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sentent, malgré leurs murailles crénelées et flanquées de tours, un système de défense insuffisant, s'ouvre sur la campagne voisine par une quantité de puty's ou poternes et par quatre grandes portes: au nord-ouest, la porte de France; à l'ouest, la porte de secours de la citadelle; au sud, la porte St-Victor, et, à l'est, la porte Chaussée; elle comprend en outre des faubourgs situés au delà de l'enceinte à l'est, le faubourg du Pavé avec la Galavaude dont les maisons bordent la rive droite de la Meuse; à l'ouest, Jardin-Fontaine et Glorieux, bàtis au pied même des glacis de la citadelle. Plus loin, Regret, Baleycourt et ses dépendances à l'ouest, Haudainville au sud, situés à une certaine distance du corps de place, se rattachent aussi à la cité. (1)

Verdun, réuni définitivement à la couronne aux traités de Westphalie, reconnaît au point de vue militaire, en 1789, l'autorité de M. le maréchal de Broglie, prince du SaintEmpire, chevalier des ordres du roi, gouverneur de Metz et du pays messin, «< commandant en chef et dans les TroisEvèchés. » Le maréchal de Broglie a sous ses ordres M. le comte de Choiseul la Baume, maréchal des camps et armées du roi, gouverneur des ville, citadelle de Verdun et pays verdunois, assisté de M. Phelippes de Souville, lieutenant du roi, commandant de la ville et de la citadelle (2). Verdun possède, outre un trésorier des troupes, un commissaire des guerres, un commissaire des poudres et salpêtres pour le Verdunois et le Clermontois; des magasins de subsistances militaires; une direction d'artillerie confiée à M. Thirion de Vercly, major, « ayant commission de chef de brigade ; » une direction du génie, confiée au maréchal de camp, chef de brigade, Dumoulin et au capitaine Bousmard; une école de mineurs que surveille le maréchal de camp, Goulet de Rugy, et où professent des maîtres civils (3). Les troupes chargées

(1) Regret est à 4 kil. 500 de Verdun; Baleycourt, à 8 kil. 200, et Haudainville, à 4 kil. 500.

(2) De Saint-Albans, major; Brunelly, aide-major; d'Aubermesnil, major de la citadelle.

(3) Alis, professeur de mathématiques; Mazurier, répétiteur de mathématiques et maître de dessin. (Almanach des Trois-Evêchés, pour l'an de grâce 1789. Metz, chez J.-B. Collignon, imprimeur-libraire.)

de la défense de la place comptent deux bataillons d'infanterie du régiment de Saintonge, six compagnies de mineurs et quatre escadrons de hussards de Lauzun, non compris la milice bourgeoise composée de deux bataillons, dont le commandement appartient au maire de la ville, colonel né de la milice.

Administrativement, Verdun se rattache à la généralité de Metz et du Clermontois. L'intendant Jean Depont, chevalier, seigneur de Monderoux, Forges, etc., est représenté dans notre ville par un subdélégué, François Tabouillot. HenriLouis-René Desnos, assis sur le trône épiscopal depuis le 26 avril 1770, préside aux destinées du diocèse.

Au point de vue judiciaire, Verdun est le siège d'un bailliage créé par édit du mois d'août 1634 et d'un présidial créé par édit de février 1685. Le bailliage et siège présidial de Verdun est régi par la Coutume de Verdun, communément appelée Coutume de Sainte-Croix, réformée en exécution de la déclaration du 24 février 1741, et autorisée par lettres patentes du 30 septembre 1747. Le bailliage et siège présidial de Verdun, ressortit, comme ceux de Toul, Sedan et Sarrelouis, au Parlement de Metz (1). Cette cour de justice. est secondée par une lieutenance de maréchaussée sise à Verdun. La prévôté générale des Trois-Evèchés, commandée en chef par un prévôt général, est divisée en deux lieutenances, l'une à Metz, l'autre à Verdun (2). Chaque lieutenance comprend un lieutenant, un assesseur, un procureur du roi et un greffier pour ce qui concerne la partie judiciaire, et deux brigades à cheval surveillées par deux sous-lieutenants

