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quelles ils existent, et d'être placés, pour leur conservation et leur viabilité, sous l'autorité et la surveillance de l'administration locale, tant qu'ils n'ont pas été aliénés, conformément à la loi du 23 messidor an v; que le no 4 de l'art. 471, C. pén., et le n° 12 de l'art. 479 du même Code, protégent également les uns et les autres; mais qu'à l'égard des matériaux ou des choses quelconques, qui peuvent y être déposées ou laissées au détriment de la liberté ou de la sûreté du passage, la première de ces dispositions n'admet la nécessité comme excuse du fait qu'elle défend, que dans le seul cas où il a été occasionné par un événement accidentel, momentané ou de force majeure ». 8 mai 1856 (S. 56. 1. 924; B., n° 170).

Il faut donc, en définitive, tenir pour certain que, par voie publique, l'art. 471 entend désigner toute espèce de voie de communication, rurale ou urbaine, servant à la circulation du public, sans qu'il y ait à distinguer entre les chemins classés ou non classés, de grande ou de petite communication, les distinctions que les lois spéciales ont pu faire, à cet égard, étant ici sans conséquences. Nous verrons plus loin s'il faut excepter de cette règle les grandes routes, les routes départementales et les chemins vicinaux.

72. Le terrain devenu vide, le long de la voie publique, par la démolition et le reculement d'une maison sujette à l'alignement, soit que le propriétaire l'ait fait abattre volontairement, soit qu'il ait été forcé à la démolir pour cause de vétusté, fait-il immédiatement partie de cette voie, même dans le cas où le propriétaire n'a pas encore reçu l'indemnité à laquelle il a droit?

Cette question doit être résolue affirmativement. En effet, il résulte des art. 30 et 52 de la loi du 16 septembre 1807, sainement entendus, d'une part,

que le terrain est sur-le-champ incorporé à la voie publique, et, d'autre part, que le propriétaire dépossédé n'a droit qu'à une indemnité, qui peut ne pas être préalable à la prise de possession, contrairement à ce qui a lieu dans le cas d'expropriation pour cause d'utilité publique.

Il s'ensuit que les dépôts de matériaux et de choses quelconques, qui empêchent ou diminuent la liberté ou la sûreté du passage, faits sans nécessité sur ce terrain, constituent la contravention réprimée par l'art. 471.

La Cour de cassation l'a jugé dans l'espèce suivante. Charles Léger était inculpé « d'avoir, après avoir reculé la façade de sa maison, sujette à l'alignement, embarrassé la voie publique, en déposant, sans nécessité, des matériaux provenant de sa bâtisse, tant sur le sol, dont la reconstruction de ladite maison venait d'élargir cette voie, que le long du mur qui la limitait du côté de sa propriété ». Le prévenu prétendit que, n'ayant pas reçu l'indemnité à laquelle il avait droit, il était resté propriétaire du terrain dont il s'agissait, et que, par suite, il avait pu le couvrir de ses matériaux. Le tribunal de police accueillit l'exception. Sur le pourvoi du ministère public, la décision fut annulée, « attendu, en fait, qu'il est reconnu par le jugement dénoncé: 1o que la maison de Charles Léger, située à Bolbec, rue de la Carrière et à l'encoignure de celle du Havre, est sujette à reculement, suivant le plan de cette ville; 2o que Ledit Léger a demandé au maire et obtenu de lui l'alignement qu'il aurait à suivre pour reconstruire cette maison, et qu'il l'a exécuté; qu'après avoir ainsi reculé sa façade, il a embarrassé, pendant plusieurs jours, la voie publique, en déposant des matériaux provenant de sa bâtisse, tant

sur le sol, dont la reconstruction de ladite maison venait d'élargir cette voie, que le long du mur qui la limite du côté de sa propriété ; attendu, en droit, que lorsqu'un propriétaire a démoli, soit volontairement, soit pour cause de vétusté, des bâtiments placés sur ou joignant la voie publique actuelle et sujets à reculement, le terrain, qui devait être affecté à l'élargissement de cette voie s'y trouve immédiatement et de plein droit incorporé, par le seul fait du nouvel œuvre, aussi complètement que s'il en avait toujours fait partie, selon les art. 50 et 52 de la loi du 16 septembre 1807; qu'il ne peut donc y rien faire ou entreprendre au mépris des règlements, qui régissent la petite voirie, sans encourir les peines de la contravention; qu'il ne saurait, pour se prétendre encore possesseur de ce terrain et faire surseoir au jugement de l'action exercée contre lui, exciper utilement de la circonstance qu'il n'a pas touché l'indemnité, qui lui est due relativement à ce terrain, puisqu'il en fut irrévocablement dépouillé, aussitôt qu'il l'abandonna librement et de son plein gré à l'intérêt public, et ne conserve plus que l'action en paiement de sa valeur; qu'il ne faut pas confondre, en effet, cette hypothèse avec celle où le retranchement, qui profite à la voirie, ne s'opère que par l'exercice de l'expropriation pour cause d'utilité publique; ce dernier mode de procéder concernant exclusivement le cas où l'administration municipale provoque, d'office, et malgré l'opposition du riverain qui sera tenu de le subir, le reculement que l'intérêt général réclame; qu'en accueillant donc, dans l'espèce, l'exception de propriété, opposée par Léger à la poursuite du ministère public, et en supercédant à statuer sur icelle, le tribunal de simple police deBolbec a faussement appliqué le principe de l'art.

