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solde du soldat, qui leur sera payée chez eux. En même temps, trente ou quarante mille hommes de l'armée de ligne se placeront sur les frontières, prêts à foudroyer le premier bataillon d'Autrichiens ou d'aristocrates qui se présentera. Les armes sont neuves; les cœurs sont régénérés, nous n'attaquerons pas, mais nous défendrons la patrie, comme des enfans courageux défendent une bonne mère. Veillons donc; mais ne craignons pas. Soyons libres, mais soyons unis; soyons égaux, mais soyons justes; honorons la religion, mais moquons-nous des curés assez sots pour se ruiner en l'honneur des évêques. Enfin respectons nos magistrats; connoissons nos lois : payons nos contributions: aimons nos frères. Les bons citoyens n'ont rien à redouter ni du ciel ni des hommes. Qu'on cesse donc de menacer et d'effrayer la France. N'a-t-elle pas. trois millions de gardes nationales et trois milliards de biens nationaux? Voilà de quoi battre et de quoi acheter les ennemis.

Evénemens.

VARSOVIE. Les nobles Polonois sont divisés sur la survivance de leur Roi. Quelques-uns vouloient qu'elle fût offerte à un des fils de l'Empereur. D'autres l'ont proposée à l'Electeur de Saxe. Ce dernier vient de leur écrire une lettre de reconnoissance. Il refuse un héritage éloigné. Il célèbre le monarque vivant. Il fait aussi l'éloge de la diète, c'est-à-dire de l'assemblée des nobles. Polonois. Si nos bons villageois veulent connoître au juste une diète polonoise, nous leur dirons que c'est un sénat d'aristocrates, qui le sabre à la main foulent aux, pieds la Nation, la Loi, le Roi. Un seul noble, au milieu de cette horde Sarmate, a plus de pouvoir que le prince et le peuple réunis. Le prince, le peuple, le sénat auroient beau s'accorder sur un décret, si un noble a la folie de le rejetter, sa folie fait loi. C'est la noblesse. dans toute sa perfection.

PETERSBOURG. La cathédrale de cette ville est ornée chaque jour des drapeaux enlevés aux Turcs. Ce sont des étendards surmontés de croissants, et sur lesquels. sont attachées des queues de cheval. L'église Grecque

de Pétersbourg ressemble en ce moment à une mosquée, c'est-à-dire à une église mahométane. Au reste les PAPAS Grecs et les IMANS Turcs ne sont guères plus savants les uns que les autres. Un voyageur qui a vu de près, successivement, le patriarche et le muphti résidans à Constantinople, assure qu'il n'est point en Europę de maître d'école ou de chantre de paroisse qui ne soit plus instruit qu'eux. Pour revenir à la Russie, nous observons qu'clle a gagné, dans cette guerre, près de vingt drapeaux et quarante queues de cheval, mais qu'elle a perdu près de deux cents mille hommes et cent millions de roubles ou de ducats.

BERLIN. Le Roi de Prusse, pour prévenir la disette de bled, vient d'en défendre l'exportation. Il a fait établir un cordon de troupes qui veillera sur les frontières et qui saisira toute voiture chargée de grain. Quel gouvernement que celui où il faut une armée pour maintenir une loi ! Le prince Henri, oncle du Roi, fait élever, dit-on, une statue équestre à la mémoire de Frédéric le grand. Il fut surnommé le grand pour avoir remporté trente victoires, gagné trois états, et bâti près de cent villages. On lui pardonne presque le mal qu'il a fait à ses voisins, lorqu'on rappelle tout le bien qu'il a fait à la philosophie et à l'agriculture. Le frère du grand Frédéric a été aussi bon général que lui. Il a voyagé en France où il a recueilli pour ainsi dire l'héritage de la gloire fraternelle. Il a yu commencer notre révolution. Il a prédit que le clergé de France payeroit la dette publique. C'est lui qui le premier a nommé les biens de l'église, LA DOT DE LA

CONSTITUTION.

́ ́ VIENNE en Autriche. L'Autriche est menacée, comme la Prusse, d'une disette de bled. Léopold a pris de sages mesures pour faire arriver et circuler dans ses états le bled des étrangers. Plus d'un village imprudent, plus d'une ville inconsidérée ont essayé d'intercepter le passage des grains. A l'exemple des sauvages, ils ne sont frappés que de l'intérêt du moment, et ils ne songent pas que troubler le commerce c'est l'écarter, et qu'enlever le bled qui passe, c'est perdre le bled qui va venir. Le larcin d'un jour empêcheroit ainsi

la provision de l'année. C'est attenter à soi-même ; c'est attenter au public; c'est tarir, en quelque sorte, la source de la vie commune. Que deviendroit un vaste pays si dans un temps de sécheresse, chaque village arrêtoit le cours de ses ruisseaux, et chaque ville, le cours de ses rivières?

LONDRES. Le peuplé Anglois est animé d'un meilleur esprit. Dans tous ses établissemens il cherche, il embrasse l'utilité générale. Une société philantropique, c'est à-dire amie des hommes, vient de composer un fonds considérable qui sera destiné à placer de jeunes artistes et à secourir les étrangers dépourvus de fortune, mais apportant des projets utiles et des découvertes heureuses. Ainsi, à Londres, le génie ne sera jamais étranger, ni la vertu orpheline. Cette société philantropique s'est formée sous le titre de bienveillance universelle. La charité religieuse se rétrécit dans le cercle de ses affections et de ses préjugés. La charitě philantropique s'agrandit dans ses vues; et sa prédilection s'attache, non aux malheureux les plus recommandés, mais aux malheureux les plus recommandables.

