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volution, j'en ai horreur; rendez-là pure, je l'aimerai. Quoi! il suffira de se dire Ecrivain Patriote, Citoyen Patriote, pour que le plus épouvantable cinisme, la plus grossiere férocité obtienne des applaudissemens et des défenseurs!»

Il est un autre genre d'Ecrits contre lesquels la Liberté de ce moment-ci voudroit fort diriger toute la' sévérité de l'ancienne inquisition; ce sont ceux où Fon s'explique librement sur les inconvéniens ou les imperfections de la Constitution. Le patriotisme exterminateur n'en end pas que la Liberte s'étende sur cette partie de notre horison politique, mais cette démence ne peut être consacrée par une Loi : nous devons tous fidelité et obéissance à celles sanctionnées et promulguées, et nous devons ensuite concourir par nos efforts et nos lumières,l faire corriger celles qui sont défectueuses; ce qui ne permet pas seulement, mais commande à tout Citoyen instruit, le plus libre examen de la nouvelle Constitution. Ceux qui professent des maximes contraires peuvent avoir sur les lèvres, mais non pas dans le cœur, le sentiment de la liberté et du patriotisme. Ah! les François rougiront de célébrer la vertu sous l'emblême des furies."

Que dis-je? les François! il en est peu désormais dont l'ivresse se prolonge; ils se reveillent au bruit de nos débats; le tumulfe de nos Séances calme les Spectateurs, et Bientôt dans le sein des familles, on nous demandera compte du trouble qui les agite et des maux quis menacent: on confrontera les Ecrits odieux que j'ai dénoncés, leur funeste influence, et tout ce qui vient d'être allégué pour leur défense; et si quelque Manlius couvert de crimes venoit nous dire:

Tai sauvé le Capitole, on se souviendra de la roche Tarpeienne. Qu'on ne se flatte pas de rendre toujours impuissante la voix des gens de bien; il ne faut peut-être que quelques nouveaux outrages, quelques crimes de plus dirigés contre eux, pour leur donner un empire irrésistible, et pour rallier à eux tous les hommes honnêtes qui veulent la liberté, mais qui détestent l'anarchie que nous assure de plus en plus l'impunité des scélérats.

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Ces salutaires vérités, dont le triomphe tardif n'en sera pas moins sûr, ne firent aucune impression. La pluralité refusa de se rendre à une application aussi raisonnable des Lois de tous les Peuples libres et policés; MM. Garat Paîné et Dupont tentèrent vainement de se faire entendre; Pacharnement redoubla: Nous ne quitterons pas la Salle que nous ne l'ayons emporté, eria de nouYeau M. Cottin. Il étoit minuit: un appel nominal eût consumé deux heures; enfin, au milieu du tumulte, on passa en Décret l'avis de M. Camus.

"L'Assemblée Nationale décrète qu'il ne pourra être intenté aucune action ni dirigé aucune poursuite, pour les Ecrits qui ont été publiés jusqu'à ce jour sur les affaires publiques, sauf néanmoins contre un Ecrit intitulé C'en est fait de nous. Et cependant l'Assemblée Nationale, justement indignée de la licence des Ecrivains, dans ces derniers temps, charge son Comité de Constitution et de Jurisprudence Criminelle réunis, de lui proposer un mode d'exécution du Décret du 31 Juillet dernier.

DU MARDI 3 AOUST.

Les témoins de la Séance d'hier au soir,

l'ont été qu'au milieu du désordre et du tumulte, les trois quarts des Députés ignorerent même le Décret qu'ils avoient rendu. En conséquence, ce matin, MM. Malouet, d Folleville, Dupont, etc. oat remontré que Je Décret devoit intimer aux Comités de Constitution et de Legislation criminelle, de présenter le travail dans le plus bref délai; ils avoient ainsi entendu voter cette disposition, et si l'Assemblée l'avoit omise, il importoit de l'ajouter au procès-verbal.... Nombre d'exemples autorisoient de semblables additions. M. Dupont alloit en prouver la nécessité: des brouhahas, des cris forcenés ont repoussé toutesses tentatives pour prendre la parole: ses réflexions qu'on refuzoit d'écouter, n'étoient pas, disoit-on, à l'ordre du jour.

