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de l'assemblée, toutes les fois que de nouveaux IV. Ep. mouvements d'insurrection ou d'indiscipline y donnèrent occasion. On pourvut au dehors par une levée de 97 mille gardes nationales qui durent être organisées, immédiatement en compagnies par district, et en bataillons par département. Le dernier événement du Champ-deMars amena aussi de nouveaux articles de législation sur l'emploi de la force publique.

La diète de Ratisbonne venait de donner en- 17 août, fin son conclusum, sur les réclamations des princes allemands possessionnés dans les deux départements du Rhin; et ce conclusum chargeait l'empereur d'armer les cercles de l'empire. Cette mesure n'était pas très-inquiétante; mais elle annonçait les dispositions hostiles qui devenaient assez générales. N'en ayant reçu aucune note officielle, l'assemblée ne pouvait en délibérer; mais on plaça, en réponse, un rap'port retardé, depuis longtemps, sur les ordres de chevalerie. L'abolition de tous ceux qui supposaient des distinctions de naissance, était une conséquence nécessaire des décrets constitutionnels; l'ordre de S. Louis ne tenant qu'aux services militaires, fut conservé provisoirement, quant à la décoration extérieure, l'assemblée se réservant de statuer sur une décoration extérieure quelconque, destinée à récompenser les services publics dans tous les emplois civils

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IV. Ep. ou militaires. L'ordre de Malte était plus difficile à traiter avec justice; leurs vœux n'étaient point émis en France, et ne ressortaient pas des lois françaises. Leur propriété ne pouvait être regardée que comme celle d'étrangers possessionnés en France; et à ce titre, la loi ne les excluait pas. En ne les considérant même que comme fermiers d'un propriétaire étranger, la loi ne pouvait les atteindre. Le décret les exclut seulement des droits civils et politiques de citoyen français, en les comprenant dans une disposition générale, qui exclut tous ceux qui, nés Français, sont liés par des voeux religieux, à une obédience étrangère.

Tous les articles de constitution, de législation, de règlements civils, judiciaires, d'administration et de police étaient achevés; on attendait, au dedans et au dehors, avec une impatience à peu près égale, la réunion de toutes ces parties dans l'acte constitutionnel. Il fut distribué, imprimé le 6 août; en même temps, la motion fut faite de lever la suspension de la 1. sept réunion des corps électoraux. Ils durent s'assembler, le 25, et avoir terminé les élections en dix jours; immédiatement les députés nouvellement élus durent venir prendre leur place.

Ce décret fut rendu de suite, au milieu des longs applaudissements de l'assemblée ; les tribunes, par une délicatesse qui n'appartient pas

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à tous les peuples, restèrent en silence. Ce- IV. Ep. pendant cette motion appartenait au premier qui s'en emparerait, et même elle fut hâtée par un calcul de parti, qui ne voulait pas en laisser l'honneur au parti contraire. On commença aussitôt la révision de l'acte constitutionnel. Les opinions étaient à une grande distance, non-seulement entre les partis opposés, mais plus encore entre les opinions opposées dans chaque parti. Cette époque de révision, pendant laquelle les uns se proposaient un dernier effort, ou pour emporter quelques articles importants, ou pour constater leur opposition et en prendre acte solennel: c'est dans cet esprit qu'avait été rédigée la protestation de 290. Dans le parti patriote, les nuances étaient presque aussi tranchantes. Les uns, voulant conserver la monarchie, prétendaient donner plus de force au pouvoir exécutif; les autres, songeant à l'abolir, ou plutôt à la rendre impossible, s'efforçaient d'ôter au pouvoir exécutif tout moyen d'exécution. Il en arriva que les uns voulant plus, les autres voulant moins, le comité de constitution, embarrassé entre l'un et l'autre, leur cédait tour-àtour, et l'ouvrage porta le caractère de toutes ces oscillations. On ne proposait plus ce que l'on croyait le meilleur, mais seulement ce que l'on croyait qui pourrait passer : ainsi, quoique

IV. Ep. tous ceux qui avaient réfléchi sur la constitu1791. tion, sentissent l'impossibilité de soutenir un

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gouvernement avec une seule chambre ou assemblée délibérante, personne n'osa cependant proposer à l'assemblée d'en former deux, quoique on eût déja pensé à prendre l'ancienneté d'âge pour seule condition. Aux différences d'opinion se mêlaient les animosités de partis, et aux animosités, des haines personnelles. Enfin, après huit jours de discussion, l'ensemble de l'acte constitutionnel se trouva tellement altéré, que les comités de constitution vinrent annoncer qu'ils croyaient de leur deyoir de déclarer à l'assemblée qu'ils pensaient que la constitution ne pouvait pas aller telle qu'elle était.

Cette déclaration ne fit pas grand effet sur l'assemblée; seulement on suspendit les travaux de révision, et les comités durent se réunir pour présenter un résultat. Cet intervalle fut

occupé de part et d'autre. On décerna pour 18 août. 200,000 liv. de gratification à ceux qui avaient Pièces j. contribué à l'arrestation de Varennes, et les ministres vinrent dénoncer les jacobins, sous le nom de société des amis de la constitution : le ministre de la justice, Duport - Dutertre, portait la parole. A Orléans, le club avait envoyé deux commissaires pour surveiller la haute-cour nationale; à Abbeville, ils avaient

enlevé à main armée une procédure du greffe IV. Ep. du tribunal; à Marseille, ils avaient écrit des 1791. lettres menaçantes au magistrat : partout, le même enthousiasme qui les avait rendus utiles au temps des obstacles, subsistant encore quand les obstacles étaient détruits, cherchait un aliment qu'il n'avait plus, et l'habitude d'abattre lui faisait renverser tout ce qui se trouvait devant lui.

Après quelques jours de travail intérieur, les comités revinrent continuer celui de la révision. Soit lassitude, soit désintéressement de fonctions dont le terme était marqué, chacun désespérant de faire ce qu'il aurait voulu, laissait faire toutes les passions étaient affaiblies, toutes les liaisons étaient relâchées. On décréta quelques articles additionnels : ils portaient sur l'assurance de la liberté individuelle et sur la liberté de la presse; on trouve, dans les délits de la presse, ce motif si souvent employé depuis, et dont on fit un si terrible usage, l'avilissement des autorités constituées. Peut-être les bonnes lois ne peuvent-elles être faites que dans les temps où elles ne sont pas réclamées par la nécessité : l'urgence ôte cette tranquillité d'esprit, ce calme de désintéressements personnels, qui sont comme l'atmosphère dans laquelle le législateur doit respirer. On régla les cas de déchéance ou d'abdication présumée;

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