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1792.

V. Ep. colonne au centre par les troupes partant du camp de Maulde aux ordres de Lanoue. Lukner se refusa à tout mouvement offensif, soit qu'il suivît en cela des ordres confiés à lui seul, soit qu'il craignît de compromettre son antique réputation; et il est vrai que les officiers-généraux et supérieurs, encore étonnés des désastres de Mons et de Tournai, gardaient une circonspection qui leur faisait craindre de donner au hasard avec des troupes incertaines, et des accusateurs préparés : le compte à rendre à la tribune législative et aux tribunes populaires, en imposait plus que le canon de l'ennemi. L'armée de Lafayette marcha le 14 par Avesnes, et arriva le 21 au camp de Villers-le-Rond, proche Marville, entre Mont-Médi et Longwi. On décida, le lendemain, une attaque sur plusieurs postes de l'ennemi, dans les environs d'Arlon, sur la frontière du Luxembourg; les généraux Leveneur, Lallemand et le colonel Stengel, durent conduire chacun une colonne; la réserve, aux ordres de Latour-Maubourg, dut faire la principale attaque.

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Dans la nuit, l'ennemi changea sa position, et malgré l'avis qui en parvint, Lafayette, incertain de l'arrivée à temps des contre-ordres, laissa s'opérer le mouvement convenu, qui se borna à une reconnaissance sur la frontière du Luxembourg, et à une canonnade, à la colonne

de Leveneur; un adjudant-général, officier de V. Ep. mérite, Desmotes, y fut tué.

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T el était alors l'état des armées, qu'à peine Jeur organisation était connue et réglée; les relations avec le pouvoir exécutif étaient incertaines et sans suite. Dumourier écrivant au président de l'assemblée nationale pour demander des ordres et des secours, commençait sa lettre ainsi : «Ne sachant pas s'il y a un ministre de la guerre, etc...;» La hiérarchie entre les généraux n'était pas fixée. chacun prétendait ne prendre l'ordre que de tel chef, et souvent n'en prendre que de soi-même; tous, comme il arrive dans les temps de troubles, songeaient surtout à s'attacher leurs armées. Les partis dans l'intérieur se les disputaient, et s'occupaient plus de faire destiner les renforts aux armées sur lesquelles ils croyaient pouvoir compter, qu'à celles qui, par leur position 1.litaire, ou par leur dénuement, en avaient le plus besoin. Les jacobins, soit girondins, soit montagne, étaient bien plus craints des généraux, et les craignaient aussi bien plus que l'ennemi. Souvent les moyens de subsistance n'étant, ni prévus, ni assurés par les ministres, il fallait que les corps administratifs y pourvussent par des avances, ou par des réquisitions. Les corps administratifs voulaient aussi prendre Pièces ji part au commandement, selon leurs convenances ou leurs craintes locales; ils donnaient des ré

(9).

V. Ep. quisitions aux généraux pour le placement ou déplacement des troupes.

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Pièces j.

(10). Le 14, un corps de six à sept mille hommes de l'armée autrichienne, s'empara d'Orchies, où se trouvait le bataillon de la Somme, au nombre d'environ six cents hommes, avec deux pièces de campagne. L'ennemi attaqua avec fureur les deux portes du côté de Lille et de Douai. On n'avait pas encore eu le temps de fortifier ce poste; le bataillon se défendit avec le plus grand courage, et fit sa retraite sur Saint-Amand, ayant perdu un de ses canons; un capitaine, nommé du Thai, se couvrit de gloire et sauva la garnison; deux colonnes ennemies tirèrent l'une sur l'autre et perdirent cinq cents hommes. Le lendemain le poste fut repris, et l'ennemi, cerné les troupes qui avaient marché du camp Famars, du camp de Maulde et de la garnison de Douai, n'eut que le temps de faire sa retraite. Dumourier alors renforça son camp de Maulde d'une partie des garnisons voisines; il avait devant lui l'armée autrichienne, forte de quinze mille hommes, commandée par le duc de Saxe-Teschen, qui s'était établi dans le camp de Bavai, peu de jours après le départ de l'armée de Lafayette pour occuper les positions de la Chiers, entre Sédan et Mont-Médi. C'était ce camp de Maulde devenu fameux par le refus formel de Dümourier, d'obéir à l'ordre de

par

de

Lukner, de lever le camp et d'en amener les V.. Ep. troupes au camp de Metz. Cette insubordination 1792. soutenue à deux ordres positifs, fut motivée militairement sur la position du duc de Saxe-Teschen qui, de-là, menaçait les villes de Flandre, et coupait la communication avec Valenciennes. On y chercha un autre motif politique, celui de tenir réunie, et de ne pas éloigner l'armée sur laquelle les jacobins comptaient le plus. Dillon mit en état de siége les villes de Landrecies, le Quesnoi et Avesnes, assembla un grand conseil de guerre à Valenciennes, on y constata l'état de l'armée, le dénuement d'armes, de munitions, d'équipement, le faible état de défense des places, le défaut de troupes en nombre suffisant, la proximité de l'ennemi. Ce procès-verbal appuyé de l'attaque faite par Saxe-Teschen, fut envoyé à l'assemblée, et servit à motiver le refus d'obéir de Dumourier. Il garda son camp de Maulde, ety forma, par une bonne discipline et par une guerre de poste active, un corps d'armée qui lui donna sa confiance, et qui fut d'une grande ressource peu de temps après. Les armées sur cette frontière, depuis Dunkerque jusqu'à Metz, occupèrent les mêmes postes jusqu'au temps de l'invasion, et tout s'y réduisait à des affaires journalières d'avant-postes et de guerre de détail. Après le départ de Lafayette, les troupes restées pour couvrir les départements du Nord,

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V. Ep. étaient divisées en trois camps: Dumourier com mandait celui de Maulde avec vingt-cinq bataillons et cinq escadrons, faisant en tout huit à dix mille hommes; le général Lanoüe avec douze bataillons et six escadrons, occupait le camp de Maubeuge, et Dillon campait à Pontsur-Sambre, avec huit bataillons et cinq escadrons: il s'en fallait de beaucoup que ces forces fussent suffisantes pour couvrir cette frontière; mais les plans d'attaque de l'ennemi n'étaient pas dirigés de ce côté. Leur armée arrivait, se réunissait successivement aux environs du pays de Luxembourg, composée d'Autrichiens, de Prussiens, et de Hessois; devant eux était l'armée de Lafayette, forte de vingt-huit mille hommes, y compris les garnisons à ses ordres; il occupait, derrière la Chiers, les positions entre Sédan, Mont-Médi et Stenay. Lukner commandait le camp de Frescati, près de Metz, avec vingt-trois mille hommes; Kellermann Biron et Custine en réunissaient '16 à 18 mille. Ces corps occupaient les positions derrière la rivière de Sarre et les lignes de Weissembourg; et Lamorlière en Alsace, avec environ dix-neuf mille hommes, presque tous de bataillons nationaux, gardait les passages du Rhin et couvrait ses deux départements.

Ces corps d'armée avaient été dans un état de défensive active. En attendant l'arrivée des

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