(1) L'office de bailli est vacant. Le lieutenant général de robe, Georgia, ne peut exercer parce qu'il est mineur. Lieutenant général d'épée : Rouyer de Chérauville; lieutenant particulier : Rouyer de la Cour; lieutenant criminel: Madin; Garaudé et Henry, anciens présidents du tribunal, conseillers honoraires; Gabriel, assesseur civil et criminel. - Conseillers de Watronville de Pintheville, chevalier, conseiller d'honneur; Samson, doyen; Roton, Talbot, Marchal; 8 charges vacantes. - Gens du roi Tabouillot, procureur; N..., avocat. Substituts de Péronne; Audoin-Deschamps. (Almanach des TroisEvêchés.)

(2) Deulneau, lieutenant; Vestier, assesseur; Deschamps, assesseur-adjoint; Lacour, procureur du roi ; Lamèle, greffier. (Almanach des Trois-Evėchés.)

pour ce qui concerne la partie militaire. Enfin nous trouvons à Verdun un bureau de recettes des aides et droits réunis, un burcau des fermes générales, un bureau des traites et fermes du roi, une conservation des hypothèques.

Le commerce et l'industrie ont singulièrement diminué à Verdun depuis deux cents ans. L'antique réputation des orfèvres, des serruriers, des armuriers et surtout des drapiers s'est perdue. Les tanneurs qui, dans la première moitié du XVIIIe siècle, occupent encore plus de quarante ateliers et produisent des cuirs très estimés, ont presque totalement disparu. La liasse BB 61 des archives de l'hôtel de ville nous renseigne de façon très précise sur la prospérité matérielle de Verdun en 1788. Il résulte en effet des réponses fournies à un questionnaire présenté à l'administration municipale, en juin 1788, par l'assemblée provinciale des Trois-Evêchés qu'outre quelques « états libres, » les 47 corporations les plus florissantes parmi lesquelles il faut citer le corps des aubergistes, cabaretiers, marchands de vin (111 maîtres ou agrégés), des cordonniers (84), des marchands merciers, drapiers et épiciers (53), des menuisiers, ébénistes, tonneliers et tanneurs (58), des tailleurs d'habits et tailleuses (86), comprennent 838 artisans occupés à de petits métiers alimentant un trafic purement local. « Ni fabrique, ni manufacture qui mérite ce nom: quelques moulins seulement et quelques carrières de pierres qui ne résistent pas à la gelée... » On compte laboureur propriétaire, 31 laboureurs fermiers, 35 laboureurs propriétaires et fermiers, 62 vignerons propriétaires, 83 vignerons à gages, 63 vignerons propriétaires. et à gages presque tous pauvres, et 545 « manœuvres; » enfin, ce document qui fait ressortir la situation précaire de la plupart des laboureurs et vignerons ajoute qu'il n'existe à Verdun aucun commerce particulier « si ce n'est peut-être celui des dragées et liqueurs qui n'est pas bien considérable. » En somme, Verdun est devenu, avant tout, un centre de négociants à peine dignes de ce nom, d'agriculteurs, de vignerons et de rentiers. (1)

(1) Archives communales: liasse BB. 61. Registre HH. g.

