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libertinage, de la cupidité, de l'injustice et d'autres passions profondément enracinées avec de tels maîtres l'on est bientôt Philosophe dans le sens du jour.

Est-ce une étude sérieuse de la Religion dans ses preuves et ses difficultés, qui a rendu incrédules ces hommes trop connus, avant la Révolution, pour être vendus à l'injustice, qui jusqu'alors n'avoient guères employé leurs études, leurs sollicitudes et leurs travaux, que dans l'art funeste de susciter et de prolonger des procès, d'embrouiller la justice, d'épuiser de frais les plaideurs, de se nourrir de leur substance, et qui depuis la Révolution ne se sont partagés qu'entre l'ivresse du commandement et la soif d'aggrandir leur fortune? Non; mais la Religion condamne les injustices, la cupidité, l'ambition, l'envie, l'esprit de domination: et ces hommes étoient infectés de tous ces vices; le scandale de leurs mœurs en dévoiloit d'autres; voilà le principe de leur Philosophie.

Est-ce une étude sérieuse de la Religion dans ses preuves et ses difficultés, qui a rendu incrédule cette foule de jeunes gens perdus de dissolution, de débauche et d'infàmie? Le principe de leur Philosophie ordurière est trop connu.

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Est-ce une étude sérieuse de la Religion dans ses preuves et ses difficultés, qui a rendu incrédules tant de gens qui ne le sont que par mode, par lâcheté et par respect humain, et qui dans le fond de leur cœur détestent la doctrine qu'ils professent, et rendent hommage aux vérités saintes qu'ils blasphement ?

Vois-tu ce libertin en public intrépide

Qui prêche contre un Dieu que dans son coeur il croit,
Il iroit embrasser la vérité qu'il voit;

Mais de ses faux amis il craint la raillerie.

Et ne brave ainsi Dieu que par poltronnerie.

Est-ce une étude sérieuse de la Religion dans ses preuves et ses difficultés, qui a rendu incrédules les suppôts subalternes de la Philosophie, ces hommes victimes de la témérité, si funeste et si dommune, de lire, de dévorer tous les livres irréligieux, sans connoître les preuves de la Religion, sans en avoir étudié les principes, ni lu les apologies; qui adoptent sans réflexion et sans jugement tout ce qu'ils lisent, jurent sur la parole de leurs maîtres, répétant et publiant comme autant d'oracles des erreurs grossières, des faits controuvés, des mensonges et des calomnies, de vieilles objections cent fois pulvérisées ? Ils se croient Philosophes, et ils ne sont que des machines.

Enfin, peut-on croire que ce soit par une étude plus approfondie de la Religion, par le résultat de nouvelles lumières acquises par conviction d'esprit, que tant de Chrétiens ont abandonné la cause de la Religion dans ce malheureux tens, et se sont déclarés pour l'impiété ? Et quelle nouvelle découverte a-t-on donc faite au préjudice de la Religion? quel dogme est renversé ? quelle preuve est affoiblie ? S'est-on seulement donné la peine d'examiner le fond d'une cause aussi importante? Non; et c'est moins par des discours et par des écrits que l'on a ébranlé la Religion, que par des décrets, par la terreur et par la hache des bourreaux. On ne raisonne pas aujourd'hui sur la Religion; on blaspheme: on ne cherche pas à répandre des lumières; on vomit des impiétés : on ne discute pas ; on persécute: et des hommes plongés dans la fange du vice, qui ne connoissent d'autre science que celle du crime, sont aujourd'hui, comme ils l'ont toujours été, les ennemis envenimés de la Religion. Y a-t-il là de quoi ébranler la foi, et n'est-il pas, au contraire, glorieux pour la Religion d'avoir de tels ennemis à combattre, et de n'avoir à lutter que contre le crime, la férocité et l'ignorance, de n'avoir besoin

pour son triomphe que de la patience et des vertus de ses sectateurs?

D. Mais les chefs du moins, et les plus fameux écrivains du parti philosophique, n'ont-ils pas été incrédules par principes?

R. Non; comme leurs subalternes, ils n'ont eu d'autres maîtres que leurs passions. Que trouve2-on en effet dans leurs livres ? De vains systêmes, des incertitudes, des railleries, des blasphêmes, des doutes, des contradictions et des absurdités. On peut appliquer à juste droit aux Philosophes modernes, ce que Cicéron a dit de ceux d'autrefois, que « de toutes les absurdités » qui peuvent passer dans la tête humaine, il n'en » est pas qui n'ait été soutenue par quelque phi»losophe.» (de Divin. L. II. )