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entre

M. de Macaye, au nom du Comité des Recherches a fait le rapport des troubles du Département du Loiret, tenus par un Ecrit incendiaire, intitulé Réponse des Officiers Municipaux des Paroisses de Campagne du Gâtinois, au Dépar tement du Loiret, Autant voler, dit l'Auteur, que payer les champarts et les droits féodaux. Tous les moyens imaginables sont employés pour exciter le Peuple à la révolte, et le préparer aux brigandages. Il faut pendre, y est-il dit, non seulement ceux qui percevront les champarts et les droits féodaux, mais encore ceux qui les paieront. Une potence a été dressée à cet effet dans la Paroisse de Joai. Celui qui l'a dressée interrogé sur ses motifs, a répondu qu'il obéissoit à la Municipalité, dont la volonté expresse étoit de faire pendre tous ceux qui acquitteront les droits de champart. Le Rapporteur a proposé un projet de Decret.

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M. Dupont est enfin parvenu à se faire entendre, et à donner l'énergique Commen taire des plaintes patriotiques que M. Malouet et plusieurs autres n'ont cessé d'élever inutilement depuis six mois, sur l'affreuse anarchie qui s'aggrave de jour en jour.

Je demande, a dit M. Dupont, que le Décret du Comité des Recherches, contre les désordres du Gâtinois, soit rendu géné ral. Comment oserez-vous poursuivre le libelle exécrable qu'on vous dénonce aujourd'hui, après le Décret que vous avez rendu hier? L'insurrection a peut-être commencé votre ouvrage, la paix seule peut le terminer, l'impunité le détruira. L'art d'exciter à la révolte s'est prodigieusement rafiné, et se perfectionne chaque jour. Je vous aurois exposé hier, avant votre Décret, les progres de cet art effroyable, si j'eusse obtenu la parole; je l'aurois fait ce matin si on ne me l'eut ôtée. Je ne serai pas moins courageux que le vertueux Démeuniers, qui vous a dit hier qu'en vous déclarant la vérité, il ouvroit peut-être sa poitrine au fer des factieux, et puisqu'on a feint de ne pas l'entendre, parce qu'on l'entendoit trop bien, je serai plus clair.

"Vous avez vn croître l'habileté à répandre des Motions d'assassinats, à former des groupes, par le secours de cinq ou six personnes seulement, qui se dispersent ensuite dans d'autres groupes, où, par des calomnies, par des récits infideles, par l'intervention supposée de quelques personnages iliustres, ils égarent un Peuple crédule qu'à l'avance des ecrits affreux animent à la cruauté. Vous avez vu, il y a peu de jours, sous les murs de cette salle, un exemple du désor

dre que peuvent occasionner quelques scélérats audacieux et payés. Il se fomentoit une émeute pour obtenir le renvoi des Ministres. Ce ne sont qu'une quarantaine de Citoyens, vous a-t-on dit; il est vrai que peut-être n'en avoit-il coûté que 40 écus. J'ai entendu ce soir même, au Palais Royal, au milieu d'un groupe de furieux, wn Chef subalterne de ces scélérats se vanter à haute voix de la menace qu'ils ont faite à vos Huissiers. Pen s'en est fallu qu'en effet les têtes des proscrits ne fussent coupées sur la terrasse des Tuilleries, et qu'on ne soit ensuite venu vous les présenter à la barre. J'ai les preuves certaines que le projet en a été for mé, et que l'activité de M. de la Fayette et le zèle de la Garde Nationale l'ont seuls fait avorter.

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Un nouveau degré de scélératesse et de noirceur a été déployé. Des Brigands ont été apostés dans le Pa'ais Royal; on a ameuté le Peuple contre les marchands d'argent, et contre de Pauvres Commissionnaires? Quels étoient les exécuteurs de ces violences? des personnes qui n'avoient pas de billets, qui n'ont peut être jamais possédë 200 liv. en leur vie. La lanterne, dont les Avocats-généraux soutiennent tant l'homme qui s'en est déclaré le Procureur général, la lanterne a été descendue. Quel étoit ce projet qu'on cût exécuté sans l'activité de la Garde Nationale? On vouloit faire resserrer largent par la crainte, pour discréditer les assignats, pour vous forcer à grever le Peuple de nouveaux impôts, et à le rendre plus facile à soulever. On vouloit forcer, par la crainte, quelque porteur d'argent, quelque malheu reux, vivant de ce commerce, à déclarer qu'il

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