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IV. Ep.

Un des secrétaires a commencé la lecture du

1791. procès-verbal de la séance d'hier.

M. le président étant arrivé, a dit que le maire

est l'histoire en action; le récit peindrait moins vrai
et la postérité, peut-être, retrouvera avec intérêt l'es-
prit du moment et la forme de rédaction usitée. L'évé-
nement était absolument imprévu, et la plus grande par-
tie des députés entrèrent dans le lieu de leur séance,
sans en être instruits; ainsi rien ne pouvait être prévu
ni concerté d'avance. Chaque individu y fut livré à son
opinion et à son caractère : il y eut peu de discussion
où plus de membres prissent part; chacun se crut comp-
table de ses moyens et de ses forces; ceux mêmes qui
avaient le plus l'influence d'habitude sur l'assemblée,
ne s'emparèrent point de la tribune; jamais il n'y eut
moins de discours; tout fut proposé, discuté, adopté
sans formes oratoires; on fit les affaires comme les eût
faites un conseil de ministres, et l'on pourvut à tout sans
déclamation et san's embarras. Il n'y eut ni animosité ni
crainte : cette attitude étonna beaucoup, et contribua à
déjouer les spéculations que l'on pouvait avoir faites
sur la consternation présumée : le départ ne causa au-
cune émotion; l'arrestation, peu de jours après, ne pro-
duisit aucune joie indécente; les tribunes prirent aussi
une contenance froide et tranquille ; jamais elle ne don-
nèrent plus de silence et d'attention. Les ministres furent
accueillis avec égards et considération : leur place n'était
même pas désignée; on leur en assigna une dans l'inté-
rieur de la salle, et personne ne se permit une inter-
pellation embarrassante; enfin la vérité est que jamais
nation ne fut plus dignement représentée.

de Paris venait de l'instruire du départ du roi, et IV. Ep. l'assemblée aurait, sans doute, des mesures

que

à prendre et des ordres à donner dans une conjoncture aussi imprévue et aussi importante.

Un membre (1) a demandé que les ministres fussent appelés pour recevoir les ordres de l'assemblée, et que le ministre de l'intérieur fût chargé d'expédier, à l'instant, des courriers dans tous les départements, avec ordre à tous les fonctionnaires publics, gardes nationales et troupes de ligne, d'arrêter ou de faire arrêter toutes personnes sortant du royaume.

Cette proposition appuyée, il a été demandé en outre qu'on ne se bornât point à arrêter les personnes, mais encore tous effets, armes, munitions, espèces d'or et d'argent, chevaux et voitures;

Qu'il fût nommé un comité pour s'occuper sur le champ des mesures à prendre, et que des membres de l'assemblée fussent provisoirement adjoints aux ministres.

(1) Regnault de Saint-Jean-d'Angeli parla le premier. Il est sans doute inutile de retracer à l'assemblée la conduite courageuse et imposante qu'elle a tenue, il y a deux ans, dans des conjonctures moins importantes peutêtre, et moins difficiles. Les hommes qui ont su, à cette époque, conquérir la liberté, sauront aujourd'hui la conserver et la défendre, et tous les amis de la constitution vont se presser et s'unir pour la maintenir.

1791.

IV.. Ep. 1795

par

Ces deux dernières mesures ont été rejetées la question préalable.

Les autres propositions ayant été discutées, l'assemblée nationale a décrété :

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Que le ministre de l'intérieur expédierait à l'instant des courriers dans tous les départements, avec ordre à tous les fonctionnaires publics, gardes nationales et troupes de ligne, d'arrêter ou faire arrêter toutes personnes quelconques sortant du royaume, comme aussi d'empêcher toute sortie d'effets, armes, munitions, espèces d'or ou d'argent, chevaux et voitures; et que, dans le cas où lesdits courriers joindraient quelques individus de la famille royale, et ceux qui auraient pu concourir à leur enlèvement, lesdits fonctionnaires publics, ou gardes nationales et troupes de ligne seront tenus de prendre toutes les mesures nécesssaires pour arrêter les suites dudit enlèvement, en empêchant que la route soit continuée, et de rendre compte du tout à l'assemblée nationale. »

Un membre (1) a demandé que le lieu des

(1) Camus. « La troisième mesure consiste à mander les ministres pour entendre de leur bouche le récit des faits qui sont à leur connaissance, et leur donner tous les ordres nécessaires; car c'est à vous certainement qu'il appartient de donner tous les ordres. Il faut également mander le maire de Paris et le commandant de la garde

1791.

séances de l'assemblée fût exactement gardé, IV. Epi et que nul étranger ne pût s'y introduire. L'as semblée nationale a adopté cette proposition.

Il a été ensuite proposé (1) et décrété d'ordonner au ministre de la guerre de faire partir, sur l'heure, M. de Rochambeau, avec les ordres nécessaires pour mettre en état de défense les frontières des départements dans lesquels le commandement des troupes de ligne lui est confié.

M. le président a annoncé que les ministres allaient se rendre à l'assemblée.

nationale, et leur ordonner notamment de prendre des précautions pour le château des Tuileries.

(1) Charles Lameth. Rochambeau était déja désigné le général des armées de la liberté. Il prouva ce jourlà qu'il ajoutait à des talents reconnus, la qualité rare de savoir commander militairement sous les ordres d'une assemblée délibérante : il l'avait appris de Wasingthon, pendant la guerre d'Amérique. Appelé, pendant cette séance, aux comités de constitution et militaire, réunis, composés nécessairement d'hommes de loi et de trèsjeunes militaires, il y reçut les ordres, les instructions, donna les renseignements, répondit aux objections avec cette tranquillité et cette égalité de caractère, condition nécessaire au talent militaire dans une révolution. C'est le seul commandant en chef dont la démission volontaire et motivée ait été honorablement repoussée par un décret du corps législatif, dans un temps de soupçon où toutes les autres démissions. étaient provoquées ou dia moins accueillies..

TV. Ep. 1791.

Le ministre de la justice (1) a été introduit le premier.

M. le président a dit qu'un des aides-de-camp, envoyés par M. de Lafayette pour prendre des informations sur la route que le roi avait pu suivre, demandait à être entendu.

L'aide-de-camp (2), introduit dans la salle, a exposé qu'un de ses camarades et lui, voulant

(1) Duport-du-Tertre. « Je crois qu'il est utile que l'assemblée ajoute à son décret une disposition qui m'autorise complètement à apposer le sceau de l'état à ses décrets; car c'est le roi qui m'a nommé, et qui m'a confié ce sceau entre les mains. Une délibération de l'assemblée nationale peut seule m'autoriser, en ce moment, à en faire usage; et cette autorisation est d'autant plus nécessaire, que le roi m'a enjoint, ce matin, par une apostille mise au bas du mémoire qui m'a été remis, de ne sceller ni signer jusqu'à ce qu'il m'en ait autrement ordonné.

(2) Robeuf, aide-de-camp du commandant de la garde nationale. « Je ne m'attendais pas à paraître devant cette assemblée. Le peuple qui m'a arrêté, m'a conduit au comité des Feuillants, et a voulu que je fusse amené devant vous. Je partais pour exécuter les ordres de M. de Lafayette, qui m'avait expédié un ordre par lequel il me chargeait d'avertir les bons citoyens du départ du roi et de les engager à employer tous les moyens pour l'arrêter dans sa route, et pour s'opposer aux tentatives des ennemis de l'ordre public. Ce sont les ouvriers du pont Louis XVI qui m'ont arrêté ; ils m'ont maltraité, ainsi que M. Curmer, mon camarade, dont j'ignore en ce moment le sort.

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