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eitoyens avec ou sans armes, contre l'exécution des loix, ordonnée par un jugement et prononcée par les juges, officiers municipaux, administrateurs et officiers ministériels.

L'officier ministériel chargé de faire exécuter un Jugement ou mandement de justice, portera une baguette blanche; il la présentera au citoyen que l'ordre regarde, et celui-ci sera obligé d'obéir sur-le-champ, sinon il sera regardé et traité comme rebelle.

Si des fonctionnaires publics ou officiers ministériels d'exécution sont insultés dans l'exercice de leurs fonctions, ils prononceront à haute voix, ces mots, force à la loi. A l'instant où ce cri sera entendú, tous les citoyens seront tenus de leur prêter main-forte et de les aider en tout ce qu'ils demanderont.

Ainsi le respect dû à la loi doit se témoigner à ceux qui agissent en son nom, à ceux qui l'exécutent, quels qu'ils soient. Dès que le magistrat ordonne, tout bon citoyen doit obéir. Ce juge, cet administrateur, ce maire, cet officier public peuvent abuser de leur pouvoir: il est vrai. Mais nous pourrons nous en plaindre; mais ils sont responsables: mais quand leur injustice seroit évidente, il y a des formes pour les poursuivre. Il suffit que leurs torts frappent sur nous, pour que nous les jugions mal. Quoique nommés par nous, nos magistrats n'appartiennent qu'à la nation; ils ne doivent compte qu'à elle; la nation seule peut les punir suivant les loix qu'elle a faites.

Amis lecteurs, ce mot de nation est un de ceux dont les brouillons, nos ennemis, se servent souvent pour égarer. La nation est souveraine : elle a tous les droits. Mais la nation peut se comparer à Dieu même. Elle est par-tout, et on ne la voit nulle part. La loi étant son ouvrage, c'est la nation qui agit par-tout; et nulle part pourtant on ne peut dire : voilà la nation. Si on pouvoit se la figurer, ce ne seroit pas dans une multitude bruyante et séditieuse, suivant en tumulte ses caprices, menaçant ses magistrats, exerçant des violences, pillant, ravageant et enivrée de sang et de carnage. Non, si la nation est quelque part, c'est dans le magistrat paisible et désarmé qui rappelle à l'ordre des furieux;

e'est même dans les victimes de leur fureur: car la nation est dans celui qui invoque la loi, plutôt que dans ceux qui la violent.

Il est temps, honnêtes citoyens des campagnes, que l'ordre nouveau s'établisse. Qui plus que vous doit aimer la loi? Sans elle, qui protègera l'homme simple et pauvre, contre le riche usurpateur, superbe et habile à étendre ses droits? Si vous méconnoissez la loi, les autres lui désobéiront. Alors chacun se livre à sa passion ou à ses vices; alors chacun vous insulte, vous vole, vous attaque impunément. Voulez-vous donc vous livrer sans trouble à la douceur d'un travail utile? Voulezvous recueillir en paix vos récoltes, élever en paix vos familles pour la liberté et pour la vertu ? Rentrez dans l'ordre: respectez la loi ; respectez vos juges, vos municipaux, vos administrateurs ; et ne souffrez pas qu'aucun leur refuse devant vous ce respect, sans lequel nous serions indignes de la liberté et des lois qui nous l'assu

rent.

Amis lecteurs, prenez pour modèles l'Anglois et surtout l'Américain. Leurs magistrats n'ont jamais besoin de force pour être obéis et respectés. Il faut des fouets et des aiguillons pour conduire les animaux ; il faut des supplices pour contenir les esclaves. La raison est le frein des hommes libres : la loi est le guide des citoyens (1).

Nouveaux décrets sur les Juges de paix, leurs Assesseurs et leurs Greffiers.

Ceux qui ont acheté une horloge toute neuve, savent que dans les premiers jours, elle demande à chaque

(1) J'étois à Londres. Un peuple nombreux étoit attroupé dans la rue de Pycadilly. On se battoit à outrance. Il sembloit qu'une armée entière n'auroit pu soumettre tous ces furieux. Arrive un magistrat, bossu, boiteux, borgne et ayant à peine quatre pieds. Il étoit guindé sur les épaules d'un valet. De-là il montre au peuple la baguette de la loi tout se tait, tout se retire. J'aurois pris ce magot pour un magicien. On me dit que c'étoit un magistrat, et au ton respectueux avec lequel on prononça ce mot, je vis que le peuple le plus libre étoit celui qui obéissoit le mieux aux ministres des loix.

instant quelque réparation; elle avance; elle retarde; ou elle s'arrête. Alors, si vous l'envoyez à l'horloger qui l'a faite, il l'aura bientôt réglée. Cette horloge est l'emblême de notre constitution nouvelle: il n'est pas étonnant qu'elle ne se montre pas tout-à-coup dans sa perfection. Il n'est pas étonnant que la machine se dérange quelquefois. Mais il est heureux que ceux qui l'ont construite soient encore là pour la régler. L'institution des juges de paix est un bien dont nous sentirons le prix de jour en jour. Mais sa nouveauté est telle, qu'on n'avoit pu prévoir toutes les difficultés, toutes les questions qu'elle devoit faire naître. Vingt et un nouveaux articles décrétés par l'assemblée nationale répondront à tout. Voici les principaux :

Les juge de paix, assesseur et greffier, (dans les villes) ne peuvent être en même temps, municipal, adminis trateur, huissier, avoué, greffier, juge de district, juge de commerce, et percepteur des deniers publics. Mais dans les bourgs et villages, les assesseurs peuvent être municipaux.

