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leurs chefs a osé prendre et publier, des résolutions contraires aux décrets. La religion est toujours le prétexte de ces attentats. Mais elle-même doit nous rassurer. De vrais chrétiens ne voudront pas commencer, au nom du Dieu de paix, la guerre sacrilège des frères contre les frères. De vrais citoyens ne voudront pas commencer la guerre 'civile.

La discorde n'est pas notre unique danger. On annonce de plusieurs endroits, que le peuple égaré, se refuse au paiement des impôts. C'est nous voler tous; puisque la contribution de chacun appartient à tous les autres. Celui qui prétend ne point payer sa taxe, prétend donc avoir le privilège de mettre sa charge sur le dos de son voisin. Cet homme-là est un indigne aristocrate. Car les aristocrates ne faisoient pas autre chose.

Nous aurons soin de dénoncer à nos lecteurs tous les noms des villes ou villages, où le peuple tient une conduite si méprisable.

Soyons unis; payons l'impôt; respectons les décrets: souvenons-nous du serment d'alliance, et tout ira

bien.

Telle est notre position actuelle.

On nous menace de la guerre, et ces menaces viennent de plusieurs côtés. Dans le numéro suivant, nos lecteurs verront ce qu'il en faut croire. Nous voulons qu'ils connoissent l'intérêt de tout François au dehors comme au - dedans de la France.

Cérémonie funèbre du Champ-de-Mars.

On a parlé du courage héroïque des gardes naionales qui ont combattu pour la patrie à Nancy. En déplorant la mort de ceux qui ont péri dans

cette journée, nous avons dû célébrer leurs funé railles. Leurs frères d'armes, qui avoient juré avec eux le pacte fédératif dans le Champ-de-Mars à Paris, se sont réunis, le 20 septembre, dans ce champ guerrier et fraternel, pour leur rendre les honneurs funéraires. Cette cérémonie, à laquelle se sont trouvés près de cinquante mille hommes, tant soldés que non-soldés, tant de Paris que des environs, tous portant un crêpe autour du bras gauche, tous marquant une affliction que l'assemblage des sentimens augmentoit encore: cette cérémonie a été aussi noble que touchante. On ne voyoit qu'un seul mouvement dans cette armée nombreuse; on n'entendoit que la musique plaintive des régimens, et les prières solemnelles du prêtre qui officioit. Au moment de la confédération, le canon a donné le signal, et cinquante mille hommes à la fois ont plié le genou et baissé leurs fusils. Que la douleur publique est imposante ! que la patrie est sainte à côté de la religion! que la religion est grande à côté de la patrie! L'émotion causée, par ce spectacle, a été cependant la moindre de ses impressions. Un sentiment plus généreux éclatoit dans tous les regards. Spectateurs, soldats, prêtres même, tous sembloient se dévouer à la mort pour le salut public. On ne distinguoit dans la foule aucun visage rebelle. Le deuil général réconcilioit tous les cœurs. L'aristocratie vaincue et le patriotisme vainqueur, en confondant ensemble leurs larmes, se montroient diposés à mêler aussi leur sang pour la cause commune. Voilà comme il est beau de triompher des aristocrates, et non en brûlant des châteaux, ni en coupant des têtes, qu'il vaut mieux soumettre aux lois et forcer à la concorde.

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Parmi les décorations funèbres du Champ-deMars, on à remarqué ces quatre inscriptions:

La première. A la mémoire des braves guerriers morts à Nancy, pour la défense de la loi, le 31 août 1790.

La seconde. Ennemis de la constitution; tremblez: en mourant, ils nous ont laissé leur exemple.

La troisième. Le marbre et l'airain périront, mais leur gloire sera éternelle.

La quatrième. C'est ici qu'ils avoient juré avec nous de mourir fidèles à la nation, à la loi, et au roi.

De l'établissement primitif des villages.

