Page images
PDF
EPUB

licate, & je me bornerai à rapporter ce que j'ai ențen du dire de ce nouvel exercice. En général, il a paru difficile, diffus, & rempli de détails minutieux, très-propres peut-être à faire briller des troupes un jour de parade, & à flatter la vue mais peu faits pour le foldat fuédois, qui eft naturellement un peu pefant, & qui fe diftingue plus par la force, la vigueur du corps, que par la légéreté & l'adreffe dans le manîment & le jeu des armes. De tout tems nos foldats ont eu une forte d'averfion pour les marches, contre-marches, & autres agrémens de la tactique moderne. Ils ont été acccûtumés à marcher, fans tant de façons, droit à l'ennemi, les rangs bien ferrés, la bayonnette au bout du fufil, chargeant peu, mais perçant impertubablement pour aller fe loger au centre de l'ennemi. Il femble en effet que pour arriver là, le courage naturel, le mépris de la mort & un vif defir de la victoire fuppléent affez à des pas fçavans, & leur font peut-être préférables. C'eft en fuivant cette méthode qué Guftaphe-Adolphe & Charles XII ont remporté les célebres victoires qui rendent leurs noms immortels. Il femble cependant que les ennemis que les Suédois peuvent avoir à combattre n'étant pas les mêmes que vainquirent les héros que nous venons de nommer, il ne foit néceffaire de s'accommoder en quel que forte aux circonftances, & d'apporter quelques modifications à notre ancienne tactique, fans trop contrarier le génie de notre foldat, qui eft encore le même, peu léger, ennemi des nouveautés, mais plein de ce cou rage froid,

fon fouvchi, le feul peut-être qui mérite d'être

appellé de ce

[ocr errors]

& toujours guidé par l'amour pour Nous ne nous arrêterons pas plus longtems fur cette importante queftion, qui n'eft ni de notre reffort, ni à notre portée, & nous nous contenterons d'obferver que fi l'exemple du fouverain peut infuer fur les fujets, le roi donne lui-même à fes troupes celui de la fobriété, de la fubordination, & qu'il leur appprend à s'endurcir au travail, aux fatigues, & as accoûtumer aux privations, puifque S. M.. n'a eu d'autre, logement que fa tente depuis le commencement des exercices, & qu'elle a affité régulierement à tou tes les manoeuvres, en faifant diftribuer fes ordres par M. le comte de Poff fon adjudant général. On peut remarquer ici en paffant, comme une nouveauté introduite dans notre militaire, que le roi a créé deux poftes d'aides-de-camp-généraux de l'aile (Flugel adjudant), uxquels S. M. a nommé les majors de Tol & de Piper.

7

Toutes les troupes font actuellement en exercice dans la Scanie, où le prince Charles a le commandement, & où il a formé un camp près de Lund; S. A. R. fait également l'effai de la nouvelle tactique; & ce n'eft qu'après en avoir balancé les avantages & les inconvéniens d'après l'expérience, que l'on fe déterminera à l'adopter en tout ou en partie. Le roi a fait marcher en, differentes fois divers corps de fes troupes pour les villes frontieres, telles que Gothenbourg, Landfcron Chriftianftadt, Carlfcron, Seabourg & Louifa, pour y travailler aux fortifications de ces places, & les mettre dans un état convenable de défenfe. Le général Sprengtporten commande en Finlande plufieurs petits corps répartis fur la frontiere, pour veiller au bon ordre & à la fûreté du pays; mais il a l'attention de prévenir tout ce qui pourroit donner lieu au moindre mécontentement, & troubler la tranquillité dont jouit la Suede. Nous nous flattons qu'elle durera encore, dumoins autant de tems qu'il fera néceffaire pour arranger les af faires en Pologne ; & en général, on eft affez d'opinion que nous ne fommes pas peu redevables aux troubles qui ont agité ce pays-là, du repos dont nous avons joui ces dernieres années dans celui-ci, furtout dépuis la révolution à laquelle nous devons notre bonheur, & à laquelle peu de perfonnes s'attendoient. Nous n'avons pas moins lieu d'être tranquilles du côté du Danemarck; & l'augmentation qu'on y fait de 10 hommes par com pagnie dans chaque régiment, tant d'infanterie que de ca. valerie, ainfi que les nouvelles levées, paroit ne tenir qu'à des arrangemens întérieurs, du moins quant à préfent.

BERLIN (le 17 Juillet.) Le roi a accordé au 27 général-major de Tettenborn la permiffion de fe retirer du fervice avec une penfion considérable, & a difpofé du régiment dont il étoit propriétai re, en faveur de M. de Zaftrow, colonel-commandant de celui de Saldern. S. M. a accordé en même tems au prince Louis de Saxe-Cobourg une compagnie dans le régiment de Steinkeller, infanterie.

S. M. vient de donner une nouvelle marqué de fa bonté à fes fujets de la province de Siléfie, en leur remettant les droits & impofitions de

plufieurs mois, qui fe montent à un million 56 mille écus d'Allemagne.

Le grand-duc de Ruffie, accompagné du prince Henri, fit, le 21 de ce mois, fon entrée en cette capitale, avec une pompe & une magnifitence dont l'Europe offre peu d'exemples.(La relation de cette brillante journée qu'il n'eft pas poffible d'inférer dans ce journal, trouvera place dans le fuivant, ou dans le prochain fupplément.)