Le juge de paix sera tenu de nommer un greffier.. Celui-ci ainsi que les assesseurs ne pourront être ses parens jusqu'au degré de cousins-germains.

Les juges de paix apposeront les scellés. Leurs vacations seront payées sur le pied de deux livres pour trois heures, et vingt sols les suivantes. Les greffiers auront les deux tiers. Mais dans les villes le prix des vacations s'élève plus haut.

Les inventaires seront faits par les notaires.

La légalisation des actes sera faite par les présidens des tribunaux. Elle sera gratuite.

Enfin le juge de paix pourra porter, attaché au côté gauche de l'habit, un médaillon ovale en étoffe, bordure rouge, sur lequel seront écrits en lettres blanches :

La Loi et la Paix.

Ce n'est pas une distinction, un ornement de vanité qu'on a voulu leur donner. C'est un signe sensible destiné à rappeler à tous les yeux la gravité et l'utilité res pectable de leurs fonctions. S'ils les portoient hors de leurs fonctions, ils seroient aussi ridicules qu'un évêque

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qui iroit se promener dans les champs la mitre en tête et la crosse en main.

Sur la contribution patriotique.

Quelqu'un a dit que les biens du clergé étoient la dot de la constitution. On peut dire que la contribution patriotique est le présent de noces et comme le trous-, seau de cette constitution, la nouvelle épouse du peuple François. Si quelqu'un, au premier janvier 1789, étoit venu nous dire : faisons un marché; vous donnerez à la patrie, dans l'espace de trois ans et plus, le quart de votre revenu d'une année; et pour cela, vous obtiendrez une égalité parfaite, une liberté durable; tous les abus seront réformés; le déficit sera rempli; toutes les dettes payées; tous les impôts changés et diminués, sur-tout pour le pauvre enfin un ordre nouveau sera établi, et tel qu'il ne peut à l'avenir que se perfectionner; quel est l'homme juste et sage qui n'eût accepté avec transport ce marché? Aussi tous les bons citoyens l'ont tenu sans peine ; mais les égoïstes, les mécontens, les aristocrates ont besoin d'être pressés et surveillés pour acquitter l'offrande commune. L'établissement des administrations nouvelles avoit suspendu les comptes des anciens percepteurs, et la perception elle-même s'interrompoit, faute d'agens. L'assemblée nationale qui a compté sur cette ressource, vient de rendre un décret pour assurer et régler le recouvre

ment.

Les ci-devant receveurs particuliers rendront leur compte aux directoires de district, avant le premier

mai.

A défaut de percepteurs nommés pour 1791, les collecteurs de 1790 suivront la perception de la contribution patriotique.

Plusieurs autres articles règlent toutes les formes et tous les termes pour cette reddition de compte. Il est bon que nos amis lecteurs sachent avec quel soin leurs représentans suivent tous ces détails. Les finances de l'Etat s'embrouillent comme les affaires d'un particulier, faute de compter. Celui qui se contente, comme on faisoit autrefois en France, de dépenser

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d'une main ce qu'il a reçu de l'autre, finit par recevoir moins et payer plus qu'il ne faut. Le proverbe dit que les bons comptes font les bons amis. Il faut aussi la confiance et l'amour des peuples pour les législateurs et pour les lois.

Sur les emplacemens des tribunaux et des administrations.

C'est un grand bienfait des lois que la multiplicité des établissemens qui assurent l'ordre et la justice. Mais il ne faut pas que beaucoup de magistrats entraînent beaucoup de frais.

Comme tous les bâtimens et maisons publiques appartiennent à la nation, et que chaque département paie en particulier les dépenses de son administration particulière, les administrateurs sont autorisés à acquérir pour leur emplacement et pour celui des juges, des édifices nationaux. Mais ces acquisitions ne se font qu'avec l'aveu de l'assemblée. Elle a nommé un comité pour surveiller cette dépense. Voici comment le rapporteur de ce comité, M. Prugnon, s'exprimoit il y a peu de temps sur ce sujet: On demandoit à Démosthène quelles étoient les plus grandes qualités de l'orateur? Il répondit. La première est l'action, la seconde, l'action, la troisième, encore l'action. Administrateurs, quelles sont vos qualités ? L'économie, l'économie, toujours l'économie. L'appartement de la liberté est une chambre, et son palais une simple maison. On ne peut disposer qu'avec une sainte avarice de l'obole du pauvre. Enfin le vrai luxe des administrateurs est le bonheur des administrés. L'assemblée suit constamment la sévérité de ces principes. Elle convient surtout à une nation nouvellement libre. Car il faut, dit encore M. Prugnon, donner une éducation un peu dure à la liberté, si nous voulons qu'elle ait un jour une santé d'athlète.

Événemens.

ROME. Un prélat romain et un jurisconsulte disputoient sur la constitution civile du clergé de France. Le premier répétoit sans cesse : et les conciles ! et les conciles ! les avez-vous lus, répondit le second; et savez-vous qu'ils

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