« J'ai consulté les Philosophes, dit Jean Jacques » Rousseau, j'ai feuilleté leurs livres, j'ai exa» miné leurs diverses opinions: je les trouve tous » fiers, affirmatifs, dogmatiques même dans leur » septicisme prétendu, n'ignorant rien, ne prouvant » rien, se moquant les uns des autres; et ce point » commun m'a paru le seul sur lequel ils ont tous » raison... J'ai conçu que l'insuffisance de l'esprit » humain est la première cause de cette prodi»gieuse diversité de sentimens, et que l'orgueil » est la seconde., . . L'abus du savoir produit » l'incrédulité. Tout savant dédaigne le sentiment » vulgaire; chacun en veut un à soi. L'orgueil» leuse Philosophie mène à l'esprit fort, comme

l'aveugle dévotion mène au fanatisme. » Nous aimons à replacer sous nos yeux ce témoignage si souvent cité: il part d'un homme qui n'est pas suspect et qui connoissoit bien la secte. Joignonsy celui d'un autre Philosophe bien plus ennemi de la Religion.

«Le desir de n'avoir plus de frein à ses passions, dit M. d'Alembert, la vanité de ne pas » penser comme la multitude, ont fait plutôt en

core que l'illusion des sophismes un grand nombre » d'incrédules, qui, selon l'expression de Mon» taigne, tâchent d'ètre pires qu'ils ne peuvent. <<

D. Quel que soit le principe de l'incrédulité philosophique, est elle réellement nuisible à l'homme et funeste à la société ? Car c'est là la question? R. Oui, elle l'est infiniment : elle avilit l'homme et le dégrade jusqu'à la condition des bêtes; elle le corrompt; elle l'abandonne à tous ses desirs et à toutes ses passions; elle le laisse sans consolation dans les peines, sans espoir dans le malheur; elle détruit toutes les vertus, encourage tous les vices,. enfante tous les crimes, et tend ainsi au désordre universel, au déchirement et à la dissolution des sociétés.

D. La Philosophie ne reconnoit-elle pas la distinction du vice et de la vertu, et n'engaget-elle pas à fuir et à pratiquer l'autre?

R. La Philosophie parle souvent du vice et de la vertu ; mais dans sa bouche ces mots n'ont point de sens dès qu'elle ne reconnoit plus de Dieu, ou qu'elle se figure un Dieu indifférent sur les actions des hommes, dès qu'elle nie la spiritualité et la liberté de l'ame, et qu'elle prononce par la bouche de Voltaire, qu'un destin inévitable est la toi de la Nature, et que nous ne sommes que des machines ainsi que tous les autres animaux ou par celle de Diderot, que la méchanceté des homines est involontaire, leurs erreurs insur. montables , et leurs crimes l'effet de la dure nécessité, il est évident qu'il n'y a plus pour elleni bien, ni mal moral, ni vice, ni vertu, car la moralité des actions suppose essentiellement la hiberté.

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D. Les Philosophes ont ils expressément rejeté la distinction du vice et de la verta, du bien et du mal moral ?

R. Oui, la plupart l'ont expressément rejetée, ou dénaturée.

Les Philosophes qui ont eu le front de faire dans leurs écrits une profession ouverte du matérialisme et de l'athéisme, tirant hardiment les conséquences nécessaires des principes qu'ils avoient adoptés, ont expressément rejeté cette distinction, ils ont tranché le mot; ils ont avancé, ils ont prétendu prouver dans beaucoup d'ouvrages qn'elle n'est qu'un préjugé; qu'il n'y a de bien et de mal que le bien et le mal physique; que le vice n'est qu'un mot, et la vertu un songe. On peut voir de longues dissertations sur ce sujet, en particulier dans l'horrible ouvrage intitulé le Systéme de la Nature, dernier effort de la Philosophie de ce siècle,

Ceux-même qui paroissent reconnoître un Dieu et une loi naturelle, ne s'accordent point sur les notions de bien et de mal, de vice et de vertu ; presque tous sont les apologistes des passions et font dériver de cette source impure les vertus qu'ils admettent; ils rejettent comme de sombres et imbécilles préjugés les vertus qui contrarient les penchans de la Nature, et en bien analysant leur doctrine, on ne trouve presque plus ni vice, ni vertu, ni principes, ni morale.

D. Les Philosophes ont-ils rejetté expressément des vertus reconnues dans les sociétés policées, et prescrites ou approuvées par la loi naturelle et par le Christianisme?

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R. Qui, les Philosophes modernes ont rejetté la plupart des vertus qui constituent les bonnes mœurs, et forment les liens de la société, et ils ont autorisé, prêché tous les vices qui leur sont contraires. Vous aurez de la peine à le croire mais il est important que vous connoissiez quelle est la corrupton de cette Philosophie tant flattée, tant célébrée et tant honorée de notre siècle. Je vais montrer sa doctrine puisée dans les écrits de ses plus fameux sectateurs.

Quelques-uns ont expressément rejetté la chas

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