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IV. Ep. procha, sans ménagement, l'évasion du roi; 1791. on sembla même lui faire grace, en ne l'accusant que de négligence. Il répondit, en peu de mots, et Lameth ensuite prit sa défense. Longtemps des soupçons vagues restèrent sur la conduite de Lafayette. A cette époque, un parti l'accusait d'intelligence avec la cour : le parti opposé, l'accusa de duplicité, ayant, disait-on, fait arrêter le roi, après lui avoir facilité son départ. Si l'intérêt des hommes publics est toujours la balance assez sûre pour peser leurs actions, la trahison l'exposait au dedans, et la perfidie le perdait sans ressource au dehors; ce qui est possible et probable, c'est qu'il eût fermé les yeux sur le départ de la reine, et que celui du roi ne lui fût pas confié. Beaucoup de bons esprits desiraient cet éloignement de la reine comme le seul moyen de sauver le roi, elle-même et la monarchie. Pendant ces deux journées, tout confirma l'attitude du calme et de l'assurance; l'assemblée ne voulut même rien changer à une disposition annoncée qu'elle assisterait à la procession de la Fête-Dieu.

Le mercredi soir 22 juin, un courrier apporta à l'assemblée la nouvelle que le roi avait été arrêté à Sainte-Menehoult. Le maître de postes, M. Drouet, eut quelque soupçon, et

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crut avoir reconnu le roi; il n'osa cependant IV.• Ep. pas arrêter les voitures; un détachement de dragons était arrivé la veille, et sur les mouvements de cette troupe, au passage de la voiture, Drouet ne douta plus. Il crie, aux armes, assemble la garde nationale, et monte à cheval à la suite des voitures. A Clermont, il apprend qu'elles ont quitté la route de Metz. Il prend un chemin de traverse et les devance de quelques instants. A Varennes, la municipalité fut à l'instant avertie, le peuple, sous les armes, les issues gardées, un chariot renversé Pièces j. barricada le pont, et lorsque les voitures arrivèrent, l'officier public demanda les passe-ports: ils étaient au nom de madame la baronne de Korf, voyageant avec sa famille, et signé Louis; plus bas, Montmorin. Il était minuit la rumeur et le tumulte servirent de prétexte à l'officier public pour engager le roi à ne point passer outre. Il lui offrit sa maison; et la famille royale y descendit. Le roi ne croyait point encore être reconnu; des relais étaient préparés dans un château voisin; et l'usage de la poste était d'y conduire, sans changer de chevaux, à Varennes : cette imprévoyance seule causa l'arrestation. Cependant l'alarme s'était communiquée dans tous les lieux voisins, les gardes nationales, en armes, arrivaient de tous côtés à Varennes; divers détachements de Tome I.

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IV. Ep. cavalerie, qui avaient été disposés secrètement depuis Châlons, et qui devaient favoriser le passage du roi et se replier successivement sur Mont-Médi, se rapprochaient aussi de Varennes. Un de ces détachements y entra. L'officier qui le commandait, était aide-de-camp du général Bouillé, demanda à parler au roi, qui lui dit : Quand part-on ? L'officier répondit: Sire, on attend vos ordres. Le roi ne pouvant plus douter qu'il ne fût connu, dressa au procureur de la commune, et lui dit Je suis votre roi; placé dans la capitale, au milieu des poignards et des baïonRapport nettes, je vais chercher en province, au micomité. lieu de mes fidelles sujets, la liberté dont vous

du

s'a

jouissez tous; je ne puis plus rester à Paris, sans y mourir ma famille et moi.

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En même temps, il embrasse ceux qui l'entourent. On le pressait inutilement de retourner à Paris. Alors le détachement d'hussards qui s'était mis en bataille devant la maison où était le roi, fit quelques mouvements pour s'emparer du canon qu'on y avait amené; l'officier de la garde nationale reçut un coup de sabre de l'officier commandant ce détachement, et le blessa d'un coup de pistolet. Les hussards demandèrent un officier de la garde nationale pour les commander. Un cavalier de maréchaussée annonça que le fils du général

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Bouillé s'avançait avec un corps de cavalerie; IV. Ep. l'aide-de-camp de Lafayette arriva de Paris, apportant le décret de l'assemblée; on attelle les voitures; la garde nationale les entoure, et elles sont conduites à Clermont. On vit, en chemin, un corps de cavalerie posté sur une hauteur; c'était le régiment de Royal - Allemand, le général Bouillé à la tête; le roi lui fit donner ordre de ne rien entreprendre et de se retirer. Le fils de Bouillé, avec un détachement de hussards, tenta inutilement le passage de la rivière pour couper le chemin aux voitures; elles arrivèrent en sureté à Clermont.

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L'assemblée était en séance, le mercredi 22 juin au soir, on venait de lire une adresse aux Français, lorsqu'une grande agitation et ces mots: il est arrêté, annoncèrent l'événement. Pièces į. Le président donna lecture des lettres qu'apportait un courrier. Alexandre Lameth dit qu'il fallait assurer le retour du roi, instruire le royaume de son arrestation, et s'assurer de la personne du général Bouillé. Ces mesures furent à l'instant proposées par un décret du comité militaire. La première disposition nomma trois commissaires, Pétion, Barnave et Latour-Maubourg, 25 juim: chargés d'aller au devant du roi et d'assurer son retour; la seconde disposition suspendait de ses fonctions le général Bouillé, et défen

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IV. Ep. dait au militaire de tout grade, de reconnaître ses ordres. Il s'était déja mis en sureté, et aussitôt après la défense qu'il avait reçue de la part du roi, il avait gagné rapidement le territoire de l'Empire, avec les généraux Klinglin et d'Ossíse; ils se retirèrent d'abord à l'abbaye d'Orval.

On reçut, en même temps, une lettre du maire de Sainte-Menehoult. Il écrivait: Le roi, avec sa famille, est parti d'ici à deux heures du matin pour se rendre à Châlons; je lui ai répondu, sur ma tête, qu'il ne leur arriverait aucun accident en route; et, à leur arrivée à Paris, je vous prie d'en prévenir les citoyens de la capitale. C'était sans doute une belle et honorable responsabilité, celle qu'un simple officier municipal osait prendre de la conduite et de la tranquillité de tout un peuple. Ces mesures furent assurées par un décret qui déclara : « 1.o traîtres à la patrie ceux qui ont « contribué à l'enlèvement du roi, et ceux qui «tenteraient de s'opposer à sa réunion aux représetants de la nation; 2. qui ordonne à << tous fonctionnaires publics, civils ou militaires,

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de saisir tous ceux qui oseraient porter at<«<< teinte au respect dû à la dignité royale. Robespierre s'éleva contre ces mots enlèvement et réunion aux représentants. Il laissa prévoir une grande question à agiter: « yous la pres

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