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1791.

mouvements et l'agitation, et s'égare avec elle. IV. Ep. Beaucoup d'hommes savent se conduire, peu savent conduire les autres.

Les affaires des colonies, et surtout celles de 24 sept. Saint-Domingue, vinrent encore réclamer les derniers moments de l'assemblée constituante;

t

ses derniers décrets n'y avaient pas réussi, et Barnave vint annoncer qu'il fallait, ou perdre les colonies, ou capituler un moment avec les préjugés et les intérêts. On prit un décret provisoire qui laissait aux assemblées coloniales le droit de statuer sur l'état des hommes non libres, et l'on renvoya le tout à la prochaine législature.

Déja la plupart des membres étaient arrivés; ils avaient leur place dans la salle, pendant les séances. Le 29 septembre, le roi fit annoncer qu'il viendrait le lendemain faire la clôture de l'assemblée. Avant l'arrivée du roi, on essaya quelques dispositions repressives contre les clubs; on leur interdit la faculté de tous actes collectifs. Le roi entra à quatre heures, et prit place comme le jour de son acceptation. Son discours fut souvent interrompu par de vifs applaudissements, lorsqu'il invita les membres de l'assem- Pièces jo blée de donner, à leur retour, l'exemple de l'ordre et de la soumission aux lois. On lui répondit, comme en chœur: Oui, oui. Soyez-y les interprètes de l'intégrité de mes sentiments auprès de mes concitoyens.-Oui,qui Dites-leur à tous

(8).

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IV. Ep. que le roi sera toujours leur premier et leur plus fidelle ami. Une voix s'éleva: C'est un discours 30 sept. à la Henri IV. La réponse du président appuya

beaucoup sur les obligations et les devoirs des nouveaux législateurs envers la constitution décrétée et acceptée. On en sentait déja le besoin. Peu d'heures avant l'entrée du roi, la municipalité de Paris était venue apporter ses hommages et ses adieux. Bailli portait la parole, et sa première phrase était belle : « Vous avez été << armés du plus grand pouvoir dont les hommes puissent être revêtus; vous avez fait les des<< tinées de tous les Français; mais aujourd'hui, « ce pouvoir expire ; encore un jour, et vous ne « serez plus. >>

«

1. oct.

ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE.

C'ÉTAIT une grande époque, celle où de nouveaux législateurs, représentant la nation, venaient, sans autre acte, remplacer d'un jour à l'autre, la première assemblée nationale. Ce premier exercice de la permanence des assemblées représentatives cautionnait le nouvel ordre de choses'; et, selon tous les calculs de probabilité humaine, c'était poser la clef à la voûte de l'édifice social. Il en arriva autrement. Les exemples de nation à nation,

ne sont pas plus concluants que les exemples de siécle à siécle. Les gouvernants doivent supposer les hommes bons et ne point présumer le mal; les législateurs, au contraire, devraient toujours supposer l'homme méchant, et présumer le mal, afin de le prévenir. Un peuple de justes n'aurait pas besoin de lois : « Et nous aussi, nous voulons faire une révolution, répondit un des meneurs de la première législature, à l'un de ses collégues, qui lui remontrait qu'il allait au renversement de la constitution faite.

IV. Ep.

Les élections s'étaient ressenties des intérêts et des passions. Depuis l'acceptation du roi, le système d'arrêter la révolution avait fait place à un autre système déja essayé, celui de la renverser sur elle-même par l'exagération de ses principes et par l'abus de ses lois. On ne pouvait plus espérer de faire élire des hommes, amis de l'ancien régime, on tâcha de faire élire des hommes, ou amis exagérés du nouveau, ou ce qui valait mieux encore, des homme feignant d'être tels. Danton, déja connu dans l'assemblée de la commune de Paris, quoique sous le poids d'un décret de prise de corps, vit son élection maintenue. Fauchet, prêtre, que l'on voulut exclure, au même titre, fut porté en triomphe, de sa maison épiscopale de Caen, par l'assemblée des électeurs, élu

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IV. Ep. président, et de suite député. D'autres encore qui se développèrent successivement, Brissot, Couthon, Chabot, Bazire, etc. apportèrent, ou des projets suggérés pour détruire ce qui était fait, ou des vues personnelles d'ambition, de gloire et de célébrité, pour faire, en leur nom. Dès les premières séances, le drame parut, et les acteurs entrèrent en scène. Il fallait, avant tout, s'attacher à diviser les deux pouvoirs exécutif et législatif; les mettre en présence, c'était les mettre en opposition. Le serment fut prêté avec un grand appareil; le livre de la 4 oct. constitution fut apporté, des archives, par une députation de 60 vieillards, et chaque député jura, la main posée sur le livre ouvert; une autre députation alla vers le roi lui faire part que l'assemblée était constituée..

La députation se rendit chez le roi, à 6 heures du soir, et fut remise pour être reçue à neuf heures. Si ce retard n'était pas indispensable, il eût mieux valu qu'il n'eût pas lieu. Mais, dès le lendemain, à l'ouverture de la séance, on décréta 5 oct. que l'on ne donnait plus au roi le titre de sire et de majesté; et que son siége, fixé par la constitu tion, au milieu de l'estrade du président, ayant le siége du président à sa droite, serait placé sur la même ligne. Le cérémonial n'est pas une vaine étiquette de cour, et les formes instituées entre les pouvoirs, font partie de leur rela

tion. Ici l'esprit public fit le décret; son opi- IV. Ep. nion se prononça fortement contre celui de 1791. l'assemblée; et, dès le lendemain, le décret de la veille fut d'abord ajourné à huitaine, et de 6 oct. suite rapporté. Cette affaire, peu importante. en elle-même, eut un effet très-prompt et trèsmarqué; elle avertit le public qu'il existait un parti nombreux dans l'assemblée, qui voulait autre chose que le gouvernement actuel; elle avertit le roi qu'il ne devait pas compter sur la bienveillance d'un grand parti dans l'assemblée; et elle avertit l'assemblée qu'elle contenait un parti formé, qui voulait la dominer et la conduire. Mais rarement ces avertissements sont entendus; l'assemblée fut menée; le roi et le public furent conduits successivement, non pas au terme où le parti voulait les amener; car ce parti ne voulait pas la république; mais la marche de ce parti rendit la république nécessaire, et on ne put ensuite lui échapper que par elle.

Sept jours après l'ouverture de l'assemblée, le roi s'y rendit, et, dans un discours, d'un ton plus ferme et plus sévère, il renouvela ses engagements, et retraça au corps législatif, ses pièces j. devoirs. Il était, en ce moment, soutenu par (9). l'opinion publique; elle se prononçait fortement contre les projets de subversion qui se faişaient déja pressentir. Il y eut même, à ce su

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