Page images
PDF
EPUB

Observations faites aux représentants du peuple près l'armée des Ardennes, par le conseil général de la commune de Verdun.

Citoyens représentants.- Deux de vos collègues viennent de passer dans notre ville pour se rendre près de l'armée du Rhin, nous leur avons soumis quelques observations essentiellement liées à notre tranquillité particulière et à la sécurité générale de la République ; ils les ont accueillies favorablement, ils ont paru ne manquer que de pouvoirs pour y faire droit sur le champ ; ils nous ont dit de s'adresser à vous, ils ont appuyé nos réclamations d'une lettre de recommandations que nous joignons ici. De là nous avons conçu les plus flatteuses espérances. Nous vous disons d'abord avec franchise que nous avons à nous plaindre du département de la Meuse. Cette administration a pris un arrêté, le 10 novembre dernier, par lequel elle défendait aux électeurs du district et aux citoyens de Verdun de procéder aux élections à eux dévolues et prescrites pour la loi du 19 octobre. Les électeurs et les citoyens ont dénoncé cette décision aux corps législatifs et aux ministres, et ils ont procédé chacun aux élections dont ils devaient s'occuper. Le département a reconnu toutes les élections, hors celles du conseil général de la commune, le conseil général a poursuivi la cassation de l'arrêté du département. Fouquerel officier municipal a été député près la Convention et les ministres pour défendre la Commune contre les prétentions de ses administrateurs. Le dépar tement a succombé la Convention a confirmé les élections, le ministre a ordonné le rapport de l'arrêté du 10 novembre. Voilà le crime du conseil général et de Fouquerel en particulier. Depuis ce temps, le département n'a laissé échapper aucune occasion d'exercer ses ressentiments. Chaque fois que dans son administration il a été question de la Commune de Verdun, chaque fois il a fait éclater la particularité la plus révoltante et l'injustice la moins dissimulée. Nous en avons une reconnaissance authentique dans 2 lettres du Procureur général syndic; il a laissé dans nos murs un commissaire pris dans son sein, lequel au mépris des lois s'est permis d'ordonner des arrestations sans avoir au préalable fait voir à la municipalité les ordres en vue desquels il agissait ainsi. Le conseil général de la commune lui en a témoigné sa surprise par une délé

gation de six de ses membres : il en a porté ses plaintes au département par une lettre qui a été imprimée et dont un exemplaire est joint à la présente. Le département a répondu en suspendant de leurs fonctions six membres du conseil général, cinq officiers municipaux et un notable. Cette conduite a porté l'indignation dans l'âme des citoyens. Ils ont réclamé la protection des lois; le conseil général qui la leur devait a juré qu'elle ne leur manquerait pas. Le commissaire du département est parti et peu de temps après ont paru dans nos murs vos deux collègues Laporte et Deville qui, semblables à la foudre, n'ont fait que se montrer un instant et disparaitre. Prévenus par le département, ils ont refusé de communiquer avec le conseil général de la commune. A la fraternelle invitation du maire qui les visita (quoique non prévenu par eux) lors de leur entrée dans la ville, ils répondirent dédaigneusement qu'ils n'avaient rien de commun avec le conseil général. Ils furent seulement entourés de deux membres du district de Verdun, sur le dévouement desquels le département peut compter; ils lancèrent l'ordre étonnant et terrible de transporter dans les prisons de Bar Fouquerel, officier municipal, et de suspendre de leurs fonctions, Catoire, maire et Paillet, procureur de la commune. Les citoyens, indignés de tant d'actes arbitraires commis au nom de la sainte liberté, ont fait éclater leurs réclamations; ils se sont assemblés; ils ont envoyé quatre députés à la Convention. Ils se sont d'abord assuré que vos collègues n'ont point rendu compte des actes d'autorité qu'ils avaient exercé contre nos concitoyens : que conséquemment les actes sont tout à fait illégaux et nuls. Ils ont ensuite présenté la pétition des citoyens de Verdun dont ils étaient porteurs; cette pétition présentée le 11 juin fut couverte d'applaudisssements et envoyée aux comités de législation et de salut public réunis. Ces députés ont présenté le 23 un projet de décret conforme aux voeux des pétitionnaires. Ce projet a été envoyé au comité de Sûreté générale. Le rapport de ce dernier comité fut ajourné le 30, pour le 3 juillet dernier. Depuis ce temps, nous attendons justice et justice ne nous est pas rendue. Toutes nos pièces sont dans les mains du citoyen Drouet, et le citoyen Drouet n'a pas même daigné nous répondre. Ainsi nos magistrats sont hors de leurs fonctions; leurs places sont vacantes, et le travail abondant dont ils allaient s'occuper, et dont ils s'occupaient en

