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racine, radix, la tige, culmus, & les feuilles, font dans l'état le plus fain & le plus robufte. Le mal s'eft-il introduit par l'extrémité des feuilles fupérieures, qui, étant roulées fur elles-mêmes, forment un tube ouvert par le haut?

J'ai plufieurs plantes de froment & d'avoine, dont le bas de la fructification, pars inferior fructificationis, eft totalement détruit par la nielle, & la partie fupérieure eft compofée de femences parfaites. Cela ne viendroit-il pas de ce que, pour l'ordinaire, les fleurons inférieurs, flofculi inferiores, s'ouvrent les premiers dans la floraifon?

Jufqu'ici, toutes les différences, dans les bleds niellés dont j'ai parlé, font formellement oppofées au fentiment de M. le Baron de Munckhaufen, puifque la fructification feule eft infectée de pouffière noire, tout le refte de la plante étant parfaitement fain: mais voici d'autres obfervations qui s'ajuftent mieux à fon fyftême,

SECONDE DIV VISION.

La nielle, qui n'attaque que les feuilles, uftilago foliorum, se préfente bien moins fouvent que les précédentes; je ne l'ai rencontrée que deux fois, fous deux formes particulières, que je rangeraj fous les deux fubdivifions fuivantes.

S. 1.

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La première variété confifte, en ce que l'intérieur des feuilles eft cannelé dans toute fa longueur & les canelures font remplies d'une pouffière infiniment déliée, plus jaunâtre, mais de la même nature que celle dont j'ai parlé jufqu'ici. J'ai trouvé cette nielle fur le Poa aquatica qui croît le long de tous nos canaux. La racine & la tige font dans l'état le plus naturel; la fructification, ou le panache, eft foible, maigre, & paroît avoir fouffert; les feuilles inférieures font plus endommagées, canelées plus profondément; les feuilles fupérieures font entièrement faines. Les côtes de la feuille qui forment, ou qui laiffent entr'elles les canelures, font faines & fortes, enforte que la feuille fe foutient & ne paroît altérée que quand on la regarde de près; d'ailleurs, l'extérieur de la feuille eft dans fon état naturel.

§. 2.

La feconde variété eft précisément le contraire de la précédente, avec quelque différence. L'intérieur des feuilles eft fain & naturel,

mais la fuperficie extérieure eft toute couverte de petits grains noirs, qui lui font fortement adhérans, & qui la rendent rude au toucher. A l'aide d'un très-bon microfcope, ces grains fe font trouvés les mêmes que tous les autres, mais ils font adhérens, & la feuille n'eft point canelée. J'ai trouvé cette variété, il y a un mois, au commencement de Juillet, fur le rofeau ordinaire, arundo phragmises depuis, à la fin d'Août, il ne s'eft point encore formé de canelures. J'ai trouvé un très-grand nombre de ces plantes viciées; les feuilles inférieures étoient très-endommagées, & les fupérieures très-faines. La fructification n'avoit point encore paru.

TROISIÈME DIVISION.

La nielle, qui s'attache uniquement à la tige, uftilago culmi, est encore plus rare que toutes les autres. Je la retrouve tous les ans au même endroit, mais fur une feule & même plante vivace, qui croît fur la Dune la plus proche de la dernière Auberge de Scheveningen, fur le bord de la mer. Ceux qui peuvent confulter Morifon, Plant. Hift. Univ. Oxon. Tom. III, Sect. 8, tabula 2, fig. 12, auront une idée beaucoup plus claire de la plante dont je parle, que par le moyen de toutes les defcriptions que j'en pourrois donner. Cette figure eft parfaite il faut fimplement ajouter que, fous les feuilles qui quelquefois font un peu pâles, mais fouvent aufli font vertes & naturelles, depuis la racine jufqu'au fommet de la plante, la tige, culmus, eft abfolument charbonnée, comme une branche de bois qu'on auroit brûlée & éteinte pour faire un charbon. Lorfqu'on ouvre les feuilles, la tige laiffe tomber une grande quantité de pouffière noire, dont les grains font totalement femblables à ceux que j'ai tant de fois cités.

