Page images
PDF
EPUB

1792.

IV.. Ep. état des choses. Tous ces mouvements étaient factices, et ceux qui les suscitaient, avaient plutôt besoin d'être contenus qu'éclairés. A Étampes, le maire Simonneau voulant maintenir la loi, et refusant de taxer les grains, fut abandonné de son escorte, et massacré par les agitateurs, au milieu du peuple, sur la place du marché. Tous les partis opposés couraient au même but, le renversement de la constitution actuelle; les uns, pour remettre la royauté telle qu'elle était avant; les autres, pour abolir la royauté; et leurs moyens étaient les mêmes, les troubles intérieurs et la guerre au dehors.

Tout la rendait inévitable; le système de la coalition était d'effrayer l'assemblée pour l'amener à une capitulation, et le système de l'assemblée était de forcer de mesures pour marquer son assurance; on parlait d'un congrès des puissances alliées, qui, sous le titre de médiation armée, devait proposer des modifications à la constitution française. L'assemblée y avait répondu par un décret qui déclarait infâmes et traîtres à la patrie tous les Français qui proposeraient d'adhérer à un congrès. Une députation porta, séance tenante, ce décret au roi, et sa réponse fut de fixer le 10 février comme délai fatal pour une explication précise et cathégorique de l'empereur. Peu de jours avant, sur une

lettre

1792.

lettre du roi, qui semblait annoncer l'espérance IV. F. de mesures conciliatrices, l'assemblée avait porté le décret d'accusation contre les princes,

Cet accord et cette fermeté en avaient imposé, et ralenti les mesures offensives; les rassemblements de Français émigrés furent réellement séparés; plusieurs même rentrèrent dans leur patrie. Les ministres de France, dans les cours étrangères, y prirent une attitude plus convenable à leur dignité. La notification du roi, de son acceptation, qui avait été refusée dans plusieurs cours, et notamment en Suède, fut accueillie, et l'empereur s'expliqua hautement sur le changement que cette circonstance apportait aux affaires. Dumourier était alors ministre des relations extérieures. Presque étranger aux premiers événements de la révolution, il avait quitté sa retraite pour venir offrir ses services, et un plan de conduite qu'il avait bien vu manquer. Dumourier, déja connu dans l'armée comme officier d'état-major, instruit et habile, était doué d'une grande activité d'esprit et de corps; prompt et entreprenant par caractère, propre à entreprendre, confiant dans ses moyens d'exécution; mais trop prompt pour mener à sa fin l'entreprise qu'il avait conçue et conduite. Le style de ses dépêches donna d'abord un autre accent aux négociations chez les puissances étrangères; toutes les opinions n'y étaient pas conTome II.

8

1792.

IV.• Ep. traires à la révolution de France, et les mesures préparées contre elle, n'y obtenaient pas l'assentiment général; les opinions philosophiques des écrivains français, avaient pénétré en Allemagne, et toute la classe des lettres, qui formait comme un ordre particulier, était partisan et défenseur de la révolution française. Léopold avait essayé de la combattre à armes pareilles, et des journaux anti-révolutionnaires furent publiés à Vienne'; mais la partie n'était pas égale, et la thèse de la liberté publique, qui n'est pas toujours soutenue avec avantage dans le fait et dans la pratique, a toujours pour elle le droit et la théorie. Léopold ne se portait qu'à regret à entreprendre une guerre dont il prévoyait les suites, et peutêtre même cette guerre n'eût point eu lieu; mais sa mort inopinée vint susprendre un moment, ensuite précipiter les événements. Environ un mois après, Gustave fut assassiné à Stockholm. Ankastroem, noble suédois, le frappa au sortir d'un bal. Gustave survécut peu de jours, et laissa une renommée composée de grands talents, de grands défauts, et de quelques vertus. Il venait de tenir les états de son royaume, et maniant avec une politique habile et adroite les différents ordres, pendant la tenue des états, qu'il venait de congédier, il avait réussi à obtenir de grands subsides, et se disposait a se mettre à la tête de la coalition contre la France, ́

[ocr errors][ocr errors]

1792.

Sa mort apporta un retard au concert de toutes IV. Ep. les parties intéressées, et le prince régnant de Brunswick fut désigné pour le remplacer; il fit un voyage à Bruxelles, c'était comme le quartier-général des puissances coalisées. Les différents partis qui avaient formé la révolution de Brabant, comprimés par la force des armes, laissaient encore quelques motifs d'inquiétude, et elles avaient servi de prétexte pour y rassembler des corps nombreux de troupes; la Prusse commençait aussi à en approcher des frontières de Hollande. Cette alliance, que longtemps on ne crut pas possible, parce qu'elle n'était pas vraisemblable, s'était cependant réalisée. On ne pouvait plus douter qu'un plan d'opérations ne fût combiné contre la France, et même il était fort douteux que l'intérêt des princes et le rétablissement du pouvoir absolu, fût le seul but de tant de démarches. L'exemple de la Pologne avait prouvé que les partages n'avaient besoin que de la raison de convenance. Les princes eux-mêmes, et les chefs des Français émigrés pouvaient ignorer les clauses secrètes de la convention de Pilnitz. Les dernières communications de l'ambassadeur à Vienne, Noailles n'avaient donné aucun éclaircissement; il n'avait même pu traiter directement avec le prince de Kaunitz, ministre de François, encore roi de Hongrie la réponse qu'il avait eue du vice

1792.

IV. Ep. chancelier de l'empire, Cobentzel, le renvoyait au dernier office adressé par l'empereur Léopold au roi. En voulant la guerre contre la France, on voulait que l'assemblée se chargeât de la déclarer. Le 19 avril, le roi fit donner à l'assemblée communication succincte de deux dépêches de l'ambassadeur de France à Vienne, et prévenir qu'elles seraient délibérées immédiatement dans le conseil. Le 20, le roi en fit donner communication officielle, et s'annonça pour le lendemain à l'assemblée; il y vint le 21, à midi, et après lecture faite du rapport au conseil, par le ministre Dumourier, le roi proposa formellement la guerre contre le roi de Bohême et de Hongrie. Le soir du même jour, le décret de l'assemblée accepta la guerre, et fut porté de suite à la sanction du roi.

t

« PreviousContinue »