Les premiers hommes vivoient; selon toute apparence, au milieu des bois. Les cavernes des rochers leur servoient de retraite. Ils y apportoient les fruits de leur chasse, ou ceux que produisoient des arbres, sauvages comme eux. Les hommes qui habitoient le long des rivages de la mer, avoient. plus de facilité pour se nourrir, en ramassant les coquillages, et en vivant de la pêche des huîtres et des poissons. La culture du bled changea la situation des hommes. Ceux qui apprirent à le semer, à le garder, à e moudre, à le pétrir, donnèrent le pain au monde, et furent regardés comme les pères nourriciers du genre humain. Des peuplades errantes devinrent des peuples sédentaires et domiciliés, et de-là s'élevèrent de loin en loin et de canton en canton, d'abord les villages, ensuite les villes. Les hommes les plus riches se rassemblèrent dans les villes; ils convinrent de suivre les mêmes lois; et ils établirent autour d'eux les arts; mais le plus utile, et le plus estimable des arts, fut toujours l'agriculture. Chez les anciens Perses, elle étoit

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honorée; et les principales fêtes des mages, qui étoient les prêtres de la religion persane, consistoient dans la célébration des grandes époques de la culture, telles que les semailles, la levée du blé, la moisson, et l'offrande solemnelle des gerbes, faite à la divinité du pays. Dans l'empire de la Chine, qui est presque aussi étendu que l'Europe, et qui subsiste depuis trois mille ans au moins l'agriculture est le premier article de la politique, et un des premiers de la religion. C'est un usage immémorial de ce superbe empire, qu'au renouvellement de chaque année, l'empereur, en présence de son peuple et de sa cour, laboure et sème de sa main deux ou trois sillons, dans lesquels il enfonce un soc qui est tout doré, parce que la vanité se mêle toujours aux meilleures cérémonies des rois. Celui de la Chine met cependant sa vanité la mieux entendue, à se montrer le premier laboureur de ses états immenses; et tous les ans il fait distribuer, dans un million de villages, un million d'exemplaires du calendrier national, qui est l'abrégé de tout ce qu'il importe au peuple de savoir. Le peuple Romain, qui fut autrefois le conquérant et le législateur du monde entier attachoit une importance extrême à l'agriculture. Il regardoit la profession du laboureur, comme aussi glorieuse que celle des guerriers et des sénateurs. Ceux-ci, en quittant le sénat ou l'armée retournoient noblement à la charrue. Tant que ces mœurs durèrent, le peuple Romain fut invincible, Le mépris de la culture, des lois et des vertus, bouleversa Rome, et livra l'Europe à l'invasion des peuples du Nord, célèbres sous le nom de Goths et de Vandales. Ces Bar

bares avoient, comme tous les brigands, le travail en horreur. Ils forcèrent les naturels du pays qu'ils avoient conquis à travailler à travailler pour eux, et alors commença le systême abominable de la main - morte, de la roture, de la corvée et de la taille. Ce systême, nommé gouvernement feodal, nâquit au milieu du carnage, et couvrit tous les villages de l'Europe de calamités et de misère. Le paysan, en Pologne, où ce gouvernement subsiste en entier, est un esclave, un forçat ; et son seigneur peut le tuer impunément. Dans plusieurs cantons de l'Allemagne, il existoit une loi, digne des Goths et des Vandales : elle condamnoit tout paysan qui tuoit un cerf, à être attaché sur un autre cerf que l'on abandonnoit avec lui dans les bois. Le paysan François ne fut jamais exposé à de telles barbaries cependant il gémissoit sous une quantité innombrable de droits féodaux. L'assemblée nationale la délivré d'une partie de ces droits et lui a permis de se racheter des autres. va renaître. Il va reprendre sa dignité. Elle consiste dans l'utilité de son travail et de la sagesse de ses mœurs. Mais il a besoin, pour l'une et pour l'autre, de sortir de cette ignorance où l'a retenu si long-temps un gouvernement qui n'étoit guère plus éclairé que les villages. Ce gouvernement ayant changé au profit des campagnes, leurs habitans doivent se rendre dignes de ses bienfaits, et s'éclairer comme lui. La richesse de leurs terres et la prospérité de leur condition dépendent des bonnes lois et des heureuses découvertes. Ils doivent donc s'appli quer à les connoître. C'est alors qu'ils seront véritablement au pair des citoyens les plus distin

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