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CONSTANTINOPLE ( le 17 Juillet.)

L Es dépofitions, l'exil & la mort même, done la Porte punit l'infidélité ou les vexations des gouverneurs des provinces, ne rendent leurs

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fucceffeurs ni plus circonfpects, ni plus attentifs à remplir leurs devoirs. Ce n'eft pas qu'ils ne connoiffent tout le poids de la verge du defpotifme; mais leur cupidité, plus forte que la crainte, leur fait braver les arrêts du divan ou bien ils fe flattent que leur pouvoir doit leur aflurer l'impunité. C'eft ainfi que calculoit, fans doute, Spanakfi-Zadé, qui avoit été nommé gouverneur de Bagdad. La tête encore fanglante de fon prédéceffeur Omar pacha, n'a point étouffé en lui le defir d'amaffer des tréfors, & ne l'a point empêché de négliger les ordres du divan relativement aux Perfans qui menaçoient fon gouvernement. Cette conduite ne pouvoit manquer de lui attirer l'indignation du grand-feigneur, qui vient de le deftituer. Il est remplacé par le premier & le fecond kiaya, ou lieutenans du feu Omar pacha, qui ont reçu des inftructions précifes pour s'oppofer aux entreprifes des Perfans; S. H. les a élevés à la dignite de pachas à trois queues, & leur a fait par venir des fommes confidérables pour payer des arrérages aux

Bigdad. La Porte a milices du pachalik de

fait raffembler en même tems un corps nombreux qui doit foutenir les opérations des deux nouveaux pachas.

Malgré ces difpofitions, on fçait que la Porte s'occupe des moyens de conclure un accommodement avec Kerim kan. Ces moyens paroiffent fort-fimples s'il eft vrai, comme on l'aflure, que le fophi de Perfe n'exige que la reffitution des biens &, des effets dont l'avarice du feu pacha Omar a très-injuflement dépouillé les Perfans qui font établis dans le gouvernement de Bagdad.

Le chevalier de St. Priest, ambaffadeur de France, n'attend pour partir que l'arrivée de la frégate de S. M. T. C, qui doit le tranfporter dans la patrie.

RUSSI E.

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PETERSBOURG (le 8 Août.) Trois mois font à peine écoulés depuis que la mort nous a enlevé la grande ducheffe, née princeffe de Heffe-Darmstadt. Cet événement avoit plongé la cour dans la douleur; mais il eft un terme aux larmes & à la trifteffe, & ce terme eft ordinairement plus court dans les palais des rois que dans les habitations de leurs fujets. Les regrets vont fe changer en acclamations de joie, & le deuil en habits de gala & en fêtes brillanres pour lesquelles on fait déja les plus grands préparatifs. La princeffe de Wurtemberg-Stutgard, qui en eft l'objet, s'achemine vers cette capitale, où le grand duc, qu'on y attend vers le 20 de ce mois, la précédera de quelques jours. Déja la maréchale de Romanzow, accompagnée de plufieurs dames de cour, eft partie pour aller recevoir la future grande ducheffe fur les confins de la Pruffe. Lorfqu'elle prit les derniers ordres de l'impératrice, elle fut décoréé de l'ordre de Ste. Cathérine, & reçut une gratification de 20 mille roubles pour les frais de fon voyage. La maréchale, qui doit être actuellement à Riga, eft auffi accompagnée de M. Paftouchow, confeiller d'état & fecrétaire du cabinet, destiné à donner à la future grande ducheffe les principes de la langue ruffe.

Il n'eft point d'état en Europe où le mérite foit couronné & la valeur récompenfée avec plus de magnificence & d'éclat que dans cet empire. C'est des mains généreuses de leur augufte fouveraine que les guerriers reçoivent des lauriers, des brevets de penfions & d'avancemens; mais ce qui eft encore plus flatteur, c'eft de fa bouche même que découlent les éloges dus à leurs actions. Les fervices paffés ne per