182 du Code forestier et commis une violation expresse des règles de la compétence ». 10 juin 1843 (B., no 142). —Conf., 19 juin 1857 (B., no 233); 9 mai 1867 (B., n° 111).

73. A raison des mêmes principes, faut-il également considérer que les arrêtés du préfet pris en vertu de l'art. 15 de la loi du 21 mai 1836, emportant reconnaissance et fixation de la largeur d'un chemin vicinal, attribuent, en tout cas, au chemin, le sol compris dans les limites qu'ils déterminent? Il faut faire une distinction.

S'il s'agit d'un terrain non bâti, le sol sera immédiatement incorporé au chemin, le propriétaire sera exproprié, il n'aura plus droit qu'à une indemnité, et, par conséquent, ne pourra plus user du sol, compris dans les limites de l'arrêté, comme s'il était resté sa propriété privée.

La Cour de cassation l'a reconnu dans l'espèce suivante.

Pierre Fatin avait élevé un mur sur un terrain, compris, par arrêté du préfet, dans la largeur d'un chemin vicinal; il avait été renvoyé de la plainte sous le prétexte qu'il avait édifié ce mur sur son terrain. La décision fut dénoncée à la Cour de cassation et annulée, «< attendu, en droit, qu'aux termes de l'art. 15 de la loi du 21 mai 1836, tous les terrains, compris dans la largeur assignée aux chemins vicinaux par le préfet, sont censés en faire partie, dès l'instant où les arrêtés, pris à cet égard, ont été approuvés par le ministre, secrétaire d'État de l'intérieur et régulièrement publiés, sauf l'indemnité due aux propriétaires riverains, lorsqu'ils en seront effectivement dépossédés; d'où il suit: 10 qu'aucune construction ne peut être entreprise sur ces terrains tant que l'autorité locale n'a pas tracé l'ali

gnement, qui doit lui être préalablement demandé; 2o que cette règle d'ordre public entraîne, de plein droit, contre les contrevenants, l'application des peines portées par l'art. 471, n° 5, C. pén., lors même qu'un arrêté spécial n'aurait pas encore rappelé tous les habitants de chaque commune à son observation; et attendu, en fait, qu'un procès-verbal régulier, qui n'a point été débattu par la preuve contraire, constate, dans l'espèce, que Pierre Fatin a construit, dans la partie nord du chemin vicinal de première classe, qui conduit de Gaillon au bourg de Vandays, malgré les défenses du maire et sans avoir obtenu de celui-ci l'alignement, dont il était tenu de se pourvoir, un mur, qui se trouve en saillie de plus d'un mètre 16 centimètres sur la largeur, que ce chemin doit avoir le long de sa propriété, en exécution de l'arrêté du préfet; que, néanmoins, le jugement dénoncé a relaxé ledit Fatin de l'action, exercée contre lui à ce sujet, sur ce motif que le mur a été édifié sur son terrain et à la distance d'un mètre de l'ancienne haie, qui sépare encore le chemin de son héritage; en quoi le jugementa commis une violation expresse des dispositions ci-dessus citées ». 16 novembre 1837 (B., n. 403).— Conf., 7 juin 1838 (B., n° 162); 2 février 1844 (B., n° 30).

S'il s'agit, au contraire, d'un terrain bâti, c'est-àdire occupé par un édifice ou une construction de quelque espèce que ce soit, il en sera autrement, l'élargissement du chemin ne pouvant s'opérer dans ce cas que par la voie de l'alignement ou de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ainsi que la Cour de cassation l'a décidé, dans son arrêt du 28 juillet 1859 (B., n° 194, et que le reconnaît l'art. 2 de la loi du 8 juin 1864.

74. Si aucun acte administratif ne s'est prononcé

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