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l'extrait pour ce qui eft des vertus aftringentes & corroborantes, ils l'attribuèrent à une terre inconnue jufqu'à préfent.

26. Mais, enfin, je laiffe aux Praticiens à décider fur les bons effets que doit produire la félénite dans l'économie animale ; elle ne convient point à la délicateffe de mon tempérament, quoique je fache bien que dans l'ancienne médecine on l'employoit communément contre les dyffenteries, dans les diarrhées, & que même encore certains tempéramens fe trouvent très-bien de fon usage (1).

(1) J'ai cru devoir donner la Traduction de cette Differtation fans y rien ajouter, parce que les différens principes qu'elle renferme, & qui pourroient être fufceptibles de quelques remarques, fe trouvent développés & difcutés d'une manière très détaillée & très favante dans les Obfervations & Additions dont M. Parmentier a accompagné les Récréations phyfiques, économiques & chymiques de M. Model; le jugement favorable que le Public a porté fur ce Recueil précieux, me difpenfe encore d'en faire ici l'éloge; je me bornerai feulement à indiquer l'endroit où il fe trouve. Chez Monory, Libraire de S. A. S. Monfeigneur le Prince de Condé, rue & vis-à-vis l'ancienne Comédie Françoise.

TROISIÈME MÉMOIRE

SUR LES

ABEILLES,

Où l'on expofe les principaux Résultats des nouvelles Expériences qui ont été faites fur ces Mouches dans le Palatinat;

Par M. BONNET, de diverfes Académies.

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IL s'eft formé à Lauter, dans le Palatinat, une Société Economique fur le modèle de celle de Luzace, & que l'Electeur Palatin, par une fuite de fon zèle pour les progrès de l'Hiftoire Naturelle, vient d'autorifer en lui accordant des Lettres-Patentes. M. Riem, Maître en Pharmacie, digne Membre de la Société naiffante a répété avec foin les expériences de M. Schirach, & ce que les abeilles lui ont offert eft fi contraire à tout ce que l'Obfervateur de Luzace m'avoit écrit, que rien ne confirme mieux ce que je difois en terminant mon fecond Mémoire : Que le nombre des vérités que nous poffédons fur ce fujet eft bien petit en comparaifon du nombre de celles dont la découverte eft réfervée à nos defcendans. Quel abíme aux yeux du Sage, qu'une ruche d'abeilles ! Quelle fageffe profonde fe cache dans 1775. JUILLET.

!

cet abime! Quel Philofophe ofera le fonder! Je n'imaginois pas en écrivant ceci, que je touchois au moment où de nouvelles expériences viendroient appuyer cette réflexion, & me préfenter les faits les plus imprévus, & les plus oppofés à tout ce que les meilleurs Obfervateurs nous avoient appris fur la police des abeilles.

M. Riem a bien voulu me communiquer très en détail fes déCouvertes les foumettre à mon examen, & m'établir juge entre lui & M. Schirach. On comprend bien que je me fuis abftenu de prononcer entre nos deux Ariftomachus: je les ai écoutés tous deux avec la plus grande attention, & j'ai renvoyé la décifion de la caufe à la Nature elle-même, qui s'expliquera, fans doute, quelque jour, par le ministère de l'un ou de l'autre, ou par celui de quelques autres Obfervateurs qui fçauront imaginer de nouveaux procédés pour lui arracher cette décifion.

M. Riem avoit publié en Allemand la fuite de fes expériences des années 1769 & 1770. Il a eu la politeffe de me les faire traduire en François; mais il a été fi mal fervi par le Traducteur, que je n'ofe me flatter d'avoir toujours parfaitement faifi le fens de l'Auteur. Quoi qu'il en foit, je me bornerai ici aux principaux réfultats, & j'avertirai que ce qu'on va lire eft le Précis. d'un écrit de plus de cent pages.

Réfultats des Obfervations de 1769.

I. M. Riem affure que M. de Réaumur fe trompoit, quand il penfoit que la reine-abeille favoit difcerner la forte d'œufs qu'elle alloit pondre, & qu'en conféquence elle dépofoit cet œuf dans la cellule qui lui étoit appropriée (1). M. Riem s'eft convaincu que la reine abeille pond indifféremment les trois fortes d'œufs dans des cellules communes, & que ce font les abeilles ouvrières qui tranfportent chaque forte d'œuf dans la cellule qui lui eft appropriée.

II. Notre Obfervateur croit être fondé à en inférer, que cette adreffe des ouvrières a trompé M. Schirach, & lui a donné lieu de penfer que des vers communs pouvoient donner des reines.

