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taires des poftes royales, commandoit en chef. Après ces poftillons venoit le corps des bouchers, habillés en brun, chapeau bordé d'argent, & cocarde rouge. Enfuite marchoit le corps des archers bourgeois, avec un uniforme bleu, vefte rouge, galonnée d'or, chapeau bordé d'or avec une cocarde verte. Ils étoient fuivis d'un corps confidérable de nos marchands, qui fe diftinguoit par la beauté de fon uniforme, qui étoit, l'habit, verd-céladon, la vefte couleur de paille, galonnée d'or, chapeau auffi galonné d'or avec une cocarde blanche: le chef de ce corps étoit le marchand Schluffer. Après ces différens corps venoient 3 fuperbes carroffes de parade, dans lefquels étoient le lieutenant- général de Lentulus de Bubdenbrock, le comte de Werthern, miniftre d'état & grand-maître de la garde robe, les généraux-majors de Sobeck & de Prittwitz, ainfi que quelques autres gentilshommes. Un détachement des gardes-du-corps, fuivi d'un conreur de la cour, fuperbement équi pé, précédoit immédiatement un des carroffes du roi, attelé de 8 chevaux, dans lequel étoient affis S. A. I. le grand-duc der Ruffe, & S. A. R. le prince Henri de Pruffe. Ce carroffe attiroit les yeux de tous les fpectateurs, non-fendes

lement à caufe tous des perfonnes qui l'oc

cupoient, mais auffi par la rich par la richeffe des ornemens dont il étuit décoté; on voyoit au-deffus de l'im périale une fuperbe couronne royale. Ce carrol terdit fuivi de 3 autres non moins magnifiques, occupés par le général feld-maréchal.com te Romanzow-Sadumiskoy, le général en chef comte de Soltikow, les chambellans & gentilshommes de la chambre de S. A. 1. Mrs. Pelfkow ? Natifchkin, & le prince Kurakin. Ce ma Brinque cortege étolt ferm par 100 hommes an régiment de Koichenbahr, infanterie

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avoient eu la garde d'honneur à Weiffenfée; après Ce détachement fuivoitum grand nombre de cha riots & voitures de bagage. L'arrivée de ce bril-kant cortege fut amoncée par un chœur de trompettes & de: timbales placé au-deffus d'un arc de triomphe érigé au-devant de la barriere de Bernau,& qui fervoit de,fignal à des décharges réitérées de l'artillerie, qui nercefferent qu'au monient que de roneut embraflé le goand-duc dans fon appartement. Toute la magiftrature de cet=te rélidence s'étoit raffemblée en corps près de cette barriere, où elle eut l'honneur de complimenter: S. A. Imp. fur fon heureute arrivée ; M. le préfident du fénat & confeilier de guerre Philippi porta la parole. Plus, de 70 jeunes filles de cette ville, habillées partie en nymphes, partie en bergeres, s'avancerent fur une ligne vers le carroffe de L. A. Imp. & royale, & la principale eut l'honneur de présenter au grandduc une guirlande de fleurs, & quelques vers faits à la louange.ske prince reçut le tout avec les plus grandes marques de bonté. Ce magnifique cortege paffa enfuite le premier arc-de-triomphe, qui, ainfi que les autres, étoient des -marques du bon goût & des connoittances de celui fous la direction duquel il avoit été conftruit. Au milieu de la principale façade de cet arc fe voyoient les génies rufles & pruffiens, qui s'embraffoient tenant chacun en leur main June corne d'abondance; à leurs côtés on voyoit leurs héaumes, leurs écus & autres armes, de même que les armoiries des deux états refpectifs: le tout étoit décoré de cette infcription: Fides mutua, & au deffous on lifoit: Magno Rufforum Principi Ingredienti Senatus Populufque Berolinenfis Acclamant Feliciter, Die XXI Jul. 1776.

Le grand-duc de Ruffie ayant pallé avec fon brillant cortege fous le premier arc-de-triomphe

placé à la barriere de Bernau, arriva du pont du roi, où S. A. Imp. fut de nouveau.complimentée par une feconde troupe de jeunes filles de nos plus riches négocians, toutes habillées comme des jardinieres, Elles eurent l'honneur de préfenter à ce prince une épître, qu'il recut avec la plus grande affabilité, & elles parfemmerent de fleurs tout le chemin par où il devoit paffer. L'arc de triomphe dreffé près de ce pont étoit auffi de la derniere élégance, & digne du fouverain qui donnoit ces fêres. On voyoit fur le deffus plufieurs génies ruffes & pruffiens qui danfpient; les uns étoient armés d'un cafque & d'un bouclier, & les autres étoient ornés de fleurs autour étoient éparses des armes,& l'on remarquoit parmi eux deux écuffons chargés des aigles ruffe & pruffien, avec cette infcription:1

Ex amicitia felicitas."

D'un côté de cet arc on voyoit la déeffe du bonheur avec tous fes attributs, & de l'autre l'efperance fe repofant fur une colonne, & ayant en fa main plufieurs épis de bled, & à fes pieds une ruche à miel.

