jettés au feu.

Pour bien juger du plan de la Divine Providence, il faut voir la fin de toutes choses. Si la vie présente n'est, dans l'ordre de notre destination, qu'un instant, et la terre un passage; s'il doit venir un jour, où Dieu rendra à chacun selon ses œuvres, où les hommes bons et religieux seront couronnés de gloire et inondés de récompenses; où le prétendu triomphe des méchans et des impies s'évanouira et se trouvera changé en opprobres et en supplices, ne plaignons pas le sort des gens de bien, et n'envions pas celui des méchans; et bien loin d'accuser la Providence dans la distribution des biens et des maux, bénissons sa bonté envers les justes à quelqu'épreuve qu'elle les mette, et adorons les terribles jugemens de sa justice, sur la prospérité et le prétendu triomphe des impies.

D. Pourquoi Dieu ne punit-il pas du moins les blasphemes qui s'élèvent contre lui, et ne frappet-il pas de sa foudre les impies qui provoquent ses vengeances?

R. Dieu ne laisse pas sans punition, même en ce monde, la révolte et les attentats des impies. Il n'est point de siècle où quelques-uns des persécuteurs de son Eglise n'aient été les objets de ses vengeances les plus éclatantes; et durant la persécution présente, il a fait tomber sa foudre sur la tête d'un grand nombre d'impies, conjurés contre lui et contre son Christ. Ainsi l'on a vu tomber les chefs de la faction qui proscrivit de la France la Religion catholique, les Mirabeau, les Barnave, les Rabaut, les Julien, les Boyer - Fonfrède et les autres.

*Sur quatre Commissaires de la Convention qui organisèrent le schisme dans la Savoie, deux n'ontils pas subi le châtiment de leur crime?

Les premiers ministres et les plus ardens défenseurs du schisme et de l'hérésie, les Gobel, les Fauchet, les Goute, les Lamourette, les Chabot, ont été frappés du même supplice.

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Et ces féroces persécuteurs qui dévouèrent les Ministres de l'Eglise catholique à la misère, aux outrages, à la déportation, ou à la mort ; qui, les deux et trois Septembre, firent une aussi horrible boucherie des Lévites, des Prêtres et dés Pontifes les Brissot, les Guadet, les Vergniaud, les Manuel, les Péthion, les Roberspierre.. que sont-ils

devenus ?

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Et ces impies trop fameux, qui attaquèrent la Religion dans mille harangues forcenées, dans mille brochures pestilentielles; qui exposèrent ses Mystères, son Culte, ses Saints, ses Ministres, ses Sacremens aux outrages et à la dérision publique; qui convertirent ses Eglises en temples d'impiété et d'idolâtrie, les Condorcet, les Marat, les Camille-Desmoulins, les Chaumette, les Hébert, les Danton, ont ils été épargnés?

*

Nous ne parlons pas des châtimens particuliers que l'on a vu' s'exercer dans tant de lieux et de tant de manières, contre les ennemis de la Religion, ni de la mort de tant de milliers d'impies dont Dieu a fait justice par les supplices, par les maladies, ou par le glaive des ennemis. C'est assez de victimes sans doute; et que faut-il de plus aux blasphé mateurs de la Providence? Voudroient - ils que Dieu eût inondé la France du sang de tous ses habitans ? Le tableau des vengeances 'divines est assez frappant pour tout homme qui n'en détourne pas les regards; et, si, à l'exemple d'un ancien apologiste du Christianisme, nous voulions en tirer une preuve en faveur de la Religion, quelques années nous fourniroient plus de matériaux, pour

composer un livre sur la mort des persécuteurs, que cet écrivain ne put en recueillir dans l'histoire de plusieurs siècles.