dent rien de leur mérite; loin de les oublier, on voit l'impératrice fe rappeller avec reconnoiffance qu'elle ne doit la fplendeur dont jouit fon empire qu'aux efforts multipliés de fes trou pes; auffi fes officiers de tous les grades, fans foins, fans placets, fans follicitations ruinenfes reçoivent le prix de leur valeur ; ils ne vont point chercher les récompenfes; c'eft Catherine II qui daigne les leur apporter. C'est ainsi que cette princeffe en ufa le 19 du mois dernier, lorfqu'elle paffa (ainfi que nous l'avons dit ) de fa chaloupe à bord du Ratiflaw, vaiffeau amiral de fa flotte. La relation de cet événement vient d'être publiée; mais en écartant les détails de la pompe dont il fut accompagné, nous nous bornerons à rapporter l'ordre concernant la distribution de la valeur des prifes faites fur les Ottomans. Cet ordre, dont S. M. I. fit faire la lecture en fa préfence, étoit adreflé au college de l'a mirauté, & conçu en ces termes.

Que Dieu foit loué ! Nous voyons toure notre flotte revenue heureufement & avec gloire dans le port de Benpire rufe. L'heure eft donc auff venue que nous pouvons témoigner notre fatisfaction impériale de la maniere dont elle a furmonté toutes les difficultés, & récompen fer glorieufement le courage, la capacité & les efforts zélés par lefquels elle a affure, durant la derniere guer re avec la Porte ottomane, une gloire immortelle à la marine de Ruffie. Nous ne faifons point ici l'énumération des triomphes qu'elle a remportés, des conquêtes qu'el le a faites, de l'empire qu'elle s'eft affuré dans l'Ar chipel & fur les côtes de l'Europe, de l'Afie & de l'Afri que: ils font auffi connus à toute la terre qu'à ceux qui en ont été témoins oculaires. Ceux qui ont fait toutes ces actions, qui, en vainquant & détruifant totalement la force maritime de l'ennemi dans les mers les plus éloignées, ont remporté les plus beaux trophées, à la gloire de leur prédéceffeur, le fondateur de la marine ruffe, Pierre le grand', de bienheureufe & immortelle mémoire, & qui les ont dépofés fur fa tombe, en témoignage de leurs faits, fi conformes à fes grandes vues; ces braves hommes recevron aujourd'hui de nos mains

conformément au réglement de la marine, les gratifica tions qui leur appartiennent pour l'action près de Napoli de Romanie, pour la victoire de Chefmé, pour la deftruc tion totale de la flotte ottomane, près de Patrazzo, pour les avantages remportés dans la mer-noire, ainfi qu'il eft marqué dans la note ci-jointe; & ils feront d'ailleurs récompenfés par de nouveaux grades; graces par lesquelles nous voulons rendre ce jour plus mémorable. Nous donnons encore ici au courage excellent & à la capacité du commandant en chef, des autres commandans & de tous ceux qui ont fervi fous lui, & le font diftingués fur Ja flotte pendant la derniere guerre, les éloges mérités & les affurons tous de la protection de notre faveur im périale.

Donné à bord du vaiffeau le Raftiflaw, le 18 Juillet 17764 Signé, CATHERINE.

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Selon l'état de la distribution, ajouté à cet or-dre, il a été affigné, pour l'action près de Napoli en Romanie au mois de Mai 1770, où 25 vaiffeaux turcs furent mis en fuite, aux 3 vaiffeaux & 2 frégates de l'eféadre du contre-amiral Elphinston, 13738 roubles: pour la bataille de Chefmé, le 24 Juin 1770, à l'efcadre de l'ami ral Spiritow, 106632 roubles; à celle du contre-amiral Elphinston, 10303 roubles; en particulier au vaiffeau l'Euftache, pour avoir brûlé le vaiffeau ottoman, 6100 roubles, & pour le grand pavillon du capitan pacha, 3339 roubles; pour la deftruction totale de la flotte ottomane dans le golfe de Chefmé, le 26 Juin 1770, pour les vaiffeaux & bâtimens qui y furent brûlés 118492 roubles; pour 3 pavillons brûlés, 9000 roubles; pour la prife d'un vaiffeau & d'une galere dans le même port, 19010 roubles; au général en chef, 15593 roubles; aux autres officiers de pavillon, 22276 roubles; pour la vic toire près de Patrazzo, le 28 Octobre 1774, où, de 24 frégates & chebecs dulcignotes, 17 furent brûlés fous le canon de la forteeffe 35633 roubles, dont 3563 pour le commandant

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