III. M. Riem a obfervé l'accouplement de la reine avec les fauxbourdons, & il eft dit que tout ce qui fe paffe dans cet accouplement a été décrit avec exactitude par M. de Réaumur.

IV. Le Naturalifte de Lauter affirme, qu'il a vu fortir d'entre les anneaux des ouvrières de la matière à cire, que cette matière

(1) Voyez l'Introduction de mon premier Mémoire, Journal de Phyfique, Avril

1775, page 327.

fembloit

fembloit tranfuder de l'intérieur, & que c'est avec cette cire tranfpirée qu'elles forment les commencemens des cellules.

V. Il s'eft affuré que les aufs fe confervent dans les cellules pendant plufieurs mois de la mauvaise saison, sans s'altérer & fans que le ver en éclofe.

VI. M. de Réaumur n'avoit pu découvrir fur quelle espèce de plantes les ouvrières récoltoient la propolis: notre Obfervateur nous apprend que c'eft fur les pins & fur les fapins. Il dit qu'on voit des abeilles Ouvrières fe charger des pelottes de cire non vierge ou de cire qui a été exprimée des gâteaux par art, & qu'on expofe en vente dans les boutiques.

Résultats des Obfervations de 1770.

I. M. Riem avoit renfermé quatre petits gâteaux dans quatre caiffes de l'invention de M. Schirach : il n'y avoit qu'un feul ver dans chaque gâteau. Il donna l'effor aux abeilles le fecond jour. Elles ne récoltèrent rien, & il trouva que le ver s'étoit defféché. Il revient à conjecturer, qu'il étoit refté des œufs de reines dans les gâteaux mis en expérience par l'Obfervateur de Luzace, & que les ouvrières avoient foigné ces œufs, dont il étoit éclos des reines.

II. M. Riem a vu conftamment dans toutes ces expériences, que les ouvrières tranfportoient les œufs & les plaçoient relativement à un certain but qu'elles fembloient fe propofer.

III. Il n'admet pas que les ouvrières détruifent les cellules communes pour élever fur la place une cellule royale, comme l'a décrit M. Schirach (1). Notre Obfervateur foutient que ce procédé n'eft point du tout celui auquel les ouvrières ont recours, & qu'elles fe bornent à transporter au befoin au befoin, un auf de reine d'une cellule commune dans une cellule royale.

IV. Notre patient Obfervateur ayant renfermé de petits gâteaux avec des abeilles ouvrières, fuivant la méthode de Luzace, il vit les aufs fe mutiplier dans les cellules, fans qu'il pût découvrir aucune reine. Il fut porté à en inférer, que les ouvrières pondoient au befoin, & qu'elles donnoient ainfi naiffance à des vers de l'un ou de l'autre forte.

V. Il rapporte fur ce fujet des expériences qui femblent décifives & dont les réfultats renverfent un des principaux fondemens

(1) Confultez la Lettre que M. Wilhelmi m'a écrite fur ce fujet, & que j'ai tranferite en entier dans mon fecond Mémoire. Journal de Physique, Mai $775JUILLET. D

Tome VI, Part. II. 1775.

de la Théorie Réaumurienne. Il avoit enlevé tous les œufs & tous les vers d'un gâteau, après l'avoir renfermé à la manière de M. Schirach. Il avoit approvifionné la petite ruche, & y avoit fait entrer un certain nombre d'ouvrières. Le premier & le fecond jour, les abeilles travaillèrent diligemment. Sur le foir du fecond jour, il examina attentivement l'intérieur de la ruche : il affure qu'il n'y trouva que des abeilles ouvrières, & ce qui étoit bien étrange, il y avoit plus de trois cens œufs dans les cellules.

VI. Plus le résultat de cette expérience étoit contraire à tout ce qu'on favoit fur les abeilles, & plus cette expérience demandoit à être répétée. Notre judicieux Obfervateur, qui le fentoit fortement, ne tarda donc pas à la répéter. Il purgea un gâteau de tous les aufs qu'il renfermoit, examina de nouveau les abeilles, & les replaça avec ce gâteau dans la même caiffe. Les abeilles y étoient en petit nombre. Elles fortirent pour récolter, & apportèrent à la ruche de la cire attachée à leurs jambes poftérieures. L'Obfervateur dit là-deffus, qu'il fit une férieufe attention, & à différentes reprifes, pour voir fi aucune abeille n'entroit point dans la caiffe avec des œufs, mais qu'il ne put rien découvrir de femblable. Qu'ayant enfuite ouvert la caiffe, en préfence d'un ami intelligent, & ayant examiné foigneufement le gâteau, ils y trouvèrent de rechef plus d'une centaine d'œufs.

