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Ces remarques font juftes & faites pour la pratique. Elles paroîtront nouvelles à bien des lecteurs: &, à la vérité, il y a peu de perfonnes capables de comprendre le discours du docteur Gregory, qui n'en retireront de l'inftruction & de l'agrément.

ART. VII. Effai fur le caractere du HAMLET de Shakespear; par M. Robertson, miniftre de Dalmeny.

Cet effai n'eft pas fans mérite : il donne une raifon plus ample & plus naturelle de ce perfonnage extraordinaire, que celle qu'on peut retirer des remarques de tous les commentateurs de Shakespear.

(Monthly review.)

L'HISTOIRE-UNIVERSELLE, comédie en vers, en deux actes, mêlés de vaudevilles & d'airs nouveaux, représentée au théatre de MONSIEUR, le 15 mai 1791, pour la vingt-feptieme fois, par LE COUSIN JACQUES. A Paris, chez l'auteur, au bureau d'abonnement des Nouvelles Lunes rue Phélippeaux, No. 15.

TANDIS

ANDIS que l'ingénieuse comédie de Nicodême dans la lune continuoit de jouir de fon premier fuccès, le Coufin Jacques a fait représenter celle que nous annonçons, & dans laquelle l'originalité, la gaieté de cet écrivain fe remarquent ainfi que dans la précédente; mais nous n'en croyons pas,

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le fujet auffi heureux. Il a plus de morale & de philofophie que le premier; mais il a moins d'unité dans fon objet, dans fa fable, & moins d'action & de plaifanterie naturelle & vraie.

L'ancien lieu commun de morale, que nul n'eft content de fon état, qu'on ne trouve perfonne qui ne fe plaigne de fa fituation, &c., eft le fond de ce drame. Pour lui donner quelque mouvement, l'auteur place la fcene dans une auberge où il arrive beaucoup de monde. Cette auberge eft aux frontieres du royaume (*), fur une grande route qui fépare du village un château dont le poffeffeur, M. Valsain, rêveur, sombre & ̧triste, fe plaît à inviter la jeuneffe du pays à n'avoir d'autres occupations que les chants, la danfe & une continuelle diffipation.

La scene s'ouvre par un tableau de cette joie infouciante & vague, entretenue dans le village par le trifte feigneur, & dont l'effet immoral & prochain eft d'éteindre ou d'affoupir au moins l'amour du travail chez les gens de la campagne, à qui ce feul amour peut donner l'équivalent des biens dont leur condition eft privée dans l'ordre général des chofes.

A droite du théatre, la premiere maison qui

(*) On ne trouve point dans la piece ce qui a pu engager le Coufin Jacques à placer fon action aux fronzieres du royaume. Nous avions cru que, comme il étoit queftion de réunir bien des mécontens, l'émigration devoit y en faire affluer un plus grand nombre qui le fût à tort & à travers; mais cette considération n'y entre pour rien,

fe présente eft l'auberge de Gaillardin, dans lequel on n'apperçoit aucun des vices & des fignes particuliers auxquels fe reconnoiffent les gens de fon état. A gauche, eft un pavillon avec une grille qui termine les jardins du château. Le fond de la grille eft une colline où l'on voit à mi-côte une chaumiere qu'habite le vieux pere Laurent.

Parmi les grouppes de jeunes paysans qui s'amufent & qui chantent, on diftingue un valet de l'auberge, nommé Gentil, efpece de Nicodême ou de bouffen dont une des gaietés eft de rendre la langue qu'il parle ou qu'il chante, prefque inintelligible, à force d'en eftropier les mots pour les adapter à la mesure de l'air ou à celle du rhythme. Nous ne voyons pas trop en quoi confifte le mérite de cet abus peu foutenable de la langue. Si Defpréaux murmura plus d'une fois de la licence de Dancourt, qui, dans fon jargon payfon, donnoit à poing fermé des foufflets à Ronfard, que diroit-il de la charge théatrale de nos Nicodêmes modernes ?

Gentil eft amoureux de Fanchette, fille de Gaillardin; elle s'amufe de ce nigaud-là; c'eft ce qu'il nous apprend lui-même par ces deux

vers :

J'fuis l'valet du papa, j'fais ma cour à la fille :
Eh ben! j'fuis mal venu de toute la famille.

Fanchette le détourne de fon service pour danfer une ronde : il lui dit :

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Q'quoiqu'rous refufiez tout, moi, je n'vous s'fuse tien

& après avoir poté fa pile d'affiettes, il fe met à danfer avec les autres. A l'arrivée de Gaillardin, il quitte la ronde, & recourt à fes affiettes, tandis que l'aubergifte murmure contre les danfeurs, qu'il traite de la maniere fuivante :

AIR: Mon pere eft cocu.

Quoi, toujours ici,

Ces beaux enfans-ci
Qui, loin de leurs parens,
Perdent toujours leur tems!
Oh! oui, fi ce train
Ne prend pas de fin,
Oui, nos habitans

Seront des fainéans.

Aux garçons.) A l'ouvrage.
(Aux filles.) Au ménage..
De pareffeux qu'est-il befoin?

Ce qui fâche Gaillardin, c'eft que fa fille Fanchette préfide à tout ce tapage. Il gourmande l'imbécille Gentil, qui fe plaint de fon fort tout comme un autre.

Bon, (dit-il) je vois tout le monde, à commencer par lui ;
Mécontent de fon fort, accufer la fortune.

Tout ceci, par ma foi! me laffe & m'importune.
Je veux que mon projet s'exécute aujourd'hui,

Aujourd'hui.... tout-à-l'heure, & vraiment cela preffe.

Il écarte d'abord la bruyante jeuneffe en lui reprochant fa fainéantife. Il on eft parmi vous, leur dit-il,

Plufieurs très en état d'aider leur pere & mere;

Mais le nouveau feigneur vient de vous gâter tous. Depuis trois mois & plus qu'il eft dans cette terce,.

Il a, par les bienfaits, écarté la mifere....

Comptant fur les fecours, nul ne veut plus rien faire, On devient pareffeux

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Il apperçoit le feigneur qui vient, & il termine fa réprimande.

Il est toujours rêveur, ( dit-il) comme à fon ordinaire,
Comme il marche à pas lents! Quel fombre caractere !
Toujours à fes vaffaux il prêche la gaieté,
Et de chagrins cuifans il paroît tourmenté.

Les jeunes gens fe plaignent au feigneur de ee que, tandis qu'il leur a permis de paffer le tems à s'amufer, Gaillardin leur en fait un crime. Valfain les y autorife de nouveau en préfence de l'aubergifte, qui lui reproche, on ne fait de quel droit, de favorifer leur pareffe.

Je ne fuis pas, Monfieur, plus ennemi qu'un autre Des plaifirs & de la gaieté,

dit Gaillardin à fon feigneur;

Mais à cet age enfin, trop de facilité

Amene un fort fâcheux quand on parvient au nôtre.

Pour réponse à cette moralité, le feigneur, prenant deux enfans par la main, leur chante le couplet fuivant :

AIR Des femples jeux de fon enfance.

Que ce bel âge de l'enfance
Rappelle d'heureux fouvenirs!
Que le tableau de l'innocence
Offre à mes yeux de vrais plaiGrs!
D'un bien qui n'exike qu'en fonge
Je crois voir la réalisé

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