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Riom, << attendu que, par ces mots voies publiques, dont se sert l'art. 605, no 2, du Code du 3 brumaire an iv, on ne peut et on ne doit entendre que les rues, places et carrefours des villes et villages, et non les véritables chemins publics, allant de ville en ville ou servant à la desserte des héritages, dont s'occupe spécialement l'art. 48, tit. II, C. rur., du 28 septembre 1791, auquel renvoie le n° 9 dudit art. 605 du Code de brumaire an iv; que ce n'a été qu'en confondant ces deux genres de délits, dont l'un appartient à la simple police et l'autre à la police correctionnelle, à raison de la peine qui peut être infligée à celui qui s'en est rendu coupable, que le tribunal de police de la ville de Riom s'est retenu la connaissance de l'action énoncée contre Mercier, prévenu d'avoir embarrassé et dégradé un chemin public, en y faisant couler les eaux; qu'en se retenant la connaissance de cette affaire, et en la jugeant, au lieu de se déclarer incompétent, le tribunal de police de la ville de Riom a commis une usurpation de pouvoir et violé les règles de sa compétence ». 20 juillet 1809 (B., no 124).-Conf., 2 mai 1811 (B., no 68).

La seconde époque comprend les arrêts rendus entre la promulgation du Code pénal et la loi du 28 avril 1832.

La loi des 28 septembre-6 octobre 1791 n'avait reçu aucune modification. Mais la disposition du Code de brumaire relative à l'embarras des voies publiques, avait été remplacée par la disposition que j'étudie. Quant à la disposition de ce Code, qui concernait la dégradation de ces voies, continuait-elle à subsister? Il est permis de le croire, puisqu'elle n'avait pas été abrogće formellement, et qu'elle était compatible avec la disposition nouvelle du Code pénal. C'est aussi ce qu'on peut inférer de certains arrêts de la

Cour de cassation. L'antagonisme restait donc le même entre la loi des 28 septembre-6 octobre 1791 et le Code de brumaire. Les moyens de conciliation devaient être également les mêmes.

En annulant, dans l'intérêt de la loi, un jugement du tribunal de simple police du canton de Ribemont, la Cour de cassation persistait à déclarer que « il ne faut pas confondre les voies publiques, dont les embarras ou dégradations sont prévus et réprimés par l'art. 605 du Code du 3 brumaire an IV et par l'art. 471, n° 4, C. pén., avec les chemins publics, qui ont appelé l'attention et la sévérité du législateur dans l'art. 40, tit. II, de la loi rurale du 6 octobre 1791; que, par la voie publique, on doit entendre les rues, places et carrefours des villes et villages; que les chemins publics sont les communications, plus ou moins importantes suivant la classe à laquelle elles appartiennent, qui conduisent de villes en villes, ou qui servent dans le territoire des communes, hors de leur enceinte, à l'exploitation des propriétés rurales, queles dégradations, détériorations des chemins publics ou l'usurpation sur leur largeur sont punies, par l'art. 40 précité, de peines, qui excèdent la juridiction des tribunaux de police et rentrent dans les attributions de la juridiction correctionnelle; mais que les tribunaux de police sont seuls investis par l'art. 605 du Code du 3 brumaire an iv et par l'art. 471, n.o 4 et 5, C. pén., de la connaissance de tout embarras ou dégradation de la voie publique ou urbaine, dans l'intérieur des villes et villages, de quelque nature que soit le fait ou l'entreprise qui cause cet embarras ou cette dégradation; sauf, toutefois, la concurrence des autorités administratives, dans le cas où les rues, places ou voies publiques seraient la continuation ou le prolongement de grandes rou

tes ». 15 février 1828 (S., coll. nouv., 9.1. 35; B., n° 38).

La troisième époque se rapporte à l'état actuel de la législation.

La loi du 28 avril 1832 n'a pas touché à l'art. 471. Mais elle a étendu l'application de l'art. 479 à « ceux qui auront dégradé ou détérioré, de quelque manière que ce soit, les chemins publics ou usurpé sur leur largeur » et par conséquent, elle a abrogé l'art. 40 (titre II) de la loi des 28 septembre-6 octobre 1791, et, du même coup, la disposition de l'art. 605 du Code de brumaire, qui avait survécu au Code pénal de 1810, celle qui concernait la dégradation des voies publiques.

La Cour de cassation, n'ayant plus à concilier deux textes qui paraissaient se contredire, a peu à peu abandonné l'interprétation, qu'elle avait donnée successivement à l'art. 605 du Code de brumaire, et à l'art. 471, C. pén.

