lieutenant, qui prirent la réfolution de déferter le 19 Mars, en marchant la nuit, & en se cachant le jour dans des rochers, mais qui ne trouvant plus de moyens de fubfifter, furent forcés de fe rendre à des cabanes qu'ils apperçurent, & où ils retomberent dans les mêmes horreurs qu'ils avoient voulu éviter; vendus & revendus de nouveau, ils furent amenés prefque nuds, le 15 Avril, à Mogador dans les états du roi de Maroc; ils y recurenc des François qui s'y trouvent, les fecours que la feule humanité réclame mais qu'affure encore plus l'efpece de parenté patriotique dont les liens fe fortifient en raifon de l'éloignement du lieu natal. On a eu depuis des nouvelles de tout le refte de l'équipage, à l'exception du chirurgien, qui a pris la fuite de chez fon maitre.

La réclamation que M. Chenier, chargé des affaires de France, a faite de ces infortunés à la cour de Maroc, a eu le fuccès le plus heureux. L'empereur envoya fur le champ deux hommes de confiance du côté du fud pour racheter & ramener ces François dans fes états; & afin d'encourager fes fujets à les découvrir tous, ce prince a fait donner 100 ducats à ceux qui ont conduit à Mogador les deux officiers de qui l'on tient les circonftances de cette relation.

TURIN (le 20 Juin.) Le duc de Saxe-Tefchen & l'archiducheffe Marie - Chriftine, fon épouse, arriverent ici le 10 de ce mois, L. A. R. defcendirent avec leur fuite, à l'hôtel du miniftre de L. M. Imp., où leur logement étoit préparé. La cour s'eft empreffée de procurer à L. A. R. tous les amufemens que la brieveté de leur féjour a pu permettre. Le 16 au foir, l'archiducheffe partit pour Milan. Le prince fon époux eft allé vifiter les principales places du Piémont, & fe rendra enfuite à Milan.

ESPAGNE.

MADRID (le 14 Juin.) Le R. P. Everard de Radskerbourg, général de l'ordre des capucins, fit le 2 de ce mois, fon entrée en cette capitale; il étoit à pied, précédé de toute fa

fuite, & accompagné du duc de Medina, grand d'Efpagne, qui avoit été le recevoir à 2 milles d'ici. Ce chef d'ordre qui, par humilité, ne voulut point faire ufage du carroffe de la cour qui lui avoit été envoyé, fe rendit d'abord dans une églife de fon ordre, où il fit fa priere, & fut enfuite conduit dans l'appartement qui lui étoit deftiné. Le 9, le R. P. de Radskerbourg fut admis à l'audience du roi, avec les cérémonies accoûtumées. Tout fait préfumer qu'il fera bientôt créé grand d'Espagne.

Comme l'efcadre de Don Michel Gafton, partie de Cadix le 21 de ce mois, a pris à fon bord - deux régimens d'infanterie, on a lieu de croire qu'elle va directement à Buenos-Ayres, & que la cour a formé le projet de reprendre fur les Portugais tout le territoire qu'ils ont envahi aux environs de Rio de la Plata. On conjecture que cette expédition fe fera fans déclarer la guerre au Portugal. L'Efpagne n'a point à craindre que les Portugais s'emparent de la Galice, de l'Eftramadure & de la Vieille-Caftille, ces provinces étant fuffifamment garnies de troupes, d'artillerie & de munitions; il n'eft donc queftion que de fe tenir fur la défensive dans cette partie.

L'infant Don Louis, frere du roi, a lieu de fe promettre tout le bonheur qui doit être le fruit d'un mariage d'inclination, tant par la beauté que par les qualités perfonnelles de fa future épouse, mais il se verra déchu, ainfi que lės enfans qui naitront de cette alliance, de tout droit à la couronne, en vertu des articles II & 12 de la pragmatique-fanction, rendue le 17 Mars dernier; au fujet des mariages, ils portent, « que, dans le cas extraordinaire ou il ne feroit pas convenable d'empêcher une alliance entre des perfonnes de naissance inégale, le

roi fe réserve & à fes fucceffeurs le droit de confentir aux mariages de ceux qui font obligés de demander l'agrément royal; mais que dans tel cas les difpofitions de la pragmatiquefanction devoient être strictement obfervées ; fçavoir, que celui ou celle qui contracteroit un tel mariage au-deffous de fa naiffance, feroit privé des titres, honneurs & privileges, qui lui appartenoient felon les loix du pays; que les enfans à naître d'une telle alliance ne pourroient jamais fuccéder aux dignités & biens de la couronne, qui, au contraire, feroient dévolus dans ce cas, à ceux auxquels la fucceffion doit venir, à leur défaut, & qu'aucun de leurs defcendans ne pourroit porter les titres ni les armes de la maifon de la fucceffion de laquelle ils auroient été déchus, mais feulement du pere ou de la mere, dont la condition étoit inégale, quoique cependant ils ne feroient point exclus de la fucceffion aux biens allodiaux, néceffaires à leur entretien, auquel même il devroit être pourvu en cas de confentement ». C'eft fous ces conditions que le roi a donné fon agrément au mariage du prince fon frere.