Comme cette plante ne porte jamais de fructification, il ne me paroît pas poffible d'affurer pofitivement quelle eft l'espèce dont la maladie a lieu; mais à en juger par les feuilles qui font faines & par les autres plantes qui l'environnent, ce doit être la nielle du Triticum junceum, uftilago Tritici juncei, ou uftilago Elymi arenarii.

Après avoir répondu, le plus clairement qu'il m'a été poffible. aux juftes defirs de M. l'Abbé de Cafa-Nova, qu'il me foit permis de dire deux mots de ce que je penfe fur toutes les obfervations microfcopiques qui ont été faites jufqu'à ce jour fur la nielle.

On a pris des corps folubles, corpora folubilia, on les a fait infufer, macérer, fermenter, pourrir quelquefois, dans de l'eau tiède, ou entretenue à un certain degré de chaleur, pendant un certain tems; qu'en est-il résulté ? La liqueur a détaché du corps foluble

de petites molécules de matières très-déliées, le mouvement naturel à tous les fluides, celui de la fermentation, qui eft encore bien plus violent, a fait mouvoir ces molécules de matière, en tout fens, ou en différens fens déterminés, par rapport à leurs maffes, au degré de fermentation, &c. & l'on a pris ces molécules agitées pour des animaux; enfin, on les a rangées, dans le règne animal, fous les noms de Chaos uftilago & de Chaos infuforium. Je prie les Naturaliftes, qui ont le SYSTEMA NATURE, Editio Holmia, 1767, de lire, de fang froid, la définition générique de CHAOS, page 1326, & de dire s'ils ne reconnoîtront pas la complaifance de l'immortel Chevalier VON - LINNÉ pour M. de Munckhaufen & d'autres; & fi le bon fens & la jufteffe du Naturalifte ne brillent pas dans ces derniers mots de la note au bas de la même page: Animatum vix Dixero?

Pour revenir à la nielle, uftilago, n'ayant point de fyftême à propofer pour en découvrir la nature; je prends la liberté d'exhorter tous les Amateurs de l'Hiftoire Naturelle & de l'humanité, qui pourront le faire commodément, de fe tranfporter à la campagne, proche des terres enfemencées de grains, cerealia, & là, d'obferver le plus implement qu'il fera poffible, pendant quinze jours ou trois femaines au plus, tempore florefcentia, tous les changemens qui arriveront aux plantes qu'ils auront fous les yeux. Il me paroît impoffible, avec des obfervations aufli fages, de ne pas découvrir un myf tère caché depuis fi long-tems. Qui fait fi la Nature, prise ainfi réellement fur le fait, ne nous procurera pas l'avantage de pouvoir dire quelque jour, avec plus de vérité qu'Horace:

Nec fterilem feges fentiet rubiginem.

Telle eft, Monfieur, la Réponse que j'ai cru devoir au favant Mémoire de M. Roffredi. Si vous croyez qu'elle puiffe être de quelque utilité à ce zélé Naturalifte, & au Public, vous m'obligerez de Pinférer dans votre Journal.

OBSERVATIONS

OBSERVATIONS

Sur la LARME BATAVIQUE;

Par M. MAUPETIT, Chanoine Régulier de la Congrégation de France, & Prieur de Caffan.

ES

LE's invitations réitérées que vous faites à tous les amateurs de la partie qui compofe votre Journal, de vous adreffer les nouvelles découvertes , m'engagent à vous envoyer l'explication du phénomène de la Larme Batavique, qui étonne tous les Phyficiens, & dont on n'a point encore donné d'explications fatisfaifantes.