Mais nous n'avons pas besoin de l'exemple des vengeances temporelles de la justice de Dieu sur les impies, pour justifier sa Providence. S'il les épargne en ce monde, s'il tolère leurs blasphemes et leurs provocations insensées, c'est précisément parce qu'il est Dieu. Hommes foibles et environnés de ténèbres, humilions nous devant sa souveraine grandeur et sa supreme sagesse ; et si nous voulons juger de ses voies, ne lui prêtons pas du moins nos erreurs et nos passions. C'est parce que Dieu est grand, impassible, tout puissant, infini dans ses miséricordes, et terrible dans sa justice, qu'il voit, sans s'irriter, les vains et impuissans efforts des impies; qu'il les supporte dans sa patience, et les fait servir à l'accomplissement de ses desseins, jusqu'à ce qu'il les ensévelisse sous le poids de ses vengeances éternelles. C'est la pensée que rendoit Tertulien par ce mot simple, mais sublime: Dieu est patient, parce qu'il est éternel. Patiens, quia æternus. Hélas! que le sort des impies est triste et digne de compassion! Ils insultent follement celui qui peut les briser comme un vase d'argile, et qui tient déjà le glaive levé sur leurs tétes, ils mettent le comble à leurs crimes et à leurs extravagances; ils accumulent des charbons sur leurs tétes, et ils se creusent un plus profond abime de malheurs. Bien loin de nous scandaliser du délai de leur châtiment, saisis de frayeur à la vue de l'éternité qui les attend, pleurons sur leur endurcissement; et prions le Seigneur de prolonger sur eux sa patience durant la vie présente, de les toucher, de les convertir, pour les préserver de la rigueur de ses vengeances dans la vie future.

CHAPITRE

CHAPITRE VIII.

De la vie future.

D. Vous ne pouvez concilier la Providence avec

l'existence des maux de cette vie, ni la justifier des désordres que l'on voit dans le monde, qu'en sup posant posant une vie future où l'ordre sera rétabli mais l'existence de la vie future est-elle bien certaine ?

R. Elle est démontrée par les difficultés que vous avez proposées contre la Providence. Car cette Providence existe; et, comme nous l'avons prouvé, elle est inséparable des attributs de Dieu. Si l'on ne peut concilier la sagesse de cette Providence avec l'existence des désordres de la vie présente, sans admettre une vie future, il est donc nécessaire d'en reconnoître l'existence. Ainsi de deux choses l'une : il faut ou que les ennemis de la Religion admettent le dogme d'une vie future, qui explique la sage économie de la Providence, ou qu'ils cessent de l'outrager par leurs plaintes et leurs murmures. Ou plutôt, il faut qu'ils fassent l'un et l'autre ; qu'ils admettent une Providence infiniment sage, qui permet les maux dont ils sont révoltés, et une vie fu ture qui développe et justifie le plan de sa sagesse.

La Providence, en effet, n'assûre pas toujours dans ce monde la punition du crime et la récompense de la vertu. On voit même souvent les hommes impies, injustes, dissolus dans les mœurs, abonder en richesse, vivre dans les plaisirs, jouir des honneurs et des dignités, et exercer l'empire redoutable des loix et de la suprême Puissance tandis que les hommes religieux, justes et recommandables par toutes les vertus, languissent dans la misère, vivent dans les souffrances et les humiliations.

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La vertu ne seroit-elle donc destinée qu'aux épreuves du malheur, et le vice aux jouissances de la prospérité? La vertu resteroit-elle donc sans récompense et le vice sans châtiment? La bonté, la sainteté, la sagesse et la justice de Dieu ne peut laisser dans un état constant de malheur, une créature qui ne vit que pour lui plaire. La sainteté de Dieu se trouveroit blessée par un ordre de choses qui ne tendroit qu'à l'encouragement du crime et au désespoir de la vertu. La sagesse de Dieu n'auroit donc pris aucun moyen pour faire observer ses loix, ou plutôt elle en auroit assuré la transgression en les mettant en opposition avec le penchant invincible de l'homme pour son bonheur; et la justice Divine traiteroit également l'impie et le fidèle, F'homme religieux et le blasphémateur, l'homme le plus vertueux et le scélérat couvert de tous les crimes! Concevoir une telle idée de Dieu, ce seroit nier jusqu'à son existence. Un Dieu, et une Providence qui punit le crime et récompense la vertu, sont deux choses inséparables; et puisque la Providence n'exerce pas dans ce monde ce jugement inévitable, elle le prononcera donc dans un autre; ainsi un Dieu et une vie future sont encore deux vérités essentiellement liées ensemble.

D. N'avez vous pas dit, pour justifier la Providence, que le bonheur est indépendant d'un état extérieur de prospérité, et que ce même état n'exclut pas toujours le malheur?

R. Oui; mais j'ai ajouté que c'est dans l'espérance de la vie future, que l'homme vertueux puise les consolations qui adoucissent ces souffrances, qui le fortifient contre ses passions, qui calment ses desirs et le rendent véritablement heureux. Otez-lui cette espérance, vous lui rendrez toute la sensibilité des privations, toute la vivacité de la douleur, toute l'inquiétude des desirs, tout le déchirement des passions; il sera, selon l'expression de Saint-Paul, le plus malheureux des hommes, et

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