ORBE, pays de Vaud. Un médecin, vrai philantrope. ayant le secret de redresser les membres difformes des enfans au premier âge, vient de fonder une maison publique pour recevoir et traiter ces innocens disgraciés de la nature. Il a déja tenté un grand nombre de cures de cette espèce avec le plus grand succès. Nous possédons en France de vastes hôpitaux qui subdivisés selon les pays et les maladies, deviendroient beaucoup plus utiles. Le comité de mendicité a présenté à l'assemblée nationale un plan dont l'objet est de distribuer également sur toutes les parties de l'empire les secours, jusqu'ici concentrés dans les grandes villes où les pauvres même avoient un privilège sur ceux des campagnes.

BOSTON. Un ministre de l'église Bostonienne, ayant refusé d'ordonner un ministre élu par le peuple, le peuple l'a installé d'un accord unanime, et lui a donné le pouvoir de prêcher et d'enseigner. Le ministre qui avoit refusé l'ordination, soutenoit qu'elle lui appar tenoit de droit divin: on lui a répondu : le proverbe la voix du peuple est la voix de Dieu, mais

dit que

il ne dit pas que la main de Dieu soit la main du prêtre; et il faut convenir que si la grace étoit attachée aux doigts d'un pape ou d'un évêque, elle a dû être gâtée et corrompue bien des fois,

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PORT DE L'ORIENT. Le vaisseau l'Amphitrite, venant de's colonies a fait naufrage sur la côte de l'Orient. De cent huit personnes qu'il contenoit, cent cinq ont péri.

PORT DE SAINT-VALERY. Quatre hommes montoient une chaloupe la mer étoit très-agitée: une vague s'élève, couvre la chaloupe et la submerge. On jette des cordages aux quatre matelots. Deux s'y attachent et se sauvent. Les deux autres, accrochés à la chaloupe étoient sous les flots. Un jeune et brave marin s'élance dans la mer, atteint et soulève la chaloupe, l'entraîne avec les deux naufragés qu'il ramène à terre et qu'il rend à la vie. Il se nomme JFAN BOUDEVILEN. La municipalité de Saint-Valery l'a comblé des plus honorables témoignages.

LIMOGES. Le club des amis de la constitution vient d'établir dans son sein trois comités : 1°. un comité de bienfaisance qui s'occupera des pauvres ; 2°. un comité de santé qui sera chargé de pourvoir aux besoins et aux traitemens des malades; 3°. un comité de jurisprudence qui travaillera à pacifier les différends et à suivre les procès inévitables des gens peu instruits ou peu riches.

SENS. Tous les curés de cette ville, leur évêque à la tête, ont prêté le serment. Si dans les autres diocèses chaque évêque eût rempli son devoir, peu dẹ curés auroient trahile leur. Ces indignes prélats ont causé un scandale, produit un schisme, et couvé, mais envain, une guerre civile. La religion est leur prétexte. L'orgueil est leur mobile. Leurs bénéfices les occupoient bien plus que leurs églises. Aussi laissoient-ils tomber les dernières : ce qui faisoit dire à un bon paysan: : AVEC AUTANT DE RICHESSES, LE BON DIEU EST

BIEN MAL SERVI POUR SON ARGENT.

VIVIERS L'évêque de Viviers a suivi l'exemple de celui d'Autun, de celui de Sens, de celui d'Orléans, de celui de Lyda, etc. ou plutôt il a suivi ses propres vertus qui auroient dû servir de modèle à tout le clergé

de France. On connoissoit la piété sincère, le patriotisme pur et la philosophie éclairée de ce digne prélat. C'est lui qui au moment où les titres furent supprimés par un décret, plaça dans son sallon un tronc pour les pauvres, et condamna tous ceux qui l'appelleroient encore Monseigneur à y porter douze sols d'amende. Il avoit reconnu depuis long-temps que l'épiscopat n'étoit pas une farce italienne, dans laquelle des pygmées se font nommer, votre grandeur; des sots, votre excellence; des bossus, votre éminence; des charlatans, votre sainteté.

ROUEN. M. Potier, supérieur du séminaire des Eudistes, a prêté serment et l'a accompagné d'un discours pathétique. Il a été reconduit au séminaire avec la musique militaire et aux acclamations de tous les citoyens.

DOMFRONT. Un curé, voisin de ce lieu, a reçu d'une dévote fort connue, une lettre qui lui promettoit un évêché en Espagne s'il se refusoit au serment. Il a répondu qu'il aimoit mieux une mazure en France qu'un château en Espagne. Un autre pasteur voisin, menacé par l'ancien seigneur de sa terre de n'être plus reçu à sa table s'il faisoit le serment, lui dit; hé bien ! je serai plus libre et plus sobre.

LILLE. Les gardes nationales de Quesnoi, et des villages circonvoisins, ont saisi onze à douze milliers de tabac en feuilles venant de l'étranger, en contrebande. Le lendemain, allant encore à la découverte des brigands, ils ont trouvé un grand nombre d'hommes armés de fusils, de pioches, de faux et de fourches. Il y a eu du sang répandu. Les brigands ont été mis en fuite. Est-il possible que l'esprit public et l'inté rêt national ne puissent pénétrer dans ces ames de bronze ou plutôt de boue?

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HOUPLINES, près de Lille. Une populace insolente et stupide avoit arrêté sur la rivière de la Lys trois bateaux de grains, destinés pour Dunkerque, et qu'elle débarquoit pour se les partager. La municipalité de Lille, instruite du désordre a fait partir sept cent hommes. Cette petite armée étoit suivie de douze portefaix qui avoient ordre de recharger les bateaux. Elle est arrivé le même jour à Houplines, vers midi. A l'instant même on s'est soumis à la force. Mais est-il possible, nous le répétons encore, est-il possible qu'une loi aussi juste, aussi simple, aussi impérieuse que celle de la circulation libre des bleds, ait besoin

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