VII. L'Obfervateur laiffa enfuite les abeilles à elles-mêmes, & il dit qu'elles couvèrent deux fois quelques vers dans des cellules royales qu'elles avoient nouvellement conftruites, qu'elles couvèrent d'autres vers dans des cellules des mâles auffi nouvellement conftruites, & qu'elles laifsèrent l'amas d'œufs fans y toucher.

VIII. L'Obfervateur prévoyant qu'on pourroit lui objecter, que les abeilles de fa caiffe s'étoient introduites dans des ruches étrangères, & qu'elles y avoient dérobé des œufs qu'elles avoient tranfportés dans leur propre habitation; il tenta l'expérience fuivante. Il mit en expérience deux gâteaux où il n'y avoit ni œufs ni vers, & il renferma avec eux un certain nombre d'abeilles ouvrières. Il ferma l'ouverture ou la porte de la caiffe avec une planchette à petits trous & tranfporta la caiffe dans un poële où il la laiffa pendant la nuit c'étoit en Octobre. Le lendemain au foir, il ouvrit la caiffe & examina les deux gâteaux. Il n'obferva rien de remarquable dans le premier, mais le fecond lui offrit plufieurs œufs, & les commencemens d'une cellule royale au fond de laquelle il n'y avoit en

core ni ver ni œuf.

Je n'ai donné ici que les résultats des obfervations qui m'ont paru les mieux conftatées & les plus intéreffantes. Je me ferois étendu davantage, fi j'avois pu faifir par-tout le véritable fens de mon

Auteur. Mais je ne faurois dire combien le volumineux Mémoire qui m'a été adreffé eft obfcur. Il fourmille de fautes de ftyle, qui n'accroiffent pas peu l'obfcurité. Je penfe bien que ces fautes doivent être mifes principalement fur le compte du Traducteur qui par malheur n'entendoit pas mieux la matière que la langue. Il est fort à defirer que l'Ouvrage Allemand de M. Riem tombe un jour entre les mains d'un Traducteur plus éclairé & qui fache manier plus heureufement la langue Françoife. Je prie donc mes Lecteurs de ne juger point des recherches de M. Riem par la groffière efquiffe que je viens d'en crayonner. Elle fuffira au-moins pour exciter la curiofité des Amateurs & les mettre fur les voies de perfectionner l'hiftoire des abeilles, que nous ne devons regarder que comme légèrement ébauchée. Les nouvelles découvertes de Luzace & du Palatinat en étendant nos vues fur ce fujet, & en multipliant nos doutes, nous montrent avec quelle circonfpection le Naturalifte Philofophe doit procéder dans la recherche fi difficile des loix qui régiffent les êtres vivans, & avec quelle fageffe il doit fufpendre fon jugement fur les premiers résultats de fes tentatives. Je l'ai fouvent répété dans mes écrits, & je ne pouvois trop y infifter; l'Hiftoire Naturelle bien maniée fera toujours la meilleure logique. » Les logiques les plus vantées, difois-je dans la contemplation de la Nature (1), font trop dé» pourvues d'exemples puifés dans la Nature: une meilleure logique » encore eft un Ouvrage d'Hiftoire Naturelle bien fait & bien penfé. » Là fe trouvent peu de préceptes, mais beaucoup d'exemples, qui » inftruisent davantage & fe gravent mieux dans le cerveau. La mar» che d'un Réaumur, d'un Trembley, en dit plus que les Nicole & »les Wolf «. J'ajouterois que l'Hiftoire Naturelle eft une logique

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réduite en action.

Je place à la fuite de ce Mémoire la lettre que j'ai écrite à M. Riem, en réponse à l'envoi de fes obfervations. Elle aidera à faire juger ce qu'on doit penfer des découvertes de cet Amateur.

A Genthod, près de Genève, le 13 Juillet 1771.

» Je réponds bien tard, Monfieur, à votre obligeant envoi: » mais il m'est parvenu dans des circonftances qui ne me permet» toient pas de donner à vos obfervations l'attention qu'elles méri

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» tent.

» Vos Traducteurs me le pardonneront fi je dis, qu'ils n'ont pas

(1) Part. VIII, Chap. XVI.

1775. JUILLET.

D 2

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