Ils

effet, s'accumule. Le rôle des impositions dans une ville dont tous les papiers ont été brûlés par les ennemis ne peut pas encore ètre mis en recouvrement pour 1792, parce que ceux qui s'en étaient chargés sont suspendus de leurs fonctions, et que dans le petit nombre d'ouvriers qui nous restent, il ne nous est pas possible de les remplacer. Le département a pris un arrêté le 15 juin par lequel les personnes détenues pour incivisme, dans la suspicion, () doivent être jugées par les citoyens de leur commune. Assemblés le 30 juin, les citoyens de Verdun ont à l'unanimité certifié du civisme de Fouquerel, officier municipal, contre lequel Laporte et Deville ont lancé, le 29 mai, une lettre de cachet, à laquelle il s'est soustrait en se retirant chez un ami. Ils ont demandé unanimement sa liberté, en attestant que, depuis le commencement de la révolution, il n'a cessé de combattre pour elle avec un zèle auquel on ne peut reprocher de tiédeur. ont également réclamé pour que le maire et le procureur de la commune fussent rétablis dans leurs fonctions; ils ont déclaré qu'aucun de leurs magistrats suspendus n'a démérité de ses concitoyens et qu'il désirent les revoir tous à leurs places. Ces témoignages de bienveillance, de justice et d'estime nous sont attestés par des certificats authentiques dont nous joignons des expéditions légales. L'arrêté du département portant que vingt quatre heures après réception du procès-verbal énonciatif du vou des citoyens, son comité de salut public faisant son rapport, le conseil général confirmerait les détentions ou les élargissements prononcés par les citoyens. Depuis le 30 juin que nous avons tenu notre assemblée, le Département ne nous a donné aucune marque de justice. Nos magistrats sont toujours dans la même position. Citoyens représentants, vos prédécesseurs en croyant servir la cause de la Patrie n'ont servi que les passions de nos administrateurs. Nous espérons que vous guérirez la plaie qu'ils ont faite dans nos âmes républi caines et que vous réparerez les injustices dont involontairement, sans doute, ils ont été les artisans parmi nous. - Nous vous deman dons la liberté de Fouquerel qu'ils ont ordonné de déporter dans les prisons de Bar. Nous vous demandons le rétablissement dans leurs fonctions de Catoire, maire et de Paillet, procureur de la commune...... Il serait bien consolant pour nous de vous faire personnellement nos représentations. Si vos occupations pouvaient

vous permettre de venir vous assurer par vous même du bon esprit qui règne dans notre ville, de notre respect pour les lois, de notre attachement à la Convention nationale, et surtout de notre amour ardent de la liberté et de légalité, nous vous y invitons de la manière la plus affectueuse et la plus pressante..... Mais si vos nombreuses occupations ne vous permettaient pas de vous déplacer, nous vous adressons assez de pièces justificatives pour espérer que vous voudrez bien nous accorder ce que nous demandons ci-dessus pour Catoire, Paillet et Fouquerel et pour appuyer près des ministres de l'intérieur et de la guerre les itératives pétitions que nous avons faites à l'effet d'obtenir des secours et des munitions pour une place entièrement dépourvue de tout et qui peut cependant au premier moment se trouver encore une fois assiégée par l'ennemi. Ce sont des actes de justice que nous vous demandons, citoyens représentants, et quoiqu'ils soient dus à tous. et à chacun des membres de la république, nous ne vous en serons pas moins infiniment reconnaissants si vous voulez bien nous la rendre. Les membres du conseil général de la commune de Verdun. »

Archives communales: Registre des délibérations du conseil général de la Commune. Bibliothèque publique : Ms 210, VerdunRévolution, tome III.