La population civile dont le chiffre atteint 10,294 âmes en décembre 1789 (1) subit naturellement, parmi la classe bourgeoise, l'influence des gens d'église qui peuplent, dans la ville haute, la cathédrale, l'évêché, le séminaire, la collégiale de la Madeleine, le Collège, Saint-Amand, Saint-Médard, les abbayes de Saint-Vannes, de Saint-Paul, de Saint-Maur, les maisons des Jacobins, des Capucins, des Carmélites, des Augustins; et, dans la ville basse, Saint-Sauveur, SaintPierre-le-Chéri, Saint-Victor, Saint-André, les abbayes de Saint-Airy, de Saint-Nicolas-du-Pré, les couvents des Clarisses, de la Congrégation, des Minimes et des Récollets; mais pourtant le peuple, en qui bouillonne le sang des anciens communaux qui si souvent se soulevèrent contre les évêques, est profondément attaché aux idées nouvelles: il aspire à des réformes qu'il accueillera plus tard avec enthousiasme, et lorsqu'en 1791, il s'agira de préparer l'itinéraire de la fuite de Louis XVI, l'entourage du roi préférera traverser Varennes et éviter Verdun, parce que, suivant Madame de Tourzel, tout le pays est révolutionné et toutes les villes mauvaises. (2)

Comment la ville de Verdun est-elle administrée lorsque paraissent les instructions royales au sujet de la convocation des Etats généraux? Comment ces instructions royales sontelles exécutées dans le bailliage de Verdun?

I. Le régime municipal auquel obéit la cité, en 1789, remonte à l'édit de mai 1765, ou, plus exactement, à l'ordonnance royale donnée à Versailles, le 21 juin de la même année, et réglementant l'exécution de l'édit. En vertu de cette ordonnance, les corps de ville sont composés, dans toutes les cités ou tous les bourgs qui comptent plus de 4,500 habitants, d'un maire, de quatre échevins, de six conseillers de

(1) Archives communales: hôtel de ville, F. Statistique, liasse.

(2) Archives communales: hôtel de ville, divers dossiers. Almanach des Trois-Evêchés. Mémoires de Me de Tourzel: tome I, page 315. En 1788 (juin), les maisons religieuses comptent 248 religieux et religieuses, non compris les domestiques. Il existe en outre 120 ecclésiastiques séculiers, dont 39 séminaristes.

ville, d'un syndic-receveur et d'un secrétaire-greffier. Les officiers municipaux, échevins et conseillers de ville sont élus par une assemblée de notables qui désigne, en outre, trois personnages parmi lesquels le roi se réserve de choisir le maire. Les notables, au nombre de quatorze, sont nommés par des délégués qui représentent les corps constitués et communautés de la ville, dans la proportion suivante: un notable dans le chapitre principal de la ville, un dans l'ordre ecclésiastique, un parmi les « personnes nobles et officiers militaires, » un dans le bailliage, un dans le bureau des finances, un parmi les officiers des autres juridictions quel que soit leur nombre, deux « parmi les commensaux de notre maison, les avocats, médecins et bourgeois vivant noblement, » un parmi les notaires et procureurs, trois parmi les négociants en gros, marchands en détail, chirurgiens <<< et autres exerçant les professions libérales, » et deux parmi les artisans. Les conditions imposées au choix des notables ou des officiers municipaux garantissent leur compétence: pour être notable, il faut être âgé de trente ans au moins, avoir son domicile depuis dix ans dans la ville, n'exercer aucune fonction dont la résidence se trouve ailleurs, avoir su conquérir les grades de la communauté à laquelle le candidat appartient, c'est-à-dire avoir occupé les charges de syndic ou de juré. Le maire n'est choisi que parmi ceux qui ont été déjà honorés de la dignité ou qui ont siégé en qualité d'échevins. Les échevins, dont l'un au moins doit être gradué en droit, sont toujours d'anciens conseillers de ville, et les conseillers de ville sont toujours pris parmi les notables en exercice ou sortis de charge. Naturellement ces prescriptions n'étaient rigoureusement applicables qu'aux élections postérieures à celles qui suivirent la promulgation de l'édit.

Le maire est élu pour trois ans ; il ne peut être réélu que trois ans après avoir quitté ses fonctions; de même, les échevins élus pour deux ans, et qui sont renouvelables par moitié chaque année, ne peuvent être réélus qu'après un intervalle de deux ans; de même aussi, les conseillers, élus en droit pour six ans, mais remplacés dans la proportion.

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