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De-là tout ce pompeux cortege s'avança jufqu'au long pant, où eft placée la ftatue de feu l'électeur Fréderic-Guillaume le grand, de glogieufe mémoire : ici l'on avoit conftruit un troifieme arc de triomphe, qui ne le cédoit en rien aux deux autres, tant pour la magnificence des décorations, que pour l'élégance de la conftruction. On lifait fur le frontispice ces mots: Vota Matris patrifque exaudita.

D'un côté l'on voyoit la ville de Berlin représentée par une femme, ayant une couronne civique fur la tête & une coupe en fa main, de laquelle elle verfoit une offrande fur un autel, placé à fes côtés; au pied de cet autel étoient les armes de la ville avec cette infcription:

Saluti hofpitis.

De l'autre côté fe voyoit la Sprée, repréfenfentée par un dieu, la tête couronnée de coquillages, accoudé fur fon vafe, & tenant de l'au- ` tre main un gouvernail antique. Au bas fe lifoit: #nolog est Lætatur & Amnis.

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Toute la riviere éroit couverte de bâtimens de différentes grandeurs, ornés de pavillons & de banderoles. Dès que L. A. Imp. & Roy. furent arrivées à ce pont, le grand-duc fut de nouveau complimenté par une troupe de nos principales jeunes bourgeoifes & de la colonie françoife, toutes habillées en bergeres & payfannes, & ce prince reçut, de la maniere la plus affectueufe, leur compliment de félicitation fur fon heureufe arrivée, & les vers qu'elles eurent d'honneur de lui offrir. Pendant tous ces diffé rens témoignages de refpect, l'air retentiffoit des acclamations de plufieurs milliers de perfonnes, qui, touchées de la beauté & de la ma gnificence de ce fpectacle, ne pouvoient s'empê cher de répandre des larmes de joie. Toutes les fenêtres qui donnoient fur le paffage, étoient pleines de curieux; on en voyoit même fur les toits. Mais ce qui mérite furtout l'admiration, c'eft que, malgré cette prodigieufe affluence de monde accouru en foule de tous côtés, la po lice avoit donné de fi bons ordres, & pris de û fages mefures, que toute cette pompeufe céré monie s'eft paffée fans le moindre défordre. On avoit placé à toutes les rues qui aboutilloient à la rue du roi, des chœurs de trompettes & de timbales, il y en avoit auffi fur les arcs de triomphe, les tours de l'églife de St. George, & fur l'hôtel-de-ville, qui, ainfi que l'artillerie, fe faifoient entendre tour-à-tour. Pendant cette allégreffe publique, le brillant cortege arriva au château, où la réception du grand-duc fe fit ainfi qu'il a été annoncé. Le roi & toute la fa

mille royale recurent ce prince de la maniere fa plus rendre. Enfuite il y eut grande cour, à laquelle fe trouverent tous les officiers-généraux & de l'état-major, les miniftres d'état, ceux des puiffances étrangeres, & nombre d'autres perfon nes de la premiere diftinction &c.'

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Le grand-duc de Ruffie s'étant rendu le 24 Juillet, à l'académie royale des fciences & belles-lettres de Berlin, M. Formey, confeiller intime de S. M. Pruf., & fecrétaire-perpétuel de cette compagnie littéraire, adreffa ce difcours à S. A.I. MONSEIGNEUR, SÅ

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Si nos yeux font éblouis dans ce moment, ce n'ef pas de voir dans l'enceinte dete, fanctuaire des mifes l'héritier d'un des premiers trônes de l'univers, & d'un trône qui acquiert tous les jours un nouveau dégré de fplendeur. Nos regards percent fort au delà de ce premier éclat qui les affecte, & pénétrent, pour ainfi dire, à travers cette atmosphere de grandeur qui vous environne. C'est l'homme, bien plus que les prince, que nous admirons, que nous vénérons, que nous recevons avec les plus vifs tranfports & joie, & à qui l'entrée de nos coeurs eft bien plus ouverte encore que celle de ce lieu, Oui, Monfeigneur, dépouillée de toute grandeur, V. A. Imp. demeureroit digne de nos hommages par excellence de fon caractere, par la nobleffe de fes fentimens, par ce fond d'humanité qui change les princes en divinités & leur mérite des autels, fur lefquels fume l'encens le plus pur. Recevez-le, Monfeigneur, cet encens; il ne reffemble en rien à celui de l'adulation. Nous ne voulons point qu'il porte à votre tête pour l'étourdir ; c'est à votre cœur qu'il doit parvenir pour y entretenir le feu célefe dont vos yeux dardent les étincelles. Recevez en même tems nos vœux. Que le puiffant génie de Fierre le Grand guide tous vos pas, & vous falle conduire un jour au plus haut point de perfection les grandes en treprifes de ce rival de Prométhée, de ce monarque créateur. Que l'immortelle Catherine, à qui vous devez avec le jour tout ce qui peut donner du prix à l'existence, Vous tranfmette, après avoir rempli le cours de fes hau tes deftinées, avec cet empire qu'elle a éclairé, embelli, aggrandi, je dirois prefque vivifié, cette fagelle, cette

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