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vos Prédéceffeurs ont ordonné pour la Réligion, qu'à ce qu'ils ont réglé pour les affaires civiles. Que perfonne n'abufe de vôtre jeuneffe. Si c'eft un Payen qui vous donne ce confeil, qu'il vous laiffe la liberté que vous lui laiffez: car vous ne contraignez perfonne à adorer ce qu'il ne veuț pas.... Je vous demande donc comme Evêque, & au nom de tous les Evêques, qui se joindroient à moi, fi cette nouvelle étoit moins fubite & moins incroyable, de ne rien ordonner fur cette requête. Du moins donnez-en avis à l'Empereur Théodofe vôtre Père, que vous avez accoutumé de confulter dans les grandes affaires. Que l'on me donne copie de la Rélation qui vous a été envoyée, afin que j'y puiffe répondre plus amplement: fi on ordonne autre chofe, nous ne le pourrons diffimuler. Vous pourrez venir à l'Eglife, mais vous n'y trouverez point d'Evêque, ou yous trouverez qu'il vous refiftera, & ne recevra point vos offrandes.

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Valentinien fe rendit aux raifons de St. Ambroife, & la Victoire refta toujours fans autel. Les Payens ne furent pas plus heureux dans la fuite auprès de Théodofe, qui s'emporta beaucoup contre Symmaque,toujours zélé défenfeur des Idoles;

mais il rendit bientôt juftice aux vertus & aux talens de ce grand homme, & il l'éleva au Confulat quelques années après.

Penfées & Réflexions morales fur divers fujets.

Quid verum atque decens curo & rogo, & omnis in hoc fum.

LA

à Avignon 1760.

Horat.

A maniére d'écrire par penfées détachées, flatte par une facilité qui n'est qu'apparente. On n'appercoit que le plaifir de fe délivrer de la gêne d'un plan, & des difficultés de la liaifon des idées. On ne remarque pas que lorfqu'on fe décharge de ces chaines, le Lecteur nous impofe un joug plus rigoureux; c'est de penter toujours, & toujours d'après foimême : autrement il ne trouve qu'un froid Compilateur, qui n'a pas même l'addreffe de lui former une guirlande des fleurs qu'il a dérobées. C'eft ce qui fait que tant d'Ouvrages qui paroissent dans ce genre, réuffiffent fi'peu. On ne tient point compte à l'Auteur du noble motif qu'il donne à fes moralités. On fe

perfuade que c'est moins le defir d'inftrui-¿ re, que l'impuiffance de faire autre chofe, qui l'a rendu l'écho de la Chaire & du Portique.

Ce Recueil ne mérite point d'être confondu dans ce tas de Brochures morales. que nous avons foin de fouftraire à nos Lecteurs. Il n'y a pas d'idées abfolument neuves; mais il y en a que l'on voit avec plaifir,& avec fruit;& en général le style a de la force & de l'élégance. L'Auteur paffe... en revue les plus grands objets, la Réli gion, l'Amour propre, l'Amitié, les Paf fions, les Femmes, le Mariage, les Cha grins. Il finit par des Réflexions fur des fujets divers. Nous pafferons l'article de la Réligion, où nous n'avons trouvé rien de bien remarquable; mais tout y eft très édi-o fiant: nous choifirons dans les autres quel, ques penfées qui pourront faire connoîtreat le tour d'efprit de l'Auteur, & le mérite de l'Ouvrage.

L'AMOUR PROPRE. La crainte de paroure ignorant, eft le plus grand obftacle pour ceffer de l'étre.

Il n'y a que ceux qui n'ont aucune bonne qualité pour balancer leurs défauts, qui n'ont pas la force de les avouer, Henri I

demandant un jour à l'Ambassadeur d'Ef pagne fi fon maître n'avoit point de maîtreffe; l'Ambaffadeur lui répondit que Philippe étoit un Prince réligieux qui n'aimoit que la Reine. Henri répartit avec vivacité: eft-ce que votre Roi n'a pas affez de vertu pour couvrir fon vice?

L'AMITIÉ eft le commerce des ames; celles qui y mettent le plus, font celles qui y goutent le plus de plaifir. Les ingrats ne doivent pas nous rendre affez cruels à nous-même, our nous faire prendre le parti de végéter, tandis que nous fommes faits pour fentir.

On ne fent jamais mieux le befoin de l'amitié, que dans le malheur. Un ami eft pour lors comme un corps flottant qu'un homme prêt à fe noyer faifit avec empreffement, & dont rien ne peut le féparer.

LES PASSIONS. Elles font,fans contredit, la fource de prefque tous les plaifirs; mais elles n'ont jamais fait d'heureux. Les grandes pafions ont fait de grands hommes dans tous les genres ; mais il leur manquoit encore d'avoir fçu vaincre ces mêmes paffions.

La galanterie n'eft point le fimula cre de l'amour, mais fa fatyre. L'amour galant eft rarement tendre, & l'on

perd prefque toujours du côté du fentiment ce que l'on gagne du côté des graces.. Celles de l'amour font l'amour lui même : tout autre ornement lui eft étranger, & le dégrade. Lorfqu'on a bien aimé, quelque refolution qu'on ait formée de ceffer d'aimer; au moment même qu'on croit y être parvenu, on fe furprend aimant encore: on en rougit, mais on eft emporté, & la bleffure fe rouvre fouvent & pendant longtems, avant que de fe refermer pour jamais.

LES FEMMES dans un état privé ne jouent point de rôle impunément. Sont elles galantes? On les méprife. Sont elles intrigantes? On les rédoute. Affichentelles la Science ou le bel-efprit ? fi leurs ouvrages font mauvais, on les fiffle: s'ils font bons, on les leur ote, & il ne leur refle que le ridicule de s'en être dites les Auteurs.

Les femmes devroient au moins ceffer de l'être à quarante ans. C'eft affez d'avoir joué à la poupée pendant vingt-cinq. Qu'on ne s'y trompe pas; les femmes, & furtout les jolies femmmes y jouent plus à dix huit ans qu'à fix.

On ne juge prefque jamais les femmes avec équité. Les jeunes gens qui les aiment, & à qui elles cherchent à plaire, trou

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