La veuve Leroux de Commequiers avait fait planter trois piquets en bois, dans un chemin vicinal de la commune de Chantenay, pour empêcher les voitures d'y passer. Elle prétendit, devant le tribunal de police, qu'elle était propriétaire de ce chemin, et demanda qu'il fût sursis à statuer, jusqu'à ce que l'exception qu'elle soulevait, eût été jugée par l'autorité compétente. En annulant cette décision, sur le pourvoi du ministère public, la Cour visa les art. 6 de la loi du 9 ventôse an XIII, 15 de celle du 21 mai 1836, et 471, no 4, C. pén. 29 décembre 1837 (B., no 446).

Il résulte implicitement, de cet arrêt, que je transcrirai plus loin, no 75, que la Cour admet que les chemins publics sont des voies publiques, puisque l'article du Code pénal, qu'elle vise comme ayant été violé, est l'art. 471 et non l'art. 479.

François de Ginest avait été renvoyé des poursuites, quoiqu'il fût établi que les décombres d'un mur, qui lui appartenait, gênaient la circulation sur un chemin public. La décision fut cassée, et, pour l'annuler, la Cour déclara « que, si le fait dont il s'agissait n'était pas prévu par l'art. 479, C. pén., il présentait les caractères déterminés par l'art. 471, no 4, dudit Code ». 6 février 1845 (B., no 35). Par cet arrêt, la Cour indique, de la manière la plus évidente, que, dans sa pensée, les chemins publics sont compris parmi les voies publiques, comme l'art. 471 les entend.

Un procès-verbal régulier constatait que les prévenus avaient formé des tas de fumier, sur un chemin public de la commune de Saint-Jean-de-Boiseau. Le tribunal de police les renvoya des poursuites, sous le prétexte que l'infraction était de la compétence des conseils de préfecture. Sur le pourvoi du ministère public, la décision fut annulée, « attendu qu'il conste du procès-verbal, dressé contre les prévenus et qu'il n'est point méconnu par le jugement dénoncé, que ceux-ci ont commis la contravention que prévoit et punit l'art. 479, no 11, C. pén., en formant des tas de fumier sur un chemin public de la commune de Saint-Jean-de-Boiseau ; que les dispositions combinées du même article et des art. 137, 138 et 139, C. instr. crim., attribuent la répression de ce fait au tribunal de simple police ; qu'en se déclarant incompétent pour statuer sur la prévention, par le motif que la connaissance de la contravention appartiendrait exclusivement au conseil de préfecture, ledit jugement a faussement appliqué le décret du 17 avril 1812, et commis une violation expresse des règles de la compétence ». 19 juin 1846 (B., no 158).

De ce que cet arrêt énonce qu'en formant des tas de fumier sur un chemin public, les inculpés ont commis l'infraction prévue par l'art. 479 n° 11 du Code, faut-il conclure qu'il revient à l'ancienne distinction, et qu'il se refuse à comprendre les chemins publics parmi les voies publiques, spécifiées dans l'art. 471? Je ne le crois pas. Car le dépôt d'un tas de fumier sur une voie publique peut être, très fréquemment, plus qu'un embarras. Il peut occasionner une dégradation et une détérioriation. Rien n'indique que, dans l'espèce, il n'ait pas produit ce résultat, qui rendait la contravention passible des peines de l'art. 479.

Au reste, l'opinion de la Cour de cassation s'accentue dans les derniers arrêts qu'elle a rendus sur la question.

Le nommé Alligant avait déposé de la paille sur le chemin public qui conduit du cimetière de SaintClaude à la route de Champagne. Il fut renvoyé des poursuites, sous le prétexte que « ledit chemin était un chemin rural ». Sur le pourvoi du ministère public, l'arrêt fut annulé, « attendu que la disposition du n° 4 de l'art. 471 est générale; qu'elle s'applique à toutes les voies publiques, urbaines ou rurales ». 9 juin 1854 (S. 56. 1. 383; B., no 188).

Les nommés Prégaton et Boirout avaient déposé des matériaux sur un chemin public. Le tribunal de police les renvoya des poursuites, sans motif légitime. Sur le pourvoi du ministère public, la décision fut annulée, et la Cour déclara « que, si l'art. 1er de la loi du 21 mai 1836 ne met à la charge des communes que les chemins classés comme vicinaux, les autres chemins ruraux ou communaux, dont le public est en jouissance, n'en continuent pas moins d'appartenir aux municipalités sur le territoire des

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