La Larme Batavique fe forme en laiffant couler dans l'eau froide, une goutte, fi je puis ainfi m'exprimer, de verre mis en fufion; cette feule opération la rend capable de quatre phénomènes : le premier, eft fa folidité, qui eft au point de réfifter aux coups réitérés du marteau, ce que ne fupporteroit point un morceau de verre de même groffeur qui auroit refroidi infenfiblement.

Le fecond eft l'explofion qui fe fait lorfque l'on caffe la pointe de la larme.

Le troisième est le peu de bruit qu'elle fait en éclatant, qui ne paroît pas proportionné à fa folidité.

Le quatrième confifte dans la qualité des particules de verre (après l'explofion) qui eft réduit en pouffière, & n'a plus le tran

chant du verre caffé.

Pour parvenir à l'explication de ces quatre phénomènes, j'établis, comme fondé fur l'expérience la plus conftante :

1°. Que le verre en fufion tombant dans l'eau froide, fe cal

cine :

2°. Que les morceaux de verre calcinés n'ont point de tran

chant.

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Nota que par verre calciné je n'entends autre chofe, que réduit en morceaux, tels qu'on les voit lorfqu'on a plongé un anorceau de verre chaud dans l'eau froide:

3°. Que lorsqu'un corps quelconque, pénétré d'un feu vif, eft placé dans un milieu froid, la chaleur tend à s'échapper avec impétuofité :

Tome VI, Part. II. 1775.

Fff

4°. Que la chaleur ne peut s'échapper avec impétuofité, d'un fluide, fans entraîner les particules du fluide à fes extrémités : 5. Qu'elle ne peut entraîner les particules du Auide à fes extré mités, fans laiffer un vuide au milieu.

Nota que je ne parle dans la cinquième propofition, que d'un fluide fujet à la congellation, tel que le verre fondu, l'eau, &c.

6o. Qu'en fuppofant un vuide au centre d'un corps folide, l'air extérieur agit de tout fon poids fur les parties de la fuperficie de

ce corps:

7°. Qu'étant preffé par l'air extérieur, il doit avoir une folidité proportionnée à la preffion de l'air extérieur & à la dureté de fes parties. Vous obferverez, M. s'il vous plaît, que dans la fixième & feptième propofition, je ne parle que des corps ronds parfaits, ou ronds allongés, tels que la larme Batavique.

Si l'on fait actuellement attention à la manière de former la larme Batavique, l'on ne pourra difconvenir :

1o. Qu'il n'y ait un vuide dans la larme, felon la quatrième & cinquième propofition.

Donc elle eft preffée par tout le poids de l'athmofphère, felon la fixième; donc felon la feptième, elle doit avoir beaucoup de folidité, puisqu'elle eft compofée de parties très dures de leur na

ture :

2°. Que la larme Batavique eft un verre calciné felon la première; donc felon la feconde, les morceaux ne doivent pas avoir de tranchant.

Pour entendre l'explication des deux autres phénomènes, il faut faire attention que le vuide qui fe trouve dans la partie la plus épaiffe de la larme, diminue à mesure qu'il approche de la partie la plus mince, devient infenfible, & enfin diminue au point de n'avoir point affez de diamètre pour recevoir une bulle d'air.

Il eft conftant que l'air extérieur entre avec impétuofité, puifque felon les troisième, quatrième & cinquième propofitions, il y a un vuide dans la larme; donc felon la fixième, l'air preffe de tout fon poids, donc il entrera avec impétuofité, puifqu'on lui a ouvert un paffage capable de le recevoir; donc la larme doit éclater, puifqu'elle ne tire la plus grande partie de fa folidité, que de la presfion de l'air extérieur qui n'a plus lieu.

Il ne me reste plus à prouver autre chofe, finon que l'explofion ne doit pas être proportionnée à la folidité apparente de la larme; les particules de la larme font calcinées ; c'est-à-dire, désunies selon la première propofition:

Donc elles n'avoient de folidité, c'est-à-dire, d'union entr'elles,

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