Le grand-duc a été accueilli par L. M., par la famille royale & par celle de Wurtemberg avec les témoignages de la plus vive amitié. Le jour de fon arrivée, il y eut cour extraordinaire, & fouper chez la reine, qui fut fervi en vaiffelle d'or, & pendant lequel la mufique du roi exécuta divers morceaux de fymphonie. Le 22, il y eut appartement chez le grand-duc, dîner & fouper chez la reine. Le 23, S. A. I. fit fa prémiere vifite à L. M. & à la famille royale.

Ce jour-là, le prince Henri, chargé des pleins pouvoirs de l'impératrice de Ruffie, demanda formellement en mariage pour le grand-duc, la princeffe de Wurtemberg. Le 24, il y eut cour & feftin chez la reine. Le 25 le prince Ferdinand de Pruffe donna un déjeuner dans le parc fous des tentes. Hier 26, toute la cour alla à Charlottenbourg, d'où, après avoir dîné, elle se rendit à Potzdam.

[ocr errors]

La cour a reçu, le 19 de ce mois, par un exprès la nouvelle que la princeffe, épouse du prince héréditaire de Bade, née princeffe de Pruffe, eft accouchée le 13 de deux filles jumelles.

On apprend de Gruneberg en Siléfie que la tour & le clocher de l'églife catholique de cette ville font tombés le 14 fur cet édifice, qui a été très-confidérablement endommagé. La hauteur de la tour étoit de plus de 130 toifes. De deux fem

mes & d'un homme qu'on retira d'abord de deffous les ruines, l'une eft morte, les autres font grievement bleffés.

FRANCFORT fur le Mein ( le 2 Août.) On affure que la vifitation de la chambre impériale de Wetzlar fera fuppléée par un comité extraor dinaire des états de l'empire, qui procédera à la révision; de forte qu'on efpere que cette opé-. ration fera terminée avant 2 ans. On créa un femblable comité au commencement de ce fiecle.

Le chapitre noble de l'abbaye libre & impériale de Corvey s'étant affemblé le 18 du mois dernier, pour procéder à l'élection d'un princeabbé, tous les fuffrages fe font réunis en faveur de Dom Théodore, baron de Brabeck, de la maifon de Lohaufen, né le 15 Juillet 1735.. Cette abbaye, l'une des plus riches d'Allemagne, füt fondée en 822, par l'empereur Louis-le-Débonnaire. Son abbé prend rang parmi les princes eccléfiaftiques de l'empire.

On apprend que le Sr. Gerand a fait conftruire à Ferney une très-belle falle de spectacle, dont l'ouverture fe fit le 26 Juin; fa troupe, quoiqu'établie à Chatelaine, y donne deux repréfentations par femaine. La présence du céleBre auteur (M. de Voltaire), dont on repréfente les pieces, l'émulation des acteurs, la beauté de la falle, tout concourt à rendre ce fpectacle intéreffant. On y attend le Sr. le Kain, premier acteur du théâtre de Paris, qui doit jouer les principaux rôles dans Alzire, Tancrede, Rhadamifie & Zénobie, &c.

Des embaucheurs étrangers fe font répandus depuis quelque tems dans les états de l'électeur palatin, & en enlevent continuellement les jeunes gens, militaires ou autres, qu'ils ont féduits. S.A. E. voulant arrêter des manœuvres si préju

diciables à la population & à la sûreté de fes peuples, vient de donner les ordres les plus précis pour découvrir ces enrôleurs. Il eft enjoint de les arrêter, & de les conduire au régiment le plus prochain pour y être examinés & punis fuivant la nature de leur délit. Ceux qui les dénonceront, recevront une récompenfe de ro écus; mais ceux qui en auront eu connoiffance, & ne les auront pas dénoncés, fubiront la même peine que les embaucheurs. On ne doute pas que ces enrólemens ne fe faffent pour le compte de l'Angleterre. Le major Lutterloh a fon quartier d'affemblée dans le pays de Waldeck, où viennent fe réunir toutes les recrues levées par fes émiffaires dans différens districts de l'empire. On fçait qu'il en a déjà fait paffer plufieurs tranfports contidérables en Angleterre par la Hollande.

La nouveauté ne fait point le mérite des actions héroïques; quelle qu'en foit la date, il n'eft perfonne qui n'aime a les connoitre. Telle eft celle qu'un papier public rapporte en ces

termes:

«Après la bataille de Rosbach, les huffards noirs appellés tête de mort, parce qu'ils en ont une de paffement blanc fur leurs bonnets noirs avec deux os de mort en fautoir, poursuivoient les troupes françoifes défunies. Un des généraux pruffiens appercevant un endroit où l'on combat encore, s'approche, & voit un grenadier aux prifes avec fix de ces huffards. Le François étoit retranché par une piece de cano, & juroit, en combattant toujours, de mourir plutôt que de fe rendre. Le général admirant fa valeur, ordonne aux huffards de fufpendre leurs coups, & dit au grenadier, rends-toi, brave foldat, le nombre t'accable, ta réfiftance eft inutile. Elle ne peut l'être, je lafferai ces gens-ci, & je reAoût. ae. quinz. 2776.

B

[ocr errors]
« PreviousContinue »