Anniversaire du 14 octobre.

Extraits du discours de Caré fils.« Toute la France sait que Verdun fut subjugué par les tirans coalisés; mais aussi que la la France sache que Verdun ne fut jamais infidèle: qu'elle apprenne que cette ville fut malheureuse, mais qu'elle ne fut point coupable. Citoyens, si après le décret du 9 février dernier par lequel la Convention nationale déclare justement que les Verdunois n'avaient pas démérité de la Patric, j'avais encore à les justifier, je demanderais à ces hommes ignorants ou de mauvaise foi qui doutent encore: Qu'était donc Verdun lors de son investissement? Répondez une ville vendue et livrée par le pouvoir exécutif, une ville abandonnée à dessein et de toutes les manières à ses propres forces, une ville dont les fortifications étaient détruites, dont tous les rem

parts étaient culbutés, sans munition et sans artillerie; une ville enfin dont toute la force n'existait alors que dans un dictionnaire géographique. Démentez-moi si vous l'osez, qu'était alors la position de Verdun? Il renfermait dans son sein une garnison insuffisante au développement de la place, il était entouré d'armées destinées à le couvrir et on les éloignait de l'ennemi. Il fut trahi, vendu et livré par des généraux infidèles, fugitifs. En un mot, Lafayette émigrait alors, Longwy capitulait et Luckner à Frescati. Frères et amis, je n'ajouterai rien à la justification des Verdunois, mais à leur louange ces paroles remarquables de Beau repaire que bien du monde ignore, et qu'il adressa aux corps administratifs pendant le bombardement. «Citoyens, dit-il, je viens de parcourir tous les postes et je n'ai trouvé en règle que ceux de la garde nationale; sa fermeté me rassure et ne m'étonne pas; un de vos concitoyens, ajoutait-il, à qui on vient annoncer que le feu était à sa maison et que je voulais y renvoyer pour la secourir me répondit sans hésiter: Mon commandant, je suis à mon poste, j'y resterai »............ Citoyens, je ne tracerai pas ici à votre imagination le tableau effrayant des maux que nous éprouvâmes pendant le séjour des barbares en cette ville. Un aussi beau jour que celui qui nous rassemble ne doit pas être obscurci par tant d'horreurs. Je ne vous entretiendrai donc que du 14 octobre jour où les Français, nos frères et nos amis, rentrèrent dans nos murs, du jour enfin où de malheureux enfants furent rendus à leur mère commune. Oui, citoyens, ce fut un jour fortuné où nous commençâmes à respirer, ce fut le moment où nos âmes comprimées par la force, mais soutenues par l'espoir, reprirent leur existence, où les cris de Vive la République, Vivent les Français se firent entendre et remplacèrent les accents plaintifs de la douleur, où les affaires abandonnées sous un régime affreux quittèrent leur stagnation; ce fut le jour où après avoir été condamnés au silence le plus profond, il vous fut permis de penser et de parler. Ce fut enfin le jour où les prisons et les cachots furent ouverts et les patriotes rendus à la liberté. Ah! frères et amis qu'un aussi beau jour est consolant pour celui qui chérit sa patrie........... » — Discours de Lespine : « Elle est grande la différence qui se trouve entre le règne de la tyrannie et le règne de la liberté : des bas valets des cours et les flagorneurs des tyrans éleveurs de statues au crime et réservant les cachots pour la vertu. Trop longtemps la philosophie s'indigna

« PreviousContinue »