On apprend que dans le cours des évolutions de l'efcadre de M. Duchaffault, il eft arrivé un accident au vaiffeau le Solitaire, monté par M. le duc de Chartres, qui l'a obligé de relâcher à Cadix. Ce prince en a profité pour vifiter les cotes & s'eft rendu à Gibraltar.

FRANCE.

VERSAILLES (le 4 Juillet.) Monfieur, frere du roi, fe trouvant indifpofé, partit de Marly, le 19 du mois dernier & fe rendit ici avec Madame. La rougeole s'eft déclarée le 21: cette maladie a eu fon cours ordinaire fans aucun ac

cident qui pût inquiéter; de forte que Monfieur s'eft trouvé en état de partir d'ici le 1er. de ce mois pour fe rendre à fon château de Brunoy où S. A. R. va achover de retablir fa fanté. Madame, qui n'a point quitté ce prince, l'accompagne à ce petit voyage.

La fanté de Mgr. le comte d'Artois fe trouvant parfaitement rétablie, S. A. R. partit d'ici le 27 pour Marly, où elle féjournera le refte du voyage.

Quelques jours auparavant, Dom Jean-Baptifte Miroudot de St. Ferjeux, évêque de Babylone, & conful de France à Bagdat, avoit été facré par l'archevêque de Befançon, affifté de. l'ancien évêque de Troyes & de l'évêque de Tricofie, à l'églife paroiffiale de St. Louis (1).

MARLY (le 3 Juillet.) Le roi a accordé l'évêché de Clermont à l'abbé de Bonnal, vicairegénéral de Châlons-fur-Saône, & l'un des vifiteurs-généraux des carmelites.

Le 21 du mois dernier, la maréchale de Mouchy prit congé de L. M. pour aller rejoindre à Bordeaux le maréchal de Mouchy, qui l'y avoit précédée.

Le 22, le roi & Mme. Sophie de France tinrent fur les fonts de baptême de cette paroiffe le fils de M. de Baffelas, écuyer, & de demoifelle Villette, fa femme. S. M, a été représentée par le duc de Fleury, pair de France & pre-, mier gentilhomme de la chambre en exercice, & Mme. Sophie, par la comteffe de Buzançois, fa dame d'honneur. L'enfant a été nommé LouisPhilippe.

Le 23, M. Ozanne, ingénieur de la marine

(1) L'évêque de Babylone n'eft point, comme in partibus; il a un diocefe" qui l'oblige à réfidence,

eut l'honneur de préfenter au roi les plans & vues perspectives des ports de Rouen & de Dieppe, faifant partie du recueil des ports de Fran ce, qu'il define d'après les ordres de S. M.

Le 24, Mme. Adélaïde de France, Mme. Victoire & Mme. Sophie partirent d'ici pour aller coucher au château de la Muette. Le 25, ces trois princeffes fe rendirent à St. Denis, où elles affifterent, dans l'églife de l'abbaye royale, au fervice folemnel qui y fut célébré à l'occasion de l'anniverfaire de la feue reine. Les principaux officiers de feu S. M. s'y font trouvés.

PARIS (le 6 Juillet. ) Il vient de fortir du département de la guerre deux nouvelles ordon nances du roi, datées du 17 Juin. L'une coneerne la conftitution & adminiftration de l'hô tel-royal des invalides, les officiers, bas-officiers & foldats penfionnés. L'autre fixe d'une maniere invariable le nombre & la compofition des compagnies détachées de cet hôtel, qui feront entretenues à l'avenir dans les places & forts du royaume, & porte augmentation d'appointe. mens & folde aux officiers, bas-officiers & foldats de ces compagnies.

Suite de l'extrait de l'ordonnance du roi portant réglement fur l'adminiftration de tous les corps,

&c.

Dans le titre 5me., concernant les remontes S. M. ne fixe aucun prix pour l'achat des che vaux, qui fe fera annuellement d'après l'état arrêté par les lieutenans-généraux attachés aux divifions. Les officiers prépofés à ces achats feront tenus de rendre les comptes les plus exacts au confeil d'adminiftration de leur régiment; & dans le cas où ils auroient acheté des chevaux non recevables & jugés tels par le confeil, ces